Darby John Nelson
1859 : Bible Treasury 2 p. 193, 209, 225, 241 = Collected Writings 7 p. 266-292
Les sous-titres et divisions de l’article ont été ajoutés par Bibliquest
Table des matières :
2 - La justice de Dieu est-elle une justice basée sur la loi ?
2.1 - Doctrines d’un partisan de la justice légale
5 - Déclaration de l’Écriture sur la justice
6 - La justice et l’épître aux Romains
8 - Comment et pourquoi l’homme est-il réputé juste ?
8.2 - Christ ressuscité pour notre justification
9 - Certitude de la justification
9.1 - Justification de vie : une position, une justification complète
10.2 - Idées fausses sur la loi
10.3 - Où est donc et en quoi consiste la justice de Dieu ?
10.4 - Comment Christ parle de la justice
10.5 - Comment la justice de Dieu a été manifestée
10.6 - Encore Rom. 5:12-21 — Deux chefs de race — L’obéissance de Christ
Avant d’en venir à la solennelle et intéressante question de notre justice, la justice de Dieu, je vais examiner brièvement les objections qu’on y fait, et en débarrasser le terrain, de manière à pouvoir ensuite traiter librement le sujet en vue de l’édification, et non pas de la controverse.
Il sera bon, cependant, de déterminer clairement le principe en question. J’admets pleinement qu’il est des plus graves et des plus essentiels. Ce n’est pas à dire que de bien chères âmes, vraiment pieuses, n’aient pu être et n’aient été, je le crois, dans l’obscurité sur ce qui était réellement d’une grande importance pour leur vraie et divine liberté en Christ, liberté qui est la puissance de la marche chrétienne. Ce n’est pas que ces mêmes chrétiens n’aient été violents (comme les hommes le sont en général quand ils ont tort) dans la défense des choses dans lesquelles ils se trompaient. Mais cela ne diminue en rien l’importance d’être au clair. Toutefois je reconnais franchement et même avec joie, comme des serviteurs de Christ précieux et dévoués, que je respecte et dont j’honore le dévouement, des hommes qui ont embrassé sur ce sujet des doctrines que je crois erronées. Je n’ai donc aucune animosité contre eux. Ce n’en est pas moins un point essentiel, car ce que les saints ont soutenu par une infirmité de jugement, peut devenir un grand obstacle au progrès des âmes et un instrument dans la main de l’ennemi : preuve en soit le judaïsme de la primitive église, à Jérusalem, et l’opposition qu’on élevait contre Paul sur ce même terrain. Les principes en question alors étaient précisément les mêmes qui agitent maintenant une portion de l’église de Dieu, empêchent grandement sa bénédiction et son témoignage, et obscurcissent sa foi.
Voici la question : Est-ce que la justice de Dieu est une justice légale ? Pour la poser, cette question, d’une manière plus explicite, je citerai quelques paroles d’un sermon, sur lequel, quant à son but en général, je puis de tout mon cœur appeler la bénédiction. Cette citation présente un avantage qu’on ne rencontre pas toujours, c’est d’exposer un côté de la question de la manière la plus franche et la plus décidée.
Je lis dans le sermon de M. Molyneux (prêché le 18 juillet 1858, dans un des services privés d’Exeter Hall, aux pages 17 et 18) les paroles suivantes : « Savez-vous ceci, mes chers frères, c’est qu’aucun homme ne peut entrer dans le royaume des cieux à moins qu’il ne soit revêtu d’un vêtement de parfaite justice ? »
Le royaume des cieux
est ici employé pour désigner le ciel — ce qui, pour un esprit bien versé, je veux
dire versé, selon l’Écriture, dans les vérités divines — trahit le système auquel
cette manière de s’exprimer appartient ; mais à part cela, dans cette phrase,
tout est bien. Vient ensuite le développement suivant de cette idée générale :
« Pour m’exprimer clairement, savez-vous que sur la porte du ciel il est écrit :
Fais cela et tu vivras ? Savez-vous que, lors même que quelqu’un est lavé de
son péché dans le sang de Christ, et sanctifié par l’Esprit de Dieu, il ne peut
pourtant pas encore entrer dans le ciel ? Il lui faut quelque chose de plus ;
il lui faut une parfaite obéissance. L’entrée du ciel dépend, non d’une obéissance
négative, mais d’une obéissance parfaite. Dieu avait dit à Adam : Fais cela
et tu vivras. Il a manqué à cette obligation. Il vous faut une obéissance parfaite
à présenter à Dieu pour venir à Lui. L’avez-vous ? C’est la justice active
de Christ, et non pas ses souffrances, qui efface le péché ; c’est sa justice
parfaite, et non pas son Esprit, qui sanctifie le cœur. Écoutez la Parole :
« Par son obéissance mon serviteur juste en justifiera plusieurs ». Et
encore : « Il amènera la justice des siècles ». De plus, cette justice
est mise sur nous. C’est la robe de noces. « Ami, comment es tu entré ici,
sans avoir une robe de noces ? ». C’est
la justice de Christ ». L’auteur continue sur le même sujet, mais ceci
peut suffire. « Les transgressions sont pardonnées à cause du sang, la personne
justifiée, c’est le fruit de la justice de Christ imputée ; l’âme sanctifiée,
c’est l’œuvre du Saint-Esprit demeurant en vous ». N’allez pas vous imaginer,
lecteur, que la grave inexactitude de la citation d’Ésaïe 53, soit une erreur de
ma part. Elle est le singulier effet du biais de l’esprit de l’auteur, le résultat
de sa doctrine. N’est-ce pas une chose frappante, que le seul passage direct qu’il
cite à l’appui de la thèse qu’il cherche à prouver, soit cité inexactement. Les
deux autres ne sont, au fond, que le point à expliquer, et non la preuve de l’explication
que l’auteur donne de la doctrine.
Maintenant je crois à la vérité : que Christ est notre justice, et j’en bénis Dieu ; je crois également que, par son obéissance, nous sommes rendus justes. C’est là la paix assurée de mon âme, comme je crois aussi que c’est celle de l’auteur. Le point important à considérer ici, c’est le contraste entre la mort et les souffrances de Christ, comme nous obtenant le pardon, et son obéissance comme étant notre justice justifiante ; c’est ce qu’on appelle quelquefois son obéissance active et son obéissance passive. Cette doctrine, cependant, ne se discerne pleinement qu’autant que l’on fait remarquer un autre détail essentiel du système, savoir le caractère légal de cette justice. M. Molyneux l’établit en principe aussi clairement que possible : « Il est écrit sur la porte du ciel : Fais cela et tu vivras ». C’est là, comme l’apôtre nous l’enseigne, ce qui caractérise bien positivement la justice légale. « Il a été dit à Adam : Pour entrer dans le ciel, une justice légale est absolument nécessaire. Cela seul y donne droit ».
Or j’affirme que
la doctrine de l’Écriture est entièrement différente, et que celle de l’auteur dont
nous parlons (sans intention aucune, je l’admets, et c’est pourquoi aussi je n’en
impute pas les conséquences à ceux qui la soutiennent) nie l’étendue du péché et
le vrai caractère de la rédemption. La loi est parfaite à sa place. Les anges l’accomplissent
dans son caractère le plus élevé ; celui qui aime le fait aussi, comme nous
l’enseigne l’apôtre. Je dis ceci par manière de préface, afin qu’il n’y ait pas
de malentendu. Mais une nature sainte accomplissant avec délices ce qui est dans
la loi, est tout autre chose que le moyen par lequel un pécheur obtient la justice
et la vie éternelle. Faire avec délices, lorsqu’on est en possession de la vie,
est tout autre chose que de faire pour obtenir la vie. Maintenant ce que je veux
dire, c’est que la loi n’a jamais été donnée, afin que, par elle, nous obtinssions
la justice ou la vie, elle n’aurait même jamais pu être donnée pour cela. Elle est
intervenue pour convaincre l’homme de péché. Un être sans péché, ayant la vie, n’aurait
pas eu besoin d’une loi de justice, afin d’obtenir la vie. Une créature pécheresse,
avec une loi de justice, ne pouvait être que condamnée. « Fais cela et tu vivras, »
n’est point écrit sur la porte du ciel. Cela était écrit sur Sinaï qui n’est pas
la porte du ciel. C’est la porte de la mort et de la condamnation. Il n’a pas été
dit à Adam : « Fais cela et tu vivras ». Il perdit la vie qu’il avait,
par la désobéissance. L’apôtre contredit explicitement tout ce qui est affirmé dans
les citations que nous avons transcrites. « Moïse, dit-il, décrit la justice
qui vient de la loi : « l’homme qui aura pratiqué ces choses vivra par
elles ». Mais la justice qui est sur le principe de la foi, parle ainsi :…
« Si tu confesses le Seigneur Jésus de ta bouche, et que tu croies dans ton
cœur que Dieu l’a ressuscité des morts, tu seras sauvé ». La justice de la
foi est mise en contraste avec celle de la loi qui dit : « Fais ces choses
et tu vivras ». Elle n’accepte pas son principe pour trouver ensuite le moyen
de répondre à ses exigences par un autre, mais elle introduit la justice d’après
un autre principe. Elle parle d’une autre manière. Le grand mal de tout le système
est ceci, que c’est une justice requise de l’homme, comme né d’Adam, quoiqu’un autre
puisse la procurer. La chose procurée est la justice de l’homme. Si Christ l’a fait
pour moi, il n’en est pas moins vrai que c’est ce que j’aurais dû avoir fait. C’est
satisfaire à l’obligation qui pesait sur moi
:
« Fais cela et tu vivras ». Et si c’est sur moi que tombe l’exigence de
satisfaire à la justice, alors cette justice consistera à faire ce
qui est demandé. Si les mots :
« Fais cela et tu vivras » se trouvent écrits sur la porte du ciel, c’est
faire cela
qui est la justice, ne faire
rien autre et rien de plus. Si telle est la vérité, le Seigneur a pu être très miséricordieux
de l’accomplir à ma place, mais c’était là ce qui devait être fait. La justice,
s’il s’agit de répondre aux demandes
d’un supérieur, ne peut être autre chose que de faire exactement ce qui est demandé.
Tout ce qui n’est pas cela n’a pas le caractère de la justice. Et si nous prenons
la loi comme règle parfaite
de ce que
devait être la créature, comme la loi était en effet, alors il ne peut rien y avoir
de plus, autrement la règle n’est pas une règle parfaite, et la justice n’est pas
une justice selon la loi, ni la réponse à l’obligation qui m’était imposée. Ce n’est
pas l’obéissance requise de moi. D’ailleurs tout le principe tombe à faux ;
car la loi, comprise spirituellement, atteint les dispositions et l’état du cœur.
Elle ne dit pas seulement : « Fais », mais : « Sois ».
Mais cela suppose la vie. Si je dis : « Aime et ne convoite pas »
(ce sont les deux faces de la loi), alors la justice est prise en dehors de la sphère
des actes. Faire devient la manifestation d’un état intérieur, du naturel. Mais
est-ce que la devise du ciel est une dénégation de la spiritualité de la loi ?
Et bien loin qu’il soit écrit sur la porte du ciel : « Fais ces choses
et tu vivras », je ne connais pas une parole de l’Écriture, montrant qu’un
observateur de la loi ait droit au ciel, ou promettant le ciel à celui qui observe
la loi, comme y ayant droit par cela même.
Maintenant remarquez
l’effet produit par la découverte de la spiritualité de la loi. Elle devient non
la prétention à faire, mais le critère de l’état de l’homme ; sa nature même
et son effet sont changés : par elle est venue la connaissance du péché. Commander
des qualités
dans un homme, l’amour et
l’absence de convoitises, cela cesse d’être un ordre de faire, cela devient la condamnation
et la mort, et pas autre chose.
Tout le
terrain sur lequel je me tiens est changé. « Par la loi je suis mort à la loi ».
Ce n’est pas regarder à un autre afin qu’il l’accomplisse à ma place, parce que
moi j’ai manqué. Mais voici ce que je trouve dans l’Écriture : l’homme, la
race d’Adam, a été, comme telle, mise à l’épreuve et démontrée ce qu’elle est. Ayant
failli lorsqu’il était innocent, l’homme fut mis à l’épreuve sans loi et fut trouvé
sans frein ; mis à l’épreuve sous la loi, il a été transgresseur de la loi.
Je puis ajouter qu’il a été mis à l’épreuve, lorsque la bonté divine lui fut présentée
en Christ, et il l’a haïe. Plus nous entrerons dans les détails, plus nous verrons
d’exemples de ce fait : ainsi nous le retrouvons dans les fils d’Aaron quant
à la sacrificature, dans ceux de David quant à une royauté obéissante ; dans
Nebucadnetsar quant au pouvoir suprême. Mais il nous suffit de signaler ici les
grands principes moraux de la chose, les trois degrés du péché, savoir, la convoitise,
la volonté sans frein ou la transgression, et la haine contre Dieu lui-même comme
Dieu de bonté. Le premier Adam, la chair, est totalement condamné. Un autre Adam,
le second homme, est suscité. Dieu n’attend plus rien du premier. Il sème (c’est
justement là la vérité présentée dans la parabole du Semeur : Il apporte quelque
chose par la parole de vie). Il ne cherche pas de fruit. Le figuier dans le jardin
du Maître, malgré toutes ses peines, ne fait qu’occuper inutilement la terre. Il
est coupé pour la foi, et le sera de fait. Il avait des feuilles mais pas de fruit,
et le jugement du Seigneur porte non pas seulement sur ce qu’il n’a pas de fruit,
mais il dit : « Que désormais aucun fruit ne naisse plus de toi à jamais ».
On dira qu’il s’agissait du judaïsme ; bien, mais le judaïsme était la chair
sous la loi. Et c’est sur cela que le jugement était prononcé ici. La chair a été
jugée — Adam et tout ce qui est provenu de lui. Non seulement le mauvais fruit
a été condamné, mais aucun fruit quelconque (que le Seigneur aurait pu attendre
par voie d’épreuve) ne devait plus jamais être produit. Le faux principe de tout
ce système consiste en ceci, qu’il cherche à reproduire
la justice du premier Adam sous la loi, au lieu de nous placer
dans le second entièrement et absolument, et de traiter le premier comme ruiné et
mort. Est-ce que je n’avais donc aucune responsabilité personnelle ? Sous la
loi, certainement pas, en tant que Gentil ; cependant j’en avais une. Le péché
a régné sur moi et la mort aussi. De là vient que Christ, par une grâce souveraine,
a été fait péché pour moi et qu’il est mort ; mais ce n’était pas pour rétablir
le vieil homme, après la mort, et une fois qu’il était mort, et pour lui conférer
la justice. C’était pour me placer dans une position complètement nouvelle, dans
l’homme céleste, lequel est ma justice ; pour me placer dans la justice de
Dieu, assis dans les lieux célestes en Christ. Christ est devenu la racine et la
source de vie de la race rachetée, et la première est entièrement mise de côté,
jugée, condamnée et morte. Christ est pour nous la justice de Dieu. Tout est entièrement
nouveau, bien que nous ne soyons introduits là personnellement que comme étant vivifiés
par la vie du second Adam, l’ayant pour notre vie.
C’est là la doctrine
spéciale de Paul : il n’y a pas même la pensée d’une justice de loi, acquise
pour nous par un autre. Il y a expiation pour le péché dans lequel nous sommes,
que nous avions commis comme étant dans le premier Adam mais, je le répète, aucune
justice à lui conférée ; rien, si ce n’est la clôture de son histoire, son
état de mort devant Dieu, dans lequel, en grâce, le Seigneur a pris sa place, quant
au jugement qui lui était dû. « Vous êtes morts à la loi par le corps du Christ
pour être à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les morts ». D’où
il ressort que, sous la loi, il n’y avait aucune connexion entre Christ et les pécheurs.
« À moins que le grain de froment ne tombe en terre et ne meure, il demeure seul ;
mais s’il meurt, il
porte beaucoup de fruit ». Nous sommes unis à Christ dans sa nouvelle position,
où il est l’homme juste à la droite de Dieu, après qu’il a été mort au péché une
fois, et il est vivant à Dieu. Mais si le grain de froment meurt seul, comme venu
au milieu de la famille du premier Adam, la mort est écrite sur tout ce qui est
d’Adam. Cela a cessé d’exister devant Dieu, si nous pouvons parler ainsi. Et lorsque
l’Esprit de Dieu parle, dans toute leur étendue, des bénédictions auxquelles nous
sommes appelés, il ne parle pas de nous comme d’hommes ayant vécu
dans le péché, ou comme étant condamnés
par la loi, ou comme ayant une vie dans laquelle ils avaient à garder la loi. L’homme
était mort, complètement mort dans ses offenses et dans ses péchés ; le Juif
était, non seulement un transgresseur, mais par nature un enfant de colère comme
les autres. Or quel est le premier objet présenté ? Christ mort (c’est-à-dire,
en grâce, placé là où nous étions), élevé au-dessus de toute principauté et puissance,
et ensuite nous « vivifiés ensemble avec lui ; ressuscités ensemble et
assis dans les lieux célestes en lui ». Au point de vue des conseils de Dieu,
il n’y avait, si je puis m’exprimer ainsi, plus aucun homme vivant. Il y avait l’homme
mort dans ses offenses et dans ses péchés, mais il y avait aussi un Christ mort
qui se trouvait là ; et comme Dieu l’a ressuscité, il nous a ressuscités aussi
avec lui, qui était descendu ici pour nous. Quand Dieu agit avec nous moralement,
comme avec des êtres responsables, il nous voit vivant dans le péché, transgressant
la loi, méprisant sa bonté.
C’est là la manière
dont le sujet est considéré dans l’épître aux Romains. Dans les Éphésiens, c’est
simplement une nouvelle création quand nous sommes morts. Pour rendre ceci un peu
plus clair, il y a deux manières dont je puis traiter le sujet des relations entre
Dieu et l’homme. Je puis prendre simplement les conseils de Dieu et commencer par
là. C’est ce qui se trouve dans les Éphésiens. Ou bien, je puis prendre l’état actuel
des hommes, comme enfants d’Adam responsables, et montrer comment la grâce répond
à cet état : le résultat en étant heureusement la confirmation de l’autre,
mais le point de vue est différent. Ce dernier est le point de vue de l’épître aux
Romains, savoir les voies de Dieu dans son gouvernement moral, satisfaites par la
grâce. Dans les Éphésiens, l’homme est présenté
comme mort
dans le péché. Tout est l’œuvre de Dieu du commencement à la fin.
Pour accomplir en grâce ce conseil béni, on
y voit Christ mort, et nous, morts dans le péché, sommes ramenés à Dieu, suivant
ces conseils, avec et comme lui. Dans les Romains, l’homme est démontré mort, mourant
sous les effets du péché et de sa condition morale comme être vivant et responsable,
enfant du premier Adam, et cette responsabilité, celle d’un pécheur qui s’est perdu
lui-même, est rencontrée par la grâce.
Mais avant de développer,
relativement au point qui nous occupe, le contenu de l’épître aux Romains, et cela
sous la lumière qu’y ajoute celle aux Éphésiens, je voudrais rassembler les déclarations
de l’Écriture quant à la justice, afin de voir jusqu’à quel point elle a affaire
avec la loi dans le cas d’un croyant. Naturellement un homme sous la loi ne pouvait
être juste qu’en l’observant. Mais est-ce par ce moyen (savoir, en légitimant la
justice légale en quelque manière que ce soit), est-ce ainsi que le croyant obtient
la justice ? — est-ce là son titre pour être dans le ciel ? Prenez Romains
3. Je lis au verset 21 : « Mais maintenant sans loi, la justice de Dieu
est manifestée ». Il n’est pas dit sans que l’homme l’accomplisse, et parce
qu’un autre l’a accomplie pour lui, mais à part de la loi entièrement (cwriV nomon).
Il lui est rendu témoignage par la loi et les prophètes, mais c’est une autre espèce
de justice, constituée indépendamment de la loi. « À celui qui ne fait pas
des œuvres » — eh ! bien, qu’est-ce qu’il y a à la place ? Serait-ce
ceci : mais qui croit en celui qui les a faites à sa place ? Point du
tout ; mais « qui croit en celui qui justifie l’impie ». Les choses
sont opposées. Mais il y a plus : la promesse d’être héritier du monde n’a
pas été faite à Abraham ou à sa semence, par la loi. Elle n’était pas sur ce principe.
Ce n’est pas non plus qu’elle fût sur ce principe et qu’un autre dût en accomplir
les exigences ; mais elle n’était pas du tout sur ce principe, ce n’était pas
par la loi. Chapitre 5:20 : La loi est intervenue. Chapitre 6:14 : Nous
ne sommes pas sous la loi,
mais sous la
grâce. Pourquoi donc faut-il qu’on l’accomplisse à ma place ? Chapitre 7:4 :
« Nous sommes morts à la loi par le corps du Christ ». Comment suis-je
tenu à l’accomplir, si je suis mort quant à elle, et si, par conséquent, elle n’a
plus domination sur moi ? De plus : « nous avons été déliés de la
loi, étant morts dans ce en quoi nous étions tenus ». Puis l’apôtre traite
de la puissance de la loi comme moyen de convaincre de péché, ce qui n’est pas mon
objet ici, mais ce dont je me propose de parler plus loin. De même, dans les Galates,
« tous ceux qui sont sur le principe des œuvres de loi, sont sous malédiction » ;
il n’est pas dit : tous ceux qui l’ont transgressée, tous ceux qui étaient
sous la loi, l’avaient fait. Mais c’est là la position de celui qui se trouve sous
la loi. Par la loi personne n’est justifié ; car le juste vivra de la foi ;
mais la loi n’est pas sur le principe de la foi : c’est-à-dire, notre justification
ne provient pas de ce principe, quel que soit celui qui puisse y répondre. Et comment
sommes-nous rachetés du seul effet possible de la loi, — savoir, de la malédiction ?
La malédiction est prise par un autre. Ce n’est pas à dire, que cette malédiction
soit détournée par le fait qu’un autre a accompli la loi ; il n’y a rien même
qui le donne à entendre. La foi étant venue, nous ne sommes plus sous un pédagogue.
Je n’ai rien à faire avec la loi, en tant que moyen d’obtenir la justice. Comment
est-ce qu’un autre pourrait être ma justice en l’accomplissant ? Il me faut
une justice ; mais je ne suis pas sous
la loi,
pour que la justice me soit demandée de cette manière. Si la justice est par la loi, Christ est donc
mort pour rien.
Comment aurait-on pu dire cela, si la justice vient réellement
par la loi, et que Christ l’eût accomplie dans sa vie afin d’être notre justice ?
Et remarquez que l’apôtre en appelle à sa mort. Christ est mort pour rien, si la
loi est le principe d’après lequel j’ai la justice ; au point de vue de la
foi, la nature même est morte en moi dans la mort de Christ, cette nature de laquelle
on aurait attendu la justice de la loi. Je suis crucifié avec Christ ; néanmoins
je vis, mais non plus moi, mais Christ vit en moi. Christ est-il sous la loi ?
S’il n’y est pas, je n’y suis pas non plus. Si, dit l’apôtre, je suis justifié par
des œuvres de loi, pourquoi ai-je renversé toutes ces choses ? Si je rebâtis
la loi après Christ, je me constitue moi-même un transgresseur, par le fait que
je l’ai abandonnée pour venir à Christ. Mais pour moi, par la loi, dit-il, je suis
mort à la loi (c’est-à-dire, non obligé par elle), afin que je vive à Dieu (ce que
personne sous la loi n’a jamais fait, car elle est faible par la chair) ; car sur le principe des œuvres de loi, nulle
chair ne sera justifiée,
soit Juif, soit chrétien, ou qui que ce puisse être,
ou qui que ce soit qui les fasse. Personne n’est justifié par des œuvres de loi.
Nous sommes placés sur un terrain entièrement différent, — morts et ressuscités
dans le second Adam. Nous sommes en la présence de Dieu à travers le voile déchiré.
Et encore : « Vous avez rompu vos liens avec Christ, vous tous qui vous
justifiez par la loi. Vous êtes déchus de la grâce ». C’est sur un autre principe.
Ce n’est pas : « Fais ces choses et tu vivras ». Quant à la marche,
la loi est mise de côté également. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes
pas sous la loi. S’ils étaient conduits par l’Esprit, ils allaient bien, cependant
ils n’étaient pas sous la loi. « Nous ne sommes pas enfants de la servante ».
Tout le système que je commente, et qui place l’homme sur le terrain de l’obéissance
légale, découle de ce qu’on n’a pas saisi ce que c’est que d’être en
Christ.
Mais nous allons traiter cette question en examinant l’épître aux Romains.
Ces citations offriront
non pas un passage particulier, difficile ou contesté, mais la pensée bien évidente
et souvent exprimée de l’Esprit. L’épître aux Romains à laquelle je reviens, va
donner le grand principe dont dépend tout ceci, et nous montrer comment le saint
passe de l’ancien état au nouveau : Voici ce que je trouve dans l’Écriture :
quand je lis dans les Éphésiens ce qui est dit des conseils
de Dieu, je ne trouve absolument rien de la loi. Tout est l’œuvre
de Dieu, et tout est en Christ, duquel il n’est pas même parlé comme vivant ici-bas,
mais qui est considéré premièrement comme mort, puis comme élevé, et les croyants
élevés en lui. Cette épître enseigne l’unité actuelle de tous les saints en lui,
dès qu’il a été délivré de la mort. Si je prends l’épître aux Romains, je trouve
l’homme responsable dans la chair, démontré coupable, non pas vu mort ; mais
dans une condition telle qu’aucun remède ne saurait la
rendre bonne en aucune manière ; puis la mort est introduite,
et là nous arrivons, pour ainsi dire, au commencement des Éphésiens, le tout ayant
rendu l’état de l’homme tout à fait évident. Dans les Romains, nous ne trouvons
pas même Christ exalté, si ce n’est dans un seul passage (mais qui ne s’applique
pas à ce point et confirme la vue que je présente). Nous n’y trouvons pas non plus
les conseils de Dieu quant à l’Église. Les résultats de l’union de ses membres sont
présentés dans un passage pratique. L’épître aux Romains place l’individu sur le
terrain de la justice, et ainsi sur celui de la vraie liberté en la vie, mais elle
ne remonte pas jusqu’à l’union du corps avec Christ. Aussi la mort et la résurrection,
qui supposent que l’homme a eu affaire au péché, sont le sujet de cette épître.
Après avoir annoncé que son but était la bonne nouvelle de Dieu, Paul la commence
en présentant, avec une puissance divine, le tableau de la méchanceté et du mauvais
état de l’homme, tableau aussi effrayant que vrai ; et effrayant par cela même
qu’il est vrai. La conscience du Gentil doit être brisée en présence de cet exposé
si simple et si vrai, qui dit les choses telles qu’elles sont ; et l’hypocrisie
du Juif aussi, hypocrisie mise à nu par le tranchant de la parole même, dont ils
se glorifiaient, doit, dans son irritation, chercher en vain à se cacher. Voilà
tout le monde coupable devant Dieu. Mais la grâce répond à ce triste état. Par des
œuvres de loi personne n’est justifié ; par la loi est donnée la connaissance
du péché. Mais maintenant la justice de Dieu est manifestée. Qu’est-ce que c’est
que cette justice ? La première idée, pour ainsi dire, qui nous soit donnée
de la justice de Dieu (Rom. 1:17) est fort abstraite. Nous verrons, dans d’autres
passages, par quel moyen elle est amenée et comment elle nous est appropriée ;
mais ici, je n’en doute pas, il est question de sa nature et de son caractère en
général. C’est la justice de Dieu, non celle de l’homme. Elle est de Dieu, c’est-à-dire
que, quant à son caractère, sa qualité, sa source, elle vient de Dieu, et non de
l’homme. Il s’agit ici de ce
qu’elle est,
non pas du comment
elle est cela. C’est une justice suivant cette manière-là, non
pas suivant la manière de l’homme. Elle vient de Dieu pour l’homme, non de l’homme
pour Dieu. En conséquence, elle a le caractère et les qualités de sa source, quel
que soit celui à qui il est donné d’en profiter. Il en est de même de la colère
de Dieu qui se révèle du ciel ; ce n’est pas la colère humaine, ni la justice
sur la terre, finissant là par sa nature et sa qualité, ni même la colère divine
exercée d’une manière terrestre, par des instruments terrestres. Elle est divine,
elle vient du ciel : Ce n’est pas de la
justice
de Dieu, comme d’un fait, d’une chose existante, qu’il est parlé ;
mais c’est d’une justice qui est
de Dieu,
— c’est cette qualité, cette espèce de justice-là. D’après cela cette justice doit
premièrement se trouver en Dieu lui-même, sans cela elle ne saurait avoir cette
qualité essentielle. De là vient que nous sommes selon Dieu
quant au nouvel homme, créé en justice et en vraie sainteté.
La justice qui est valide devant Dieu, sens que Luther et Calvin ont donné à cette
expression, est un sens complètement erroné, parce que, dans ce cas, la justice
légale, là où elle existerait, serait valide devant Dieu. Si elle était accomplie,
elle serait acceptée. L’homme vivrait en la pratiquant ; mais alors ce ne serait
pas la justice de Dieu, mais celle de l’homme : tandis que le point sur lequel
l’apôtre insiste dans cette expression, c’est qu’elle est de Dieu
et non de l’homme. Je voudrais encore faire remarquer ici, que
ce n’est pas une justice inhérente, — expression fort contestable, si tant est qu’elle
ait un sens juste quelconque. En effet, sur ce sujet, il y a plutôt contradiction
dans les termes. Cette expression « la justice » est bien, à la vérité,
employée pour désigner l’attribut moral qui est disposé à juger et à agir justement ;
au moins le terme « juste » l’est ainsi ; nous disons, par exemple,
un homme juste. Mais, en général, la justice
est un terme relatif ; c’est-à-dire qui se rapporte à la conduite envers
un autre. D’après cela, l’expression « justice inhérente » est une expression
très vague, tout comme une conduite inhérente
envers un autre serait évidemment une expression fort peu exacte. Cependant,
pour la prendre comme on l’entend, comme la qualité par laquelle l’homme est disposé
à être juste, bien que cela ne puisse pas être séparé de la justice dont il est
ici parlé (parce que si Christ est notre justice, il est en même temps notre vie ;
c’est une justification de vie), néanmoins nous n’avons rien à faire ici avec une
justice inhérente. C’est à la question de Job : « Comment l’homme pourrait-il
être juste devant Dieu ? » que répond l’épître aux Romains. Quand il est
dit que les Juifs cherchaient à établir leur propre justice, et qu’ils ne se sont
pas soumis à la justice de Dieu, il est clair que ce n’est pas là se soumettre à
une justice inhérente. Ainsi encore, quand il est dit : « Maintenant la
justice de Dieu est manifestée — afin de montrer sa justice dans le temps présent, »
ces paroles ne peuvent s’appliquer à une justice inhérente. C’est de la justice
devant Dieu que parle l’épître. Mais, plus loin, cette justice est considérée sous
une autre face, et par la raison même qu’elle est la justice devant Dieu, comme
étant appliquée à la personne qui doit être réputée juste. L’homme est réputé juste,
la justice lui est compté ou imputée. Ainsi lorsqu’il est dit que « la foi
lui fut comptée pour justice, » ce n’est pas la valeur spéciale et intrinsèque
de sa foi qui fut réputée justice en elle-même, puis imputée à lui ; mais c’est
lui
qui fut réputé juste, tenu pour juste
devant Dieu, à cause de sa foi. Reste le pourquoi et le comment. Celui qui croit
en Christ est justifié par la foi ; il est réputé juste ; cependant ce
n’est pas la valeur ou la force de sa foi qui est réputée comme étant en elle-même
équivalente à la justice, et puis imputée. Mais cela est dit aussi pour nous à qui
il sera aussi compté, si nous croyons (à nous qui croyons) ; mais c’est que
nous sommes réputés justice sur le terrain de la foi. C’est la condition de l’individu
aux yeux de Dieu. Dieu le considère comme juste, bien qu’il ne soit pas tel et qu’il
n’y ait absolument rien d’inhérent en lui, au moyen de quoi il puisse y avoir droit.
C’est une justice à lui imputée, nullement envisagée à part de lui ; mais c’est
sa position devant Dieu. On est dans la justice suivant le compte de Dieu, bien
qu’on ne le soit pas intrinsèquement. C’est pourquoi il est dit qu’elle est imputée
ou comptée. C’est en cela que consiste toute la différence. Les mots :
« justice imputée » ne signifient pas une certaine quantité de justice
à part de la personne, et ensuite à elle comptée dans le sens ordinaire du mot,
comme je compte quelque chose à quelqu’un ; mais c’est l’état ou la condition
dans laquelle Dieu voit la personne devant lui. Je prie le lecteur de remarquer
que c’est la force de l’expression scripturaire « justice imputée » que
j’examine ici, et non pas la doctrine de l’Écriture.
D’après tout ce que je viens de dire, il peut y avoir ou ne pas y avoir une quantité de justice en dehors d’une personne, et qui lui soit portée en compte. Mais le sens de justice comptée, c’est le caractère ou la qualité dans laquelle la personne paraît aux yeux de Dieu et non la cause pour laquelle elle paraît ainsi. Cela prouve que la justice n’est pas inhérente, car, dans ce cas, il n’y aurait plus lieu à la porter en compte. Il reste à prouver pourquoi l’homme est réputé juste.
C’est pour n’avoir
pas vu cela, qu’on a rencontré d’insurmontables difficultés dans l’examen de passages,
tels que celui-ci : « sa foi lui fut comptée pour justice » ;
car alors, si une certaine chose, dans sa valeur propre, a été portée en compte
à quelqu’un, ou à lui imputée, la foi était cette chose précieuse pour la valeur
de laquelle il était ainsi réputé juste, et de fait elle était inhérente. Ainsi
« bienheureux est l’homme, auquel Dieu impute la justice sans œuvres, disant :
« Bienheureux ceux dont les iniquités ont été pardonnées et dont les péchés
ont été couverts ; bienheureux l’homme à qui le Seigneur n’aura point compté
le péché ». Ce n’est pas simplement que Dieu ne lui compte pas la péché commis ;
mais il ne voit pas cet homme comme étant dans le péché, il le voit comme étant
dans la justice ; de l’innocence il n’en est pas question. Aussi il n’y a pas
dikaiwma lorsqu’il est parlé de justice
imputée, mais dikaiosunh ; c’est-à-dire,
non pas un acte ou une somme de choses faites, mais un état. Il est réputé comme
étant dans l’état de dikaiosunh. Dikaiosunh
lui est comptée. Comme l’expriment les Trente-Neuf Articles (*), « nous sommes réputés justes devant Dieu » ;
ainsi dans Rom. 4:3 : « cela lui fut compté pour justice ». Ici,
comme nous l’avons remarqué, ce ne peut être la valeur de quelque chose qui ait
été comptée à Abraham, mais bien l’état dans lequel il était réputé être. Ainsi
nous lisons (verset 11) : « Pour que la justice leur fût aussi comptée ».
Ici, il n’est pas parlé de ce qui doit être compté, et le passage montre aussi clairement
que possible que le sens de la phrase, « la justice leur fut comptée, »
est celui-ci : qu’ils furent réputés justes. J’ai déjà parlé des versets 21-23.
La foi est encore ici la chose imputée. Gal. 3:6 ; c’est toujours la foi qui
est comptée pour justice. Il y a onze passages dans l’Écriture qui parlent d’imputer
la justice ou de compter pour justice. Dans neuf d’entre eux la foi est comptée
pour justice ; et ici cela ne veut pas dire que ce soit la valeur de la chose
faite qui est comptée, autrement notre foi serait méritoire. C’est Rom. 4:3, 5,
9, 10, 22, 23, 24 ; Galat. 3:6 ; Jacq. 2:23. Les deux autres, où il est
dit que la justice est comptée ou imputée, sont Rom. 4:6, 11. Dans Rom. 4:6, c’est :
« Dieu compte la justice sans œuvres, en disant : « Bienheureux ceux
dont les iniquités ont été pardonnées et dont les péchés ont été couverts ».
Ici il est clair qu’il n’y a aucune chose extérieure et positive imputée ou portée
en compte à un autre, mais un homme est réputé avoir dikaiosunh. Le verset 11 nous conduit exactement au même résultat.
Les croyants d’entre les Gentils devaient être réputés justes, parce que la foi
avait été comptée à Abraham pour justice, lorsqu’il était encore incirconcis. Voilà
tous les passages. Un passage analogue (Rom. 2:26) présente le même sens, l’incirconcision
est comptée pour circoncision. C’est-à-dire l’homme est réputé circoncis, lors même
qu’il ne l’est pas. Ainsi, bien qu’une personne soit réputée être dans un état,
dans lequel elle n’est pas de facto,
[de
fait], un quantum
de justice accomplie,
et en dehors d’elle qui lui serait porté en compte, n’est pas le sens de justice
imputée. Cela indique l’état, aux yeux de Dieu, de la personne ainsi réputée juste.
La justice imputée à un homme, est la même chose qu’un homme réputé juste.
(*) note Bibliquest : Déclaration du 16° siècle exprimant la position doctrinale de l’église anglicane.
Vient ensuite la question : Comment et pourquoi l’homme est-il réputé juste ? C’est la justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ envers tous, Juifs ou Gentils, et sur tous ceux qui croient. Nous sommes « justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus, lequel Dieu a présenté pour propitiatoire, par la foi en son sang, afin de montrer sa justice dans le support des péchés précédents dans la patience de Dieu ; afin de montrer, dis-je, sa justice dans le temps présent ». Ici nous avons un principe très simple. Dieu est juste en remettant les péchés aux croyants de l’ancienne alliance ; péchés à l’égard desquels Celui qui préconnaissait toutes choses, avait exercé du support, à cause du sang de Jésus. Il avait supporté et pardonné ; et comment cela était-il juste ? C’est ce qui est maintenant prouvé et rendu manifeste par la mort de Christ. Il montre sa justice dans le temps présent. Il y a cette différence entre notre position et celle des patriarches, non dans la substance de la chose, mais dans notre état [status] devant Dieu, que nous sommes là dans une justice connue et révélée, et non pas dans l’espoir d’un support, quelque grande que soit la grâce qui nous l’accorde. Dieu est juste et justifiant. Qui est-ce qui est juste ? Dieu. Il y a là un principe de toute importance : la justice de Dieu veut dire, avant tout, la justice qui lui est propre ; sa qualité d’être juste. Ce n’est pas la justice de l’homme, ou même la justice positive d’un autre, consistant en une certaine quantité de mérite légal, mis sur quelqu’un. La justice, dont il est parlé, est celle de Dieu, Dieu étant juste, et en même temps cette justice est déclarée telle qu’il peut justifier les plus affreux pécheurs.
Mais on dira qu’il
faut une raison pour cela, quelque chose qui rende juste l’acte de pardonner et
de justifier. Parfaitement vrai. Le mot justice à un double sens : je suis
juste
, par exemple, en récompensant ou
en pardonnant ; mais cela suppose une raison adéquate qui rende juste l’acte
d’agir ainsi, cela suppose un mérite quelconque. Si j’ai promis quelque chose, ou
que quelque chose soit moralement dû, selon la justice, je suis juste en le donnant.
Ainsi pour que Dieu soit juste en pardonnant et en justifiant, il faut qu’il y ait
une raison morale adéquate pour qu’il agisse ainsi. Dans le pécheur évidemment il
n’y en a pas ; dans le sang de Christ il y en a une. Et Dieu l’ayant établi
pour propitiatoire, la foi en son sang est devenue le moyen de la justification.
Cela montrait la justice de Dieu en pardonnant. Ainsi accepté, je me tiens devant
Dieu sur le pied de sa justice. Ici nous avons des principes de toute importance ;
— la justice de Dieu est bien vraiment ce que les mots expriment, la justice qui
lui est propre. Il n’y a pas ici dikaiwma,
c’est-à-dire quelque acte ou quelque somme complète de justice obtenue par un acte
ou par une chose faite ; mais dikaiosunh,
la qualité, l’état moral ou l’habitude. Dieu est juste en cela. Ensuite cette justice
de Dieu est révélée ou manifestée en vertu du sang de Christ. Ainsi Dieu est juste
en pardonnant et en justifiant ; il est démontré tel relativement aux saints
du temps passé, qu’il a supportés avant que le sang fût répandu ; il est connu
comme tel à perpétuité, une fois pour toutes par la foi, maintenant que tout est
accompli et que la parfaite base de la justification a été déclarée. De plus, par
ce pardon (attendu que c’est par le sang, en sorte que Dieu est juste en l’accordant),
l’homme est justifié, c’est-à-dire réputé juste. C’est la rédemption, et la justice
de Dieu est sur tous ceux qui croient. C’est pour cela qu’ensuite (au chapitre 5),
il est dit : Nous sommes « justifiés par son sang ». L’homme est
pécheur, sans loi et sous la loi, et maintenant entièrement à part de la loi, cwriV nomon.
La justice de Dieu se déploie, en justifiant celui qui croit, par la rédemption
qui est dans le Christ Jésus, en vertu de la propitiation par son sang, et par la
foi en ce même sang. Dieu est juste et il justifie ceux qui croient en Jésus. On
a gagné un point immense quand on a compris que la justice de Dieu est la qualité
ou le caractère qui est en Dieu lui-même ; et un autre aussi qui n’est pas
de peu d’importance, à savoir que nous sommes justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption,
et que la
justice se révèle dans la rémission des péchés.
Tel est le témoignage
direct de Rom. 3 (comp. 4:6, 7). Mais cette justification par le sang est-elle tout ?
Non. Une partie très importante de l’épître reste encore, c’est la doctrine de la
résurrection. Voici comment elle est introduite. C’en était fait des Gentils, et
des Juifs sous la loi ; ils étaient mis de côté comme pécheurs. Mais ce n’était
pas le cas d’Abraham. Appelé d’entre les Gentils, Dieu l’avait accepté et ce n’était
certes pas sous la loi. Mais comment ? Lui aussi fut justifié par la foi. Mais
par la foi en quoi ? C’est là le second point important de l’épître. Or l’apôtre
n’abandonne pas la vérité, qu’en justifiant l’impie, le pardon a la pleine valeur
de réputer juste sans œuvres ; ni que la mort, la rédemption par le sang, est
le fondement de tout cela. Il nous donne le témoignage de David à cette grande vérité.
« À celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit en Celui qui justifie
l’impie » ; — remarquez cela : non pas qui substitue une autre justice
légale, à la place de la justice légale qui manque au pécheur, mais qui justifie
quelqu’un qui n’en a aucune, — « sa foi lui est comptée pour justice ».
Le point à remarquer est, que ce n’est pas une dette
, à cause d’œuvres quelconques qui l’aient méritée, mais que c’est
une grâce
envers celui qui n’en fait pas.
Maintenant il est évident qu’ici la force de l’argument est détruite, si ce sont
les œuvres d’un autre qui la méritent. Et quelle est la déclaration de David ?
Il exprime la béatitude de l’homme à qui Dieu compte la justice sans œuvres, cwriV ergwn.
Cela n’a rien à faire avec des œuvres de justice qui soient faites ou imputées.
Et quelle est cette déclaration ? « Bienheureux ceux dont les iniquités
ont été pardonnées et dont les péchés ont été couverts ». Et en qui croit-on
ici ? En Dieu qui justifie l’impie. Il répute le croyant juste, à part des
œuvres.
Mais j’ai dit que
ce n’est pas tout, et qu’Abraham est introduit pour amener un principe additionnel
de vérité, mais sans affaiblir le premier ; car de fait c’est sur celui-ci
qu’il est fondé ; tout comme le premier principe ne met nullement de côté le
principe additionnel. Bien loin de là, si nous ne saisissons pas ce que cette épître
va nous enseigner maintenant, la connaissance que nous aurons de notre position
devant Dieu sera extrêmement imparfaite. Mais avant de poursuivre ce second point,
il importe de rappeler au lecteur, que la base du pardon ou de la justification
que nous venons de considérer n’est pas une chose peu importante, qui nous ait été
acquise à peu de frais de la part de Christ. Quelque parfaitement
agréable qu’il fût au Père, en tout ce qu’il était, pensait
et faisait, cependant sa mort, dont nous parlons maintenant au point de vue de notre
justification, était, d’entre tout le reste, ce qui avait le caractère le plus profond
et la plus haute valeur. Il se donna lui-même pour la gloire de son Père comme pour
nous. « À cause de ceci, » pouvait-il dire, « le Père m’aime, c’est
que je laisse ma vie, afin que je la reprenne ». Nul acte de vivante obéissance
sous la loi, bien que tout fût parfait, ne s’éleva jamais à l’excellence de l’abandon
volontaire de lui-même à la mort, de l’acte de boire la coupe que le Père lui avait
donnée à boire. Mais il y avait encore un point à signaler, lequel est lié à ce
fait capital d’histoire éternelle. Christ est ressuscité pour notre justification,
comme il avait été livré pour nos offenses. C’était la foi d’Abraham aussi, quoique
dans une lumière encore bien faible. Ce n’est pas l’union avec un Christ exalté
dans le ciel. Ceci est la doctrine de l’épître aux Éphésiens, dans laquelle il n’est
rien dit d’Abraham. Mais Abraham crut que Dieu était puissant pour accomplir ce
qu’il avait promis. Nous
croyons qu’il
a
ressuscité d’entre les morts Jésus notre
Seigneur, et c’est pourquoi à nous comme à lui la foi est comptée pour justice.
Ainsi donc, comme le sang de Christ était l’objet mis devant nous en tant que pécheurs,
comme ce par quoi, moyennant la foi en Christ, nous étions pardonnés, et justifiés,
en même temps que par là la justice de Dieu était révélée, de même maintenant la
résurrection est posée comme fondement et les chapitres suivants sont basés sur
cette vérité, qui, naturellement, suppose toujours la mort. Cela nous porte plus
loin que la pensée de l’effusion du sang. Cela pose la base sur laquelle nous sommes
absous et rachetés. Cela nous place devant Dieu dans une position claire et nette,
en même temps que toute nouvelle. Je crois en Celui qui a ressuscité Jésus ;
c’est-à-dire, je crois que Dieu parfaitement satisfait en justice, et glorifié par
le sacrifice de Christ, l’a, en témoignage de cela, ressuscité et lui a donné une
place, comme vivant à lui, dans la résurrection, le péché étant ôté,
nos offenses pour lesquelles il avait été livré étant ensevelies
dans son tombeau, et nous faits de nouveau vivants ici-bas par la puissance de sa
vie, dans une condition entièrement nouvelle, dans la faveur de Dieu, grâce présente
dans laquelle nous sommes,
nous réjouissant
dans l’espérance de la gloire de Dieu qui a été parfaitement glorifié par Christ.
Je dis, ou plutôt l’apôtre dit, « dans laquelle nous sommes
, »
parce
que ce n’est plus à présent simplement comme auparavant, être absous du
péché, mais c’est la position nouvelle
dans laquelle nous sommes, comme étant absous. « Ayant été,
[car c’est là la force du mot], ayant été justifiés sur le
principe de la foi, nous avons (*) la paix avec
Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, par lequel nous avons eu accès aussi, par
la foi, à cette faveur, dans laquelle nous sommes ». Nous marchons ainsi en
nouveauté de vie. Nous ne sommes pas vus ici comme ressuscités avec
Christ. Il est ressuscité, en sorte
que nous sommes justifiés, que nous avons un fondement certain d’assurance, et que
nous sommes vivants à Dieu par lui.
(*) Quelques-uns lisent : « Ayons la paix ». Si c’est ainsi, cela ne ferait que donner plus de force à la vérité.
On met en doute si
la doctrine de la justice imputée ne se trouve pas ébranlée, lorsqu’elle est envisagée,
ainsi que je le fais, comme en contraste avec une justice vivante et inhérente en
nous. En aucune manière. Il est bien vrai que Christ est notre vie, et que nous
avons reçu une vie qui en elle-même est sans péché, et que, considérés en tant que
nés de Dieu, nous ne pouvons pécher parce que nous sommes nés de Dieu. C’est une
vie sainte en soi comme née de lui. Mais, outre cela, nous avons la chair, quoique
nous ne soyons pas dans la chair ; et le résultat pratique relativement à notre
responsabilité quant aux œuvres faites dans le corps, ne répond pas, même quand
nous avons cette nouvelle vie, aux justes demandes de Dieu, si nous avions la prétention
de présenter ces œuvres comme telles. C’est-à-dire que ce n’est pas notre renaissance
qui constitue la justice. Il nous faut, et nous avons une justice parfaite à part
de notre vie, quoiqu’elle soit dans Celui qui est notre vie. Christ nous a été fait
sagesse, et justice, et sanctification et rédemption. Personne ne peut ni ne doit
avoir une paix solide et assurée par aucun autre moyen. C’est dans toute la perfection
de Christ, sans aucune diminution de sa valeur, que nous sommes acceptés. C’est
selon les délices que Dieu trouve dans son obéissance, que nous sommes reçus. Ce
que nous avions fait, comme enfants d’Adam, il l’a pris, en grâce, sur la croix,
et l’a entièrement ôté. Et ce qu’il a fait est notre acceptation auprès de Dieu.
Cela est nécessaire pour nous, autrement nous n’avons point de justice. Cela devient
notre joie, parce que nous entrons, comme en étant les objets immédiats, dans les
délices que Dieu trouve dans son Fils. Ce dont l’Écriture ne
parle pas,
c’est d’un certain
quantum
de justice légale, qui nous serait
attribuée, parce qu’étant sous la loi nous y avons manqué ; car nous ne sommes
pas sous la loi. C’est une doctrine contraire à la sainteté, parce que ce n’est
pas là l’expiation par un Sauveur béni, supportant la malédiction pour les transgressions
de la loi par ceux qui étaient sous la loi, mais que cette doctrine permet des manquements
à cette loi par le fait qu’un autre l’accomplit. Autre chose est de faire l’expiation
du péché, et autre chose, de voir son propre devoir qu’on a négligé, accompli de facto
par un autre. D’ailleurs, quand
cela serait, et par qui que cela fût fait, ce serait toujours une justice humaine
et légale.
Aussi l’apôtre dit : « N’ayant pas ma justice qui
est de la loi, » quelque parfaite qu’on la suppose ; car elle ne pourrait
être et ne serait en effet rien de plus que celle de l’homme ; « mais
la justice qui est de Dieu, » une autre espèce de justice. Mais n’ai-je pas,
ou du moins quelqu’un sous une loi n’a-t-il pas négligé son devoir ? Hélas !
oui, mais cela a été expié (quoi ! donc, dirai-je en passant : et aussi
accompli par un autre, et si cela
a été accompli par un autre, quel lieu y avait-il à l’expier ? Tout le système est essentiellement faux), et je suis
placé dans une position entièrement nouvelle, comme totalement mort ; tout
l’être et toute la nature dans lesquels j’étais, sont mis de côté, puisque Christ
est mort pour moi, comme y étant, et ainsi toute ma condition, tout mon être devant
Dieu, comme étant dans le premier Adam, est mis de côté. JE NE SUIS PAS DANS LA
CHAIR, dans ma position adamique à laquelle
la loi s’appliquait.
Et j’ai un état [status] entièrement nouveau devant Dieu,
en résurrection, en vertu de cette œuvre de Christ. C’est le Christ ressuscité qui
est le modèle et le caractère de mon acceptation, comme il en est la cause. Comme
lui est, je suis, moi aussi, dans ce monde ; et cela par une réelle et vivante
possession de sa nature, en même temps que par la foi en lui, en sorte que mon acceptation
est inséparable de la sainteté de vie, en tant que je suis en quelqu’un qui est
mort au péché et vivant à Dieu, et que cependant cette même acceptation repose,
quant à la justice et à la paix, sur la perfection de ce qui est devant Dieu pour
nous. De là vient qu’elle est appelée justification de vie. De là vient aussi que
notre responsabilité n’est pas maintenant de réparer les manquements du vieil ou
premier Adam. Je suis complètement hors de lui, et comme en parfaite et absolue
acceptation dans le second Adam, devant Dieu, je suis appelé à me livrer moi-même
à Dieu, comme d’entre les morts étant fait vivant. La chose vieille est passée,
expiée (tellement que Dieu est glorifié dans sa majesté et dans sa justice), mais
ôtée entièrement. C’était à cela
que la
loi s’appliquait, et c’est pourquoi elle était faible par la chair ; mais mon
premier mari, la loi (si j’avais été sous sa puissance comme un Juif l’était, et
comme plusieurs s’y mettent en pratique), a passé, non parce que son autorité est
détruite, mais parce que Christ est mort sous sa malédiction. Cette autorité est
ainsi, au contraire, pleinement établie en ce que Christ y a répondu dans la mort ;
mais alors, ainsi, par le corps de Christ, j’en suis délivré, étant mort dans ce
en quoi j’étais tenu, afin que je serve, non pas en vieillesse de lettre, mais en
nouveauté d’esprit. Au lieu de satisfaire aux exigences de mon ancienne condition
sous la loi, j’en suis sorti, Christ ayant porté la malédiction méritée, de manière
à établir son autorité, et je suis passé à un autre, — à Christ — devant Dieu, comme
quelqu’un qui est vivant à Dieu par lui, Dieu ayant été parfaitement glorifié.
C’est la doctrine
de Romains 5, 6, 7, fondée sur le chapitre 4 ; les résultats étant pleinement
développés au chapitre 8. On verra que tout
le fondement
en est posé dans la mort, et non dans la vie de Christ sur la terre.
Voyez chapitre 5:6-11. Tout est attribué à la mort et cela de la manière la plus
positive. La mort et l’effusion du sang sont le thème de ces chapitres ; seulement
la conclusion qui en est tirée par le précieux raisonnement du Saint-Esprit (qui
argumente toujours non de ce que nous sommes à ce que Dieu doit être, mais de ce
que Dieu est et a fait, à ce qui doit être pour nous ; comme quelqu’un qui
révèle en grâce le fera toujours), c’est que, à
fortiori,
nous serons sauvés
par sa vie, comme étant maintenant ressuscités, — sa vie, non pas avant la mort,
mais en résurrection, — que nous serons sauvés de la colère à venir. À la fin du
chapitre, la loi est mise en contraste avec tout ceci, quand il est question de
la justice. Je reviendrai là-dessus dans un instant. Je continue à montrer les preuves
de la vérité de notre nouvelle position dans les chapitres cités : le chapitre
5, a appliqué la résurrection à la justification, fondée, comme nous l’avons vu,
sur la mort. Le chapitre 6 l’applique à la vie. Si c’est l’obéissance d’un seul
qui justifie, nous pouvons faire
ce que nous voulons, dit l’adversaire de la grâce. Non, dit l’apôtre, vous êtes
justifiés parce que vous êtes morts, et vous avez maintenant à marcher en nouveauté
de vie. Comment un homme mort au péché (et c’est le moyen par lequel vous avez la
justification et la vie), peut-il vivre dans le péché ? S’il le fait, il n’est
pas mort, il est dans le premier Adam, il n’a aucune part en Christ ; car nous
sommes baptisés pour sa mort,
et c’est
dans la résurrection que nous avons la vie. Dans le chapitre 7, cette mort est appliquée
à la loi. La loi a de l’autorité sur l’homme aussi longtemps qu’il vit ; mais
nous ne sommes pas en vie, nous sommes morts. En un mot, Christ est vivant pour
moi devant Dieu, et je suis justifié, mais comme ayant été mort, et c’est ainsi
que j’ai place dans cette bénédiction. De là vient que je suis mort au péché ;
et de plus, je ne suis plus vivant dans la nature à laquelle s’appliquait la loi,
c’est pourquoi il dit en Rom. 7 : « Quand nous étions
dans la chair ». Je suis marié à un autre ;
je ne puis pas avoir deux maris à la fois, Christ et la loi. Mais ce n’est pas en
affaiblissant le premier mari ; rien n’a glorifié autant la loi que la mort
de Christ, sous sa malédiction. Mais si j’ai été sous elle, je suis mort sous elle
dans le corps de Christ, et ainsi mis en liberté. « Par la loi, je suis mort
à la loi ».
Je n’entre pas dans
le précieux et magnifique développement de cette vraie liberté devant Dieu qui nous
constitue libres du péché, et dans la céleste sécurité qui l’accompagne, Dieu fermant
la porte sur nous comme il le fit pour Noé ; non qu’il ne fût infiniment doux
de le suivre, mais parce que je dois me borner à mon sujet. On peut voir le caractère
de la délivrance au chapitre 8:1-11. Là l’Esprit est vie. De là jusqu’au verset
28, il est l’Esprit de Dieu considéré personnellement ; la source de la joie ;
le consolateur dans les afflictions qui découlent de cette joie elle-même, dans
un monde tel que celui-ci. C’est Dieu en
nous.
Du verset 28 à la fin, c’est la sécurité et les résultats glorieux et assurés, provenant
de ce que Dieu est pour
nous. De là vient
qu’il n’est pas parlé ici de la sanctification de la vie, — cela est opéré en nous.
Qu’est-ce donc que
la justice de Dieu, et comment est-elle décrite ? Comment y avons-nous part ?
Comment la justice nous est-elle imputée. Il est dit que nous sommes justice de
Dieu en Christ (2 Cor. 5). L’apôtre parle d’avoir la justice qui est de
Dieu (Philip. 3). Mais il n’est pas dit
que la justice de Dieu nous est imputée, et l’expression la justice de Christ n’est
pas une expression scripturaire, lors même qu’aucun chrétien ne doute que Jésus
ait été parfaitement juste. Cependant l’Esprit de Dieu est parfait en sagesse, et
il serait étrange que ce qui est la base nécessaire de notre acceptation ne fut
pas clairement exprimé dans l’Écriture. Un seul passage semblerait le dire, c’est
Rom. 5:18. Mais le lecteur remarquera que là il y a : c’est « par une
seule justice », et non : « par la justice d’un seul ; »
puis le mot rendu par « justice » est dikaiwma
(*). Il ne peut y avoir le moindre doute que ce
ne soit la vraie manière de rendre le passage. Quand l’apôtre veut dire,
« par l’offense d’un seul, » versets 16 et 17, il se sert d’une forme
différente de celle qu’il emploie pour « une seule offense, » verset 18.
La théologie peut en faire « la justice d’un seul, » mais le grec ne le
fait pas.
(*) C’est ainsi que toutes, nos versions françaises ont traduit. Le mot grec que nous citons dans le texte, est rendu, dans la Version suisse par « justification » ; dans Rilliet, par « acquittement » ; dans la Version nouvelle, par « justice accomplie » (Traducteur).
Quant à l’expression
« la justice de Dieu, » elle est employée si souvent, qu’il n’est pas
nécessaire d’indiquer les passages. Or, ce n’est pas en vain que le Saint-Esprit,
dans un sujet aussi important, n’emploie jamais l’une des expressions :
« la justice de Christ, » et emploie constamment l’autre, c’est-à-dire
« la justice de Dieu ». Par là nous apprenons à connaître le courant des
pensées de l’Esprit. La théologie emploie toujours
ce que le Saint-Esprit n’emploie jamais ;
et elle ne sait que faire de ce qui est la pensée et l’expression de l’Esprit.
Assurément, il doit y avoir erreur dans toute la manière de penser de la théologie
à ce sujet.
Je suis convaincu
que cela provient des notions théologiques sur la loi. La loi est pour le premier
Adam, pour les iniques. L’apôtre nous le dit expressément. La justice est dans le
second. Christ est né sous la loi ici-bas, afin qu’il rachetât de cette condition
ceux qui y étaient ; en portant la malédiction qu’ils avaient encourue. On
nous dit que la loi est l’expression [la copie
]
de la pensée divine. Je le nie entièrement et absolument. Elle est l’expression
de ce que la créature devait être. Est-ce que Dieu peut, disons-le en toute révérence,
est-ce que Dieu peut aimer Dieu de tout son cœur ou son prochain comme lui-même ?
C’est tout simplement un non-sens. Ces docteurs de la loi n’entendent ni ce qu’ils
disent, ni ce sur quoi ils insistent. La loi n’est pas donnée pour le juste, mais
pour les iniques, et n’a jamais rendu
juste
qui que ce soit au monde. Elle est juste, mais elle a été donnée à des pécheurs
quand ils étaient dans leurs péchés, et jamais, comme loi, à qui que ce soit d’autre.
Nous ne parlons pas ici de Christ venant en grâce sous la loi. Elle est intervenue
[pareishlqen],
elle s’est placée entre la promesse et son accomplissement en Christ,
afin que
l’offense abondât. C’est Christ,
l’image du Dieu invisible, qui est l’expression, la copie, si vous le voulez, de
la pensée divine. La loi est une règle imposée. Tu
aimeras.
Est-ce là une
copie de la pensée de Dieu ? Il aime souverainement, lui. Christ est né, ici-bas,
sous la loi, et sans doute, il a été parfait dans cette position, — mais dans ce
caractère, il fut, et il est demeuré seul.
Mais il était Dieu manifesté en chair, et ainsi l’image du Dieu invisible.
Celui qui l’avait vu, avait vu
le Père. Il était amour, et il était sainteté. Assez saint dans son être, il a pu,
étant au-dessus du péché, aimer les pécheurs, — et de plus, ce que la loi ne fait
pas, ce qu’elle ne peut et ne devait pas faire, ce dont elle ne sait rien dans sa
nature, — il s’est donné lui-même pour des pécheurs, ce à quoi la loi n’entend rien,
car elle ne veut pas de pécheurs du tout, si ce n’est pour les maudire. De là vient
que, quand il est question de la pratique chrétienne, nous devons être « imitateurs
de Dieu comme de bien-aimés enfants », — « laisser nos vies pour les frères ».
Qu’est-ce que la loi a affaire avec cela ? elle n’en sait rien du tout. C’est
contre la doctrine de Paul tout entière, et contre celle de la justice de Dieu,
que s’élèvent ces docteurs de la loi.
Où est donc et
en quoi consiste la justice de Dieu ? La justice de Dieu consiste en ceci,
qu’il est parfaitement conséquent avec sa propre nature, parfaite et bénie ;
et cela (aussi est-il dit : « si notre injustice constate la justice de
Dieu ») dans ses voies envers les autres, relativement à nous maintenant.
« L’Éternel juste aime la justice, ses yeux contemplent l’homme droit. Dieu
est un juste juge, et Dieu s’irrite tous les jours. Car tu n’es pas un Dieu qui
prennes plaisir à la méchanceté ; le méchant ne séjournera point chez toi.
Ô Dieu de ma justice ! puisque je crie, réponds moi » (Ps.
11:7 ; 5:4 ; 4:1). Le psaume premier commence par cette grande vérité.
Aussi, quand il viendra, il jugera le monde habitable en justice et les peuples
en équité. Il en est de même des psaumes 97, 98, 99, et d’une quantité d’autres.
On dira que la justice dont il est ici parlé, bien qu’elle soit en principe essentielle
à l’être de Dieu, est cependant appliquée à la loi : je l’admets, et c’est
pour cela que l’instruction qui y est renfermée, aboutit au gouvernement de ce monde,
et que jusqu’à ce que l’ordre y ait été introduit par la puissance, l’état des choses
embarrassera ceux qui y cherchaient la justice, quand ils voyaient la prospérité
des méchants. Nous sommes appelés à une autre position, à une position céleste,
et, comme Christ, à faire le bien, à souffrir en le faisant et à l’endurer.
« Cela est digne de louange devant Dieu ». Mais il n’est jamais dit que
l’observation de la loi soit un titre pour le ciel, encore moins pour être assis
à la droite de Dieu. Moralement, — non pas personnellement, cela va sans dire ;
mais quant à la qualité de notre justice nous avons un titre pour être là. Ainsi,
si, d’un autre côté, quant au péché « nous n’atteignons pas à la gloire de Dieu »,
cependant
« nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu ».
Et Christ dit : « La gloire que
tu m’as donnée, je la leur ai donnée, afin que le monde connaisse que tu les as
aimés comme tu m’as aimé ». La justice est montrée dans la punition des méchants
et dans le fait que le monde ne voit plus Christ. Telle est la solennelle réponse
à la vaine suffisance d’un amour qui nie la justice, et fait de l’amour l’indifférence
pour le péché. Mais je ne m’arrêterai pas maintenant sur cette solennelle application
de la justice, savoir que la vengeance appartient à Dieu, parce que cela ne rentre
pas proprement dans le sujet que je traite. Comment, pour ce qui nous concerne,
et selon la révélation chrétienne que nous en avons, cette justice est-elle démontrée ?
Dans la résurrection de Christ, sans aucun doute. Mais il y a plus encore. Il convaincra
le monde de justice [c’est-à-dire, il démontrera la justice au monde], parce que
je m’en vais à mon Père. Dieu a montré sa justice, en plaçant Christ, comme homme,
à sa droite. C’est là que, plus pleinement encore que la chose n’aura lieu dans
son gouvernement direct (quoique naturellement elle y soit parfaite aussi), c’est
là que la justice de Dieu est manifestée. Christ avait droit à être là et il y est.
La justice est dans le ciel, elle est divine, elle est un titre à la gloire et elle
est dans l’homme. Voilà ce qu’il nous faut, ce qui est à nous. Mais pourquoi est-ce
la justice que Christ y soit ? Il y a droit comme Fils. Il était là avant que
le monde fût. Mais ce n’est pas ici notre sujet.
Voyons comment il
en parle. Premièrement, il dit, Jean 17 : « Père, glorifie ton Fils, afin
que ton Fils aussi te glorifie ». Ceci, je le laisse de coté, parce que c’est
son titre personnel, quelque juste et bénie que soit sa demande, laquelle caractérisait
sa position, et qui est ainsi des plus intéressantes pour nous. Mais il ajoute une
seconde raison : « Je t’ai glorifié sur la terre, j’ai achevé l’œuvre
que tu m’as donnée à faire. Et maintenant glorifie-moi, toi, Père, auprès de toi-même,
de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que le monde fût ». Et quand
est-ce que cela a été fait ? Jean 13:31 nous dit : « Lorsque Judas
fut sorti, Jésus dit : Maintenant
le
Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié
en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même, et incontinent il le glorifiera ».
Il n’attendra pas jusqu’au moment du gouvernement public du monde, et jusqu’à ce
que son apparition du ciel le glorifie suivant le Psaume 8, mais ce sera incontinent,
quand il dit : « Assieds-toi à ma droite jusqu’à ce que
j’aie mis tes ennemis pour le marchepied de tes pieds ».
Il est là couronné de gloire et d’honneur, pendant que toutes choses ne lui sont
pas encore assujetties. Mais pourquoi était-ce justice, de faire cela ? parce
que le Seigneur y avait droit, qu’il avait droit à être glorifié comme Fils de l’homme
(bien qu’il eût été dans la gloire, comme Fils, avant que le monde fût) ; parce
que Dieu
lui-même, dans sa nature et son
être moral, avait été glorifié en lui, et que, par conséquent, lui avait droit à
être glorifié en Dieu. Nous avons vu quand cela a eu lieu. « Maintenant le
Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui ». La gloire céleste,
auprès de Dieu, en était la juste conséquence, selon ce qu’il dit :
« Si Dieu est glorifié, Dieu le glorifiera en lui-même ». Mais comment
cela ? Certes c’était une chose glorieuse, pour un fils d’homme, de maintenir,
et non pas simplement de maintenir, mais d’établir la gloire de Dieu. Sans doute,
il a dû être beaucoup plus que cela, pour pouvoir le faire. Toujours est-il, selon
qu’il nous le dit lui-même, que c’est comme tel qu’il l’a fait. Et quelle grâce
précieuse et infinie pour nous qu’il en soit ainsi ! Plus nous pèserons ce
qu’a été la croix, plus nous verrons combien Dieu était juste en ressuscitant Jésus
et en le plaçant à sa droite. Le péché était entré, le désordre était dans l’univers,
le gouvernement de Dieu était inintelligible, les anges, en conflit dans la création
de Dieu, étaient les témoins des progrès du mal. Si Dieu jugeait en justice et détruisait
tous les méchants, il n’y avait pas d’amour. S’il les épargnait, il n’y avait pas
de justice. Si tout était restauré, c’était simplement défaire le mal ; si
tous étaient glorifiés, c’était le sanctionner. Où aurait été sa vérité, qui avait
dénoncé la mort au transgresseur ? Que devenait sa majesté qui avait été foulée
aux pieds ? Par le péché, tout le caractère de Dieu était mis en question.
Le Seigneur s’offre lui-même, selon les conseils de Dieu, pour la gloire de son
Père. Sa vérité est maintenue. Les gages du péché, c’est la mort : la preuve
absolue en est donnée. Les gages du péché ont été payés par le Fils de Dieu lui-même.
Personne n’échappe autrement que par sa mort, lui mourant à leur place, lui, le
Fils de Dieu.
La majesté de Dieu
a été sauvegardée, de telle manière qu’aucune autre chose n’eût pu le faire. Christ
s’est dépensé lui-même et s’est soumis à la colère pour la soutenir. La justice
de Dieu a été glorifiée dans le complet jugement du péché, et néanmoins son amour
pour le pécheur a été déployé, comme aucune autre chose n’aurait pu le faire. Quelle
scène pour l’univers moral ! Rien dans toute l’histoire créée qui en approche
ou qui lui ressemble. Les choses qui sont ont été créées et peuvent être détruites,
mais ceci demeure, justifiant ce que Dieu est pendant toute l’éternité. Telle fut
la croix. Là le fils de l’homme fut glorifié, et Dieu fut glorifié
aussi. C’est pour cela qu’il a glorifié Christ en
lui-même, qu’il l’a placé à sa droite. C’était justice. Aucune gloire parmi les
hommes n’eut été une récompense proportionnée au fait d’avoir glorifié Dieu lui-même.
La vraie récompense d’avoir glorifié Dieu, c’était la gloire de Dieu. C’est là que
le Seigneur est entré, là où il était déjà avant que le monde fût. C’est là ce qui
manifeste la justice divine, savoir l’acte de faire asseoir le Fils de l’homme à
la droite de Dieu. Comme je l’ai dit, c’était la justice même de Dieu. Mais pour
que cela fût justice, il fallait un titre mérité, un droit à être là ; eh !
bien, ce que Christ a fait lui a donné ce droit. Mais cela a été fait pour nous,
pour tous ceux qui ont la foi de Christ, — cet acte de glorifier Dieu au sujet du
péché. C’est relativement à notre péché qu’il l’a fait. C’est pourquoi la valeur
de l’œuvre nous est imputée : Dieu nous reçoit justement dans sa gloire comme
il a reçu Christ, car il l’a reçu en vertu de l’œuvre accomplie pour nous, — ainsi
nous en lui. Nous sommes faits justice de Dieu en lui, car en nous bénissant de
cette manière céleste et glorieuse, en nous justifiant, il ne fait que donner l’effet
justement dû aux droits de Christ sur lui. Relativement à nous, c’est pure grâce,
mais c’est également la justice de Dieu. Ainsi nous voyons que toute la valeur de
l’œuvre de Christ nous est comptée, et comptée pour justice. Il a été fait péché
pour nous, lui qui n’a pas connu le péché, afin que nous devinssions justice de
Dieu en lui. Est-ce que son obéissance à Dieu dans sa vie n’a rien à faire avec
ceci ? Ce n’est pas ce que je dis. Avant tout, « il n’a pas connu le péché, »
c’est ce qui était absolument nécessaire, pour qu’il put être fait péché ;
mais la vérité est que son obéissance est considérée comme un ensemble de condition
morale ou de perfection dans laquelle il fut agréable à Dieu. Il fut, par excellence,
l’homme obéissant, comme Adam avait été le désobéissant. Et quoique son obéissance,
dans sa vie, ne fût pas pour le péché, elle faisait partie de cette agréable odeur,
qui s’éleva à Dieu, et dans laquelle nous sommes acceptés. À la croix, cette obéissance
fut finalement mise à l’épreuve et trouvée parfaite. C’était là l’homme parfait,
et dans des circonstances de telle nature qu’il y fut toujours seul, mais parfaitement
agréable à Dieu. Il avait entrepris l’obéissance, elle était son devoir ; mais
ce devoir, il l’accomplit, et de manière à glorifier Dieu quoi qu’il put lui en
coûter ; mais il était seul et il est demeuré seul, afin qu’il put alors prendre
sur lui la condition de péché de l’homme, et en cela glorifier Dieu. Relativement
à Dieu, ce n’est pas le caractère de Dieu qu’il maintenait en cette position, mais
le caractère d’un homme parfait. Le caractère de Dieu, il l’avait manifesté pendant
sa vie. Lui-même était Dieu ; mais cela s’adressait à l’homme, ce n’était pas
une satisfaction à Dieu pour l’homme. Il avait pris en main la cause de l’homme,
comme étant né de femme ; il avait pris le résidu d’Israël, comme étant né
sous la loi. Il fut fait péché pour réconcilier l’un, et il porta la malédiction
de la loi pour en racheter l’autre, et jamais il n’amènera sous la loi ceux qui
sont sans loi. En tant qu’homme vivant, les pécheurs n’avaient aucune part en lui
ni avec lui. Il demeurait seul. Comme homme mourant, il répondait à leur état. Là
ils pouvaient venir par la foi. « Et moi, si je suis élevé de la terre, j’attirerai
tous les hommes à moi ». C’était lorsqu’il dit : « L’heure est venue
pour que le Fils de l’homme soit glorifié. — À moins que le grain de froment ne
tombe en terre et ne meure, il demeure seul, mais s’il meurt, il porte beaucoup
de fruit ». C’est en mettant entièrement de côté le vieil homme, toute sa condition,
toute son existence devant Dieu, que nous atteignons notre
place devant Dieu, et non pas en gardant la loi pour
le vieil homme ; car autrement
il nous faudrait le conserver en vie, ce qu’à Dieu ne plaise. Je vis
uniquement par le second Adam, avec
lequel j’ai été crucifié ; néanmoins, je ne vis plus moi, mais Christ vit en
moi. Mais alors, dans le nouvel homme, je ne suis pas sous la loi, ainsi il n’est
pas question de l’accomplir pour moi, parce que je suis déjà accepté et que j’ai
la vie. Il ne peut pas y avoir de : « Fais cela et tu vivras
».
Je suis, selon que même Luther l’exprime, je suis Christ devant Dieu.
Si la justice est par la loi, Christ est donc mort
pour rien. Mais si Christ a accompli la loi pour moi, la justice
vient réellement par la loi, et Christ est mort pour rien. La loi s’applique à la
chair, elle est faible par la chair ; elle établirait, si elle le pouvait,
la justice du premier homme. Mais je ne suis pas dans la chair du tout, — je suis
en Christ.
Mais il nous faut
revenir sur quelques-uns des détails du chapitre 5 aux Romains. Comme nous l’avons
vu, le sujet que traite l’apôtre est la mort, afin d’avoir une place, une manière
d’être complètement nouvelle
dans la résurrection.
Mais ceci va au delà des limites de la loi ; car l’homme a péché et mourut
quand il n’en avait aucune. « La mort a régné depuis Adam jusqu’à Moïse, même
sur ceux qui ne péchèrent pas selon la ressemblance de la transgression d’Adam,
qui est la figure de celui qui devait venir ». Ce passage a fort embarrassé
les théologiens, parce qu’ils n’ont pas compris que c’est tout simplement une citation
d’Osée 6:7 : « Eux (Israël), comme Adam (les hommes), ont transgressé
l’alliance ». Adam était sous une loi, non pas, il est vrai, sous :
« Fais cela et tu vivras, » comme M. Molyneux le dit si malencontreusement,
mais sous : « Fais cela et tu mourras, toi qui es vivant ». Israël
était sous la loi de : « Fais cela et tu vivras, » quand il était
mort, comme l’implique un sérieux examen des termes. Mais entre Adam et Moïse il
n’y avait pas de loi, il n’y en avait ni de l’une ni de l’autre espèce ; cependant
dans cet intervalle, les hommes péchèrent et moururent. D’après cela, il nous faut
remonter aux têtes des deux systèmes, — le premier et le second Adam, non pour amender
le premier par le second, mais pour, au moyen de la mort, substituer l’un à l’autre.
Je ne parle pas des personnes auxquelles cela est appliqué, mais de la nature abstraite
de l’acte. Adam pèche, il est désobéissant, il est chassé d’un paradis terrestre,
et devient la souche ou la tête d’une race perdue, condamnée, pécheresse. Le second
Adam obéit, glorifie Dieu en justice, est reçu dans le ciel, et devient la souche
ou la tête d’une nouvelle race justifiée. Dans l’un et l’autre cas, l’acte causatif
de la condition tout entière était
accompli, avant que les conséquences en eussent passé sur ceux qui étaient placés
sous cet acte. Ce n’est pas une carrière d’action sur le terrain du premier homme,
qui, étant accomplie par le second, forme notre justice, comme appartenant au premier.
Nous passons une entière condamnation sur nous-mêmes, comme appartenant au premier,
— enfants de colère, Juifs ou Gentils. La mort clôt tout cela en Christ ; et,
après la rédemption,
nous commençons à
exister devant Dieu en Christ, étant acceptés en Christ, et Christ en nous est notre
vie. Nous ne retournons pas en arrière chercher une justice légale en la chair,
l’autre côté adamique de la rédemption. Là nous ne pouvons nous connaître que comme
perdus, morts dans le péché. Il est trop tard pour obtenir une justice à notre premier
état adamique. Je me suis réfugié en Christ, parce que, par cet état, j’étais déjà
perdu. Par la désobéissance d’un seul homme, plusieurs ont été constitués pécheurs ;
par l’obéissance d’un seul homme, — considérée comme un tout moral, parfait dans
la mort, son caractère en contraste avec celui d’Adam, sans aucune pensée de loi,
— plusieurs sont constitués justes. Dans la mort, il a porté la malédiction de la
loi pour ceux qui étaient sous la loi, mais ce n’était pas là la garder pendant
sa vie. Il a été obéissant toute sa vie, il a appris ce que c’était que l’obéissance
en souffrant. Il a été obéissant dans la mort, en se courbant sous la souffrance,
lorsque ç’a été la volonté de son Père, là où la loi n’avait aucune place, quoiqu’il
en supportât aussi la malédiction. Où était la loi qui commandât de supporter la
colère de Dieu quand on était innocent ? « Il a appris l’obéissance par
les choses qu’il a souffertes ». Et non seulement cela, mais cette obéissance
est expressément mise en contraste avec la loi, afin de satisfaire aussi pour le
péché de ceux qui ne sont pas sous la loi. Ceci est le grand point de l’argumentation
de Paul dans ce chapitre. Il y insiste sur la primauté personnelle d’Adam et de
Christ, et c’est sur ce terrain que nous nous tenons, la loi étant intervenue, occasionnellement,
quoique pour des fins importantes. Adam mourut par désobéissance et Christ par obéissance.
La loi est intervenue, dit l’apôtre, — afin que l’offense abondât. C’est-à-dire,
il pose l’obéissance comme une qualité absolue et parfaite du Christ, efficace pour
les fils d’Adam, tandis que la loi avait simplement une place spéciale, qui ne rentrait
pas dans cette question d’obéissance. Elle amenait le péché au jour par manière
de multiplier les offenses, mais où (non pas l’offense, l’apôtre prend soin de ne
pas dire cela ; car alors la grâce n’eût pas été appliquée à ceux qui n’étaient
pas sous la loi, le point sur lequel il insistait étant précisément qu’elle s’appliquait
à eux), mais où le péché
abondait, la
grâce a surabondé. Il y avait une seule offense (paraptwma),
dont les conséquences furent envers tous les hommes en condamnation ; un seul,
dikaiwma, ou acte de justice accomplie,
dont les conséquences furent envers tous les hommes en justification de vie. C’est
aussi abstrait que possible, mais, ainsi que le montre le verset suivant, à l’exclusion
de la loi ; celle-ci
est intervenue
[nomoV pareishlqen]
comme une chose accessoire qui avait un
effet particulier et qui ne rentrait pas dans l’argumentation générale de l’apôtre ;
bien plus, que son raisonnement avait pour effet d’exclure, afin d’introduire les
Gentils.
Si la seule offense
s’étendait bien loin au delà des Juifs, la seule justice accomplie doit le faire
aussi. La loi est entrée en passant, pour accomplir son œuvre, en produisant des
offenses (non pas le péché) ; mais où le péché abondait, la grâce a surabondé.
Le but du raisonnement de l’apôtre est de nous sortir du terrain de la loi quant
à la désobéissance, à l’obéissance et à la justice, et non de nous y introduire.
Si elle intervient, c’est avec un objet spécial, en passant, ce qui ne concerne
pas les Gentils, et pour le Juif, elle servait à aggraver sa culpabilité, mais Christ
en a porté la malédiction pour ceux qui croient. Je ne suis pas sous la loi mais
sous la grâce, si je suis un croyant. Je ne suis pas dans la chair, si je suis en
Christ ; quand j’y étais j’étais
sous
la loi, ou sans loi. En Christ, je suis entré, Juif ou Gentil, sur un nouveau terrain,
où je suis à la fois mort au péché et à la loi, et vivant à Dieu, dans le Christ
Jésus notre Seigneur, étant fait justice de Dieu en lui.
C’est une chose bien frappante que Luther ait exclu du Nouveau Testament ce sur quoi l’apôtre insiste partout, comme étant le fondement de sa doctrine, la révélation du christianisme, à savoir la justice de Dieu. Et Calvin ne va guère plus loin. « Par la justice de Dieu, dit-il, je comprends ce qui peut être approuvé devant le tribunal de Dieu ; comme, au contraire, les hommes sont accoutumés à la justice de l’homme, c’est-à-dire à ce qui est tenu pour justice, estimé justice dans l’opinion des hommes » (Rom. 1, de même 2 Cor. 5). Mais tout son exposé est des plus pauvres. « Ne pas atteindre à la gloire de Dieu », dit-il de la même manière, — signifie « à ce dont nous pourrions nous glorifier devant Dieu ». Dans Rom. 10, il fait de la justice de Dieu ce que Dieu donne, et de leur propre justice ce qu’on cherche dans l’homme.