Philippe Laügt
1° janvier 2005
Table des matières :
2 - Des exemples hors de la Bible
3 - Exemples de l’Ancien Testament
3.4.1 - Des renouveaux partiels, et ce qui les conditionne
3.4.2 - Plusieurs instruments utilisés par Dieu dans la faiblesse
4 - Exemples du Nouveau Testament
Dans ses épîtres, l’apôtre Paul, pour illustrer les difficultés,
les efforts et les victoires de la vie chrétienne, se sert volontiers d’expressions
courantes en athlétisme. Parmi les termes employés dans ces milieux sportifs, on
relève maintenant le mot handicap
, d’origine incertaine. Il est utilisé pour
une course à pied ou à cheval où certains candidats à la victoire portent parfois
un poids ralentisseur pour égaliser les chances de succès des concurrents.
Mais le même terme sert maintenant aussi pour désigner une personne dont les capacités physiques ou intellectuelles sont limitées, ou réduites. Elle peut être d’ailleurs parfois handicapée par sa race, ses origines ou pour le simple motif qu’elle ne dispose que de faibles ressources financières et se trouve obligée de vivre dans une pauvreté parfois extrême. En conséquence, elle se trouve plus ou moins empêchée, contre son gré, d’atteindre les buts qu’elle se propose dans sa vie.
Mais, par contre chacun de nous connaît des handicapés qui, à force
de courage et de volonté, obtiennent des résultats remarquables, malgré leurs déficiences.
— Citons par exemple cet ingénieur, brusquement entièrement paralysé, qui continue
à diriger, avec succès, des milliers d’hommes pour terminer la construction d’un
grand paquebot. — Citons aussi un illustrateur de livres, très connu. Pour lui permettre
de travailler encore, on doit attacher les pinceaux à ses mains, complètement déformées
par les rhumatismes. Ses capacités restent telles que la finesse du trait sur ses
tableaux fait l’admiration de tous les connaisseurs. — Plusieurs se souviennent
peut-être d’un musicien, parmi les plus connus à notre époque. Entièrement aveugle,
il dirigeait pourtant un des plus grands orchestres philharmoniques. — Mentionnons
encore Beethoven, devenu entièrement sourd durant la dernière partie de sa vie.
Il ne pouvait plus entendre la moindre note de ses compositions musicales. Et pourtant,
quelle magnifique musique il écrivait encore ! — Citons enfin, tout près de
nous, Léna Klingwall, née sans bras, championne mondiale
de natation chez les handicapés. Elle témoigne de sa foi et se déclare persuadée
que l’essentiel tient dans son attitude vis à vis de Dieu. Évidemment, elle s’est
souvent demandé pourquoi Dieu permet tant de souffrances,
de maladies et d’infirmités. Il n’y a pas, pour elle non plus, de réponse simple
à de telles questions. Mais ce qui fait souffrir n’est-il pas formateur pour chaque
croyant ? Avec le secours du Seigneur, elle a pu surmonter
les souffrances
et la peine. J’ai souhaité, dit-elle, que Dieu m’ait épargné mon
infirmité
.
Mais « j’ai maintes fois expérimenté Sa
présence
, dans des
situations insignifiantes ou des circonstances cruciales. Il m’a donné la force
et la joie ! J’ai Dieu, il m’aime et je
sais
que désormais
rien ne pourra me séparer de son amour ». Il est vraiment le Dieu de toute
consolation (2 Cor. 1:3-5), pour le pécheur qui accepte le salut par l’œuvre de
Jésus-Christ à la croix.
Il y a beaucoup d’ « handicapés » parmi ceux que Dieu appelle
à travailler pour Lui
au milieu de ce monde enténébré,
pour amener des âmes à Christ et pour agir en faveur des siens. Dans sa sagesse,
il choisit souvent ceux qui ont des infirmités parfois depuis leur naissance. Ceux en tout cas auxquels souvent
les hommes penseraient le moins pour mener à bien un travail, Dieu s’en sert pour mener à bonne fin Son œuvre
! (És. 55:9).
L’Éternel appelle Moïse à délivrer le peuple d’Israël de son esclavage en l’Égypte. À certains égards, on peut estimer qu’il était tout à fait qualifié pour cette tâche. N’était-il pas israélite, de la tribu de Lévi ? Toutefois son adoption par la fille du Pharaon et l’instruction reçue pendant toute sa jeunesse « dans toute la sagesse des Égyptiens » étaient plutôt des facteurs susceptibles de lui aliéner la sympathie de ses frères ! (Ex. 2:14).
Il lui vint au cœur de visiter ses frères. Il croyait
qu’ils comprendraient
que Dieu voulait leur donner la délivrance par sa main. Mais il est aussitôt incompris,
méprisé (Ex. 2:14) ; il est vrai qu’il a agi de sa propre initiative :
c’est un fiasco total et Moïse doit s’enfuir (Act. 7:22-29).
Il demeure étranger en Madian pendant quarante ans, toujours énergique et généreux (Ex. 2:16-22). Dieu lui parle au cœur, au désert (Osée 2:14). Puis finalement, Il lui apparaît dans la flamme d’un mystérieux buisson : Israël était semblable à ce buisson, éprouvé mais non détruit.
Moïse devient tout tremblant et il sent maintenant son incapacité totale, son ignorance, son manque d’autorité. Étienne affirme pourtant qu’en Égypte il se montre « puissant dans ses paroles et dans ses actions » (Act. 7:22).
Or maintenant, après l’insuccès de sa tentative, quand Dieu
veut
l’envoyer pour délivrer Israël de l’esclavage, il soulève toutes sortes d’objections.
Il Lui dit : « Je ne suis pas un homme éloquent, — ni d’hier, ni d’avant-hier,
ni depuis que tu parles à ton serviteur » (Ex. 4:10). Il reconnaît qu’il n’a
pas les capacités d’un avocat pour plaider avec éloquence la cause d’Israël, car
sa bouche et sa langue sont pesantes. Il en vient ainsi à mépriser involontairement
Celui qui a donné une langue
à l’homme (Ex. 4:11). Il conclut en affirmant
que les fils d’Israël ne le croiront pas et, malgré les signes que Dieu lui donne
alors, il demande : « Envoie, je te prie, par celui que tu enverras »
(Ex. 4:2-9, 13). Nous pouvons, nous aussi, invoquer toutes sortes de motifs pour
ne pas obéir
!
Ainsi Moïse n’a plus confiance en lui-même. C’est bien une étape
indispensable pour chaque serviteur. Mais,
en même temps, il faut apprendre à avoir une pleine
confiance
en Dieu.
Soyons assurés que si le Seigneur charge d’un service, il donne en même temps toutes
les ressources pour l’accomplir.
Fortifié par sa réelle communion avec Dieu, son intimité exceptionnelle
avec Lui (Nom. 12:8), par la foi, Moïse quittera l’Égypte, « ne craignant pas
la colère du roi », malgré
ses infirmités. Il a appris à tenir
ferme, comme voyant
Celui qui est invisible
.
Il se confie dans le Roi de ceux qui règnent et le Seigneur de ceux qui dominent :
Israël sera arraché à l’ennemi et pourra servir l’Éternel,
son Dieu (Héb. 11:27 ; Ex. 10:26).
En contraste, Samson, s’appuie à tort et hélas, de plus en plus, sur sa force naturelle, qui paraît grande ; aussi s’éloigne-t-il de plus en plus de l’Éternel (Jug. 13-16). Vient un moment où il est à toute extrémité, aveugle, prisonnier des Philistins. Il fait interminablement tourner une meule et sert à amuser ses bourreaux (Jug. 16:21-25).
C’est à ce moment-là que Dieu accepte de se servir de lui, pour exécuter
un terrible jugement sur les ennemis d’Israël (Jug. 16:26-30).
C’est un exemple solennel si l’on est tenté d’avoir confiance en soi-même (Ps 30:6).
Apprenons, si c’est encore nécessaire, à compter vraiment sur Dieu
seul
,
sinon tout notre travail sera vain ! (Ps. 127:1).
Joseph, le fils de
Jacob et de Rachel, un beau type de Christ, est particulièrement aimé de son père.
Obéissant
à son désir, il part à la recherche de ses frères pour s’enquérir
de leur bien-être. Mais ils le haïssaient et, malgré sa jeunesse, ils décident de
le vendre sans pitié comme esclave, après avoir médité de le tuer ! (Gen. 37:28). Il est emmené en Égypte par les Madianites, qui le revendent à leur tour à un officier du Pharaon,
Potiphar. L’Éternel fait tout
prospérer en sa main. Joseph est fidèle
, mais injustement accusé, il est
enfermé dans la tour des prisonniers du roi (Gen. 39:20).
« On lui serra les pieds dans les ceps, son âme entra dans les fers »
(Ps. 105:18).
Quel étrange chemin l’Éternel semble choisir
pour son serviteur ! Mais Joseph doit apprendre à se rejeter entièrement
sur Dieu ! (Ps. 55:22). Il ne lui fera jamais défaut : Il étend sa bonté
sur lui et il trouve grâce auprès du chef de la tour.
Il semble qu’il a tort de chercher par sa propre initiative à être
libéré (Gen. 40:14-15). Le Psalmiste dit : « La
parole de l’Éternel l’éprouva » (Ps 105:19-20). L’emprisonnement
se prolonge deux ans encore : la branche qui porte du fruit doit être émondée
,
pour qu’elle devienne propre pour le dessein de Dieu.
Tout au long de sa vie, l’Éternel est avec Joseph : c’est le secret de sa prospérité spirituelle. Quand Dieu juge à propos d’intervenir, quel changement ! « De la poussière, il fait lever le misérable, de dessus le fumier il élève le pauvre, pour les faire asseoir avec les nobles : et il leur donne en héritage un trône de gloire » (1 Sam. 2:8-9).
Appelé soudain pour interpréter le songe du « dominateur des
peuples », il lui annonce : « Dieu donnera une réponse de paix au
Pharaon » (comparer avec Dan. 2:28). Chacun doit reconnaître que ce pauvre
prisonnier que l’on fait accourir de la fosse, est l’homme intelligent et sage
que Dieu a préparé en secret
(Gen. 41:33, 38-40). Après les souffrances, les gloires
suivent : Joseph est établi sur toute la maison du Pharaon. Devant lui, on
crie : Abrec, c’est à dire : « Qu’on s’agenouille » !
Il reçoit le titre de révélateur de secrets — en égyptien : Sauveur du monde,
ou, soutien de la vie (Gen. 41:45).
Quel moment pour cet homme qui a été humilié de tant de manières, quand enfin il peut se jeter au cou de son père ! Quel chemin de préparation il a dû suivre pour atteindre ce sommet de sa vie et de son service !
Selon les instructions de Dieu, Joseph est employé pour sauver de la famine l’Égypte (une figure du monde) et le peuple de Dieu (Gen. 45:5). Le Pharaon dit aux affamés : « Allez à Joseph, faites ce qu’il vous dira » (Gen. 41:55). Joseph peut désormais entretenir ses frères, qui habitent séparés en Goshen, de ce qu’il y a de meilleur dans le pays d’Égypte (Gen. 45:18 ; 47:4-6).
Le livre des Juges qui ressemble sur bien des points au temps actuel, est caractérisé par Bokim, le lieu des pleurs (Juges 2). Ne soyons pas indifférents, pleurons, car nous avons tous contribué à la ruine du peuple de Dieu. Il n’y a pas encore de réelle confession ou d’humiliation, il faudra attendre pour cela 1 Samuel 7.
L’Ange de l’Éternel
est définitivement monté de Guilgal à Bokim (Jug. 2:1-5). Le jugement de soi-même, ce « dépouillement
de la chair » (1 Pierre 3:21), secret du bonheur de l’âme et des victoires
sur l’ennemi, est de plus en plus négligé
. Le peuple, en tant que tel, ne
revient pas à Guilgal après la victoire. Et surtout il n’y
reste
pas
, dans l’attente de discerner
la volonté de Dieu pour le pas suivant. Ehud pourtant partira encore de Guilgal.
L’infidélité collective ne doit pas être un obstacle à l’énergie individuelle de
la foi.
L’édifice est ruiné, ne cherchons pas à le recrépir
(Ézé. 13:14) :
Dieu le détruirait. Le Seigneur hait les prétentions
à la force dans un jour comme le nôtre.
Dans ce livre des Juges, Israël abandonne son Dieu de façon répétée.
Alors dans sa grâce, pour réveiller leur conscience, il se sert des ennemis, il
les
fortifie même
!
Il est solennel de penser que Dieu se sert de tels instruments de son choix pour
nous discipliner ! Quand enfin Israël crie
à l’Éternel,
Dieu, dans Ses compassions, leur donne un juge.
Un nouveau réveil, même partiel, est nécessaire aussi à chaque génération dans l’histoire de l’Église.
Dieu prend souvent à son service des personnes que l’on estime handicapées
, d’une manière ou d’une autre, mais conscientes
de l’être. Le Seigneur sait fortifier
ou guérir parfaitement, s’Il le juge bon, tous ces infirmes
(Jean 5:3-9 ; Matt. 8:2).
L’accent est parfois mis sur la faiblesse
de l’instrument :
Ehud était gaucher :
il adapte sa courte épée à son infirmité ; la victoire, par cette arme divine :
une parole de Dieu
, est remportée
sans bruit et sans gloire, sur la puissance qui tenait pourtant Israël asservi jusque
là. On mesure un peu aussi la faiblesse apparente des armes employées avec l’aiguillon
de Shamgar ou le pieu de Jaël, encore plus inattendu. Mais tout cela fait ressortir d’autant plus la puissance
de Dieu
.
Quand il faudra combattre à nouveau, au milieu d’une indifférence
devenue quasi générale (Jug. 5:6-7), l’Éternel se sert d’une
femme
prophétesse, de Debora, pour juger
et délivrer le peuple.
Dans le temps actuel, non seulement le nombre des ouvriers est restreint,
mais les dons de l’Esprit sont peu accentués. Leur absence
se fait cruellement sentir au milieu des assemblées, mais le réalise-t-on ?
Si le Seigneur nous réveille à ce sujet, il faut demander avec foi des dons spirituels
plus grands (1 Cor. 14:1), avec le désir sincère d’être utile
(1 Cor. 12:7), et que les saints soient
édifiés
(1 Cor. 14:5), à la gloire de Dieu.
Debora envoie et appelle Barak et lui dit : « L’Éternel, le Dieu d’Israël ne l’a t-il pas commandé
?
Va, et rends-toi sur le mont Thabor, et prends avec toi dix mille hommes… J’attirerai vers toi Sisera… et Je le livrerai en ta main » (Jug. 4:6-7). Mais Barak manque d’énergie morale, de confiance
en Dieu. Il a besoin de s’appuyer sur quelqu’un
, d’avoir un secours humain
visible
. Il ne sait pas s’appuyer sur Dieu seul (Ps. 146:3 et 5).
Deborah accepte d’aller avec lui, mais elle l’avertit : « Ce ne sera pas à ton honneur dans le chemin où tu vas, car l’Éternel livrera Sisera dans la main d’une femme ». Cette femme, ce sera Jaël qui a l’honneur de tuer Sisera (Jug. 4:8-9, 21 ; 5:24-27).
Dans ce temps de faiblesse, Barak est un instrument malhabile, mais dans sa miséricorde, Dieu accorde la victoire aux siens, et Barak est cité parmi les témoins de la foi ! (Héb. 11:32).
Gédéon, qui est appelé
aussi à devenir un juge, ne voit pas en lui-même la force que l’Ange de l’Éternel lui attribue (Jug. 6:12-15). Il s’estime au contraire désavantagé, en état
d’infériorité, ce qui était indiscutable d’un point de vue humain : « Voici
mon millier est le plus pauvre en Manassé, et moi je suis le plus petit dans la
maison de mon père ». Vouloir dans de telles conditions sauver
Israël ne relève-t-il pas de la prétention ?
Gédéon a besoin d’apprendre
cette certitude qui a soutenu l’apôtre Paul : « Je puis toutes
choses
en Celui qui me fortifie » (Phil. 4:13). Une fois cette leçon apprise, on peut
s’appuyer sans réserve, et avec reconnaissance, sur Celui qui promet : « Moi
je serai avec toi » (Jug. 6:16 ; Héb. 11:34).
Mais il faut aussi comprendre qu’il y a des choses à renverser, à démolir et à couper dans notre vie, même si, faute d’un certain courage, nous les ôtons, comme Gédéon, sans bruit et de nuit ! La fidélité au-dedans précède la force au dehors : c’est l’ordre selon Dieu. Une idole maintenue dans le cœur attriste grandement le Saint Esprit qui habite dans chaque enfant de Dieu. Il ne peut pas agir librement dans un vase qui, sans cela, pourrait être utile au Maître !
Un autre choix divin, est celui de David, dont le nom signifie :
bien-aimé
. Il est un
type de Christ, de Celui qui est si parfaitement selon le cœur de Dieu. Mais, en
même temps, David est un homme ayant les mêmes passions que nous. Dieu l’appelle à régner sur Israël ; or David
était un inconnu quand Dieu l’appela : ce choix ne peut que surprendre,
car les hommes sont prompts à s’entourer de personnes jugées qualifiées
,
d’après leurs normes (1 Sam. 14:52).
Même Samuel n’était pas prêt à le reconnaître, car malgré l’expérience
faite avec Saül, il regardait encore à l’apparence
(1 Sam. 16:6-7). David était le plus jeune fils d’Isaï, il paissait le bétail, et son père n’avait pas jugé utile
de le présenter à Samuel, avec ses autres frères (1 Sam.
16:1-3, 11-13). On avait même négligé de l’appeler à la fête ; néanmoins, il
sera oint « au milieu de ses frères » comme roi pour l’Éternel. Asaph, le psalmiste, présente
ainsi ce choix : « Il [l’Éternel] choisit David,
son serviteur, et le prit des parcs des brebis ; Il le fit venir d’auprès des
brebis qui allaitent, pour paître Jacob, son peuple, et Israël, son héritage » (Ps.
78:70-71). David n’appartenait pas à ce qui est appelé de nos jours la classe
dirigeante
et pourtant son règne va être pour le peuple de Dieu, une période
particulièrement bénie.
David apprend
d’abord, au désert et sans témoin, par de grandes
expériences personnelles, à connaître Celui qui seul peut enseigner ses mains à
combattre et ses bras à bander un arc d’airain (1 Sam.
17:34-37 ; Ps. 18:34).
Envoyé par son père s’enquérir du bien-être de ses frères, David
est consterné d’entendre l’outrage répété de Goliath, qui insulte les troupes rangées
du Dieu vivant (És. 37:27-28). Il refuse l’armure de Saül,
une entrave pour sa foi, et avec ses humbles instruments de berger, triomphe du
grand ennemi, figure de Satan. Il semble qu’il n’avait plus qu’à attendre tranquillement
le moment de prendre la succession de Saül. Mais le plan de Dieu en amour à son
égard prévoit des années difficiles, une discipline destinée à le préparer
à occuper le trône.
Chaque enfant de Dieu aussi, au moment de sa conversion, doit réaliser
qu’il est un handicapé
. Toutefois le Seigneur, en grâce, a l’intention de
se servir de lui. Alors il le prépare
pour la place qu’il a décidé de lui assigner. Il faut qu’il devienne un vase à honneur,
vidé
de tout ce qui l’encombre, sanctifié
, utile au Maître (2 Tim. 2:21). Laissons-le faire : Quelle grâce s’il pouvait
être dit de l’Assemblée, comme pour Israël à sa sortie
d’Égypte : « Il n’y eut aucun infirme [ou : trébuchant] dans ses
tribus » ! (Ps. 105:37).
Pour ce temps de formation indispensable, David doit tout quitter : foyer, situation, ressources. Il connaît l’amertume et l’injustice. Il fait l’expérience de la méchanceté humaine, de l’ingratitude, de la jalousie, de la haine et même de la trahison.
Il s’enfuit d’abord à Rama et demeure quelque temps avec ce prophète, Samuel, qui s’est retiré, par fidélité, de la scène dont David, à son tour, est chassé. L’affaire de Tsiklag laisse le fils d’Isaï humilié, plus conscient de sa faiblesse (1 Sam. 30). Une expérience que chacun doit faire ! Mais d’heureuses relations sont rétablies avec Dieu. Alors chez David brillent désormais la grâce, le désintéressement et l’amour pour son peuple, le respect de l’ordre divin (2 Sam. 1). Un temps de patience encore à Hébron, pendant sept ans, et l’Éternel lui-même l’établit roi sur tout Israël.
Le Seigneur se présente plus tard à son peuple comme le Fils de David,
mais il met en évidence son antériorité et sa supériorité
par cette question
restée sans réponse : « Si David l’appelle Seigneur, comment est-il son
fils ? » (Matt. 22:45).
Amos, un autre serviteur, est pris par l’Éternel à Thekoa. Ignoré, il garde le bétail et cueille pour se nourrir le fruit, généralement dédaigné, des sycomores. C’est alors que Dieu lui commande : « Va, prophétise à mon peuple Israël ! » (Amos 7:14-15). Ce prophète, d’une extraction si humble, doit prononcer sans crainte des paroles sévères et annoncer le jugement à Béthel, devenu le haut-lieu de la religion officielle du peuple, — une religion sans vie. Simultanément il ne cesse d’intercéder secrètement pour le peuple, objet de sa fidèle affection (Amos 7:1-6).
Dans un tel chemin, il rencontre l’opposition et l’opprobre ; Amatsia, sacrificateur à Béthel, imbu de son importance, vient le chasser de ce qu’il appelle pompeusement « le sanctuaire du roi et la maison du royaume » (Amos 7:13).
Malgré le mépris des gardiens d’une religion de forme, Amos, soutenu par l’Éternel, déclare sans ambages, comme plus tard les disciples, qu’il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Act. 5:29).
Parmi ceux que le Seigneur choisit pendant son ministère pour faire partie de ses apôtres, c’est à dire de ses envoyés, il confie à Matthieu auparavant appelé Lévi, la rédaction d’un évangile, dont les enseignements fondés sur l’Ancien Testament, sont en premier lieu en bénédiction aux Juifs.
Pourtant l’activité de Lévi, jusqu’au moment où Jésus lui dit :
Suis-moi
(Matt. 9:9-10) fait de lui un renégat, aux yeux de ses concitoyens.
C’est un publicain méprisé : il accepte de percevoir des impôts, fixés par
l’occupant romain. De sorte qu’il est particulièrement honni, associé dans l’esprit
de ses compatriotes aux païens et aux pécheurs. Les Pharisiens s’indignent de voir
Jésus et ses disciples assis à table, avec des publicains et des pécheurs, chez
un tel homme ! (Matt. 9:11). Mais « Dieu a choisi les choses viles du
monde et celles qui sont méprisées, et celles qui ne sont pas, pour annuler celles
qui sont ; En sorte que nulle chair ne se glorifie
devant Dieu »
(1 Cor. 1:28-29).
Les autres apôtres aussi sont aux yeux de ce monde, et à des degrés
divers, des « handicapés ». Les plus en vue sont de pauvres pêcheurs au
bord du lac de Génésareth (Luc 5:1-11). Traduits devant le Sanhédrin, les chefs,
les anciens et les scribes sont vite convaincus de leurs
« handicaps » : « voyant la hardiesse de Pierre et de Jean,
et s’étant aperçus qu’ils étaient des hommes illettrés et du commun
, ils
s’en étonnaient et les reconnaissaient pour avoir été avec Jésus » (Act. 4:13).
Quel précieux témoignage pourtant est rendu au Seigneur par ces « frères de basse condition » (Jacq. 1:9 ; Luc 22:28) ! Ils n’ont pas à se mettre en souci de ce qu’ils diront (Matt. 10:19). Guidés par le Saint Esprit, ils répondent avec fermeté et avec sagesse aux docteurs de la Loi (Act. 5:29-32) !
Peut-être pense-t-on qu’au moins Saul de Tarse, devenu plus tard l’apôtre Paul, fait exception à ce qui semble être une règle ?
Voilà un homme qui, plus que beaucoup d’autres, a de quoi se confier dans la chair. Il dresse le tableau de ses avantages naturels : « Moi circoncis le huitième jour, de la race d’Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu des Hébreux, quant à la loi, pharisien ; quant au zèle, persécutant l’assemblée ; Quant à la justice qui est par la loi, étant sans reproche » (Phil. 3:4-6 ; Gal. 1:14). Instruit aux pieds d’un célèbre docteur de la Loi, Gamaliel (Act. 22:3), il est de surcroît, par naissance, citoyen romain (Act. 22:27-28).
Mais après sa rencontre décisive avec Jésus sur le chemin de Damas,
il considère que, pour gagner Christ
, tous ces « avantages » sont
des ordures (Phil. 3:8).
Dieu révèle à Ananias, lui aussi « inconnu
mais bien connu », que cet homme est « un vase
d’élection
pour porter Son nom devant les nations et les rois et les fils d’Israël » (Act. 9:15). Saul va apprendre combien il doit souffrir pour Christ ! Il prend bientôt plaisir
dans les infirmités, dans les nécessités, dans les persécutions, dans les détresses
pour Christ
. Il a appris dans Son intimité cette leçon, si nécessaire pour
chacun des siens : « Quand je suis faible, alors
je suis fort »
(2 Cor. 12:9-10).
Par amour aussi pour Christ, Paul a accepté de n’être plus qu’un pauvre Juif parmi d’autres. Il ne cherche pas à garder ce statut social qui le remplissait jusqu’alors de satisfaction et que d’autres, autour de lui, cherchent à acquérir à tout prix ! (Act. 22:28).
Citoyen d’un pays assujetti à l’empire romain, mais toujours prêt
à se rebeller, Paul est constamment suspect pour les autorités occupantes
d’être un fauteur de trouble en puissance (Act. 17:6).
Pour les Grecs, imbus de leur culture (1 Cor. 1:22), ils le tiennent tout simplement
pour un Barbare. Enfin, même ses
frères à Corinthe, tout en étant obligés de reconnaître que « ses lettres étaient
graves et fortes », se hâtent d’affirmer que « sa présence personnelle
était faible et sa parole méprisable » — un prétexte
pour contester
la valeur
de son enseignement, reçu du Seigneur (2 Cor. 10:10).
Enfin, une « écharde pour la chair », ce messager de Satan qui le souffletait afin qu’il ne s’enorgueillisse pas de l’extraordinaire des révélations dont il était l’objet, avait sur l’entourage de l’apôtre, un effet répulsif — sauf toutefois sur les Galates dont l’attachement à l’apôtre était réel (2 Cor. 12:7 ; Gal. 4:13-15).
Ne doit-on pas reconnaître que même dans les assemblées chrétiennes,
les auditeurs sont facilement attirés par une belle prestance et des talents d’orateur ?
L’on est toujours plus volontiers disposé à recevoir celui qui paraît plus grand
que tout le peuple, « depuis les épaules jusqu’en haut », que ce soit
simplement une question de taille ou de capacités intellectuelles hors du commun
(1 Sam. 10:23-24). Mais la liste que Dieu dressera de
Ses « hommes forts » sera très différente de celle des célébrités, établie par les hommes !
Malgré le mépris dont il est l’objet, Paul affirme être prêt, très
volontiers, à se dépenser entièrement
pour ses frères en Christ, même si
les aimant davantage, il devait être moins aimé (2 Cor. 12:15).
L’apôtre a travaillé plus que tous (1 Cor. 15:10), mais il n’a pas eu plus de succès que son Maître (És. 49:4). Il doit dire : « Tous ceux qui sont en Asie… se sont détournés de moi ». « Démas m’a abandonné… Luc seul est avec moi » (2 Tim. 3:15 ; 4:10).
Paul s’est trouvé très souvent sous les coups et il a été souvent en prison. Il a été souvent exposé à la mort : Cinq fois il a reçu des Juifs quarante coups moins un. Trois fois on le bat de verges, une fois, il est lapidé, il fait aussi trois fois naufrage (2 Cor. 11:23-28). Les Juifs, les nations et parfois même les assemblées se sont ligués pour l’entraver dans ses travaux, mais il a poursuivi sa route, courant droit au but pour le prix de l’appel céleste. Animé d’un noble désir, il écrit : « je me réjouis dans les souffrances pour vous, et j’accomplis dans ma chair ce qui reste encore à souffrir des afflictions du Christ pour Son corps qui est l’assemblée, de laquelle je suis devenu serviteur » (Col. 1:24-25).
L’on ne sait pas la nature de l’écharde pour
la
chair
de Paul, mais l’on sait
par contre que Dieu n’a pas répondu, du moins de la manière qu’il souhaitait, à
sa triple prière. Dieu ne retire pas toujours les épreuves de nos vies, mais il
donne la grâce suffisante pour les supporter.
Quelle est la consolation que l’on trouve dans la réponse que Paul
a reçue à sa prière ? La présence assurée du Seigneur à ses côtés. Elle l’a
maintenu dans l’humilité
et elle a été une source d’inspiration pour le peuple
de Dieu à travers les âges. Retenons pour nous-mêmes cette merveilleuse promesse.
Apparemment le grand dévouement de l’apôtre s’achève par un désastre, mais le Seigneur, son Seigneur n’a t-il pas dit prophétiquement : « J’ai travaillé en vain, j’ai consumé ma force pour le néant et en vain » (És. 49:4). Le chemin de la gloire passe pour le croyant, comme pour son Maître, par la vallée de l’humiliation (Ps. 30:5).
Dans la faiblesse extrême,
Sa vertu s’accomplit,
Et dans l’épreuve même,
Sa voix nous réjouit.
Oui, sur Dieu seul, repose-toi mon âme
Tu comprendras les peines de ta vie,
Et tu verras qu’il voulait te bénir.