J. N. Darby
ME 1892 p. 471-477 = CW 16 p.31-33
1 - [Exhortations nécessaires à cause des circonstances]
2 - [Dieu ne nous épargne pas les difficultés]
3 - [La sensibilité aux difficultés]
4 - [Trouble intérieur quand on sent sa faiblesse]
5 - [Paul vis-à-vis de Timothée : Inquiétude et encouragements]
6 - [Ressentir sa faiblesse dans les souffrances, mais avoir la puissance de Dieu de notre côté]
De telles exhortations ne sont jamais données, s’il n’existe des circonstances qui les rendent nécessaires. Elles ont pour but de parer à quelque mauvaise tendance de la chair, pour que nous veillions contre elle par l’Esprit. Il est bon de nous souvenir comment le Seigneur, en s’occupant de nous, nous prend toujours tels que nous sommes ; comment, dans toutes ses voies, Il a égard aux circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. Il fait le contraire de la philosophie qui nous transporte dans d’autres circonstances.
Christ ne nous sort pas de nos soucis et de nos épreuves. « Je ne fais pas la demande que tu les ôtes du monde ». Tandis qu’Il nous laisse ici-bas, Il permet que nous soyons en butte à tout ce qui est inhérent à la vie de l’homme ; mais, quant à la nouvelle nature, Il nous enseigne à nous confier en Dieu. Nous pensons souvent que, parce que nous sommes chrétiens, les difficultés doivent nous être épargnées, ou que, si nous sommes dans l’épreuve, nous devons ne pas la sentir. Ce n’est pas la pensée de Dieu à notre égard.
En théorie, le chrétien peut être placide et calme. Il a des livres édifiants, des principes profonds ; mais si Dieu lui envoie quelque chose pour troubler sa placidité, vous le trouverez plus sensible que d’autres aux épreuves de ce monde et à la difficulté de les surmonter. Plus un homme marche près de Dieu par grâce, plus il est sensible aux fautes des autres. Plus longue aura été sa carrière chrétienne, plus il aura conscience de la fidélité et de la tendresse de Dieu, et de l’expérience personnelle qu’il en a faite.
Voyez la vie du Seigneur Jésus. À Gethsémané, par exemple, que
trouvons-nous ? Jamais un nuage sur son âme ; Il paraît imperturbable.
Vous ne le voyez jamais sortir de ses gonds. Il demeure toujours Lui-même. Mais
prenez les Psaumes ; nous y trouvons tout au dedans
pour rompre
cette placidité ? Les Psaumes révèlent ce qui se passait au dedans. Dans
les évangiles, Il est présenté à l’homme, en témoignage de la puissance de Dieu
avec Lui, précisément dans les choses qui auraient irrité le cœur humain. Il
marche avec Dieu quant à ces choses, aussi le trouvons-nous en parfaite paix,
disant avec calme : « Qui cherchez-vous ? » – « C’est moi ». Quelle paix !
comme Il en impose ! (car rien n’en impose comme la paix au milieu des
difficultés). Lorsque tout seul, dans l’angoisse de Son âme, Sa sueur découlait
en terre comme des grumeaux de sang, sa placidité ne provenait pas d’un cœur
insensible. En esprit, Il sentait pleinement l’épreuve ; mais, dans ses
circonstances, Dieu était toujours avec Lui, aussi pouvait-Il être uniformément
calme devant les hommes.
Nous ne devons pas nous attendre à n’être jamais exercés, troublés ou abattus, comme si nous étions insensibles. « Ils ont mis du fiel dans ma nourriture, et, dans ma soif, ils m’ont abreuvé de vinaigre ». Il sentait ces choses dans toute leur intensité. Le fer Lui entra jusque dans l’âme. « L’opprobre, dit-Il, m’a brisé le cœur ». Mais entre Christ souffrant et affligé et nous, il existe une différence. Pour Lui, Il ne s’écoulait jamais un instant entre l’épreuve et la communion avec Dieu. Ce n’est pas le cas pour nous. Nous devons premièrement découvrir notre faiblesse et notre incapacité à rien faire de nous-mêmes ; cette expérience faite, nous tournons nos regards vers Dieu.
Où se trouvait Paul quand il disait : « Tous m’ont abandonné ? » Sa confiance en Dieu n’était pas ébranlée ; mais, arrivé à la fin de son ministère, lorsqu’il regardait autour de lui, son cœur était brisé à cause de l’infidélité générale. Il voyait le mal monter comme une marée (ch. 3 ; 4) ; il voyait aussi le danger que courait Timothée de rester seul, sentant sa faiblesse, en face du déploiement des forces de l’ennemi ; aussi, pour que Timothée ne se laissât pas envahir par un esprit de crainte, il dit : « Ranime le don de grâce qui est en toi (*) – car Dieu ne nous a pas donné un esprit de crainte, mais de puissance, et d’amour, et de conseil. N’aie donc pas honte du témoignage de notre Seigneur, ni de moi son prisonnier, mais prends part aux souffrances de l’évangile selon la puissance de Dieu ». Si nous avons un esprit de crainte, cela ne vient pas de Dieu, car Dieu nous a donné l’esprit de puissance. Il a rencontré toute la puissance de l’Ennemi dans la faiblesse de l’homme, en Christ, et Christ est maintenant assis à la droite de la Majesté dans les lieux célestes.
(*) Ce passage lie l’exercice du don de grâce à l’état spirituel. « Dieu ne nous a pas donné un esprit de crainte », aussi ne soyons pas découragés par le triste état de choses qui nous environne. Les Philippiens, eux aussi, sont exhortés à n’être en rien épouvantés par leurs adversaires.
« Prends part aux souffrances de l’évangile, selon la puissance de Dieu ». Quoi ! prendre part aux souffrances ? Oui ! – Être délivré de la faculté de les sentir ? Non – mais participer aux souffrances que l’on peut sentir comme homme, mais « selon la puissance de Dieu ».
On ne réalise pas cela en ne sentant pas le poids de la tristesse et de l’infirmité. Paul avait « une écharde en la chair » (2 Corinthiens 12). Pensez-vous qu’il n’en eût pas conscience ? Ah ! il la sentait journellement et, qui plus est, sous la forme d’un « ange de Satan pour le souffleter ». Et que disait-il ? « Je me glorifierai donc très volontiers plutôt dans mes infirmités (dans les choses dans lesquelles je sens ma faiblesse), afin que la puissance du Christ demeure sur moi ». Quand nous avons la puissance de Dieu de notre côté, elle ne diminue pas en nous la faculté de sentir. Mais nous « rejetons sur Lui tout notre souci, car Il a soin de nous ». Ce n’est pas que Dieu nous réponde dans l’instant même où nous crions à Lui. Daniel dut attendre trois semaines entières la réponse divine ; mais dès le premier jour où il appliqua son cœur à comprendre et à s’humilier devant son Dieu, ses paroles furent entendues (Daniel 10). Nous commençons souvent par réfléchir à la question qui nous préoccupe, nous en cherchons nous-mêmes la solution, avant de placer la chose devant Dieu. En Christ, il n’y avait rien de semblable. « En ce temps-là, Jésus répondit et dit : Je te loue, ô Père », etc. (Matthieu 11). Nous nous fatiguons bien vite en présence de la longueur de notre chemin.
« Ne vous inquiétez de rien » (Philippiens 4:6). C’est facile à
dire. Mais quoi ! ne pas s’inquiéter de la condition de l’Eglise, ou de
l’entretien d’une famille ? etc. « Ne vous inquiétez de rien
». Tout
ce qui produit un souci en nous, produit aussi les soins de Dieu pour nous.
C’est pourquoi « ne vous inquiétez de rien, mais, en toutes choses, exposez vos
requêtes à Dieu par des prières et des supplications avec des actions de
grâce ». Alors,
« la paix de Dieu, laquelle surpasse toute intelligence,
gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus ». Ce n’est pas que vos cœurs
garderont la paix de Dieu. Mais la paix dans laquelle Dieu est Lui-même, sa
paix, la stabilité constante de toutes les pensées de Dieu, gardera vos cœurs.
De plus, quand l’esprit est au large, ne s’inquiétant de rien, quand la paix de
Dieu garde le cœur, Dieu donne à l’âme d’heureux sujets de réflexion. « Toutes
les choses qui sont vraies, vénérables, justes, pures, aimables, de bonne
renommée, – s’il y a quelque vertu et quelque louange, – que ces choses
occupent vos pensées : ce que vous avez et appris, et reçu, et entendu, et
vu en moi, – faites ces choses, et le Dieu de paix sera avec vous ». Dieu
devient le compagnon de l’âme ; ce n’est plus seulement « la paix de Dieu »,
mais « le Dieu de paix ».
Quand une âme se confie en Dieu, le Seigneur est avec elle dans l’épreuve ; elle est gardée dans une paix parfaite. L’Esprit d’amour, l’Esprit de Christ est là. Si je m’occupe de moi-même, c’est un esprit d’égoïsme.