Au sujet de la liberté dans le ministère de la Parole

Auteur inconnu [style ressemblant à W.Kelly — ajouts bibliquest entre crochets]


Bible Treasury, N12 p.319


Note Bibliquest : Par « ministère libre », « open ministry » en anglais, cet article entend le fait de ne pas désigner d’avance celui qui va parler et présenter un sujet dans les réunions d’assemblée (église) pour l’édification (1 Cor. 14). Cet article a été manifestement écrit en réponse à un tract proposant de régenter les conditions d’exercice du ministère de la Parole.


J’admets que ce qu’on appelle le ministère libre a donné occasion à la chair. Mais je ne pense pas que le remède à cela soit de nier la présence et l’opération de l’Esprit de Dieu qui est le sujet du tract que nous considérons.

J’admets aussi que la chair a profité de la liberté spirituelle pour s’octroyer de la licence (comme Dieu nous a avertis qu’elle ferait), et je pense que la chair agissant ainsi devrait, comme dans tout autre cas, être jugée par l’assemblée (ou église) si l’individu ne la juge pas lui-même.

J’ai pu comparer avec des rassemblements où des enseignants avaient pris en mains, jusqu’à l’absorber, le ministère de la parole. Ces enseignants pouvaient avoir un don, mais ils avaient une très bonne opinion d’eux-mêmes, et étaient capables de se faire accepter par beaucoup, grâce à leurs qualifications naturelles. — Je n’ai aucune hésitation à dire que, dans ce genre de rassemblements, j’ai trouvé que le dévouement spirituel et l’intelligence spirituelle et la joie fraternelle étaient indiscutablement inférieurs, et des modes de pensée particuliers prenaient leur place et étaient suivis très charnellement.

C’est, et cela a été à toutes les époques, un des premiers symptômes du déclin spirituel dans l’église. Une autre conséquence est que les sœurs perdent la place très bénie que Dieu leur a donnée dans l’église, et en prennent une qu’Il n’a pas donnée, et qui est vraiment un déshonneur pour elles devant Dieu.

Avant d’aller plus loin, je voudrais insister sur le point suivant auprès des cœurs de tous, et spécialement auprès de ceux qui agissent selon le principe déplorable et non chrétien qu’ils ont le « droit de parler » : la grâce est « prompte à écouter et lente à parler » (Jacq. 1:19), et tout en étant fidèle pour exercer ce que Dieu a donné, on doit toujours être prêt à estimer autrui meilleur que soi

J’ajoute maintenant que je crois qu’il faut autant redouter d’une part l’amour du pouvoir chez ceux qui peuvent satisfaire les oreilles et les esprits de beaucoup (ce qui n’est pas de l’édification), et d’autre part l’amour de l’action chez ceux qui ne peuvent plaire qu’à quelques-uns, et ceci surtout là où la puissance spirituelle est en déclin, et où l’on cherche à stimuler l’enseignement, au lieu de jouir du Seigneur en grâce. La conséquence est que vous trouverez plus ou moins que celui qui enseigne prend la place du Seigneur. La chair convenable n’est pas plus agréable à Dieu que la chair grossière, bien qu’elle prépare le terrain plus facilement à une église qui se contente de laisser Dieu et d’oublier Sa présence.

L’enseignement, aussi précieux soit-il, n’est pas Sa présence. Je redoute beaucoup lorsque j’entends des gens dire : « Cher Monsieur Untel ». Cela peut s’accompagner de grâce en d’autres manières, mais je ne pense pas qu’on aurait parlé ainsi de Paul ou d’Apollos, lorsqu’il y avait l’énergie de la grâce et de la sainte puissance qui met la conscience en présence de Christ, ce qui n’empêchait pas de les estimer très haut en amour à cause de leur œuvre (1 Thes. 5:13).

Vous pensez peut-être que je blâme les autres — ce n’est pas le cas. J’ai vu le même esprit agir à mon égard ; et je crois pouvoir dire que j’ai lutté contre lui, bien que cela ne soit pas facile, étant donné la faiblesse de l’église quant aux ouvriers ; mais en faisant confiance à Dieu pour cela, j’ai trouvé que la bénédiction a suivi, quel que soit le danger apparent. Je crois que le Saint Esprit demeure dans l’église. Cela ne rendra jamais l’homme négligent lorsqu’il s’agit de veiller sur les saints pour leur bien, bien au contraire ; mais le fait de le croire, empêchera de prendre la place de l’Esprit. Dieu sera respecté dans l’église, et Son Esprit sera respecté dans tout le corps, y compris dans le moindre de ses membres. Et ceux qui L’honorent, Il les honorera.


Le tract que vous m’avez envoyé n’est que la mise de côté de tout cela, et l’expression du déclin, dans le cas de l’auteur, allant jusqu’à cesser de croire en la présence et l’opération de Dieu dans l’église. Je ne pense pas que l’on puisse, en vue d’être profitable, forcer à parler ceux qui n’ont qu’un petit don ou que peu de paroles à dire. Forcer un membre à agir ne rétablit pas le tonus du corps, dont le manque a ôté la capacité de ce membre à agir ; mais considérer un tel état comme sain au motif que c’est l’action des membres qui a rendu le corps dans son état maladif, mal à l’aise, c’est une triste erreur.


Voici comment les choses se passent : lorsque la joie dans le Seigneur est fraîche et réelle, et que les saints pensent beaucoup au Seigneur, quelques paroles prononcées à Son sujet Le rappellent Lui, et les saints sont pleins de joie et heureux. Si un autre peut parler largement de Sa grâce (bien que dans la communion, cela serait pour moi exceptionnel), les saints sont nourris ; on pense encore à Christ, à Sa gloire présente, et l’âme emporte peut-être de quoi méditer à un autre moment. Celui qui parle et ceux qui écoutent pensent ensemble à Christ. Là où l’on pense beaucoup moins au Seigneur, les mêmes paroles peu nombreuses ne rappellent Christ au cœur que maigrement, parce que Lui ne s’y trouve pas de la même manière, et ces paroles sont fatigantes, elles ne stimulent pas ; et celui qui avait précédemment l’habitude de parler de cette manière se croit méprisé, lui et son don.


Peut-être aussi un défaut d’éducation ou autre a-t-il accompagné ces quelques paroles : on ne s’en rendait presque pas compte ou on le remarquait pas quand Christ était très présent, mais maintenant cela devient très évident et déplaisant. Si parfois celui qui parle allait au-delà de ce que l’Esprit lui donnait, même si on le percevait et qu’on y faisait allusion en grâce (au cas où il y avait de la fidélité), on reconnaissait ce qui était de Christ dans tout le reste — mais maintenant que Christ n’est pas la source de la même bénédiction, et n’a pas la même place chez celui qui écoute, ces défauts se remarquent et deviennent choquants, parce que ce que l’homme est, ressort maintenant beaucoup plus.

Il s’ensuit la nécessité d’avoir un enseignant plus accompli qui ne heurte pas l’oreille et le goût — ce qui est un piège redoutable pour lui-même et pour toute l’assemblée. Mais lorsqu’on en vient à insister là-dessus comme étant la bonne chose à faire et que ceux qui ont des qualifications en matière d’éducation en viennent à insister pareillement sur ce nouvel état de choses à mettre en place, c’est très triste. Des défaillances d’une part, et d’autre part le fait de se baser sur ces défaillances pour établir la position que la chair voudrait prendre pour être à l’aise à cause de l’échec, ce sont deux choses très différentes. En premier, les défaillances, l’homme doit les confesser ; la seconde chose, c’est accepter ses aises dans cet état de chose et mettre de côté en même temps Dieu et sa propre responsabilité. — J’affirme que je me méfie de cela, du fait que cela vient toujours de ceux qui se chargent de toute l’affaire pour eux-mêmes sur cette base. Je pense que si l’on examine l’histoire de l’Église, on constatera que le déclin de tout réveil a toujours suivi cette voie.


Encore un mot de remarque générale. Je ne dis pas du tout que, dans une assemblée où tel est l’état des choses, ceux qui ne peuvent édifier que très peu, ou pas du tout, doivent s’imposer à l’assemblée, ou être encouragés à parler dans cet état des choses. Si cela n’édifie pas, cela ne peut être d’aucune utilité. Il s’agit que tous sentent quel est l’état de choses, et surtout qu’ils ne mettent pas leur sanction en qualifiant de juste ce qui est en réalité la preuve de la défaillance et de la décadence. Je n’hésite pas à dire qu’un déclin spirituel pire en est toujours la conséquence.

Que la chair ait fait usage de la liberté comme une licence, je n’en doute pas : les dons ne l’empêchent pas. Il se peut aussi que dans une assemblée donnée, il n’y ait pas du tout d’enseignant ; c’est très possible, car les dons sont dans l’unité du corps tout entier, et non dans une assemblée particulière. L’état de l’église peut rendre notre faiblesse très apparente à cet égard ; mais si nous sommes humbles, nous accepterons cette position et nous serons bénis. La tentative de restaurer le don par, ou plutôt d’y substituer la tranquillité provenant d’un arrangement humain convenable, ne fait qu’éviter la confession de l’état auquel nous avons amené l’église, — une confession sainte, humble et qui reconnaît Dieu. C’est reconstruire (et en pire) les choses que nous avons détruites.

C’est, après avoir été réveillé, refuser de reconnaître et de courber la tête à cause de l’état douloureux de l’église ; et je vois cela se développer rapidement dans beaucoup d’esprits à cause de la bénédiction que Dieu, dans Sa souveraine bonté, a daigné accorder à ceux qui ont ainsi reconnu et se sont humiliés à cause de cet état. Que le Seigneur nous garde humbles, et gardant la parole de Sa patience.