Louis Chaudier
Table des matières :
1 - La conduite — 1 et 2 Pierre
2 - Défaillances — Luc 22:31-34, 54-62 ; Jean 21:15-19 ; Galates 2:6-14 ; 2 Pierre 1:13-14
Le texte de ces méditations a été révisé par Bibliquest dans sa forme, par rapport à diverses éditions papiers précédentes. Les révisions ont été limitées à ce qui était nécessaire à une expression et une compréhension correctes. Le texte reste marqué par son caractère oral, non révisé par l’auteur. Dans certains cas d’expressions au sens discutable, l’imperfection de celles-ci a été laissée de peur d’en perdre une certaine vigueur.
Certains textes ont été repris de l’ouvrage « Méditations sur la vie chrétienne » édité en 1995 par F.R., et sont notés comme tels. Ces textes ont fait l’objet (par F.R.) d’une révision un peu plus poussée.
[LC n° 148]
Envisageons un peu ce qui nous est dit de la conduite. Ce que l’apôtre Pierre nous a donné à ce sujet, dans ses épîtres, dérive sans doute de ce que le Seigneur lui a dit, dans le chapitre 21 de Jean, en cette occasion mémorable où il fut restauré publiquement.
La première tâche qui lui fut confiée était : « Pais mes agneaux » (Jean 21:15). J’ai été frappé, dernièrement, de voir combien Pierre introduit souvent ce mot de conduite. Quelle est l’issue pratique de la conduite des saints ? Voilà une considération très importante. Son caractère influera sans doute sur ses résultats.
Pierre nous invite à être « saints dans toute notre conduite » (1 Pierre 1:15), et parle ensuite de six espèces de conduite. Je vais les indiquer.
« Et si vous invoquez comme père celui qui, sans acception de personnes, juge selon l’oeuvre de chacun, conduisez-vous avec crainte pendant le temps de votre séjour ici-bas, sachant que vous avez été rachetés de votre vaine conduite qui vous avait été enseignée par vos pères, non par des choses corruptibles, de l’argent ou de l’or, mais par le sang précieux de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache, préconnu dès avant la fondation du monde, mais manifesté à la fin des temps pour vous, qui, par lui, croyez en Dieu qui l’a ressuscité d’entre les morts et lui a donné la gloire, en sorte que votre foi et votre espérance fussent en Dieu » (1 Pierre 1:17-21). Vous avez là une vaine conduite, en rapport avec une religion charnelle. Nous ne devons pas y voir seulement le langage des lèvres. Je crois que Pierre emploie ce mot dans un sens beaucoup plus large. Que commence-t-il par dire ? Vous êtes entièrement sortis de ce système de religion qui convient au premier homme. Vous avez été rachetés pour Dieu par le précieux sang de Christ. La première chose que l’âme saisit, en rapport avec la conduite, est donc que vous n’êtes plus dans cet ancien état. Vous êtes délivrés de cette vaine conduite. C’est le judaïsme, lequel a été reçu des pères par tradition. Ce que nous avons à faire, c’est de nous débarrasser entièrement de tout ce qui, dans le domaine religieux, ne convient pas à Dieu. C’est la première des choses.
Passons maintenant au chapitre suivant. « Bien-aimés, je vous exhorte, comme forains et étrangers, à vous abstenir des convoitises charnelles, lesquelles font la guerre à l’âme, ayant une conduite honnête parmi les nations, afin que, quant aux choses dans lesquelles ils médisent de vous comme de gens qui font le mal, ils glorifient Dieu au jour de la visitation, à cause de vos bonnes oeuvres qu’ils observent » (1 Pierre 2:11-12). C’est maintenant une conduite honnête. C’est beau, cela ! Or que sommes-nous ? Forains et étrangers (ou pèlerins et étrangers). Qu’est-ce qu’un étranger ? Un étranger est une personne qui est loin de chez elle. Où est notre maison ? C’est le lieu où Jésus se trouve. Voilà la maison. Il n’est pas ici ; Il est là-haut, et nous sommes ici-bas, pèlerins et étrangers. Nous ne sommes pas chez nous, mais nous allons à la maison. Un pèlerin est un homme qui fait un voyage, et le but de notre pèlerinage est notre maison, le ciel. Pierre dit : Si vous comprenez vraiment ce qu’est la grâce de Dieu, vous êtes un pèlerin. Un pèlerin est un homme qui est en voyage, ayant la pensée de retourner à la maison. Paul était un pèlerin, et pouvait dire : « Et maintenant, voici, étant lié dans mon esprit, je m’en vais à Jérusalem, ignorant les choses qui m’y doivent arriver, sauf que l’Esprit Saint rend témoignage de ville en ville, me disant que des liens et de la tribulation m’attendent. Mais je ne fais aucun cas de ma vie, ni ne la tiens pour précieuse à moi-même, pourvu que j’achève ma course, et le service que j’ai reçu du seigneur Jésus pour rendre témoignage à l’évangile de la grâce de Dieu » (Act. 20:22-24). Voilà la pensée. Vous êtes loin de la maison, mais vous vous y rendez. Votre coeur dit-il : Oui, je suis là pour Lui ? Le long du chemin, votre conduite doit donc être honnête. Vous savez que nous vivons en un temps où rien n’est honnête. Dieu nous dit, à vous et à moi : Veillez à être honnêtes. C’est une parole pour tous, mais pour les hommes en particulier. Veillez à avoir un coeur et une conscience qui répondent à la vérité et à la lumière de Dieu.
Allons plus loin, maintenant, et nous trouvons :
« Pareillement, vous, femmes, soyez soumises à vos propres maris, afin que, si même il y en a qui n’obéissent pas à la parole, ils soient gagnés sans la parole, par la conduite de leurs femmes, ayant observé la pureté de votre conduite dans la crainte, — vous, dont la parure ne doit pas être une parure extérieure qui consiste à avoir les cheveux tressés et à être paré d’or et habillé de beaux vêtements, mais l’homme caché du coeur, dans l’incorruptibilité d’un esprit doux et paisible qui est d’un grand prix devant Dieu » (1 Pierre 3:1-4). Pierre s’adresse ici aux femmes dont le chemin pouvait être très difficile. Sa pensée envisage le cas où la femme pourrait être convertie, et le mari incrédule. Le mari pourrait être gagné par la pureté de la conduite de sa femme. Cela suggère l’importance de ce qui est intérieur, de la vie au foyer. C’est une belle parole, pour un jour tel que celui-ci. Une conduite pure ! Il n’y a là rien de la femme moderne du vingtième siècle.
Nous sommes tous exhortés ensuite à avoir
« Enfin, soyez tous d’un même sentiment, sympathisants, fraternels, compatissants, humbles, ne rendant pas mal pour mal, ou outrage pour outrage, mais au contraire bénissant, parce que vous avez été appelés à ceci, c’est que vous héritiez de la bénédiction ; car celui qui veut aimer la vie et voir d’heureux jours, qu’il garde sa langue de mal, et ses lèvres de proférer la fraude ; qu’il se détourne du mal et qu’il fasse le bien ; qu’il recherche la paix et qu’il la poursuive ; car les yeux du Seigneur sont sur les justes et ses oreilles sont tournées vers leurs supplications ; mais la face du Seigneur est contre ceux qui font le mal. Et qui est-ce qui vous fera du mal, si vous êtes devenus les imitateurs de celui qui est bon ? Mais, si même vous souffrez pour la justice, vous êtes bienheureux ; et ne craignez pas leurs craintes, et ne soyez pas troublés, mais sanctifiez le Seigneur le Christ dans vos coeurs ; et soyez toujours prêts à répondre, mais avec douceur et crainte, à quiconque vous demande raison de l’espérance qui est en vous, ayant une bonne conscience, afin que, quant aux choses dans lesquelles ils médisent de vous comme de gens qui font le mal, ceux qui calomnient votre bonne conduite en Christ, soient confus. Car il vaut mieux, si la volonté de Dieu le voulait, souffrir en faisant le bien, qu’en faisant le mal » (1 Pierre 3:8-17). Voilà ce qu’on doit voir, extérieurement, dans le monde.
Remarquez simplement combien le mot « bon » revient souvent, dans ce chapitre (voyez versets 10, 11, 13, 16) (car il faut lire : de « bons » jours, littéralement, et : qu’il fasse ce qui est « bon », aux versets 10 et 11). Savez-vous ce qu’est un chrétien ? Un chrétien est une personne qui est bénie, et qui est envoyée pour apporter la bénédiction. Vous avez été bénis de la part du Seigneur, et vous êtes placés sur cette scène pour apporter la bénédiction, comme Pierre l’exprime ici. Vous bénissez celui qui vous fait opposition. Vous êtes la reproduction de Christ dans la scène de laquelle Il a été rejeté. Désirez-vous voir d’heureux jours, si le Seigneur tarde ? Gardez votre langue de mal.
Je pense que nous en venons ici à ce que les lèvres expriment effectivement, et à leur effet sur nous-mêmes aussi bien que sur les autres. « Car les yeux du Seigneur sont sur les justes et ses oreilles sont tournées vers leurs supplications ; mais la face du Seigneur est contre ceux qui font le mal ». La face du Seigneur est autant contre ses propres enfants, s’ils font le mal, que contre les enfants du diable. Il en fait ici l’application à la marche pratique du chrétien. « Et qui est-ce qui vous fera du mal, si vous êtes devenus les imitateurs de celui qui est bon ? ». Remarquez le mot « bon ». D’heureux (ou bons) jours ; imitez celui qui est bon ; une bonne conscience et une bonne conduite. Bien-aimés, si vous faites le bien (ce qui est bon), imitez le bien et nourrissez-vous du bien. Vous verrez d’heureux jours ; vous aurez une bonne conscience ; et tout le monde devra reconnaître que votre conduite est une bonne conduite. Plus encore, Dieu agira en sorte que « ceux qui calomnient votre bonne conduite en Christ, soient confus ».
Abordons maintenant la deuxième épître, où il nous est parlé de ce qui doit nécessairement peiner l’enfant de Dieu, savoir :
« Car, si Dieu n’a pas épargné les anges qui ont péché, mais, les ayant précipités dans l’abîme, les a livrés pour être gardés dans des chaînes d’obscurité pour le jugement ; — et s’il n’a pas épargné l’ancien monde, mais a préservé Noé, lui huitième, prédicateur de justice, faisant venir le déluge sur un monde d’impies ; — et si, réduisant en cendres les villes de Sodome et de Gomorrhe, il les a condamnées par une totale subversion, les établissant pour être un exemple à ceux qui vivraient dans l’impiété ; et s’il a délivré le juste Lot, accablé par la conduite débauchée de ces hommes pervers, (car ce juste qui habitait parmi eux, les voyant et les entendant, tourmentait de jour en jour son âme juste à cause de leurs actions iniques) — le Seigneur sait délivrer de la tentation les hommes pieux, et réserver les injustes pour le jour du jugement, pour être punis » (2 Pierre 2:4-9). Dieu doit juger le mal, et Il le jugera. Mais, avant de le faire à Sodome, Il a délivré le juste Lot, accablé par la conduite débauchée de ces hommes pervers. Si Lot avait eu une parcelle de spiritualité et de dévouement pour Dieu, il serait resté près de son oncle Abraham, apparemment grotesque et ridicule. Mais, comme beaucoup d’autres, il pensa qu’il prospérerait dans le monde. Et où alla-t-il ? Il dressa d’abord ses tentes jusqu’à Sodome (Gen. 13:12), puis il y entra et y habita (Gen. 14:12).
Dieu lui donna, bientôt après, un avertissement solennel, car il fut fait prisonnier par Kedor-Laomer et ses confédérés, et perdit tous ses biens. Son vieil oncle revint alors sur la scène, et lui fit recouvrer sa liberté. Mais, n’ayant pas tenu compte de l’avertissement reçu, il retourna tout droit à Sodome. Peut-être pensait-il qu’il pouvait améliorer cette ville impie, comme beaucoup de chrétiens aujourd’hui, qui s’efforcent de réhabiliter ce présent siècle mauvais, mais en vain. Par la suite, Dieu dut traîner Lot hors de Sodome (Gen. 19). Mais il ne put que tourmenter son âme à cause de la conduite débauchée de ces hommes pervers, pendant qu’il s’y trouvait.
Or, il n’est nullement nécessaire, pour un saint aujourd’hui, de se trouver dans le cas de Lot. Il se trouvait à Sodome à dessein, et de sa propre volonté. Nous devons traverser le monde ; mais on peut le traverser en étant préoccupé d’autre chose. Je vais vous indiquer un remède, pour éviter que la conduite des hommes pervers occupe votre âme, et qu’elle en soit tourmentée. Soyez préoccupés. Si vous êtes préoccupés de Christ, il n’y aura pas de place pour cela. Il y a une débauche morale considérable, autour de vous. Soyez occupés de Christ, du bien, d’une conduite honnête et pure, et la conduite débauchée de ceux qui vous entourent ne vous affectera pas. Si vous le faites, vous pouvez rencontrer la persécution, mais vous découvrirez, pendant votre course, que le monde ne vous gênera pas beaucoup. Si vous prenez position pour Christ, vous découvrirez bientôt ce que le monde va faire. Il se débarrassera de vous. Votre âme ne sera jamais vraiment tourmentée par la conduite débauchée des hommes pervers, sauf si vous êtes de pair, ou compagnon, avec eux.
Venons-en au dernier point. « Mais n’ignorez pas cette chose, bien-aimés, c’est qu’un jour est devant le Seigneur comme mille ans, et mille ans comme un jour. Le Seigneur ne tarde pas pour ce qui concerne la promesse, comme quelques-uns estiment qu’il y a du retardement ; mais il est patient envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais que tous viennent à la repentance. Or le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; et, dans ce jour-là, les cieux passeront avec un bruit sifflant, et les éléments embrasés seront dissous, et la terre et les oeuvres qui sont en elle seront brûlées entièrement. Toutes ces choses devant donc se dissoudre, quelles gens devriez-vous être en sainte conduite et en piété, attendant et hâtant la venue du jour de Dieu, à cause duquel les cieux en feu seront dissous et les éléments embrasés se fondront. Mais, selon sa promesse, nous attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre, dans lesquels la justice habite. C’est pourquoi, bien-aimés, en attendant ces choses, étudiez-vous à être trouvés sans tache et irréprochables devant lui, en paix » (2 Pierre 3:8-14).
En parlant ainsi de l’apparition du Seigneur, Pierre dit : « Quelles gens devriez-vous être en sainte conduite et en piété » ! C’est beau, cela ! Le croyant, né de Dieu et rempli du Saint Esprit, marche dans une atmosphère d’amour, un saint amour, et traverse cette scène en ayant une sainte conduite. Il vit dans une sainte atmosphère, et apporte avec lui cette atmosphère. Autrement dit, il est séparé pour Dieu avec qui il marche, et communique les impressions, qu’il reçoit dans la compagnie de Dieu, tout autour de lui. Je ne peux rien désirer de meilleur pour vous, tandis que vous allez votre chemin, vous dirigeant vers la patrie céleste et le jour de la manifestation, afin que vos âmes connaissent ce que c’est que de traverser cette scène dans la puissance de l’Esprit de Dieu. En toute affection, j’aimerais insister, devant vous, sur les paroles de Pierre : « C’est pourquoi, bien-aimés, en attendant ces choses, étudiez-vous à être trouvés sans tache et irréprochables devant lui, en paix » (verset 14).
Vous voyez que vous avez été délivrés d’une « vaine conduite » — la religion des hommes dans la chair. Il n’est pas nécessaire que vous soyez tourmentés par leur conduite débauchée, parce que vous n’avez rien de commun avec elle. Vous êtes du ciel. Et maintenant, que doit être votre sentier ? Une conduite honnête, une conduite pure, une bonne conduite, et une sainte conduite. Eh bien, je le répète, si nous nous attachions tous vraiment à suivre ainsi le Seigneur, je crois, bien-aimés, qu’une puissance merveilleuse serait manifestée dans cette ville. Recherchons, avec zèle, avec un zèle toujours croissant, la bénédiction des autres. Nous sommes pleinement bénis nous-mêmes, et laissés ici pour être en bénédiction pour d’autres. Que le Seigneur nous donne la grâce, à chacun de nous, de nous attacher plus simplement et pleinement à Le suivre !
Seigneur, toi qui pour nous t’offris en sacrifice,
Remplis-nous de ferveur pour mettre à ton service
Nos jours, nos biens, nos corps, nos coeurs.
Donne-nous de marcher, malgré notre faiblesse,
Sous ton oeil tutélaire et que par toi, sans cesse,
Nous soyons tous plus que vainqueurs.
Fais-nous toujours goûter combien c’est douce chose,
Pour tout enfant de Dieu, qui sur toi se repose,
De t’aimer et de te servir !
« Pour moi vivre, c’est Christ » : que ce soit la devise
De tous tes rachetés, que chacun d’eux le dise,
Et que tous sachent l’accomplir.
(Cantique 140)
[LC n° 50]
Dimanche après-midi 11 janvier 1948
Méditations sur la vie chrétienne, édition FR 1995, p. 115
« Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ? » (És. 2:22). Si cette pensée habite notre coeur, quelle délivrance ! Nos conducteurs sont souvent revenus avec insistance sur cette déclaration fondamentale qu’il n’y a rien de bon dans un homme, rien ; et ils disaient cela sans nuances, mettant sur le même pied les actions d’éclat des hommes et les crimes des plus grands pécheurs. Avaient-ils raison ? Parfaitement ; devant Dieu, parfaitement. Il faut dire et redire cela aujourd’hui ; c’est une vérité qui n’est pas à corriger ; elle devrait marquer de son empreinte l’éducation donnée aux enfants des chrétiens. La mesure suivant laquelle cette vérité est saisie par l’âme marque toute la vie du chrétien. Il vaut mieux partir lentement dans la vie chrétienne, mais partir avec cette connaissance-là de l’homme. On peut être en contact avec les choses de Dieu sans être en contact avec Dieu ; notre propre histoire quotidienne le prouve.
Le Seigneur a arrêté Pierre au milieu de son travail. La présence de Dieu a produit dans cet homme le sentiment de son péché : « Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme pécheur » (Luc 5:8). C’est ce que Dieu fait qui compte, et il veut nous amener dans sa présence. Prêcher l’évangile, ce n’est pas parler de ses propres sentiments, c’est proclamer que Christ est mort parce que tout le monde est pécheur, que la croix a une vertu intrinsèque — elle montre que tout homme est pécheur — que Dieu a tué l’homme, que la croix est la fin de l’homme et, en même temps, le commencement de l’homme nouveau dans le Christ Jésus. Pour Dieu, il y a deux hommes : le premier Adam et le dernier ; on est rattaché à l’un ou à l’autre.
Après la rencontre initiale avec Dieu, le pécheur, placé devant Dieu, doit y rester. Pierre a appris à connaître le Seigneur ; il doit encore apprendre à se connaître lui-même. Simon aimait son Maître, mais il y avait beaucoup de sentiments naturels en lui et un zèle selon la chair. Lorsque le Seigneur parle de la croix : « Seigneur, Dieu t’en préserve ! » (Matt. 16:22), dit-il. Simon, fils de Jonas, était comme nous, il voulait bien tous les avantages de la foi, mais pas les inconvénients ; régner, oui, tout le monde veut bien régner. Mais si Jésus lui montre qu’il sera livré aux principaux sacrificateurs et qu’il sera mis à mort : « Dieu t’en préserve, cela ne t’arrivera point !… Va arrière de moi, Satan » (Matt. 16:22-23). Le Seigneur nous le dit toutes les fois que nous lui disons : « Te suivre, mais pas à ce point-là ».
La croix s’approche ; le Seigneur dit à Pierre : « Simon, voici, Satan a demandé à vous avoir pour vous cribler comme le blé ; mais moi, j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas » (Luc 22:31-32). Il avertit Simon : Satan a demandé et Dieu permet. Dieu se sert souvent de Satan pour exercer la discipline, sous quelque forme que ce soit. Il ne faut jamais prendre une discipline à la légère, mais discerner l’intention de Dieu. Il veut dépouiller une âme pour l’enrichir : « Ne méprise pas la discipline ! » (Héb. 12:5) : rien dans la vie du chrétien n’est à négliger. Dieu est un Dieu très proche de nous.
« Cribler comme le blé » : ce sont d’abord les pleurs, puis une poignée de bon froment pour le grenier de Dieu. Quand un homme est passé par une discipline, il n’est pas le même après, s’il l’a traversée avec Dieu ; sinon, elle est à recommencer sous une forme ou une autre. Nous sommes en danger de mépriser la valeur de la vie chrétienne. Dieu n’a pas condamné le péché dans la chair pour ressusciter la chair dans les siens, même si nous le souhaiterions souvent. Christ est mort et nous, nous sommes morts ; la foi réalise cela, et elle a la pensée de Dieu. À la croix, Dieu a fait passer la mort sur toute l’humanité, et la foi devance le moment où cette mort sera réalité. Dieu ne cherche plus rien de bon dans l’homme, l’homme est tué : c’est le point de départ de la vie nouvelle du chrétien.
Quel est le but de la discipline ? Dieu veut peu, mais il veut du vrai. Il veut voir son Fils dans les siens, peu d’activité peut-être, peu de signes extérieurs sans doute, mais Christ. Marcher avec le Seigneur, marcher comme lui, est-ce que c’est notre souci chaque jour, même si nous ne le réalisons pas toujours ? Ou bien les soucis de ce siècle, l’amour des choses du monde, ou même l’activité dans les choses de Dieu, nous font-ils perdre de vue l’état de notre âme ? Jamais Dieu ne nous dit de chercher une bonne chose dans un mauvais chemin.
Le Seigneur a prié pour Pierre ; c’est une anticipation du service sacerdotal du Seigneur. Il prie continuellement pour les siens dans la présence de Dieu ; il y a un homme à la droite de Dieu, dans la gloire, qui prie continuellement pour chaque chrétien, afin qu’il ait « du secours au moment opportun » (Héb. 4:16), c’est-à-dire pour qu’il ne pèche pas. C’est un service préventif. Jésus connaît chacun des siens ; il les porte, devant la gloire de Dieu, sur son coeur et sur ses épaules, sans cesse. En même temps, il s’occupe des siens sur la terre pour qu’ils aient communion avec le Père et avec lui dans la gloire. Et il prie avant que Pierre ne le sache, et avant qu’il ne tombe. Pierre a fait comme nous souvent : « Avec toi, je suis prêt à aller en prison et à la mort » (Luc 22:33). Que de fois nous chantons ce cantique : « Seigneur, toi qui pour nous t’offris en sacrifice… » ! Et nous affirmons : « Pour moi, vivre c’est Christ » (Phil. 1:21). Le Seigneur dit : « Ah ! Vous chantez ce cantique ; eh bien, on va voir ! ». Il permet alors une circonstance qui manifeste l’état réel du coeur.
Le Seigneur a été tenté, et nous sommes tous tentés. Mais les tentations auxquelles a été soumises le Seigneur ont montré son inattaquable perfection ; l’Ennemi n’avait rien en lui, « ayant accompli toute tentation » (Luc 4:13). Nous, nous disons : « Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller et en prison et à la mort » (Luc 22:33) ; et l’expérience de Pierre montre si les paroles sont en accord avec l’intérieur du coeur. C’est la vie intérieure qui importe. En voyant les gens passer dans la rue, on en mettrait beaucoup au ciel, mais Dieu ne fait pas comme cela ; il ira plutôt chercher quelqu’un en prison, quelqu’un qui aura dit : « Voilà ce que j’ai fait, j’ai péché, je suis coupable ».
Nous connaissons bien ce qui est arrivé à Pierre, et Pierre, c’est nous. Il s’avance plus loin que les autres dans son zèle charnel, et un tel zèle prépare une chute, toujours ; c’est pourquoi il ne faut jamais pousser personne à un service ; nous ne savons pas quelle est la mesure de sa foi, et nous pouvons l’entraîner dans une chute. Il faut prier pour que sa foi augmente ; il faut aller du dedans au dehors. Pierre renie son maître par trois fois. Dans la vie chrétienne, il ne faut pas montrer extérieurement une mesure de foi supérieure à celle qu’on a.
Au moment de la chute, le Seigneur regarde Pierre ; son coeur est fondu, il pleure. Si le Seigneur n’avait pas prié pour lui, c’était le désespoir, comme pour Judas. Nous jouons facilement avec les choses saintes, Dieu ne joue jamais. Mais il n’y a pas de situation sans issue pour le chrétien ; Dieu a les moyens de tirer quelqu’un d’une situation de chute, souvent par la souffrance ; « il ne retire pas ses yeux de dessus le juste » (Job 36:7).
Le Seigneur rencontre Pierre une nouvelle fois, en tête-à-tête, et son coeur retrouve la paix. Trois fois, il le sonde : « Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu ? », « m’aimes-tu plus que ne font ceux-ci ? ». Pierre ne dit plus : « Je te suivrai en prison et à la mort », mais : « Seigneur, tu connais toutes choses, tu sais que je t’aime » (Jean 21:17). Le Seigneur relève son serviteur et lui confie un service ; mais, avant de bénir Pierre comme il ne l’a jamais été, le Seigneur touche le fond de son coeur. Il veut la vérité, il veut une confession totale. Pierre n’a rien de plus à cacher : peu de paroles, mais tout est réglé.
Plus tard, sous l’influence des Juifs, Pierre a été tenté de ne pas marcher droit. Un homme fidèle, l’apôtre Paul, se lève et dit : « Non, Pierre, ce n’est pas ainsi qu’on marche devant Dieu ». Paul aurait pu reculer devant Pierre, qui avait vu le Seigneur, qui était l’un des douze, le plus éminent peut-être. Mais il s’agissait du bien du peuple de Dieu. Quand il vit qu’il ne marchait pas droit, il le reprit devant tous (Gal. 2:14).
Il n’y a pas de situation individuelle ou collective que Dieu ne connaisse par le menu détail ; un fait qui n’est pas jugé, qui remonte même à dix ans, est toujours présent. Nous voulons la bénédiction de Dieu ? Laissons la Parole sonder notre âme jusqu’au fond ! « Tu veux la vérité dans l’homme intérieur » (Ps. 51:6). Dieu ne panse pas une plaie à la hâte, ni à demi. Aujourd’hui, non seulement on craint de laisser la Parole de Dieu sonder son âme par l’Esprit, mais on n’en sent même plus la nécessité : c’est un des signes les plus sûrs du déclin. Nous pouvons tromper nos frères, nous pouvons arriver à nos fins à force de patience et d’habileté, mais tôt ou tard il y aura un règlement sous le gouvernement de Dieu.
Que le Seigneur nous accorde à tous de marcher dans la lumière de sa présence !