Livre 1 : Psaumes 1 à 41 — Livre 2 : Psaumes 42 à 72 — Livre 3 : Psaumes 73 à 89 — Livre 4 : Psaumes 90 à 106 — Livre 5 : Psaumes 107 à 150
par J.-N. Darby
Tables des matières :
Le livre des Psaumes est une des portions de l’Écriture dont l’application et l’interprétation ont été généralement peu comprises ; et néanmoins, il a servi de tout temps à la consolation des saints, en prêtant une voix à l’exercice de leurs âmes devant Dieu.
Depuis quelques années, avec l’intelligence de l’appel et des espérances de l’Église, une connaissance plus approfondie des espérances d’Israël s’est aussi réveillée parmi les chrétiens. Ils ont mieux compris la portée des plaintes touchantes sorties de la plume et du coeur du Roi-Berger d’Israël et d’autres écrivains inspirés des Psaumes.
« David et toute son affliction » a plus de prise sur les
affections de nos coeurs que « Salomon et toute sa gloire ». Un plus grand que
David était en esprit dans toutes les circonstances du roi-prophète, et donnait
des accents à ces chants précieux et divins. L’écrivain inspiré de l’épître aux
Hébreux ne dit pas, en citant le Psaume 8 à propos des gloires du Fils de
l’homme : « David
a rendu ce témoignage » ; mais : « Quelqu’un
a rendu ce témoignage quelque part ». L’apôtre savait qu’il y avait là
quelqu’un de plus grand que David.
Nous lisons au chapitre 63 d’Ésaïe : « Dans toutes leurs détresses, Il a été en détresse », et nous connaissons l’approche rapide de « cette journée » qui sera « le temps de la détresse pour Jacob » (Jérém. 30:7), mais dont « il sera pourtant sauvé », en contraste avec ses autres afflictions. Israël devra traverser les angoisses de la grande tribulation sous le gouvernement de Dieu en la terre, et les divins gémissements des Psaumes trouveront un écho dans son coeur, lorsqu’il passera par la fournaise. Mais les fidèles apprendront que Celui qui dans toute leur angoisse avait été en angoisse, les avait devancés dans ce chemin. Le résidu d’Israël apprendra ainsi à connaître moralement le coeur et les affections de Jéhovah-Messie, avant que leurs yeux le voient et qu’ils regardent vers Celui qu’ils auront percé et mènent deuil comme quand on mène deuil d’un fils unique. Alors ils lui diront : Quelles sont ces blessures à tes mains ? Et il répondra : Ce sont celles dont j’ai été blessé dans la maison de mes amis (Zach. 12:13).
L’auteur des pages qu’on va lire a déjà traité ce grand sujet du côté de l’interprétation prophétique (*) ; il va le considérer dans ses rapports avec l’enseignement et le bien moral de l’âme des fidèles.
(*) Études sur la Parole, par J.N. Darby, Les Psaumes
Il est bon toutefois de faire remarquer que les Psaumes ne contiennent pas proprement la vraie expérience des chrétiens, ceux-ci étant introduits dans une relation, dont le Saint Esprit envoyé du ciel leur donne la connaissance et la puissance. Ce livre ne présente cette expérience que dans la mesure de notre participation aux souffrances de Christ. Les chrétiens possèdent quatre choses que l’on ne rencontre jamais dans les Psaumes : une conscience purifiée par le moyen de l’oeuvre accomplie à la croix ; l’habitation du Saint Esprit en eux ; la connaissance du Père, par l’Esprit du Fils ; enfin la justice de Dieu, manifestée par l’Évangile comme leur position, en contraste avec « le support des péchés précédents dans la patience de Dieu », qui caractérisait devant Dieu les saints de l’Ancien Testament (Rom. 3:25, 26).
Lorsque le coeur a trouvé dans les Épîtres
le déploiement
de l’oeuvre de Christ, et tout ce qui est nécessaire pour lui faire connaître
le repos et la paix avec Dieu ; il remonte en arrière et considère les Évangiles
pour y apprendre les voies, les pensées, les actes de Celui qui nous a
aimés et qui s’est livré Lui-même pour nous. Puis, remontant encore le courant
des Saintes Écritures, s’il a quelque intelligence de la vraie signification
des Psaumes
, il y fait connaissance avec le coeur de Christ ; il
l’y trouve, entrant en sympathie dans les exercices du coeur de son peuple et
lui donnant Sa voix pour les exprimer devant Dieu. Le Seigneur a « appris »
toutes ces choses, lorsque, en grâce divine, surtout vers la fin de son
ministère, il entra dans cette catégorie de souffrances, afin de pouvoir
assaisonner la Parole à celui qui est accablé de maux. — Enfin c’est là, dans
les Psaumes, que nous trouvons la plainte de son propre coeur, alors que nul
coeur humain ne pouvait sonder la profondeur des flots de l’angoisse qui
passaient sur son âme sainte.
Puissiez-vous, cher lecteur, si vous avez trouvé la paix avec Dieu, discerner, par son Esprit de grâce, « les choses excellentes » ; puissiez-vous apprendre de chaque ligne des Écritures ces leçons qui élargissent le coeur dans la connaissance de Jésus. S’il est nécessaire pour vous de faire l’application vraie et directe des Psaumes selon l’intention de Dieu, vous y trouverez aussi une nourriture savoureuse pour votre âme, des encouragements et des consolations pour toutes les épreuves du pèlerinage. Vous y apprendrez en outre ce que sont les voies et le gouvernement immuables de Dieu, applicables à tous les temps, mais manifestés d’une manière éclatante dans l’histoire de son ancien peuple d’Israël. Cette nation, rejetée pour un temps, sera restaurée plus tard et deviendra le centre du gouvernement manifeste et public de Dieu sur la terre.
L’Éditeur
Le Psaume 90 nous présente, d’une manière spéciale, le cri d’Israël demandant grâce et désirant ardemment le rétablissement aux derniers jours après sa longue affliction ; mais nous trouvons ici des principes dont nous désirons, selon notre habitude, faire l’application pratique. Ce Psaume considère deux points dans le gouvernement de Dieu : la discipline proprement dite, et la grâce qui satisfait à tout. Ces deux points sont fondés sur une autre vérité : Dieu est le seul Dieu immuable ; il est avant que ce monde, auquel la discipline se rattache, fût créé, le même qu’aujourd’hui, et il est aujourd’hui le même qu’alors ; car, le temps qui nous semble si long, n’est rien pour Lui ; de plus, il est l’habitation de son peuple, son repos, sa demeure, son asile assuré, quels qu’aient été ses égarements. Quant au premier homme, d’un seul mot il le met de côté et le rétablit. Il est comme l’herbe qui reverdit et qui sèche. Mais bien que cela soit vrai, lorsque nous mettons en regard Dieu et l’homme, la foi saisit et les voies et les desseins de Dieu dans son activité envers son peuple, dans laquelle Israël ne trouve que la colère, parce qu’il ne connaît pas encore la réconciliation, tandis que nous savons qu’elle est amour, ce qui du reste ne change en rien le fait de cette activité, quand il s’agit de nous en faire l’application.
Premièrement, quant à ses voies, il est dit (v. 11) : « Selon ta crainte, ton courroux ». Son courroux n’est pas arbitraire, mais il est selon la propre nature et le caractère de Dieu. Le craindre, c’est le connaître en vérité, en sorte que l’on applique ce qu’Il est au saint jugement de tout ce qui se trouve dans le coeur, afin que rien ne Lui déplaise et n’altère la communion avec Lui. Or la colère comme discipline, c’est-à-dire le déplaisir de Dieu manifesté dans son gouvernement, est l’expression de ce saint jugement en présence de l’état de l’âme, quand on n’a pas surveillé ce dernier ou que la propre volonté le caractérisait. Ce jugement justifie le caractère de Dieu à l’égard de ce qui, en nous, est opposé à ce caractère. La foi, l’enseignement divin, nous montrent que « son courroux est selon sa crainte ». Mais lorsque notre volonté se soumet, notre faiblesse même, loin de produire la terreur, ne sera qu’un motif de plus pour invoquer Dieu. Or Dieu reconnaît cette faiblesse ; il considère de quoi nous sommes faits, se souvenant que nous ne sommes que poussière. Mais, du moment que nous sentons notre néant et que nous appliquons notre coeur à la sagesse, dont le commencement est la crainte de l’Éternel, Dieu n’est plus obligé d’aggraver cette crainte, en soumettant notre volonté et en corrigeant notre négligence : le coeur prend courage, il devient hardi. Ce n’est pas du raisonnement, mais par la grâce la confiance est rétablie, et le coeur dit : « Éternel ! retourne-toi. Jusques à quand ? » (v. 13).
Ces mots, nous l’avons déjà dit souvent, sont le langage de la foi. Dieu se propose de bénir son peuple, et finalement il le bénira ; c’est pourquoi, lorsqu’il est dans l’angoisse, sa foi peut dire : Jusques à quand ? Le moi n’est point de la foi et la crainte de Dieu doit être produite ; mais là où se trouve la foi, elle s’élève de nouveau jusqu’à la certitude de la grâce qu’elle connaît, et dit : Jusques à quand ? Remarquez-le, il y a connaissance de la grâce. Les fidèles ne disent pas : « Viens », mais : « Retourne-toi » ; non pas comme si Dieu les avait abandonnés (quoique, selon ses voies, la chose soit vraie pour Israël, puisque l’Éternel cache sa face de la maison de Jacob : És. 8:17), mais nous attendons qu’il se retourne, c’est-à-dire qu’il nous soit donné de jouir de sa faveur et des grâces présentes que nous connaissons. Alors l’âme s’épanouit dans une entière confiance. La foi sait que la pensée de Dieu est de bénir, de donner, par sa faveur, la joie et l’allégresse à son peuple, elle y compte : « Rassasie-nous, au matin » (v. 14). Quelle parole hardie vis-à-vis de Dieu ! Mais c’est de la confiance maintenant ; l’âme est moralement restaurée et a retrouvé la jouissance de l’amour, dans lequel Dieu lui-même se réjouit. Cet état est envisagé aussi comme étant durable : « Nous chanterons de joie », disent-ils, « et nous nous réjouirons tous nos jours ». Pourquoi l’âme n’attendrait-elle pas cela du Dieu de bonté ? Pour Israël la chose a peut-être un caractère plutôt extérieur ; elle reste vraie pour nous spirituellement. Le fidèle regarde à un Dieu qui épargne, qui tient compte de l’affliction de son peuple, quoiqu’il ait été forcé de l’infliger. Au chap. 40 d’Ésaïe, v. 2, le désir que le fidèle exprime ici, nous est présenté d’une manière admirable et touchante. « Parlez au coeur de Jérusalem, et criez-lui que son temps de détresse est accompli… car elle a reçu de la main de l’Éternel le double pour tous ses péchés ». Le coeur de l’Éternel a estimé que le châtiment nécessaire avait été double, lorsqu’il le comparait aux péchés de Jérusalem ; car la réponse à la foi va toujours au-delà de ce que celle-ci a demandé (Voir les prières et les réponses du Ps. 132).
Mais la foi, qui regarde aux pensées et aux desseins de Dieu, lorsqu’il bénit, ne s’arrête pas aux bénédictions dont le but est de restaurer ou d’épargner. Dieu, dans son amour, a un but à l’accomplissement duquel il travaille ; aussi les fidèles ne disent-ils pas seulement : « Rassasie-nous de ta bonté », mais : « Que ton oeuvre apparaisse à tes serviteurs ». L’oeuvre de Dieu même amènera la bénédiction ; aussi, combien cette dernière sera-t-elle parfaite, lorsqu’elle sera manifestée pour l’honneur et la joie de son peuple ! Il en est de même pour nous ; nos âmes ne cherchent pas seulement la grâce qui nous restaure ; elles cherchent ensuite l’oeuvre positive de Dieu qui produit la bénédiction, en nous amenant encore plus près de Lui. Il ne s’agit donc jamais pour l’âme du simple relèvement, mais d’être rendue plus capable d’apprécier Dieu, un Dieu qui lui est plus complètement révélé. Cependant nous en attendons encore le résultat dans la pleine manifestation de la gloire, lorsque nous connaîtrons comme nous avons été connus. Ce v. 16, qui parle des « fils » se rapporte littéralement à Israël pendant le millénium, mais nous attendons l’accomplissement parfait de l’oeuvre de Dieu pour nous en résurrection et en gloire, et notre introduction dans la gloire pour y habiter éternellement.
À cette pensée s’en ajoute une autre, bien précieuse aussi : « Et que la gratuité du Seigneur, notre Dieu, soit sur nous » (v. 17). Ici les Juifs fidèles ne pouvaient guère, dans leurs pensées, aller au-delà du don manifeste de la bénédiction, dispensée par la main de Dieu, et qui les caractérisait comme appartenant à l’Éternel. Mais pour nous, quelle plénitude de bénédiction ! Ne serons-nous pas dans la gloire de Christ Lui-même ! tels que Lui, à sa ressemblance, devant notre Dieu et Père, dans le lieu des parfaites délices ? Toutefois les bénédictions présentes sont aussi notre part, car nous pouvons être sous le régime de la grâce, « comme des arbres d’aloès que l’Éternel a plantés » ; ce qui était le cas pour Israël lorsqu’il habitait sous ses tentes (Nombr. 24:6). Or l’Église aussi devrait donner, aux yeux des anges, le spectacle de la grâce, de l’ordre et de la beauté, et chaque croyant individuellement devrait être la manifestation de la vie de Jésus. Dans ce cas aussi, les oeuvres de nos mains, sous la faveur divine, sont affermies pour nous.
J’ai fait remarquer autre part la structure de ce magnifique Psaume et je n’ai pas beaucoup à en dire ici, car il définit les noms sous lesquels Dieu s’est manifesté, ainsi que les effets spécifiques de la foi, allant même jusqu’aux choses directement applicables à Christ ; c’est pourquoi aussi le principe général ne peut être déduit de ce Psaume ou y être rapporté avec autant de justesse. Ce serait réduire à quelque chose de vague ce qui est à dessein spécifique. Ce Psaume déclare que l’Éternel, comme tel, est Dieu, en sorte que celui qui reconnaît ce nom, se trouve sous les soins d’El-Schaddaï (Tout-Puissant), pour un accomplissement spécial de promesses terrestres selon les voies de Dieu. Telle n’est pas notre position ; celui qui agirait d’après cela se tromperait, quand même une foi générale, et la confiance du coeur fondée sur ce principe, seraient certainement bénies. Ce Psaume ne parle pas des châtiments d’un Père, auxquels se rattache le gouvernement de Dieu.
Ici, aucun mal n’approche de la tente de ceux qui se confient en l’Éternel. Voilà ce qui était pour Asaph un sujet d’étonnement jusqu’à ce qu’il fût entré dans les sanctuaires de Dieu : il voyait les méchants prospérer, tandis que son châtiment revenait chaque matin. Or le résultat certain du fait que l’on reconnaît l’Éternel, c’est d’être abrité de tout mal, lorsque le gouvernement de Dieu intervient.
Malgré ce qui vient d’être dit, nous apprenons à connaître ici quelques-uns des caractères de la confiance. Il faut plus que connaître un Dieu Tout-Puissant, qui est au-dessus de toutes choses : il faut connaître le lieu secret où l’on trouve Dieu se révélant Lui-même en vérité. La vraie foi connaît ce lieu, et s’y entretient avec Dieu selon cette révélation. Son nom est révélé à la foi : pour nous, c’est celui de Christ comme Seigneur et du Père. Ainsi la foi trouve son refuge et sa forte tour dans la confession de son nom, et, de plus, elle s’y confie : c’est une grande chose, car ni puissance du mal, ni sujet d’angoisse, n’ont le pouvoir d’inquiéter l’âme, si, regardant au Seigneur, on se confie en Lui. La foi reçoit ici la promesse d’une sollicitude protectrice toujours vigilante, et cela reste vrai en dépit de tous les maux extérieurs, qui pourraient survenir.
Nous en avons un exemple en Luc 21:16-18, où le Seigneur dit qu’on ferait mourir quelques-uns d’entre eux, mais que pas un cheveu de leur tête ne périrait ; ils étaient tous comptés. La puissance providentielle est tout entière aux mains de Dieu. La foi s’identifie avec les intérêts du peuple de Dieu (v. 9) ; mais, ce qui a gouverné le coeur, c’est le propre nom du Seigneur, et le vrai nom de Dieu lui est connu ; c’est-à-dire, je le répète, la vraie révélation de Dieu Lui-même, connue par l’enseignement divin. Pour nous c’est Christ, et le Père en Lui. La foi invoque le Seigneur (v. 15). Ce n’est pas seulement une confiance passive, qui a aussi sa place marquée ; c’est une foi qui, parce qu’elle se confie en Dieu, aime à converser avec lui et à lui faire part de ses besoins. La présence de Dieu est là pour la foi, ainsi que l’exercice de sa puissance qui s’y rattache, et la chose, dans sa véritable application, est aussi vraie maintenant qu’alors, et que pour l’avenir. Sans doute, le chemin est différent, parce que le but, qui est d’introduire un état céleste, est différent. Ce chemin apporte la bénédiction présente, non sans des persécutions, et reçoit l’assurance d’un salut éternel et céleste.
Ce Psaume est un chant de louange pour la délivrance finale d’Israël et, comme pour le Psaume précédent, le nom millénaire de l’Éternel en est la clef, tandis que les Psaumes suivants traitent de la réintroduction du Fils unique sur la scène. Nous trouvons ici un principe à noter : L’élévation des méchants a pour résultat final leur destruction. L’homme qui n’est pas instruit par Dieu ne voit pas cela ; mais la foi discerne les ennemis du Seigneur dans ses adversaires et dans la puissance du mal qui s’élève, qui l’opprime et obscurcit son horizon. Mais aussi la foi a confiance, quoiqu’elle soit plus éprouvée qu’un autre, car cette puissance du mal lui est très pénible. Si le chrétien doit être entièrement étranger à tout désir personnel de vengeance (et nous avons à nous garder d’un tel sentiment), ne peut-il pas se réjouir en pensant que la terre sera délivrée de la puissance des méchants ? Certainement, car il est dit : « Réjouissez-vous, vous les saints, et les apôtres et les prophètes ! » (Apoc. 18:20). La foi donne un sens très vif du mal, parce que c’est le mal et qu’il est hostile à Dieu, à la bonté, à la vérité ; c’est pourquoi elle se réjouit du juste jugement du Seigneur. Mais c’est comme étant l’oeuvre du Seigneur, l’ouvrage de ses mains, qu’elle s’en réjouit, et en cela consiste la perfection. En outre le jugement annonce que le Seigneur est droit (v. 15). Il faut, dans l’intervalle, que la foi attende avec patience. Les Psaumes suivants expriment et célèbrent l’arrivée du jugement.
Nous trouvons dans ce Psaume quelques principes très importants. La puissance, bien qu’elle s’exerce maintenant pour le triomphe du bien, n’est pas une puissance nouvelle. Le trône du Seigneur est établi dès longtemps ; Lui-même est dès l’éternité (v. 2). Nulle invasion du mal n’a pu toucher cela ni l’affaiblir. Cette invasion avait eu lieu. La fureur et la volonté de l’homme s’étaient élevées comme des vagues tumultueuses ; mais en vain : l’Éternel qui est dans les lieux hauts est plus puissant. Dieu laisse libre cours à cette rébellion de l’homme ; mais, tant que dure la patience, la puissance de l’Ancien des jours est cachée à l’incrédulité, en sorte que l’homme s’imagine avoir tout dans sa main. Mais lorsque le péché s’élève de manière à l’atteindre, Lui, et à provoquer son action, un seul instant suffit pour accomplir les conseils de Dieu en puissance par la destruction des méchants.
Ce n’est pas tout. La foi a quelque chose sur quoi elle s’appuie : les témoignages de Dieu qui sont très sûrs (v. 5). On peut compter sur la parole de Dieu comme sur Lui-même, non seulement pour la délivrance finale, mais pour être guidés le long du sentier des difficultés. Ce n’est pas tout encore ; il y a un caractère qui est une sauvegarde contre l’erreur, et un moyen de discerner et de juger le vrai chemin : « La sainteté sied à ta maison ». Oh ! combien ces deux principes nous encouragent et illuminent notre route ! Combien ils nous fortifient dans la certitude qu’il s’agit de la propre nature de Dieu, et qu’il ne peut en être autrement. Ainsi les témoignages de Dieu et la sainteté de Dieu affermissent et assurent le coeur quant à ce qui est de Dieu. Si les courants des eaux s’élèvent, la puissance de Dieu mettra tout à sa place par le jugement.
J’ai fort peu à dire sur les Psaumes 93 à 101, par rapport à mon sujet actuel, quoiqu’ils soient très frappants. En effet, ils ne traitent pas des exercices du coeur au temps de l’épreuve, mais ils parlent de la puissance, intervenant pour mettre fin à ce temps-là. Ils sont caractérisés par ce début : « L’Éternel règne — le monde est affermi » (v. 1). Je n’aurai donc que quelques remarques à faire : et d’abord, le résultat de toute cette patience de Dieu en gouvernement, c’est que l’homme s’élève contre Lui comme les flots de la mer ; mais Dieu est plus puissant que l’homme. Sa puissance met fin à tout cela.
Deux grandes vérités accompagnent celle-ci : les témoignages de Dieu sont très sûrs, et nous pouvons compter à travers tout sur sa Parole. Elle révèle sa nature, son conseil, son caractère. Elle montre les principes selon lesquels il agira — point de paix pour le méchant, mais une certitude infaillible des conseils et de la puissance divins. L’homme peut être comme l’herbe, le péché s’élever comme les fortes vagues de la mer, mais la parole de l’Éternel demeure éternellement, de même que celui qui fait sa volonté. Aussi, dans tous les temps, nous pouvons prendre cette parole pour règle, quelque sombre que tout nous paraisse, quelque puissant que soit le mal. Que ce soit Israël ou l’Église, l’apostasie ou une profession sans réalité, la persécution ou la prospérité qui séduit, Sa parole est véritable, elle est un guide sûr, répondant à la nature et au caractère de Celui auquel, en définitive, appartient tout pouvoir. Et s’il fut un temps où Celui auquel appartenait tout pouvoir était compté parmi les malfaiteurs, il était néanmoins conduit par cette Parole ; il s’y soumit, il l’accomplit, et après tout « le jugement retournera à la justice » (Ps. 94:15). Nous avons vu jusqu’ici tout ce qui se rapporte au gouvernement actuel et au déploiement futur de la puissance publique de Dieu, au royaume et à la patience, puis au royaume et à la gloire du Seigneur.
Mais il y a une seconde chose : l’Éternel a une maison, une demeure. Prenez-la comme son habitation céleste, ou comme son temple où tout dit : Gloire ! ou bien, comme ce qui le remplace, comme l’Église, son habitation par l’Esprit ; dans tous les cas, une seule chose essentielle la caractérise, parce qu’elle est son habitation : « La sainteté sied à sa maison pour de longs jours », la séparation pour Dieu, selon sa propre nature.
Ces deux points, la parole de Dieu et la sainteté de sa nature, guident le fidèle dans toutes les circonstances, jusqu’à ce que la puissance intervienne pour le soutenir ; parce qu’à travers tous les soulèvements de la puissance du mal, il compte sur Dieu. Dieu, dans sa grâce, a communiqué sa pensée aux hommes, a parlé. Advienne que pourra, sa Parole demeure sûre. Cela est inhérent à sa nature et dépend de sa puissance comme Dieu. S’il parle, il doit, pour ainsi dire, à sa nature d’accomplir. Je ne peux pas croire qu’il soit Dieu, il ne serait pas Dieu, si, lorsqu’il a parlé, sa parole restait sans effet. « Aura-t-il dit, et ne le fera-t-il pas ? aura-t-il parlé, et ne l’accomplira-t-il pas ? » (Nombr. 23:19). S’il est Dieu, la vérité et la puissance pour accomplir ne peuvent manquer, sinon il n’est pas Dieu. Ce serait chez lui de l’ignorance, ou quelque autre aurait la puissance de l’empêcher d’agir. Ses témoignages sont très sûrs. Au milieu du mal c’est une immense, une parfaite consolation, un recours parfait.
Mais l’autre point est tout aussi important, et a autant de droits sur la conscience. S’il est Dieu, la sainteté est nécessaire en tout cas. Ni la vérité la plus élevée, ni la certitude entièrement digne de confiance de la parole divine, ne changeront cette nécessité. Elle met l’homme, subjectivement à sa place. Il pourra s’enorgueillir de la vérité, se vanter de la certitude des promesses, comme si Dieu s’était lié Lui-même vis-à-vis de l’homme, mais il faut que Dieu soit conséquent avec Lui-même ; ce qui n’est pas saint, ne peut nullement être de Lui. Il est suprême, et tout doit se rapporter à Lui, tout doit lui être consacré dans sa présence, et, pour autant qu’il est révélé, tout doit correspondre à ce qu’il est. Ainsi l’homme est tenu en échec et la vraie connaissance de Dieu est donnée. Ce n’est pas une sainteté sans la Parole, ni la connaissance ou l’assurance sans la sainteté. L’Esprit de vérité est l’Esprit Saint ; l’Esprit Saint est l’Esprit de vérité.
Notez encore que ces témoignages viennent de Dieu, qu’ils sont la déclaration positive de sa pensée et de sa volonté (non pas une connaissance de Dieu, que l’homme se vante d’atteindre par sa volonté, ni la prétention de l’homme à savoir ce que Dieu doit être, quoique la conscience enseignée par la tradition, souvent pervertie par elle, puisse bien en avoir une certaine conception) ; ce sont les témoignages positifs de Dieu, de sorte que l’homme doit s’y soumettre tout en étant soutenu par eux. Il ne s’agit ni des raisonnements de l’homme, ni de la conscience de l’homme, mais des témoignages de Dieu, de la révélation active de Dieu par Lui-même, de l’émission de sa Parole. Ces témoignages sont reçus simplement par la foi, et comme tels l’âme s’y soumet. Cette soumission caractérise l’âme qui reconnaît Dieu. La puissance viendra en son temps et mettra publiquement tout à sa place. Dans l’intervalle la foi s’appuie sur les témoignages, sur la révélation de Dieu qui soumet l’âme et qui la soutient.
Mais, en outre, Dieu a une habitation, une maison. Ceci, comme
je l’ai remarqué autre part, est l’un des fruits immenses de la rédemption.
Dieu n’habitait
ni avec l’innocence, ni avec les fidèles ; ni avec
Adam avant sa chute, ni avec Abraham. L’innocence caractérisait le premier, et
la foi, le sentier béni du second. Dieu les visitait
, montrant à l’un et
à l’autre sa condescendance et sa bonté, soit que cette visite fût rendue
inutile, soit qu’elle apportât la grâce de Dieu. Mais, lors de la rédemption
d’Israël, nous trouvons que l’Éternel avait fait sortir son peuple du pays
d’Égypte, afin de pouvoir habiter au milieu de lui (Ex. 29:45-46). Ce qui
convient à la maison de Dieu n’est pas l’innocence, mais une consécration
absolue à Lui, suivant sa nature, lorsque le bien et le mal sont connus. Ce
caractère et cette nature se trouvent dans le ciel, mais là, il n’y aura plus
besoin de témoignages. L’homme possède la connaissance du bien et du mal, mais
dans un état de séparation de Dieu et dans le péché. Mais lorsque Dieu a
racheté l’homme pour Lui-même, l’a purifié et délivré, alors il habite avec
l’homme, dans l’homme, — en Israël, selon la révélation partielle de Lui-même
qu’il avait donnée alors ; dans le fidèle maintenant, par son Esprit, et
dans l’Assemblée ; et cela pour l’éternité, car maintenant cette
habitation a lieu selon ce qu’il est en Lui-même, pleinement révélé en Christ
et par sa mort. Elle est donc fondée sur un témoignage ; car il faut que
Dieu se révèle Lui-même, ainsi que sa rédemption, et ses voies, et ce qu’il
est. Ainsi, le Saint Esprit est donné en conséquence de l’exaltation de Christ,
après l’accomplissement de la rédemption, et, de fait, en vertu de la
réception, par la foi, du témoignage de Dieu. Lorsque Dieu est connu (et non
pas seulement la vérité), alors on a la conscience de ce qui Lui
convient ; on trouve ses délices dans Son nom, selon sa propre nature, et
cela fournit la preuve non seulement que la vérité est connue, mais avec la
vérité Dieu Lui-même, — car Christ est la vérité et l’Esprit est la vérité.
C’est pourquoi, du moment qu’Israël est racheté, il est parlé de la sainteté de
Dieu, et non pas auparavant, car Dieu allait habiter au milieu d’eux après les
avoir amenés à Lui. Le monde sera établi par la puissance ; mais il s’agit
ici de la consécration à Dieu par le témoignage, et de sa propre présence en
vertu de la rédemption. Il ne s’agit pas ici de la magnificence et de l’ordre
de sa maison (comme nous les trouvons au Ps. 101), mais de l’habitation de ses
délices, et de sa nature (comp. Ps. 132:13-14).
Ce Psaume est l’expression de l’attente du jugement et de la vengeance qui mettra le monde en ordre ; mais nous y trouvons aussi la discipline et les consolations du Seigneur, soutenant l’âme dans l’intervalle ; et nous allons nous en occuper un moment. Le triomphe des méchants est, pour celui qui croit en Dieu, une pensée pénible et accablante ; la puissance du mal est évidente ; voilà ce qui affecte maintenant aussi le coeur du fidèle, non pas dans un sens prophétique, mais dans un sens moral. L’aveuglement et l’orgueil de l’homme éloigné de Dieu, pèsent sur le coeur de celui qui, en vertu de la connaissance qu’il a de Dieu, voit que le jour du méchant approche. Nous trouvons en même temps la perception distincte que l’on est le peuple de Dieu, dont la faiblesse et l’affliction ne font que fournir l’occasion de l’opprimer. Tels sont les deux motifs évidents pour juger que cela ne peut pas durer toujours. Celui qui a formé l’oeil voit certainement tout cela. Les pensées de l’homme ne sont que vanité. Deux choses donc sont le fondement de la pensée du fidèle : l’intérêt de Dieu pour son peuple et Sa bonté qui n’oubliera ni le pauvre opprimé, ni le fait même de l’orgueil des méchants.
Mais une autre pensée est introduite : Dieu juge le mal, mais il commence par sa propre maison. Dans les voies qui font souffrir son peuple, on peut reconnaître la main de Dieu aussi bien que celle de l’homme. Le coeur du fidèle s’attache à cette pensée : « Bienheureux l’homme que tu châties, ô Jah ! » (v. 12). Nous trouvons ici « l’interprète, un entre mille », dont il est parlé au livre de Job (Job 33:23). Dieu, par le châtiment, nous enseigne les vérités de sa loi. Dieu, par tout ce courant du mal qui a la haute main, brise la volonté, enseigne la dépendance, sépare non seulement le coeur mais l’esprit, du monde où ce mal règne. Comment pourrait-il y avoir une union avec un monde où l’on voit cette puissance du mal, devant laquelle on recule moralement ? L’homme pense qu’il peut traverser le monde à l’amiable, sans participer au mal ; mais quoi donc, si le monde lui-même est mauvais, et qu’on le sente tel ? Ainsi la méchanceté qui s’élève, qui rejette Dieu, devient son propre remède pour le coeur de celui qui reconnaît Dieu ; elle exerce le coeur, le purifie, le transporte hors de la sphère où sa propre volonté est active, lorsque, peut-être, sans en avoir l’intention, mais de fait pratiquement, il y cherchait une issue pour la nature. La vie divine lui ayant donné les pensées de Dieu, le coeur rencontre un monde qui ne veut rien de Dieu, et qui s’élève contre Lui : mais en tout cela le fidèle trouve la main de Dieu.
Il y a plus encore : nous trouvons ici, outre la discipline
de sa main, l’enseignement intérieur direct par sa Parole qui le révèle
Lui-même. Ainsi le mal orgueilleux a pour effet, non seulement de repousser le
coeur, mais aussi, lorsque ce dernier est soumis et qu’il a goûté que le
Seigneur est bon, de le pousser dans les bras d’un Dieu connu en grâce et par
la révélation de Lui-même, de ses voies et de ses desseins. Ainsi la grâce
produit elle-même son effet dans l’âme. Le coeur renouvelé est introduit dans
sa propre sphère et apprend à connaître non seulement le caractère de Dieu, qui
aime nécessairement le bien et qui hait le mal, mais encore ses propres voies,
le développement de sa grâce et de sa vérité, sa sainteté dans la sphère dans
laquelle il révèle ce qu’il est pour ceux qui le connaissent. Ceci est un repos
de coeur pour le fidèle, un repos de l’esprit qui cherche le bien et y trouve
ses délices. Si le fidèle cherchait à combattre le mal dans le monde (quelque
activité qu’il mette dans un service selon la volonté de Dieu et quelque
profond que soit le désir de son coeur que Dieu réprime le mal en triomphe), il
n’éprouverait qu’accablement et déception amère ; mais lorsque la
puissance du mal est arrivée à maturité, l’âme est obligée de prendre sa place
là où Dieu et ses voies sont directement révélés, et là, près de l’autel de
Dieu (car le culte est produit), elle trouve le repos jusqu’à ce que… —
car
elle attend encore que le mal soit ôté, que l’affligé et le pauvre soient
délivrés, mais elle attend avec patience, apprenant la pensée de Dieu, et elle
y trouve son repos, le repos dans ce qui est éternel. Elle participera à
l’activité pour le bien, partout où il y a une porte ouverte, mais elle a son
repos dans ce qui est proprement de Dieu. L’établissement du bien en puissance
aura lieu, cela est certain. Dieu est la sûreté même dans ses voies. Il ne
rejettera pas son peuple. Il ne veut pas que le mal domine à toujours.
Il s’agit ici, naturellement, de l’intervention en jugement sur la terre, du jugement retournant à la justice ; la puissance et le bien allant ensemble, et non pas la puissance et le mal. Nous possédons des choses meilleures : une révélation céleste pour des fils, une position céleste, et la maison de notre Père devant nous ; mais le principe est le même. Le jugement qui était autrefois dans les mains des souverains sacrificateurs et de Pilate, tandis que la justice et la vérité se trouvaient dans la personne bénie de Jésus, retournera aux mains de Celui qui fut jadis le pauvre et l’opprimé ; le jugement retournera à la justice. Et si nous qui prenons notre croix, sommes heureux de souffrir, afin de régner avec Lui, il reste vrai que les pensées et les voies, les conseils et la fidélité de Dieu seront accomplis. La grâce céleste et la gloire céleste, avec le repos qui nous reste, seront ajoutés à notre repos d’esprit actuel ; mais la justice aussi, puisqu’elle est céleste, aura domination, avec une bénédiction éternelle pour nous qui avons une part avec Celui qui a souffert. L’impossibilité que le mal continue à exercer sa puissance si seulement le Seigneur se montre, est exprimée d’une manière frappante au v. 20.
Remarquez que la puissance du mal est profondément sentie (v. 16, 17). Qu’il en soit ainsi ! Cela peut montrer notre faiblesse parfois, mais il est bon qu’elle soit montrée, si la foi est là. Le coeur ne devrait pas s’accoutumer à la puissance du mal ; il ne le fera pas s’il est avec Dieu ; il y sera sensible, il s’en étonnera, et il dépendra de la restauration divine pour le rencontrer en pensée. C’est ce que Christ a réalisé, mais en perfection, car il n’y avait pas de faute dans ses pensées. Il s’étonnait de leur incrédulité (Marc 6:6) ; il les regarda tout à l’entour avec colère, étant attristé de l’endurcissement de leurs coeurs (Marc 3:5) ; il a dit : « Jusques à quand serai-je avec vous ? jusques à quand vous supporterai-je » ? (Marc 9:19). Puis, non moins prompt de coeur dans l’activité du bien quand il s’agissait d’un besoin, il pouvait dire : « Maintenant mon âme est troublée ; et que dirai-je ? Père, délivre-moi de cette heure », et puis encore, le voici, parfait en soumission et en obéissance, avec le seul désir de glorifier son Père, afin que son Père pût se glorifier Lui-même — parfait en toutes choses (Jean 12:27). Et nous, hélas ! si nous ne sommes aidés quelquefois, prompts à habiter dans le silence (v. 17), nous aurions bientôt, pour ainsi dire, abandonné la partie, là où Christ, notre Sauveur béni, a senti toutes choses infiniment plus que nous et fut parfait en tout. Mais lorsque, dans le sentiment de notre tendance à faillir, ou bien dans la réalité d’un danger présent, nous nous tournons vers Dieu, son secours est là. C’est une grande grâce. L’instruction est donc pour le repos de l’esprit, mais nous trouvons soutien et secours dans nos voies (v. 12-18). David se fortifiait en Dieu, et dans ce cas qui pourrait faillir ? Celui qui est plus puissant que tous, Celui dont la puissance s’accomplit dans l’infirmité, est là pour aider ; il est là dans une personne éprouvée, dans un témoin de sa bonté, à l’exemple duquel nous pouvons voir que, même si nous n’avions jamais manqué, nous étions toutefois en danger (v. 18).
Maintenant une autre scène s’ouvre, car Dieu pense à tout pour
nous. Si nos esprits travaillent, combien de questions se présentent à nous
dans la confusion, dans le labyrinthe du mélange entre le bien et le mal !
(v. 19). L’esprit qui jouit de la bonté de Dieu peut éviter cela, et il fait
bien, mais la racine et la source de toutes ces questions sont dans les coeurs
des hommes et la puissance du mal qui nous entoure les suscite. Ce n’est pas
seulement de l’égoïsme, quoique le moi soit toujours le centre de toutes ces
questions, mais quand l’esprit est affligé par le mal, on a une multitude de
pensées. Certes, je ne dis pas que ce soit bien ; c’est le fruit de notre
éloignement de Dieu, par lequel le mal est entré dans le monde de Dieu, et de
fait, c’est être nous-mêmes au milieu de ce mal. Mais lorsque le coeur et
l’esprit vont au-delà du mal, ayant la connaissance du bien et du mal, la
révélation des pensées de Dieu, quand l’esprit travaille, augmente encore la
difficulté et la multitude des pensées, parce que l’esprit voit plus clairement
le bien. Pourquoi ce mal, et d’où vient-il ? L’esprit voit un autre monde
de la puissance de Dieu. Pourquoi donc ce monde-ci ? L’esprit considère un
monde qui est au-delà et en rapporte des pensées dans ce monde-ci, où elles ne
sont pas réalisées. Il voit la bonté et la puissance et habite pourtant au
milieu de l’affliction et du mal. Ces pensées peuvent avoir, et ont souvent un
caractère égoïste. C’est alors un principe bas, mais, quoi qu’il en soit, ces
pensées ont toujours l’homme pour centre, sont toujours mauvaises, ne sont
autre chose que « la multitude de nos
pensées ». Christ seul a fait
exception, lui qui, parfait en amour et en sainteté, a introduit en perfection
dans son esprit et dans sa personne, un autre monde dans celui-ci. Mais Dieu a
compassion. Je me réfugie en Lui par la foi. Cela console et réjouit mon âme.
Les spéculations de nos pensées, quand nous connaissons le bien et le mal, soit
par l’affliction personnelle, soit par l’activité de l’esprit, ce qui est pire,
nous lancent dans les raisonnements interminables, mais non pas réellement
infinis, de la spéculation sur ce qui devrait être, ou dans des reproches à
Dieu sur ce qu’il est. Tout cela se montre parfois sous l’apparence plus humble
de l’étonnement ; on reconnaît que cela est trop difficile pour
nous ; mais c’est un esprit limité, un esprit qui se meut dans la sphère
de ce monde, n’ayant, hors de cette sphère, aucunes facultés naturelles, et
entrant dans ses pensées et ses spéculations, en relation avec l’infini, avec
le bien et le mal. Il a une multitude de pensées, mais pas de repos possible.
Dans son état actuel, il n’appartient pas à la sphère dans laquelle il s’est
engagé.
De là procède, soit dit en passant, la forme que l’incrédulité revêt habituellement de nos jours ; ce qu’on nomme le positivisme ou le réalisme. On dit : « Je sais ce que je vois et ce que j’éprouve, peut-être avec les quelques petites conclusions que j’en tire » ; et l’on prétend s’arrêter là. En réalité on ne s’y arrête pas, car on prétend nier tout ce qui est au-delà. Cela est évidemment faux, car si l’on ne connaît que ce que l’homme peut connaître par lui-même, on ne peut nier ce qui est au-delà, pas plus qu’on ne peut l’affirmer : C’est donc un principe sans consistance ; mais il est faux encore sous un autre point de vue. L’esprit n’a aucune certitude, mais il a une multitude de pensées qui dépassent la sphère des facultés naturelles de l’homme, et peuvent décider de ce qui appartient à ces facultés. Il y a une multitude de pensées au dedans de nous. Nous sommes incompétents pour arriver à une conclusion, néanmoins il y a des pensées, suggérées par une chose ou par l’autre, mais le coeur ne trouve point de réponse. Tel est le cas, lorsqu’il n’y a pas incrédulité, mais seulement l’activité naturelle du coeur humain. Il n’y aura point de réponse jusqu’à ce que le jugement vienne, jusqu’à ce que « le jugement retourne à la justice ».
Dans ce Psaume, l’exercice d’âme dont nous parlons se rapporte plus entièrement, cela va sans dire, au gouvernement de ce monde. À ces pensées, le christianisme, la révélation d’un autre monde, a ajouté mille autres pensées qui surgissent lorsque l’esprit de l’homme travaille. Mais il y a un refuge, une ressource ; ce n’est pas de donner à l’esprit l’explication de toutes choses et de le maintenir ainsi dans la folle et inique prétention de juger Dieu ; mais c’est d’introduire dans l’âme le bien positif qui est en Dieu ; en sorte qu’elle ait la certitude de posséder la bénédiction et la vérité, malgré la multitude des pensées dont elle est incapable de trouver la solution. La conscience est droite quand elle est mise en exercice et qu’elle juge le moi. Mais lorsque, avec notre connaissance affaiblie et obscurcie du bien et du mal, en la nommant conscience, nous prétendons juger Dieu, cette prétention est de faire de notre ignorance et de notre état moral tel quel, la mesure de ce qui est parfait, alors que nous connaissons tout imparfaitement, et Dieu pas du tout. En effet, dans cet état, les hommes se forment un jugement qu’eux-mêmes doivent ensuite reconnaître comme tel.
C’est évidemment juger de tout un système de choses, lorsque, en réalité, nous n’en avons devant nous qu’un bout obscur. Mon raisonnement, ayant pour point de départ un état de choses rempli de mal, je ne puis juger de rien. Dieu n’a pas encore mis les choses en ordre, et je ne suis nullement compétent pour juger même comment cela aura lieu ; mais Dieu a introduit le bien, le bien parfait, Lui-même, au milieu du mal. Il m’a fait découvrir le mal en moi, il m’a fait me juger moi-même ; avantage moral immense. Seuls, ceux qui se sont jugés ainsi sont droits et sans fraude quant à l’état de leur âme. C’est la conscience honnête et droite, et cela me fait trouver une ressource dans la grâce, une parfaite connaissance de son amour (en Israël, une connaissance relative par le moyen de ses voies). Alors, dans les détails des exercices subséquents, destinés à produire la connaissance de soi-même et à purifier l’âme, ayant connu l’amour parfait, je puis y avoir recours, et j’ai aussi ce que cet amour m’a révélé et donné, la grâce et la vérité ; et cela non pas seulement dans leur révélation extérieure, quelque autorité qu’elles possèdent, mais dans mon âme par le Saint Esprit. « Celui qui croit au Fils de Dieu, a le témoignage au dedans de lui-même » (1 Jean 5:10). « Ce que l’oeil n’a pas vu, et que l’oreille n’a pas ouï, et qui n’est pas monté au coeur de l’homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment, mais Dieu nous l’a révélé par son Esprit » (1 Cor. 2:9, 10). Et encore : « Nous nous glorifions en Dieu » (Rom. 5:11). Mais de plus, Dieu agit directement par son Esprit. Son amour est versé dans nos coeurs ; nous pouvons compter sur sa fidélité dans cet amour ; mais la communion directe avec Lui-même nous élève à une source de joie que les difficultés ni l’affliction ne peuvent troubler. Rien ne nous sépare de son amour ; nous sommes plus que vainqueurs dans ce monde ; nous avons les joies d’un autre monde, des consolations divines à travers les épreuves que nous avons à supporter, et en présence du mal qui nous assiège : la puissance du mal nous pousse vers notre retraite, vers notre joie en Celui qui reste toujours le même, et que nous apprenons à mieux connaître. Le jugement mettra fin à la scène dans laquelle il me faut être affligé.
Je ne m’arrête pas sur ces Psaumes, parce qu’ils parlent de la venue même du Seigneur en jugement, et ne traitent pas des exercices du coeur qui attend cette venue. Le Psaume 95 appelle les Juifs, et le Psaume 96, les Gentils, à être prêts pour aller à sa rencontre ; au Psaume 97, il arrive dans les nuées ; au Psaume 98, il a accompli la délivrance ; au Psaume 99, il a établi son siège à Jérusalem entre les chérubins. Le Psaume 100 appelle les gentils à partager la joie d’Israël et à rendre culte. Le Psaume 101 nous donne les principes d’après lesquels le roi de l’Éternel gouvernera la terre.
Le Psaume 102 est l’un des plus profondément intéressants de tout le livre, mais je bornerai mes remarques à ce qui suit. Ce Psaume s’applique spécialement au Seigneur Jésus, quelles que puissent être les circonstances ou l’affliction individuelle qui ont fourni l’occasion de le composer. La citation qui en est faite au premier chapitre de l’épître aux Hébreux ne laisse aucun doute à ce sujet, et lui donne une profondeur d’intérêt qu’à peine un autre Psaume peut égaler. Il montre comment la nature divine, éternelle du Seigneur, résout la difficulté d’un Messie qui a été retranché, alors que Sion doit être restaurée plus tard. Mais ceci donne une profondeur et un caractère tout particuliers à la douleur poignante de ses afflictions. Ce n’est pas un résultat glorieux en bénédiction, la conséquence d’une oeuvre unique dans sa nature et dans sa valeur, ce n’est pas non plus le jugement qui suit le rejet du Messie, mais c’est la vérité éternelle de la nature divine du Seigneur, rencontrant la réalité de ses afflictions, même jusqu’à la mort. C’est donc principalement Sa personne qui est l’objet spécial de ce Psaume et qui lui donne un intérêt particulier. Mais, quoique nous y trouvions la sécurité des enfants de ses serviteurs, il ne nous offre pas proprement d’instruction sur le gouvernement de Dieu, lors même que le fondement de tout cela soit en grâce. Les Psaumes suivants (103 à 106) qui terminent ce livre, ne nous apportent pas non plus beaucoup d’enseignement sur ce sujet. L’Esprit considère ce que Dieu est toujours pour la foi, mais en rapport avec la délivrance future, introduite par la venue du Seigneur.
Toutefois la puissance du bien qui sera manifestée en mettant toutes choses en ordre, et que la foi considère comme prête à intervenir, est réalisée, par cette foi, comme appartenant à Celui qu’elle connaît déjà. Ainsi la foi se repose sur cette puissance comme étant le caractère de Dieu ; elle se repose sur Dieu comme portant ce caractère de puissance, quoique les résultats de cette dernière ne soient pas encore produits, et elle revêt les choses présentes de cette connaissance de Dieu, bien que le mal soit encore ici-bas. La foi considère le monde comme le déploiement de la puissance et de la sagesse, sous un gouvernement de bonté, Dieu étant connu, quoique le mal ne soit pas encore finalement aboli et que les résultats de la bonté ne soient pas encore produits. Mais Celui qui gouverne est bon. Or cela est connu par ceux qui ont péché contre Lui, connu pour eux-mêmes et en eux-mêmes ; et c’est cette connaissance de Dieu qui rend l’âme capable de voir la sagesse et la bonté en toutes choses, quoique les effets du péché soient encore présents.
Ce principe est très important : je parle de discerner Dieu et le bien au milieu de la scène de péché dans laquelle nous vivons. Il est vrai qu’un Juif pieux qui n’aurait pas vu Jésus rejeté, qui ne connaîtrait pas la croix, ne pourrait connaître le mal comme nous ; cependant il le connaîtrait en partie ; et la foi qui attend une délivrance finale, non encore venue, introduit Dieu, ainsi connu, sur la scène que la foi devra traverser. Dieu qui, au milieu du mal, n’a rien laissé échapper de sa main, Dieu a souverainement ordonné toutes choses au milieu de ce mal, quoique ce dernier ne vienne pas de Lui ; dans le jugement, il s’est souvenu de la miséricorde. Et lorsque l’esclavage de la corruption entra dans ce monde, Lui, qui avait fait toutes choses très bonnes, a tenu les rênes et a tout ordonné très sagement, malgré tous les témoignages qui puissent rester du mal, de la misère et de la mort. Nous sommes sous leur esclavage jusqu’à ce que nous soyons divinement délivrés, mais Dieu n’a jamais été sous cette servitude, il n’y sera jamais. Il veut que nous sachions que toute la création soupire et que, dès qu’Il régnera, la délivrance viendra ; mais que le Créateur qui fit toutes choses bonnes, gouverne et conduit tout maintenant : « Ses compassions sont sur toutes ses oeuvres » (Ps. 145:9). Maintenant la foi regarde au-delà du mal qu’elle ressent, elle ne désire pas y être insensible, mais ses yeux s’attachent sur Celui qui est au-dessus du mal et qui peut introduire sa bonté, même au milieu de la scène actuelle. Elle discerne le rôle qu’Il y joue, et reconnaît même ce rôle comme étant supérieur à tout le mal. Il ne s’agit pas ici de la jouissance naturelle de la création (quoique toutes les créatures comme telles soient bonnes et aimables), car cette jouissance peut être une complète déception à l’égard de soi-même, et un aveuglement complet à l’égard du mal ; mais c’est la foi atteignant la bonté par-dessus le mal, et introduisant cette bonté dans la jouissance qu’elle a de Dieu dans la créature.
Je le répète : Israël ne pourrait pas connaître le péché comme nous le connaissons ; mais, d’un autre côté, il ne pourrait pas avoir connu la rédemption effectuée et la réconciliation future comme nous, qui pouvons ainsi introduire Dieu maintenant d’une manière plus complète. Tel est le caractère général des Psaumes 103, 104 et 105. Ils contemplent, mais par la foi, la délivrance finale d’Israël ; et ils considèrent la création, non pas dans sa perfection abstraite, mais Dieu en elle ; et voient, en outre, l’histoire d’Israël comme une série de chutes, mais la miséricorde et la bonté de Dieu qui s’élèvent au-dessus d’elles.
C’est ainsi que le Psaume 103 reconnaît le pardon et la guérison, espère, par la foi, en la délivrance et en la grâce qui sont réservées à Israël, et connaît Dieu selon cette grâce et cette délivrance, tout en voyant dans l’intervalle sa patience et sa bonté appliquées à son gouvernement. Il est tardif à la colère et d’une grande bonté. S’agit-il du péché, nous savons sur quel fondement parfait tout est établi, mais notre Psaume célèbre l’effet de cette oeuvre dans le gouvernement d’Israël ; toutefois, pour tous les temps, Dieu est connu selon cette connaissance qu’il a donnée de Lui à la croix. C’est pourquoi il ne s’agit pas ici d’une bonté vague, par laquelle on se trompe soi-même, mais le mal est reconnu tandis que Dieu est connu dans sa bonté. Voilà ce qui devrait caractériser nos voies et nos pensées. Non pas qu’il ne nous faille pas avoir à faire avec le mal, car si nous regardons au-dessous de la surface, nous le rencontrons partout : mais je devrais m’en être occupé de telle manière avec Dieu, que je ramène Dieu avec moi, selon le caractère dans lequel je l’ai trouvé, c’est-à-dire comme étant au-dessus de tout mal. Mes pieds devraient être chaussés de la préparation de l’Évangile de paix.
Le Psaume 104 envisage la création sous le même aspect. Le dernier verset montre le jugement qui nettoie le monde du mal, et la puissance souveraine de Dieu est reconnue. Mais l’Esprit est capable d’introduire la bonté au milieu de tout ce qu’il voit. Toutefois ce Psaume ne va pas au-delà d’une création en chute.
Le Psaume 105 récapitule les voies spéciales de Dieu envers Israël aux temps passés. La délivrance actuelle par le moyen du jugement se trouve aussi mentionnée ici, mais elle est considérée comme étant sa fidélité à sa promesse et à sa grâce. Ici, la manifestation présente de la bonté réveille le souvenir de toutes les voies de Dieu dans le passé. Tel il est, tel il a toujours été.
Le Psaume 106 considère l’autre côté du tableau, et montre les voies de l’homme qui, au milieu de toutes les interventions de Dieu en bonté, après la première joie de la délivrance, est retourné à sa propre méchanceté et à ses voies impies. Cependant l’oreille de Dieu restait toujours ouverte, Il s’est souvenu de sa promesse, il s’est repenti selon la multitude de ses bontés, de manière à produire finalement la louange et les actions de grâces à son nom. Le Psaume précédent nous a montré ce que Dieu était dans ses propres voies ; celui-ci montre qu’il est finalement au-dessus du mal, en accomplissant sa miséricorde et ses promesses, après que les hommes s’étaient montrés ce qu’ils sont. Dieu est bon en Lui-même, Dieu est bon au milieu du mal, non pas comme permettant le mal, mais comme se faisant connaître par ses propres voies de miséricorde ! Or Dieu étant ainsi connu par le coeur, ce dernier passe au milieu des circonstances présentes selon cette connaissance qu’il a de Lui. Mais pour faire cela avec conséquence et constamment, il faut non seulement que le coeur connaisse Dieu, mais qu’il vive habituellement avec Lui. Ainsi se termine le quatrième Livre des Psaumes.