La part de Christ

Les souffrances et les gloires de Christ dans quelques Psaumes (1 Pierre 1:11)

G.André — 1988

Table des matières abrégée :

1 - Introduction

2 - Les souffrances

3 - Les gloires qui suivraient


Table des matières détaillée :

1 - Introduction

2 - Les souffrances

2.1 - Psaume 40:6-13, 16-17, 1-3 — L’obéissance de Christ à la volonté du Père

2.1.1 - « Avant la fondation du monde »

2.1.2 - Dans le temps

2.1.3 - Sur la terre

2.1.4 - La réponse divine (v. 1-3)

2.2 - Psaume 102 — L’abaissement suprême du Sauveur

2.2.1 - La profondeur de son humiliation dans une tristesse sans égale (v. 1-11)

2.2.2 - « À cause de la joie qui était devant lui, il a enduré la croix, ayant méprisé la honte, et est assis à la droite du trône de Dieu » (Héb. 12:2) (v. 13-22)

2.2.3 - v. 23-24b

2.2.4 - La réponse divine (v. 24b-28)

2.3 - Psaume 69:1-21 ; 29-35 — L’Homme de douleurs

2.3.1 - v 1-6

2.3.2 - Ses afflictions durant sa vie — v. 7-12

2.3.3 - Sa prière à Gethsémané — v. 13-20 (Héb. 5:7)

2.3.4 - Les résultats — v. 30-36

2.4 - Psaume 22

2.4.1 - v. 1-21a — Sur la croix

2.4.2 - Les résultats

3 - Les gloires qui suivraient

3.1 - Psaume 16

3.2 - Psaume 45 — L’apparition glorieuse du Messie apportant la délivrance

3.3 - Psaume 2 — « Tu es mon Fils »

3.4 - Psaume 8 — La domination universelle du fils de l’homme

3.5 - Psaume 110 — « Tu es sacrificateur pour toujours »

3.6 - Psaume 72 — Le règne : « Son nom sera pour toujours »

3.7 - Conclusion


1 - Introduction

Un certain nombre de psaumes nous présentent tout spécialement le Seigneur Jésus, quoique beaucoup d’autres parlent de lui sous divers aspects. Après l’entretien sur le chemin d’Emmaüs où il avait fait brûler deux cœurs, avant de quitter les siens Jésus a souligné « qu’il fallait que toutes les choses qui sont écrites de lui… dans les psaumes fussent accomplies » ; il leur a alors « ouvert l’intelligence pour entendre les Écritures » (Luc 24:32, 44-45). Quelqu’un a appelé de tels psaumes « le cœur du Saint Livre ».

En effet, les évangiles rappellent surtout les faits de la vie du Sauveur ; mais les psaumes, et particulièrement ceux que nous allons considérer, nous font entrer un peu plus dans les sentiments qu’a éprouvés dans l’intimité de son être, Jésus qui a tant souffert, généralement solitaire.

De tels psaumes sont très souvent cités à son sujet dans le Nouveau Testament, preuve qu’ils parlent bien de Christ ; soit dans les discours de Pierre puis de Paul dans les Actes, et surtout dans l’épître aux Hébreux.

Mais s’il fallait que le Christ souffre ces choses, il fallait aussi qu’il entre dans sa gloire (Luc 24:26) ; elle « suivait les souffrances » (1 Pierre 1:11). Certains psaumes se concentrent sur de telles gloires.

Si, dans ces portions de la Parole, l’Esprit de Dieu a voulu nous faire entrer en quelque mesure dans les profondeurs où l’amour du Sauveur l’a conduit, ne nous convient-il pas de les considérer avec toute révérence, sentant bien la distance qui nous sépare de ce qu’il a pu vivre lui-même. Le psaume 22 par exemple nous parle de ces heures de ténèbres, pendant lesquelles le petit groupe qui avait été précédemment au pied de la croix « se tenait loin regardant ces choses » (Luc 23:49). Il faut aussi veiller à ne pas dépasser ce que la Parole nous présente. D’aucuns ont voulu le faire, présumant, ou supposant tel ou tel aspect qui ne nous est pas clairement révélé ; ils se sont plus d’une fois fourvoyés, comme hélas, parfois, ceux qui ont cherché à les corriger. Nul ne devait regarder dans l’arche, type de Christ, même pas la toucher, sous peine de mort !

La moitié des psaumes, d’après leurs suscriptions, ont été composés par David, le doux psalmiste d’Israël ; avec bien d’autres, ils expriment les expériences qu’ont traversées de tels hommes de Dieu. Mais, chose remarquable, l’Esprit de Dieu qui les a inspirés, les a conduits souvent beaucoup plus loin que leurs propres sentiments, jusqu’à exprimer ceux du Sauveur lui-même ; aussi seul cet Esprit de vérité peut-il « prendre de ce qui est à Lui et nous l’annoncer » ; son but n’est-il pas de « Le glorifier » ? (Jean 16:14).

D’autres portions de la Parole nous présentent divers types de Christ. Lors de l’entretien du Ressuscité avec les deux disciples, il « commençait par Moïse et par tous les prophètes, et leur expliquait, dans toutes les Écritures, les choses qui le regardent » (Luc 24:27). Relevons en passant les cas de Joseph, Moïse et David. Chacun d’eux a connu un chemin de souffrances, qui les a fait descendre fort bas, puis ils ont été élevés à la gloire. Joseph a délivré son peuple de la famine ; Moïse, de l’esclavage ; David, de l’ennemi. La Parole de Dieu se plaît à relever divers incidents de leurs vies et de leurs expériences, qui, d’une façon voilée peut-être, mais claire pour le croyant, parlaient de Celui qui devait venir.

Nous considérerons d’abord quelques psaumes parlant des souffrances, puis d’autres des gloires : « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, et qu’il entrât dans sa gloire ? » (Luc 24:26).


Sur l’interprétation prophétique des psaumes :

Nous disposons des ouvrages suivants :


Pour l’édification nous recommandons :


Les souffrances


Les gloires


2 - Les souffrances

2.1 - Psaume 40:6-13, 16-17, 1-3 — L’obéissance de Christ à la volonté du Père

« Voici, je viens » Ps. 40:7 ; Héb. 10:9


2 Corinthiens 3:18 nous dit : « Nous tous, contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit ». Le voile qui, pour les Juifs, demeurait sans être levé dans la lecture de l’Ancien Testament et qui jusqu’à aujourd’hui demeure, est levé pour le croyant. Nous tous pouvons contempler à face découverte, sans voile, les gloires variées du Seigneur : gloires personnelles, éternelles ; gloires officielles que nous partagerons avec Lui dans le Règne ; gloire morale tout le long de sa vie ici-bas. Et l’Esprit de Dieu agit dans nos cœurs, pour qu’en Le contemplant, nous soyons « transformés ».

Ce psaume 40 nous présente le Seigneur Jésus venant dans ce monde dans un chemin d’obéissance et de dévouement total, dans une parfaite soumission à la volonté de Dieu. « Affligé et pauvre », il s’attendait à son Dieu. Le psaume est pour ainsi dire encadré par cette attente patiente. Nous avons besoin de le voir dans ce chemin de pleine consécration.


2.1.1 - « Avant la fondation du monde »

« Il est écrit de moi dans le rouleau du livre », livre des conseils éternels de Dieu, il contient le mystère de ce qui s’est passé dans le secret du ciel entre le Père et le Fils : « Père… tu m’as aimé avant la fondation du monde » (Jean 17:24) ; « Au commencement était la Parole, et la Parole était auprès de Dieu ; et la Parole était Dieu » : éternel dans son existence, distinct dans sa personne, divin dans son essence.

« Avant la fondation du monde », l’Agneau a été « préconnu » (1 Pierre 1:20). Et ceux que Dieu a « bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ », il les a « élus en lui avant la fondation du monde » (Éph. 1:3-4), « élus selon la préconnaissance de Dieu le Père » (1 Pierre 1:2)… N’allons pas plus loin dans ce mystère qui nous est révélé dans la mesure où notre intelligence limitée peut le saisir.


2.1.2 - Dans le temps

« En entrant dans le monde, il dit… » rappelle Hébreux 10:5.

Notre psaume précise : « Tu m’as creusé des oreilles… Voici, je viens ;… c’est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon plaisir » (Ps. 40:6-8)

Jean 1:14 nous dit : « La Parole devint chair ». Jésus lui-même déclare : « Moi, je procède de Dieu et je viens de lui ; car je ne suis pas venu de moi-même, mais c’est lui qui m’a envoyé » (Jean 8:42). Et plus tard : « Je suis sorti d’auprès du Père, et je suis venu dans le monde » (Jean 16:28). En Luc 1:35, l’ange révèle à Marie : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-haut te couvrira de son ombre ; c’est pourquoi aussi la sainte chose qui naîtra sera appelée Fils de Dieu ». Aux bergers il est annoncé : « Aujourd’hui… vous est né un sauveur, qui est le Christ, le Seigneur ». Quel en était le signe ? — « Un petit enfant emmailloté et couché dans une crèche » (Luc 2:12) ! Philippiens 2:6-7 complétera le mystère : « Étant (subsistant) en forme de Dieu,… Il s’est anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave, étant fait à la ressemblance des hommes ».

« Sans contredit, le mystère de la piété est grand : — Dieu a été manifesté en chair » (1 Tim. 3:16). Fils de Dieu, il l’était avant la fondation du monde. Comme on l’a dit, sa naissance sur la terre a correspondu à ce qu’il était auprès de Dieu toujours. Devenu véritablement homme, il est resté aussi véritablement Dieu, en une seule Personne, malgré son abaissement.

Ne scrutons pas plus loin le mystère : « Personne ne connaît (à fond) le Fils, si ce n’est le Père » (Mat. 11:27).


2.1.3 - Sur la terre

« Tu m’as creusé des oreilles… c’est mes délices ô mon Dieu de faire ce qui est ton bon plaisir » (v. 6 et 8). De même que les tables de la loi étaient dans l’arche, « ta loi est au-dedans de mes entrailles ». Que comportait cette obéissance et cette soumission parfaites ?

Annoncer la justice de Dieu ; ne pas retenir ses lèvres ; ne point cacher sa justice au-dedans de son cœur ; parler de sa fidélité et de son salut ; ne pas celer sa bonté et sa vérité. Nous pouvons dans l’Évangile suivre de lieu en lieu Celui qui présentait la grâce, qui usait de bonté et de compassion envers les malades, les pauvres, tous ceux qui venaient à lui. Mais aussi, ne craignant pas de parler ouvertement à ceux qui rejetaient cette grâce, en particulier aux pharisiens et aux scribes (Luc 20:3). Au début de son ministère, Jésus avait répété : Bienheureux… bienheureux (Mat. 5:3-12). À la fin de sa course, pourquoi doit-il redire tant de fois : Malheur… malheur… malheur (Mat. 23:13-29) ?

Quand il doit adresser des reproches aux villes dans lesquelles le plus grand nombre de ses miracles avait été fait, avec quelle tristesse il doit redire : Malheur… Et pourtant « en ce temps-là, Jésus répondit et dit » : « Oui, Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi ». Il se soumet à l’opprobre, au rejet. Ses bras restent quand même ouverts : « Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos » (Mat. 11:28).

Qu’a-t-il devant lui ? — « Des maux sans nombre m’ont entouré ; mes iniquités m’ont atteint et je ne puis les regarder ; elles sont plus nombreuses que les cheveux de ma tête, et mon cœur m’a abandonné » (v. 12). « Mes iniquités m’ont atteint » (v. 12). Voilà la perspective qui l’attend, sans être encore la croix. C’est en quelque sorte le bouc Azazel (Lév. 16:8, 21, 22) qui s’en va seul dans une terre inhabitée, chargé des péchés d’Israël.

« Ceux qui prennent plaisir à mon malheur » (v. 14). Que de fois il a rencontré « la contradiction des pécheurs contre lui-même » (Héb. 12:3). Un refrain jalonne les évangiles : « contre ». Les pharisiens tinrent conseil « contre » lui (Mat. 12:14 ; 27:1). Ils cherchaient « quelques faux témoignages contre Jésus » (Marc 14:55, 60) ; « contre lui toute la cohorte » (Mat. 27:27) ; cracher « contre lui » (Marc 14:65 ; 15:19).

À son Dieu il demande la délivrance, le secours : « Maintenant mon âme est troublée ; et que dirai-je ? Père, délivre-moi de cette heure ; mais c’est pour cela que je suis venu à cette heure. Père, glorifie ton nom » (Jean 12:27-28).

Quelques-uns pourtant répondront à son amour et rechercheront le Dieu Sauveur : « Que tous ceux qui te cherchent s’égayent et se réjouissent en toi ; que ceux qui aiment ton salut disent continuellement : Magnifié soit l’Éternel ! » (v. 16).

« Tu m’as creusé des oreilles ». Hébreux 10:5 dira : « Tu m’as formé un corps ». Corps formé par Dieu lui-même, naissance virginale, corps humain, parfait comme tel, ayant eu faim, ayant eu soif, ayant été lassé du chemin. Mais corps qu’il a voulu prendre pour pouvoir (non devoir) mourir (Héb. 2:14). À la veille du sacrifice suprême, quand il institue la Cène, il dira à chacun des siens : « Ceci est mon corps, donné pour vous, faites ceci en mémoire de moi ». Il avait tout donné : sa gloire, son amour, sa compassion, ses forces, sa réputation, son honneur, et tant d’autres choses encore ; que pouvait-il donner de plus ? — Son corps ! Il a, comme la brebis muette, subi les coups, les crachats, le fouet, la honte, et pour finir l’horrible supplice de la croix, sur laquelle il a traversé les heures de ténèbres alors qu’il était fait péché pour nous.

Deux hommes, qui n’avaient pas osé le suivre, se sont rencontrés au pied de la croix, où pendait ce corps inanimé : « Ils prirent le corps de Jésus, et l’enveloppèrent de linges, avec les aromates… Il y avait… dans le jardin un sépulcre neuf… Ils mirent donc Jésus là » (Jean 19:38-42).

À la fin du psaume, le Christ rappelle ce qu’il a été : « Affligé et pauvre ». Deux expressions que nous sommes appelés à sonder dans la mesure où nous le pouvons, ayant peu connu d’affliction et de réelle pauvreté : « Bienheureux celui qui comprend le pauvre ! Au mauvais jour l’Éternel le délivrera, l’Éternel le gardera… il sera rendu heureux sur la terre » (Ps. 41:1-2).

Jérémie exprimait dans ses Lamentations : « Je suis l’homme qui ai vu l’affliction par la verge de sa fureur » (3:1). « Mon œil se consume d’affliction » (Ps. 88:9). « Souviens-toi de David et de toutes ses afflictions » (Ps. 132:1). « Souviens-toi de mon affliction » (Lament. 3:19).

Il a été « le pauvre », parce que volontairement il s’est « fait pauvre », quoiqu’il eût « de grands biens » (Prov. 13:7). Il a connu la pauvreté au point d’être secouru par les femmes fidèles qui le suivaient (Luc 8:3). Et lorsque les pharisiens et les Hérodiens lui demandent s’il faut payer le tribut à César, il doit les prier d’apporter un denier, n’en ayant pas lui-même (Marc 12:15). « Étant riche, il a vécu dans la pauvreté pour vous, afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis » (2 Cor. 8:9).

Dernières paroles du psaume 40 : « Tu es mon secours et celui qui me délivre. Mon Dieu ! ne tarde pas ». Il n’a pas été exaucé en ayant été sauvé de la mort, mais à travers la mort. « Durant les jours de sa chair, ayant offert, avec de grands cris et avec larmes, des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort, ayant été exaucé à cause de sa piété, quoiqu’il fût Fils il a appris l’obéissance par les choses qu’il a souffertes » (Héb. 5:7-8). Les trois premiers versets de notre psaume vont donner la réponse.


2.1.4 - La réponse divine (v. 1-3)

« J’ai attendu patiemment l’Éternel ; et il s’est penché vers moi et a entendu mon cri. Il m’a fait monter hors du puits de la destruction (la mort), hors d’un bourbier fangeux (le péché) ; et il a mis mes pieds sur un roc », ce roc glorieux de la résurrection. « Il s’est penché vers moi » (v. 1). Dieu pour ainsi dire voit son Fils remonter du puits ; il « a entendu son cri » ; ce Fils qui a tant souffert « est salué par Dieu » (Héb. 5:10) : « Assieds-toi à ma droite » (Ps. 110:1). La mort ne lui a pas été épargnée, mais, étant ressuscité, « il est devenu, pour tous ceux qui lui obéissent, l’auteur du salut éternel » (Héb. 5:9).

Quand le sacrifice est consommé, il peut entonner « un cantique nouveau, la louange de notre Dieu ». Il n’est plus seul : « Plusieurs le verront et craindront et se confieront en l’Éternel » (cf. Jean 12:24).

En cette journée de la résurrection, premier jour de la semaine, jour de lumière, il s’emploiera à ramener, afin de les avoir autour de lui le soir même, ceux qui s’éloignaient : un Pierre qui l’avait renié ; deux qui s’en allaient à Emmaüs ; et d’autres encore. Quand il est apparu au milieu d’eux, « les disciples se réjouirent quand ils virent le Seigneur ».

Aujourd’hui encore, au premier jour de la semaine, c’est notre privilège de nous réunir autour de lui, le Centre, comme membres de son corps ; et, en participant au pain de la Cène, de réaliser « la communion du corps du Christ », ce corps dans lequel il a tant souffert, mais aussi ce corps spirituel composé de tous ses rachetés, dont il est lui-même la Tête (1 Cor. 10:16-17).

Encore une fois : « Bienheureux celui qui comprend le pauvre ». Ce fut le privilège d’une Marie de Béthanie (Jean 12:7) ; de Marie de Magdala qui l’avait suivi et servi et fut la première à le voir ressuscité ; même des disciples, au soir de la résurrection, eux qui n’avaient pas compris qu’il leur avait parlé d’avance de ses souffrances, et cherchaient pour eux-mêmes la première place (Luc 22:19-24).

Sommes-nous meilleurs qu’eux lorsque nous participons au pain, « ne distinguant pas le corps » (1 Cor. 11:29) ou en ayant négligé de « nous éprouver nous-mêmes » ? « Se juger » n’éloigne pas de la Cène, mais amène à manger (v. 28) dans le sentiment de la grâce qui, à cause de l’œuvre de la croix que nous rappelons en un tel moment, peut tout pardonner à ceux qui confessent leurs fautes (1 Jean 1:9).


2.2 - Psaume 102 — L’abaissement suprême du Sauveur

Prière de l’affligé, quand il est accablé et répand sa plainte devant l’Éternel


Une première question se pose  : Aimons-nous vraiment le Seigneur Jésus ? Comment l’aimons-nous  ? Si la méditation de ce psaume nous amène à mieux le connaître, à mieux l’aimer, il y aura de la gloire pour lui.


les versets 1-11, 23-24a

soulignent son abaissement, sa solitude. Cinq fois il y est question de « jour ». Ils nous révèlent les pensées intimes que le Seigneur Jésus a eues dans son cheminement de souffrances tout le long de sa vie et devant la perspective de la croix.


les versets 12-22

expriment « la joie qui était devant lui » (Héb. 12:2), un tissu de bénédictions autant pour les Juifs que pour les nations.


les versets 24b-28

apportent la réponse divine  : il y est question d’« années ». Reprise presque textuellement en Hébreux 1:10-12, comme s’appliquant au Fils, elle nous donne bien la certitude que dans ce psaume, c’est essentiellement Lui que nous contemplons.


2.2.1 - La profondeur de son humiliation dans une tristesse sans égale (v. 1-11)

Remarquons que dans l’en-tête, contrairement à bien d’autres psaumes, il n’y a ni nom d’auteur, ni indication de musique sur laquelle il doit être chanté.

Les versets 1-2 sont un cri de détresse quand les paroles manquent pour l’exprimer : « Au jour que je crie, hâte-toi, réponds-moi ». C’est la prière non d’un affligé, mais de l’affligé. Très probablement l’écrivain du psaume n’a pas compris de qui il s’agissait. Était-ce de lui-même, ou d’un affligé de sa connaissance ? Mais l’Esprit de Dieu sans aucun doute avait en vue, comme Hébreux 1 le confirme et Ésaïe 53 le présente en détail, Celui qui a été opprimé et affligé,… qu’il plut à l’Éternel de meurtrir et de soumettre à la souffrance.

L’affligé « répand sa plainte devant l’Éternel », non pas devant les hommes. Quel modèle pour nous qui si facilement nous plaignons auprès de l’un ou de l’autre, trouvant peut-être quelque consolation auprès d’un frère, d’une sœur, d’un parent, mais restant surtout occupés de nous-mêmes. Pire encore, selon le psaume 42:4, on peut « répandre son âme au-dedans de soi », se morfondre, tourner et retourner dans son esprit tout ce qui nous abat. Au psaume 62:8, le psalmiste invite le peuple à se confier en Dieu en tout temps, à « répandre votre cœur devant lui : Dieu est notre refuge ». Dans 1 Samuel 1:15, Anne, dont l’esprit était accablé, « répandait son âme devant l’Éternel ».

Savons-nous en faire autant plutôt que de répandre nos plaintes dans notre entourage ?

Dans notre psaume, c’est la plainte intime du Fils devant le Père. La réponse viendra dès le verset 25. Mais ce dialogue n’est pas à notre portée. Il est placé devant nos cœurs pour que nous entrions un peu dans la profondeur des souffrances du Sauveur, avec toute révérence et distance. Il n’y a ici ni murmure, ni révolte ; la souffrance est douloureusement éprouvée, mais acceptée.

Les versets 3 à 5 semblent marquer des souffrances dans son corps : « mes os sont brûlés… mon cœur est frappé et est desséché… mes os s’attachent à ma chair ».

Les versets 6 à 7 soulignent sa solitude : « Je suis devenu semblable au pélican du désert », animal impur des ruines accumulées par le jugement, passant la nuit sur les chapiteaux de Ninive aride comme un désert (Soph. 2:13-14). De Babylone, Jérémie prophétise : « Elle ne sera jamais habitée… les bêtes du désert y auront leur gîte et les hiboux rempliront ses maisons, le hibou des lieux désolés » (Ps. 102:6).

Les passereaux sortent généralement en bandes, un oiseau sociable fréquentant les toits plats de l’Orient, où les habitants conversent dans la fraîcheur du soir. Mais ici « l’affligé » est solitaire sur le toit ; il veille. Il faut avoir vécu soi-même une solitude prolongée pour entrer un peu dans ce qu’elle a signifié pour notre Seigneur.

Dans la solitude, quelle qu’en soit la cause, se tourner vers Dieu, chercher en Lui son secours, mais aussi s’effacer soi-même et penser au peuple de Dieu ! Combien y en a-t-il autour de nous qui souffrent de cette solitude, à cause du deuil, de la maladie, de l’âge, de l’incompréhension de ceux avec lesquels on vit s’ils ne sont pas au Seigneur. Penser aux autres, penser aux besoins des enfants de Dieu qui nous entourent, apportera le soulagement que le repli sur soi-même ignore. Et par-dessus tout, la Parole de Dieu elle-même, lue et méditée, reçue dans le cœur, apportera cette « consolation des Écritures » (Rom. 15:4) qui vient à nous comme la Voix même d’En-haut. Le Seigneur Jésus ne dit-il pas par le prophète (És. 50:4) : « Le Seigneur l’Éternel m’a donné la langue des savants, pour que je sache soutenir par une parole celui qui est las » ? On connaîtra alors dans une mesure cette communion dans le Seigneur dont lui-même pouvait dire : « Je ne suis pas seul, car le Père est avec moi ». Mais pour Lui seul il y a eu les heures de l’expiation sous le jugement de Dieu, parce qu’il était fait péché pour nous. L’exclamation du prophète est devenue réalité : « Même quand je crie et que j’élève ma voix, il ferme l’accès à ma prière » (Lament. 3:8).

« Mes jours s’évanouissent comme la fumée… mes jours sont comme l’ombre qui s’allonge » (v. 3 et 11) Dans l’évangile de Jean, depuis le chapitre 10, de chapitre en chapitre, l’ombre de la croix s’accentue sur son chemin : « Je mets ma vie pour les brebis » (10:15) ; « Jésus allait mourir… pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés » (11:51-52). « À moins que le grain de blé, tombant en terre, ne meure, il demeure seul) (12:24). « Mon âme est troublée ; et que dirai-je ? Père délivre-moi de cette heure ; mais c’est pour cela que je suis venu… ». « Il disait cela pour indiquer de quelle mort il allait mourir » (12:27, 33). « Son heure était venue pour passer de ce monde au Père » (13:1).

« Tout le jour mes ennemis m’outragent » (v. 8). Que d’outrages à travers les évangiles : « Tu as un démon (4 fois)… tu es un Samaritain… ils prirent des pierres pour les jeter contre lui… nous savons que cet homme est un pécheur… nous te lapidons pour blasphème… ». Tout cela dans le seul évangile de Jean, celui du Fils de Dieu, dont les anges avaient proclamé la sainteté et la gloire !

La perspective de l’abandon de Dieu (lorsqu’il sera fait péché) est devant lui comme anticipée : « J’ai mangé la cendre comme du pain, et j’ai mêlé de pleurs mon breuvage, à cause de ton indignation et de ta colère » (v. 9-10). Le Fils s’adresse au Père : « Tu m’as élevé haut » ; c’est Proverbes 8:22-30 : « J’étais ses délices tous les jours, toujours en joie devant lui… ». Et il faudra qu’il soit « jeté en bas » : « Il est descendu dans les parties inférieures de la terre » (Éph. 4:9).


2.2.2 - « À cause de la joie qui était devant lui, il a enduré la croix, ayant méprisé la honte, et est assis à la droite du trône de Dieu » (Héb. 12:2) (v. 13-22)

« Le temps d’user de grâce… le temps assigné est venu ». Cette grâce est d’abord pour Sion, Israël restauré (v. 13), mais aussi pour les nations (v. 15) et tous les rois de la terre. Quand l’Éternel bâtira Sion, il paraîtra dans sa gloire (v. 16) ; qu’on annonce dans Sion le nom de l’Éternel (v. 21) ; mais aussi « les peuples seront rassemblés, et les royaumes, pour servir l’Éternel » : la bénédiction du Règne (v. 22).

Au milieu de sa souffrance, le Seigneur lève pour ainsi dire les yeux vers un avenir qui sera le résultat de l’œuvre de la croix. Toutes ces joies sont devant lui : le repos d’être assis à la droite de Dieu lui-même ; la bénédiction pour la terre, avec Sion pour centre ; la bénédiction des nations ; la louange dans Jérusalem et le rassemblement des peuples pour servir l’Éternel. Le peuple qui sera créé louera Jah ; car il a regardé des lieux hauts de sa sainteté… pour entendre le gémissement du prisonnier et pour délier ceux qui étaient voués à la mort. Ésaïe 53 ajoute : « Il verra du fruit du travail de son âme et sera satisfait ».

Dans la sainte cité il n’y aura pas « besoin du soleil ni de la lune, pour l’éclairer ; car la gloire de Dieu l’a illuminée, et l’Agneau est sa lampe. Et les nations marcheront par sa lumière ; et les rois de la terre lui apporteront leur gloire » (Apoc. 21:23 et 24).


2.2.3 - v. 23-24b

La vision de l’avenir s’efface, la perspective de la mort est là : « Il a abattu ma force dans le chemin, il a abrégé mes jours. J’ai dit : Mon Dieu, ne m’enlève pas à la moitié de mes jours ! » (v. 23-24a) — « La moitié de mes jours » : Dans sa parfaite humanité, « en toutes choses rendu semblable à ses frères », il ressent douloureusement ce que signifie être enlevé par une mort atroce à quelque 33 ans. C’était le sort prévu pour « les hommes de sang et de fourbe qui n’atteindraient pas la moitié de leurs jours » (Ps. 55:23). Et Lui a dû passer par là.


2.2.4 - La réponse divine (v. 24b-28)

La voix de l’affligé est comme coupée au verset 24 et Dieu lui-même parle à son Fils.

L’affligé a ressenti la brièveté de ses « jours ». La réponse d’en-haut parle d’années : « Tes années sont de génération en génération ! ». Il est le Créateur qui a jadis fondé la terre, et les cieux sont l’ouvrage de ses mains ; et pourtant « ils périront, mais toi, tu subsisteras… toi tu es le Même et tes années ne finiront pas ».

« Tu es le Même », celui qui existe, immuable en lui-même. Notre vie n’est « qu’une vapeur paraissant pour un peu de temps et puis disparaissant » (Jacq. 4:14) ; même la terre et les cieux, ouvrages de ses mains, périront et seront changés, mais « Toi, tu demeures » (Héb. 1:11).

Dans une révolte en Chine, tous les bâtiments de la Mission à l’Intérieur de la Chine avaient été détruits par les insurgés. Une de nos sœurs, épargnée, visitait les lieux avec une amie, reconnaissant telle salle, tel endroit où elles avaient passé, un pan de mur ici, les restes d’une porte là. À travers l’ouverture, elles voient, subsistant encore sur le mur opposé, ces mots « Toi, tu demeures » !

Peu après la dernière guerre, visitant avec un ami les ruines de la Cité de Londres, nous nous trouvons devant une maison détruite jusqu’au rez-de-chaussée. Subsistaient une porte d’entrée et son linteau sur lequel les propriétaires d’autrefois avaient gravé le verset de 2 Corinthiens 5:1 : « Si notre maison terrestre qui n’est qu’une tente est détruite, nous avons un édifice de la part de Dieu, une maison qui n’est pas faite de main, éternelle, dans les cieux » !

« Jésus Christ est le même, hier, et aujourd’hui, et éternellement » (Héb. 13:8). Mais il ne sera pas seul « Si le grain de blé tombant en terre… meurt, il porte beaucoup de fruit ». C’est le dernier verset de notre psaume : « Les fils de tes serviteurs demeureront, et leur semence sera établie devant toi » (v. 28). Qui sont-ils ces serviteurs, ce peuple qui sera créé (v. 18), ces prisonniers déliés (v. 20), sinon ceux, Juifs et nations, qui ont été sauvés par la grâce, par le moyen de la foi en Celui qui pour eux a tant souffert jusqu’à donner sa vie à la croix.


2.3 - Psaume 69:1-21 ; 29-35 — L’Homme de douleurs

Ses afflictions dans sa vie et devant la mort


2.3.1 - v 1-6

Christ n’est pas ici sous la colère de Dieu et son abandon, mais il a en vue les douleurs de la mort (v. 14-15), et dans la détresse de son âme il crie à Dieu pour en être épargné. Il est délicat de dire si c’est à Gethsémané qu’il supplie avec prières et avec larmes (Héb. 5:7), ou s’il est déjà sur la croix pendant les trois premières heures, anticipant les heures de ténèbres.

Il ne revendique toutefois pas les droits qu’il n’avait pas ravis (v. 4) (Phil. 2:6). Contraste avec celui qui préfigure Satan en Ésaïe 14:12-14 : « Tu as dit dans ton cœur : Je monterai aux cieux, j’élèverai mon trône au-dessus des étoiles de Dieu… je monterai sur les hauteurs des nues, je serai semblable au Très-haut ». Contraste aussi avec Adam qui mange le fruit donné par sa femme, écoutant la promesse du serpent : « Vous serez comme Dieu » (Gen. 3:5). « Le Christ Jésus, étant en forme de Dieu, n’a pas regardé comme un objet à ravir d’être égal à Dieu, mais s’est anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave ». Comme le prophète l’avait annoncé, « le Messie sera retranché et n’aura rien » (Daniel 9:26). La gloire, il l’avait de toute éternité auprès du Père, mais il s’est « dépouillé des insignes de la Majesté ». Une fois l’œuvre accomplie : « Glorifie-moi, toi, Père, auprès de toi-même, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût » (Jean 17:5).

Le verset 5 fait un peu penser au bouc « Azazel » (Lév. 16:21-22), qui, vivant, s’en allait seul mourir dans une terre inhabitée. C’est peut-être l’horreur de la perspective d’être fait péché, comme en Jean 12:27 aussi, pourrait-on penser, des heures sur la croix avant les ténèbres.

v. 6. Les disciples s’étaient attendus à Lui, « espérant qu’il était celui qui doit délivrer Israël » (Luc 24:21). Quelle déception, quelle confusion, quand pour eux sa mort a mis fin à toutes leurs espérances. Au milieu de sa propre détresse, l’Homme de douleurs pense à eux. Au jour de la résurrection, combien il se hâte de se révéler à eux comme le Vivant.


2.3.2 - Ses afflictions durant sa vie — v. 7-12

Les outrages sont tombés sur Lui à cause de son témoignage. Il a profondément ressenti « l’opprobre », le déshonneur public, la honte. Ce mot revient quatre fois dans ce psaume. À notre verset 7 : « J’ai porté l’opprobre » ; au verset 10, l’âme dans le deuil, « cela m’a été en opprobre » ; au verset 19, « Toi tu connais mon opprobre, et ma honte, et ma confusion ». Enfin au verset 20, « L’opprobre m’a brisé le cœur et je suis accablé ». Toute sa vie, par amour pour son Dieu, il devait connaître l’opprobre. Moïse avait « estimé l’opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte » (Héb. 11:26). Mais qu’était-ce en regard de l’opprobre qu’a subi notre Seigneur, toute sa vie portant la honte publique par amour pour son Dieu.

Portant l’opprobre, il devient pour sa famille un étranger à ses frères, inconnu aux fils de sa mère. « Il vint chez soi ; et les siens ne l’ont pas reçu » (Jean 1:11).

Par amour pour son Dieu, il a été outragé. Il chassait de la maison de son Père les trafiquants qui s’y étaient installés. Ses disciples se sont souvenus qu’il était écrit : « Le zèle de ta maison me dévore » (v. 9) ; mais les Juifs n’ont fait que le mépriser et se moquer de lui.

Il a pris les marques du deuil : les pleurs, le jeûne, le sac, « et je leur suis devenu un proverbe » (v. 11) — « Je sers de chanson aux buveurs » (v. 12).


2.3.3 - Sa prière à Gethsémané — v. 13-20 (Héb. 5:7)

Marc 14:33 nous dit du Seigneur lui-même : « Il commença à être saisi d’effroi et fort angoissé ». Cela nous étonne de sa part. Lui n’a jamais eu peur, ni de ses ennemis, ni de Hérode le renard, ni de Pilate, ni de ceux qui, armés, allaient le prendre à Gethsémané. Il a fait la belle confession devant Ponce Pilate. Mais à Gethsémané, il a été « fort angoissé », à cause de nos péchés qu’il allait prendre sur lui-même. La peur est entrée dans le monde avec le péché, Adam a eu peur, parce qu’il avait péché, peur de Dieu (Gen. 3:10). Dès lors les hommes ont toujours eu peur. Mais à la pensée d’être fait péché pour nous, notre Sauveur a été saisi d’effroi. On peut bien appliquer à Jésus lui-même les paroles de Jonas : « Tu m’as jeté dans l’abîme, dans le cœur des mers, et le courant m’a entouré ; toutes tes vagues et tes flots ont passé sur moi ».

Dans cette vie faite de larmes et d’opprobre, que restait-il « pour Lui » ? — La prière. Trois fois de suite, il insiste  : Réponds-moi, réponds-moi, réponds-moi  ! Il n’y a pas eu de réponse.

Il supplie d’être « délivré du bourbier », figure de la souillure du péché, cette boue dans laquelle on enfonce et qui vous pénètre de partout. Il demande d’être délivré des profondeurs des eaux, de la culpabilité du péché : « Que le courant des eaux ne me submerge pas et que la profondeur ne m’engloutisse pas » (v. 14-15). Ces eaux puissantes du jugement vont fondre sur lui — profondeurs insondables pour nous : dans les heures de ténèbres il sera abandonné de son Dieu. Pour le moment il anticipe, il supplie d’en être délivré.

Il nous faut penser à ce que signifierait concrètement pour nous la boue profonde et le courant qui submerge (v. 2). Nous avons lu sans doute des descriptions de malheureux pris dans des sables mouvants, qui s’enfoncent lentement dans la boue, se démènent, font des efforts, pleins d’angoisse et de détresse. Petit à petit le corps disparaît, les épaules, la tête, une main s’agite, et c’est fini. Ou peut-être nous sommes-nous baignés dans la mer et avons-nous été pris par la marée descendante, et le courant nous a entraînés loin de la plage. Tous nos efforts de bon nageur pour regagner le bord étaient vains, le courant nous entraînait toujours plus loin. Quelle angoisse, quelle détresse ! Ce ne sont que des figures pour nous faire entrer dans une mesure dans ce qu’ont signifié cette boue et ce courant des eaux pour notre Sauveur : « Étant dans l’angoisse du combat, il priait plus instamment ; et sa sueur devint comme des grumeaux de sang découlant sur la terre » (Luc 22:44).

« Que le puits ne ferme pas sa gueule sur moi », ce puits de la mort où il a dû descendre, cette profondeur qui éloigne de Dieu et fait que toute communion avec Lui disparaît. Dieu n’est plus là. Et le puits risquerait de fermer sa gueule, cette communion pourrait être perdue à tout jamais.

Que de souffrances tout cela signifiait pour lui, parfaitement pur, innocent, sans souillure, ayant toujours joui d’une pleine communion avec son Dieu… et vient la supplication : « Ne cache pas ta face de ton serviteur, car je suis en détresse. Hâte-toi — et pour une dernière fois — réponds-moi ». Il invoque les compassions de l’Éternel ; qu’il s’approche de son âme et soit son rédempteur. Mais dans le psaume il n’y a pas de réponse.

Il y avait pourtant quelques raisons d’espérer : « Ma prière s’adresse à toi en un temps agréé… la grandeur de ta bonté… ton salut… la grandeur de tes compassions ».

Mais la conclusion reste  : « L’opprobre m’a brisé le cœur, et je suis accablé  ; j’ai attendu que quelqu’un eût compassion de moi, mais il n’y a eu personne… et des consolateurs, mais je n’en ai pas trouvé » (v. 20).

C’est l’atmosphère du jardin de l’agonie, « les grands cris et les larmes, les prières et les supplications à Celui qui pouvait le sauver de la mort » (Héb. 5:7). Dans l’Évangile, c’est aussi l’acceptation de la coupe que le Père lui avait donnée à boire : « Que ta volonté soit faite ».

Du côté des hommes, un étranger, un inconnu, un proverbe pour « ceux qui me haïssent, mes adversaires ». À ses disciples, il avait déclaré, étant attristé et fort angoissé : « Mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort ; demeurez ici et veillez avec moi ». Mais eux se sont endormis. Du côté de Dieu, dans ces heures d’agonie… le silence : « Pour moi, je suis affligé et dans la douleur : que ton salut, ô Dieu, m’élève en un lieu de sûreté ! ».

Il lui faudra boire la coupe !

Mais à travers l’abandon et la mort, il sera « exaucé, à cause de sa piété » ; « consommé, il est devenu, pour tous ceux qui lui obéissent, l’auteur du salut éternel » (Héb. 5:8-9).


2.3.4 - Les résultats — v. 30-36

Dans sa détresse il avait dit : « Ne me cache pas ta face » (v. 17). Il avait traversé l’obscurité profonde, abandonné même de son Dieu. Mais dans la résurrection il peut s’écrier : « Ta face est un rassasiement de joie. Il y a des plaisirs à ta droite pour toujours » (Ps. 16:11).

Alors la louange éclate : « Je louerai le nom de Dieu dans un cantique, et je le magnifierai par ma louange ». Plus besoin de sacrifices de taureaux ou de bœufs (v. 31). Et les cercles de l’adoration vont s’étendant : « Les cieux et la terre te loueront, les mers et tout ce qui se meut en elles ».

Ceux qui cherchent Dieu, leur cœur vivra. Les débonnaires se réjouiront, les pauvres et les prisonniers seront délivrés, « Dieu sauvera Sion et bâtira les villes de Juda… La semence de ses serviteurs… et ceux qui aiment son nom, y demeureront ».

En contraste avec ce que le Seigneur Jésus a enduré dans les grandes eaux, nous avons la promesse d’Ésaïe 43:2 : « Quand tu passeras par les eaux, je serai avec toi, et par les rivières, elles ne te submergeront pas ». La Parole de Dieu ne nous dit pas que nous ne passerons pas par les eaux, mais donne la promesse : « Je serai avec toi ».Il y aura le courant des rivières qui cherchent à entraîner, « mais elles ne te submergeront pas ».


2.4 - Psaume 22

Les psaumes précédents nous ont parlé des souffrances du Seigneur dans les diverses étapes de son cheminement jusqu’à Gethsémané, et même, semble-t-il, pendant les heures de lumière de la croix. Mais ce psaume va jusqu’à l’abîme des trois heures sombres, lorsqu’Il était suspendu entre le ciel et la terre. Dans ces heures-là, le petit groupe qui avait été au pied de la croix, regardait « de loin » (Marc 15:40). Et nous-mêmes avons besoin de toute retenue et sobriété pour, par le cœur, entrer un peu dans les sentiments qui animaient Jésus dans ces heures terribles. Moïse avait dû déchausser ses pieds au buisson ardent (Ex. 3:5) ; Josué de même lorsque se présentait à lui le chef de l’armée de l’Éternel (Josué 5:15). Combien plus nous convient-il d’avoir toute réserve et révérence et adoration devant le trouble de l’âme du Sauveur, l’angoisse et l’effroi qu’il a ressentis devant la cruauté des hommes, et surtout devant l’inflexibilité d’un Dieu saint et juste lorsqu’Il était fait péché pour nous.

D’un œil discret nous pouvons, dans un tel psaume, regarder de loin la tragédie de la croix. Les femmes qui s’étaient un peu retirées ne pouvaient connaître les pensées mêmes du Seigneur lorsqu’il était ainsi sur la croix, quel était l’objet de son regard, enfin ses souffrances sous l’abandon de Dieu.

Nous avons ici une œuvre accomplie dans le passé il y a bientôt deux mille ans. Le Seigneur dépouillé de tout, même de ses vêtements, peut dire du haut de la croix : « Je suis un ver, et non point un homme » (v. 6) un ver, animal que l’on écrase facilement, qui rampe sur la terre, dénué de tout ; tel a été notre Sauveur. Par contraste, le psaume 23 nous dit ce qu’il est pour le présent ; avec le psalmiste nous pouvons répéter : « Je ne manquerai de rien ». Le psaume 24 nous parle de l’avenir : la gloire qu’il aura sur la terre, acclamé, publiquement reconnu. Il peut alors être dit : « À lui est la terre et tout ce qu’elle contient, le monde et ceux qui l’habitent » (Ps. 24:1).

Dans ce psaume 22 « le grand pasteur des brebis » a été « ramené d’entre les morts par la puissance du sang de l’alliance éternelle » (Héb. 13:20). Le psaume 23 le présente comme le berger de son troupeau qu’il conduit et qu’il aime. Dans le psaume 24, il est le souverain pasteur, le roi de gloire. « Quand le souverain pasteur sera manifesté », dit 1 Pierre 5:4, ceux qui se seront fidèlement appliqués à paître le troupeau de Dieu recevront la couronne inflétrissable de gloire.


2.4.1 - v. 1-21a — Sur la croix

Du premier verset au 21a, nous avons la croix, un sujet que nous craignons même d’aborder. La croix a été de toute éternité l’objet des pensées divines. Elle seule a permis le rétablissement de la gloire et des droits de Dieu ; elle a répondu à sa propre justice et lui a permis de faire descendre vers nous, pécheurs, tout son amour. « Il a fait la paix par le sang de sa croix ». Un jour toutes choses seront « réconciliées » avec Dieu, grâce à la croix (Col. 1:20). Elle a divisé l’histoire de l’humanité. Le jour où le Seigneur Jésus a été crucifié était un jour unique dans le temps et dans l’éternité.

Les versets 1 à 6 soulèvent un peu le voile des trois heures de ténèbres : l’abandon de Dieu sur la croix. C’est l’heure de la colère de Dieu où « l’épée s’est réveillée contre mon berger, contre l’homme qui est mon compagnon, dit l’Éternel des armées ; frappe le berger » (Zach. 13:7). L’épée est là, l’abandon, et enfin la poussière (v. 15). Trois fois il est répété que Dieu se tient « loin » (v. 1, 11, 19). Avant la croix et les heures solitaires, Jésus disait « Père ». Il le dira encore lorsqu’il lui remet son esprit, mais dans ces versets, son cri s’élève : « Mon Dieu ! mon Dieu ! ». Après la résurrection, avec quelle joie il pourra annoncer à ses disciples : « Je monte vers mon Père et votre Père » (Jean 20:17).

Au verset 2, alors que Christ est « fait péché », il s’écrie : « Tu ne réponds point », et en donne lui-même la cause : parce que « tu es saint ». Dans cette nuit terrible « il n’y a point de repos pour moi ».

Le Seigneur a souffert par-dessus tout sous l’abandon de Dieu ; mais il a aussi ressenti profondément l’opprobre et la moquerie (v. 6b-8). Les gouverneurs, se raillant de lui d’une même voix avec les principaux sacrificateurs, les scribes, les anciens, répètent presque textuellement le verset 8 de notre psaume « Il s’est confié en Dieu ; qu’il le délivre maintenant, s’il tient à lui » (Mat. 27:43).

Dans les versets 9 à 11 le crucifié se tourne à nouveau vers son Dieu : « Ne te tiens pas loin de moi » (v. 11). Le psalmiste avait dit (Ps. 119:151) « Éternel ! tu es proche » ; mais sur la croix, Dieu se tient loin, et « la détresse est proche ». Envers nous, pécheurs, Il n’est pas un Dieu de loin ; il est plein de compassion et miséricordieux ; il justifie et pardonne… mais il a dû se tenir loin de son Fils pour qui ce fut une douleur inouïe. Les souffrances de l’enfer seront d’être loin de Dieu. Il est la vraie source du bonheur, de la paix et de la joie. Loin de lui, c’est la détresse, « le châtiment d’une ruine éternelle de devant la présence du Seigneur et de devant la gloire de sa force » (2 Thess. 1:9). Le Seigneur, dans ces heures sombres, a subi ce que nous aurions mérité. Il a porté « l’éternité de notre châtiment ». Mystère insondable pour nous, mais que par la foi nous acceptons avec adoration, fondés sur la Parole de Dieu.

Son peuple l’a rejeté ; ils l’ont condamné, ils l’ont maltraité, et pour finir l’ont élevé sur la croix. Il l’avait annoncé lui-même : « Il faut que le fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle » (Jean 3:14-15). Il ajoute un peu plus tard « Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous (sans distinction) les hommes à moi-même. Or il disait cela pour indiquer de quelle mort il allait mourir » (Jean 12:32-33). Rejeté par les hommes, il est aussi rejeté de son Dieu. Il est ainsi inexorablement seul, comme aucune créature ne l’a jamais été. Il souffre de la part de Dieu et de la part des hommes.

Du haut de la croix, Jésus regarde les hommes : ce sont des animaux : des taureaux (les chefs du peuple), la gueule d’un lion déchirant et rugissant ; des chiens : les soldats qui l’ont crucifié : ils ont percé mes mains et mes pieds.

C’est le défilé devant la croix (v. 7-8 ; 12-18). Pendant tout ce temps Jésus endure des souffrances physiques et morales indicibles : mes os se déjoignent, mon cœur est fondu, ma vigueur est desséchée, et ma langue est attachée à mon palais — la terrible soif des crucifiés ; et tu m’as mis dans la poussière de la mort. « Le premier homme est tiré de la terre, — poussière ; le second homme est venu du ciel » (1 Cor. 15:47). L’homme retourne à la poussière (Éccl. 12:7) ; Lui a été mis dans la poussière de la mort, mais il n’est pas devenu poussière : « Tu ne permettras pas que ton saint voie la corruption » (Ps. 16:10). Les mains qui avaient fait tant de bien ont été percées ; les « chiens » ont cloué à la croix les pieds de Celui qui de lieu en lieu avait déversé sur les hommes sa compassion et ses bienfaits. Ils ont mis fin à ce chemin-là.


v. 14-15

Le crucifié sent que sa vigueur s’en va peu à peu : « Je suis répandu comme de l’eau… mon cœur est comme de la cire… ma vigueur est desséchée ». Les atroces souffrances augmentent : « Tous mes os se déjoignent… je compterais tous mes os » (v. 14-17). Normalement on ne sent pas ses os, mais quand ils font souffrir, la douleur est beaucoup plus intense. Le supplice de la croix est parmi les plus grands, une mort terrible.

Et pendant tout ce temps ceux qui défilaient devant la croix « me contemplent, me regardent ». Puis les uns après les autres, « toutes les foules qui s’étaient assemblées à ce spectacle… s’en retournent, frappant leur poitrine » (Luc 23:48). Les soldats ont partagé entre eux ses vêtements ; sur sa robe ils ont jeté le sort, tunique sans couture, symbole de sa perfection (Jean 19:23-24).

Aucun opprobre ne lui est épargné et les souffrances morales de toutes natures dépassent encore les douleurs physiques. Si nous devons un jour vraiment souffrir, nous avons Dieu près de nous ; nous avons sa consolation. Et si nous cherchons des consolateurs, peut-être se trouvera-t-il quelqu’un pour venir nous encourager. Pour lui, il n’y a eu personne.

Pour Isaac il y avait eu un substitut, le bélier retenu par les cornes. Pour Jésus il n’y avait pas de substitut possible, il se livrait lui-même ; il était fait péché pour nous.

La Parole nous parle souvent de myrrhe, en particulier dans le Cantique des cantiques. La myrrhe et son amertume rappellent les souffrances du Seigneur. Il y avait eu Gethsémané, le pressoir à huile ; puis Gabbatha, le pavé, la dureté des cœurs humains ; et maintenant c’était Golgotha, le lieu du crâne, la mort.

Dans la couverture intérieure du tabernacle, et dans les voiles, il y avait quatre couleurs : le blanc représentant la pureté parfaite de Christ ; le bleu, celui qui était venu du ciel ; la pourpre, sa gloire royale future ; enfin l’écarlate, la couleur du sang. Seule cette couleur luisait encore à la croix. Tous les types de l’Ancien Testament s’accomplissaient.

Qu’y avait-il pourtant dans son cœur, sinon cette première prière : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font » (Luc 23:34). Pour eux et pour nous il invoque le pardon qui sera le résultat de son œuvre. Dans les Évangiles, nous avons les sept paroles de la croix ; dans ce psaume, les pensées et les sentiments du Sauveur. Il a goûté la seconde mort — l’abandon de Dieu, avant d’entrer dans la mort même, salaire du péché.

Une dernière prière  : « Sauve-moi de la gueule du lion » (v. 21). Satan est là. Il a dû se retirer lors de la tentation au début du ministère. Il a étendu ses pièges tout du long, surtout vers la fin. Et maintenant, la gueule ouverte va-t-elle engloutir l’homme parfait  ?


2.4.2 - Les résultats

« Tu m’as répondu d’entre les cornes des buffles ». Il a été exaucé, non pas lorsqu’il criait, mais à travers la mort, une fois l’œuvre accomplie.

Dans Lévitique 14, illustrant la purification du pécheur, l’oiseau plongé dans l’eau vive et le sang, peut s’envoler libre. Il porte sur lui les marques des souffrances, vrai type du Ressuscité, qui les gardera jusque dans la gloire.

À ses frères, Jésus va annoncer le nom du Père (v. 22) ; il va entonner la louange au milieu de la congrégation. Toute la semence d’Israël le glorifiera et ceux qui cherchent l’Éternel le loueront. Cette louange qu’il a entonnée va s’étendre en cercles croissants jusqu’à ce que tous les bouts de la terre se souviennent et se tournent vers l’Éternel et que toutes les familles des nations se prosternent devant lui. « Au nom de Jésus se ploiera tout genou des êtres célestes et terrestres et infernaux, et toute langue confessera que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père » (Phil. 2:10-11).

Le cri du Fils arrivait aux oreilles du Père, penché vers Lui (Ps. 40:1), mais sans pouvoir lui répondre. Il doit laisser son Fils mourir sur la croix. Finalement, l’œuvre achevée, il peut intervenir. C’est la résurrection. Il y a une explosion de joie et de louanges. Sans la vie nouvelle, il n’y a pas de louange véritable ; seuls les rachetés chantent. Le cercle s’étend toujours plus, il passe à de nouvelles générations : « une semence le servira… ils raconteront sa justice à un peuple qui naîtra… qu’il a fait ces choses ».

Dans sa prière de Jean 12:28, Jésus avait conclu : « Père, glorifie ton nom ». Et la réponse était venue du ciel : « Je l’ai glorifié, et je le glorifierai de nouveau ». Il l’avait glorifié en ressuscitant Lazare, mais il le glorifierait de nouveau en ressuscitant son Fils bien-aimé.

C’est notre immense privilège d’enfants de Dieu, nés de nouveau, de pouvoir rappeler « l’œuvre de la croix », de la chanter dans l’adoration, en attendant de voir face à face l’Agneau qui a tant souffert pour nous acquérir la vie éternelle.


3 - Les gloires qui suivraient

Les psaumes que nous allons considérer parlent de la gloire. Qu’est-ce que la gloire ? Pensant à nous-mêmes, un chrétien du siècle passé disait : « La gloire, ce sera de voir » (1 Cor. 13:12).

Mais quant à Dieu lui-même, sa gloire, peut-on dire, est l’effusion de ses perfections. Quand Moïse dit à l’Éternel : « Fais-moi voir ta gloire », Dieu lui répond : « L’homme ne peut me voir et vivre » (Ex. 33:20). Dieu fait pourtant quelque chose de magnifique vis-à-vis de Moïse : il le met dans la fente du rocher et fait passer devant lui toute sa bonté, sa grâce, sa miséricorde. Et Moïse voit par derrière quelque chose de merveilleux, une trace qui ne s’efface pas.

Pour nous, la gloire n’est pas insoutenable. Nous l’atteignons par le chemin de la grâce. La fente du rocher nous parle de l’œuvre de Christ. Par cette œuvre, nous sommes amenés progressivement jusqu’à cette face découverte de 2 Corinthiens 3:18. En vertu de l’Esprit qui nous enseigne dans les Écritures, nous sommes placés face à face avec Celui qui les remplit, et, en Esprit pour le moment, mais bientôt en réalité, nous le regardons, et Lui, il nous regarde.


3.1 - Psaume 16

La gloire morale du Seigneur Jésus (v. 1-8) ; Après la perfection de sa vie, la résurrection et la gloire (v. 9-11)


Le psaume 22 correspondait à l’holocauste. Dans l’institution de Lévitique 2, celui-ci était suivi par l’offrande de gâteau, à laquelle se réfère notre psaume. C’est l’ordre divin. Nous allons donc considérer la gloire morale de la vie du parfait Serviteur.

Le psaume 22 nous faisait connaître, dans une mesure, les sentiments de notre Seigneur sur la croix. Le psaume 16 propose à notre méditation et à notre adoration les ressorts secrets de son âme, lorsqu’il a été vu ici-bas comme un homme, Serviteur parfait.

Notre texte répond en quelque sorte à une question posée au psaume 15:1 : « Éternel !… qui demeurera en ta montagne sainte ? », autrement dit qui peut se tenir dans la présence de Dieu ? Le verset 2 donne la réponse : « Celui qui marche dans l’intégrité, et qui fait ce qui est juste ». Au psaume 14 l’Éternel avait regardé des cieux sur les fils des hommes pour constater qu’il « n’y a personne qui fasse le bien, non pas même un seul ». C’est alors, comme si, avec ce psaume 16, l’Éternel venait dire : Oui, il y en a Un : je l’ai regardé des cieux et j’ai eu en lui tout mon plaisir.

Considérons quelques rayons de la gloire morale de notre Seigneur lorsqu’il a été vu ici-bas. Dans une dépendance complète il a pris la position d’un homme devant Dieu.

On pourrait se demander si ce psaume 16 s’applique vraiment au Seigneur Jésus disant : « Garde-moi ô Dieu ! car je me confie en toi ». Par la foi on est gardé des circonstances extérieures, des attaques de l’ennemi, de soi-même. Il est évident que notre Seigneur n’avait pas besoin d’être gardé de cette manière. Dans la plénitude de son être : il commandait aux éléments ; ses ennemis reculaient quand il disait : « C’est moi » ; et comme on l’a dit « il n’y avait point de « moi » en lui ».

De fait dans ce psaume il prend volontairement sa place d’homme et se soumet à son Dieu. Dans cette condition il ne s’adresse pas au Père, mais à Dieu. Parfaite position d’un homme devant son Dieu, dépendance exprimée par la prière (v. 1). Dans l’Évangile lorsqu’il s’agira de faire le choix de ses disciples, en particulier de celui qui le livrera, « Il passa toute la nuit à prier Dieu » (Luc 6:12).

Si quelque doute subsistait encore que ce psaume 16 se réfère bien essentiellement au Messie, il suffirait de considérer Actes 2, où l’apôtre Pierre le cite, en relevant les paroles de David à Son sujet dans les versets 8 à 11.

Au verset 2, dans cette position d’homme prise volontairement, il fait en quelque sorte acte de soumission à son Dieu, sans réclamer aucune prérogative : « Tu es le Seigneur ». Dans l’Évangile, un chef s’approche de lui et l’appelle : « Bon Maître ». Et Jésus de lui répondre, en toute humilité : « Nul n’est bon, sinon un seul, Dieu » (Marc 10:17-18). Le jeune homme ravale Jésus au niveau des hommes, et Lui-même accepte une telle position.

Au verset 3 il prend place avec ceux qu’il appelle les « saints qui sont sur la terre ». C’est la scène de l’Évangile quand Jésus vient de Galilée au Jourdain, où venaient vers Jean ceux qui se repentaient et confessaient leurs péchés. A-t-il, lui, pur et saint, besoin de prendre place au milieu d’eux ? Jean l’en empêchait fort, mais Jésus lui dit : « Il nous est convenable d’accomplir toute justice ». C’était juste que dans la position d’homme qu’il avait prise il s’associe avec ceux qui prenaient une telle attitude devant Dieu.

L’homme parfait montre encore une gloire à laquelle il répond parfaitement : la fidélité (v. 4). Il se sépare moralement complètement de ceux qui « courent après un autre » (l’antichrist), il ne s’associe nullement à leurs rites d’adoration. Plus d’une fois dans l’Évangile il élèvera sa voix vers son Père. Lorsque le diable le tente et lui offre tous les royaumes de la terre, il répondra : « Il est écrit : Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul » (Mat. 4:10).

Dans les psaumes considérés précédemment, nous avons vu combien le Seigneur a souffert ici-bas. Mais dans nos versets 5 et 6, nous discernons, dans le profond de son être, des sentiments de satisfaction : avoir « l’Éternel pour la portion de son héritage et de sa coupe » ; il ne s’appesantit pas sur son lot quotidien de souffrances. Sur la terre, il y avait dans le secret de son âme ce qui dépassait infiniment toute la gloire terrestre qu’il aurait pu avoir : il a l’Éternel pour sa portion. Pour le présent, cela lui suffit.

Bien sûr en lui-même il avait toute connaissance, il était la Sagesse ; et pourtant comme homme dépendant il se laisse enseigner : « L’Éternel me donne conseil », même pendant les nuits. Dans l’intégrité de son cœur il peut exprimer : « Je me suis toujours proposé l’Éternel devant moi ». On se souvient de son affirmation en Jean 8:28 : « Je ne fais rien de moi-même, mais selon que le Père m’a enseigné, je dis ces choses ». En Jean 14:31, il affirme : « Selon que le Père m’a commandé, ainsi je fais ». Dans ses paroles comme dans ses actes, il n’a qu’une chose devant lui une obéissance parfaite.

Quelle est la réponse à toute cette dépendance, cette confiance, le résultat de cette communion ? — C’est la joie du cœur : « Mon cœur se réjouit, et mon âme s’égaie » (v. 9). S’agit-il de son âme, il sait qu’elle ne sera pas abandonnée au shéol. S’agit-il de son corps, il n’a aucun doute qu’il ne verra pas la corruption (v. 10).

En regardant au-delà de la mort, il voit la résurrection et jusqu’à la gloire de Dieu. Déjà son cœur se réjouit. Ce cœur a été affligé, blessé, fondu. Devant lui se présentait alors la coupe que le Père lui donnait à boire, l’abandon sur la croix ; son âme très sainte ne pouvait qu’en souffrir profondément. Malgré tout, comme homme, il se confie en Dieu. Il avait lui le pouvoir de se ressusciter. Mais il a l’assurance, dans cette condition humaine qu’il a prise, que son Dieu ne l’abandonnera pas au shéol, qu’il ne verra pas la corruption. En quelque sorte depuis le ciel le Père contemple le corps inanimé de son Fils bien-aimé. Il en prend soin jusqu’au jour glorieux où « Tu me feras connaître le chemin de la vie ».

Le chemin passera par le « puits » et le « bourbier fangeux », mais il aboutira à la vie. En Actes 2:28, il deviendra « les chemins de la vie », chemins qui seront la part de tous les rachetés pour lesquels il s’est donné lui-même. Il est pour eux « le chef et le consommateur de la foi », « les prémices » de la résurrection ; son chemin de lumière et de sainteté, où il a glorifié le Père, le mène à la gloire, entraînant après lui tous ceux qui lui appartiennent.

La face qui s’était détournée de Lui dans la nuit du calvaire devient un rassasiement de joie : « Il y a des plaisirs à ta droite pour toujours ».


3.2 - Psaume 45 — L’apparition glorieuse du Messie apportant la délivrance

Le psaume 16 répond à une question ; le 45, à un cri, le cri du résidu (*) juif à la fin du psaume 44 : « Pourquoi caches-tu ta face… lève-toi, aide-nous, et rachète-nous à cause de ta bonté » (v. 24 et 26).


(*) Le « résidu » — cette expression désigne les Juifs croyant en Christ, qui, après l’enlèvement de l’Église, attendront le Messie et son royaume. Ils subiront de terribles persécutions.


La réponse, c’est la présentation du Bien-aimé, du Roi qu’ils ont tant attendu. Leur situation avait été bien saisissante : « Écrasés dans le lieu des chacals… couverts de l’ombre de la mort » (44:19). Il est répondu à leurs cris par l’apparition du Roi de gloire.

Tout d’abord est présentée sa Personne, pas des titres, mais Lui-même : « Tu es plus beau que les fils des hommes ; la grâce est répandue sur tes lèvres », traduction de tout ce qu’a été le Seigneur lorsqu’il a cheminé ici-bas. Tel il est vu d’abord par le résidu qui attend la délivrance.

Et quand nous-mêmes nous nous rendons au culte, quelle est la première chose que l’Esprit de Dieu (« l’écrivain habile » v. 1) présente à nos cœurs ? — La Personne du Bien-aimé. Dans cette contemplation, le fidèle entre dans une certaine mesure en communion avec Dieu lui-même. Pouvoir contempler la beauté du Seigneur n’est-ce pas la base, le fondement de notre culte ? Sa beauté dans sa gloire morale ici-bas, dans son sacrifice, sa beauté que nous contemplons maintenant dans la gloire, portant encore la marque de ses souffrances.

Nous contemplons aussi toute son œuvre. Ici le résidu a devant lui le vrai David qui combat pour leur délivrance et l’établissement du règne. Pour nous il s’agit d’un autre combat, celui contre les puissances des ténèbres et l’ennemi de nos âmes : « Par la mort il a rendu impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable » (Héb. 2:14). Quelle louange montera du cœur du résidu en réalisant quel combat il a livré pour les libérer de leur situation désespérée. Quelle louange encore plus fervente s’élève de nos cœurs quand nous nous souvenons de toutes les souffrances qu’il a endurées, telles que les psaumes précédents nous les ont présentées : « le travail de son âme » pour arracher à Satan ceux qui étaient pendant toute leur vie assujettis à la servitude.

Viennent ensuite les gloires du vrai Salomon, sa majesté, sa magnificence, mais aussi les « choses terribles » qui amèneront le règne de justice et le sceptre de droiture. Cette note n’est-elle peut-être pas trop souvent absente dans notre louange, celle de voir le Seigneur dans sa gloire régner en puissance, apportant la paix et la justice ?

La louange individuelle monte vers lui  ; elle est aussi collective, pour ce qui nous concerne, de la part de l’assemblée. Sans doute la « fille » du verset 10 représente-t-elle en première ligne Jérusalem, mais on peut assimiler cette pensée à l’assemblée d’aujourd’hui. Pour elle  : « Écoute… vois… incline ton oreille… oublie ». Et pour Lui, voir la « beauté » de celle pour qui il a tant souffert. Les noces du roi vont avoir lieu pour le résidu, mais les noces de l’Agneau nous touchent encore plus : « Adore-Le ». Et dans notre adoration, lorsque l’église considère la beauté de son époux, n’oubliera-t-elle pas tout ce qui est de son origine terrestre ? N’est-ce pas déjà notre privilège, lorsqu’au culte nous contemplons la gloire du Seigneur et ses souffrances, d’oublier ce qui a pu nous préoccuper, même nos faiblesses, tout ce que nous sommes et ne sommes pas, pour répondre à cette injonction : « Il est ton Seigneur : adore-Le ».

Devant tout ce que l’Esprit nous a rappelé du Bien-aimé, n’avons-nous pas une responsabilité ? Nous avons trouvé dans le psaume 16, entre autres choses, la gloire morale du Seigneur Jésus, la perfection de sa vie comme homme dépendant de Dieu sur la terre. Modèle inimitable sans doute, mais qui nous est présenté quand même, spécialement à travers les évangiles, et dans les psaumes quant à ses sentiments, « afin que nous suivions ses traces » (1 Pierre 2:21), et surtout que nous « croissions dans la grâce et la connaissance de sa Personne »(2 Pierre 3:18).

Notre psaume a placé devant nous sa gloire officielle, celle du Messie apparaissant dans sa puissance, du roi victorieux qui établit la paix et la justice sur la terre. Cette gloire nous la partagerons avec Lui, selon Apocalypse 5:10, 2 Timothée 2:12, et bien d’autres passages. Quand il apparaît dans sa gloire en Apocalypse 19:11-16, « Roi des rois et Seigneur des seigneurs », les armées qui sont dans le ciel le suivent ; les rachetés précédemment enlevés dans le ciel, en font sans doute partie. Lui-même se nomme la « Parole de Dieu ». Il est appelé « fidèle et véritable ». Il porte aussi un autre nom, « un nom écrit que nul ne connaît que lui seul ». C’est sa gloire personnelle, inscrutable pour nous : « Glorifie-moi, toi Père, auprès de toi-même, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût ». Cette gloire, nous ne la partagerons pas, mais selon sa prière : « Père, je veux, quant à ceux que tu m’as donnés, qu’ils voient ma gloire que tu m’as donnée ». (Jean 17:5, 24). Il reste dans la personne du Fils un mystère que seul le Père connaît : « Personne ne connaît le Fils si ce n’est le Père » (Mat. 11:27).


3.3 - Psaume 2 — « Tu es mon Fils »

Dans le premier psaume nous est présentée la justice parfaite de l’homme bienheureux, la Personne même du Seigneur Jésus.

Dans le 2, nous avons à son sujet trois noms qui répondent à cette justice parfaite. Au verset 2, il est l’Oint de Dieu, le Messie, le Christ ; il a accompli tout ce que Dieu lui a confié : « J’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire » (Jean 17:4). Au verset 6 il est son Roi ; au verset 7, son Fils, verset central.

Ce psaume se divise en quatre parties de trois versets chacune. Successivement le Saint Esprit s’exprime, puis Dieu lui-même, enfin le Fils, et pour terminer les fidèles.

Il s’ouvre par la révolte des grands de ce monde contre Christ lui-même, dans sa vie et sa condamnation. Même deux ennemis comme Hérode et Ponce Pilate consultent ensemble et deviennent amis contre Christ (Luc 23:12). Cette persécution se continue à travers les âges envers les enfants de Dieu (Jean 15:19). Dans l’avenir cette révolte contre Christ sera manifeste : les dix rois qui ont reçu pouvoir avec la bête « combattront contre l’Agneau » (Apoc. 17:14). De même en 19:19 : « La bête et les rois de la terre et leurs armées sont assemblées pour livrer combat à Celui qui est assis sur le cheval et à son armée ».

D’autre part on ne veut plus aucune restriction ni retenue ; le mal se déploie toujours plus (v. 3).

Et maintenant la patience de Dieu attend ! Mais le jour viendra, inexorablement, où sa colère et sa fureur épouvanteront.

Dans les versets 4 à 6, Dieu lui-même parle. Il suffit qu’il affirme : « J’ai oint mon Roi sur Sion » pour fermer la bouche à la révolte. Dans celle d’Adonija en 1 Rois 1, nous avons comme un tableau précurseur de ces versets de notre psaume.

De Christ Dieu dit « mon Roi ». Dans l’Évangile il sera reconnu comme tel pour quelques heures, lors de son entrée à Jérusalem. Rejeté alors, il reviendra un jour comme roi de gloire.

Qui est-il ce roi ? Jésus le déclare lui-même dans les versets 7 à 9 : « L’Éternel m’a dit : Tu es mon Fils aujourd’hui je t’ai engendré ». Il recevra les nations pour héritage, mais il les recevra de la main du Père, non pas de la main du diable qui les lui offrait pourvu qu’il se prosterne devant lui (Luc 4:6-7).

« Tu es mon Fils) ! Il l’est dès l’éternité : « Père… tu m’as aimé avant la fondation du monde… La gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût » (Jean 17:24, 5). Mais il est venu sur la terre, envoyé du Père : « Aujourd’hui je t’ai engendré ») (Héb. 1:5). Sa naissance humaine ici-bas correspond à ce qu’il était dans la déité (Luc 1:35) : « Étant (littéralement : subsistant) en forme de Dieu… il s’est anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave ». Il s’est dépouillé des insignes de la gloire ; il a été fait à la ressemblance des hommes ; en une même personne, il était véritablement homme et véritablement Dieu. Haut élevé, proclamé Seigneur, au nom duquel se ploiera tout genou, il reste véritablement homme et véritablement Dieu : « En lui habite toute la plénitude de la déité corporellement » (Col. 2:9).

Vu l’état de violence et de corruption de la terre, le « sceptre de fer » sera indispensable. Avant que le règne de paix et de justice s’établisse, il faudra les jugements terribles de l’Apocalypse (v. 9). « Celui qui vaincra » en Apocalypse 2:26 sera associé à cette autorité sur les nations, pour les paître « avec une verge de fer,… selon que moi aussi je l’ai reçu de mon Père ».

v. 10-12 — À travers les jugements terribles qui fondront sur la terre sera encore proclamé l’évangile du royaume, l’Évangile éternel. Les rois, les juges de la terre, tout homme, sont appelés à craindre l’Éternel, à baiser le Fils. Cette expression de « baiser le Fils » signifie une réconciliation. En Luc 7 nous avons celui de la pécheresse qui couvrait de baisers les pieds du Seigneur et les arrosait avec ses larmes : un baiser de repentance et de confession.

Par contre, comme Jésus le relève, le pharisien qui à ce moment-là recevait le Seigneur, ne lui avait même pas donné de baiser. Il invitait Jésus chez lui, mais n’avait pas de cœur pour le faire. En Actes 20 un serviteur va s’en aller et l’on est là sur le rivage ; c’est le baiser de toute une assemblée qui voit quelqu’un qui les quitte et ne les reverra plus. C’est un baiser d’attachement qui pourra se prolonger par la prière, et pourtant ceux d’Éphèse oublieront (2 Tim. 1:15). Il y a aussi le baiser du père qui accueille l’enfant prodigue. Combien celui-là est chaleureux. Quelqu’un qui revient, quelqu’un qui se repent ! Il y a enfin — puissions-nous ne jamais le connaître — le baiser du traître. Jésus doit lui dire quand Judas le livre par un baiser donné avec empressement : Ami, pourquoi es tu venu ?

« Bienheureux tous ceux qui se confient en Lui  ! », mais malheureux celui qui s’engage dans le chemin des méchants et finit par s’asseoir au siège des moqueurs (1:1). Une fois assis, il n’est pas facile de se lever  ; quand on s’est détourné volontairement de Christ, combien difficilement on revient à Lui. Mais si l’on s’est assis aux pieds du Seigneur, par la grâce on y reste volontiers, pour y contempler ses gloires de Roi, de Christ, de Fils.


3.4 - Psaume 8 — La domination universelle du fils de l’homme

Celui qui a été « fait de peu inférieur aux anges » (Héb. 2 ajoute  : « … à cause de la passion de la mort ») est maintenant « couronné de gloire et d’honneur ». Dans l’avenir il dominera sur toutes les œuvres des mains du Créateur.

Dieu avait donné cette domination primitivement à Adam (Gen. 2:20) ; par la chute il l’a perdue, et le sol, maudit à cause de lui, ne donnerait son fruit qu’à force d’un travail pénible (Gen. 3:17b-19). La domination a été ensuite remise à Noé, mais il est tombé ; elle a été confiée à Salomon, mais il a mal terminé sa vie ; transmise à Nébucadnetsar, selon Daniel 2:37, puis aux trois autres empires des nations ; elle a mal fini (v. 43). Christ la recevra.

Il y en avait déjà un échantillon dans l’évangile, lorsque Jésus invite Pierre à pêcher un poisson qui apporte le statère nécessaire pour payer l’impôt du temple (Mat. 17:27). Le Seigneur possédait toutes choses, mais sa gloire était alors voilée ; elle brillera bientôt sur toute la terre.

Maintenant c’est par la bouche des « petits enfants » qu’il a fondé sa force, ou sa louange (Mat. 21:16) ; « petits enfants » surtout dans le domaine spirituel : nouveaux convertis au début de la course chrétienne, encore bien ignorants, mais qui peuvent bénir Celui qui les a sauvés.

Quand dans une nuit étoilée on contemple la splendeur du ciel, « qu’est-ce que l’homme que tu te souviennes de lui » ? Si peu de chose, cet « homme mortel » (Enosh Gen. 4:26), en face de l’infini ! Et pourtant le Seigneur Jésus a voulu devenir tel, véritablement homme, mais homme en qui il n’y avait point de péché, fils de l’homme venu pour donner sa vie, à qui personne ne pouvait l’ôter, le « dernier Adam » (Ps. 8:4b). Il est bien en vue dans Hébreux 2:6b-8a, dont le verset 9 ajoute qu’il a été « fait un peu moindre que les anges, à cause de la passion de la mort ». Maintenant, par la foi, nous voyons Jésus couronné de gloire et d’honneur ; il a amené plusieurs fils à la gloire, ayant accepté, pour devenir chef de notre salut, d’être lui-même « consommé par des souffrances » (Héb. 2:10).

Notre verset 6 nous parle de sa domination future, non seulement sur toutes les œuvres du Créateur, mais aussi sur ce que représentent les brebis et les bœufs, sans doute les rachetés ; puis les bêtes des champs, les nations qui reconnaîtront sa domination ; finalement les oiseaux des cieux et les poissons de la mer, qui font penser à ceux qui devront ployer le genou devant lui et reconnaître que Jésus est Seigneur (Phil. 2:10-11). Daniel 7:13-14 avait déjà annoncé que le fils de l’homme recevrait la domination et l’honneur et la royauté, une domination éternelle, et son royaume qui ne sera pas détruit.

Ce psaume célébrant sa grandeur infinie, comment pourrait-il être mieux encadré que par cette exclamation : « Éternel, notre Seigneur ! Que ton nom est magnifique par toute la terre ! ».


3.5 - Psaume 110 — « Tu es sacrificateur pour toujours »

Une fois l’œuvre de la croix accomplie, « le Seigneur… fut élevé en haut dans le ciel, et s’assit à la droite de Dieu » (Marc 16:19). Ainsi le présente notre psaume (v. 1) et le souligne tout particulièrement l’épître aux Hébreux : « Ayant fait par lui-même la purification des péchés, il s’est assis à la droite de la majesté dans les hauts lieux » (Héb. 1:3). Par les choses qu’il a souffertes, il a appris l’obéissance, il a réalisé ce qu’elle signifiait pour un homme parfait sur la terre. Il a accompli en toutes choses la volonté de Dieu et, étant salué par Dieu, il est devenu souverain sacrificateur, non pas sur la terre, mais dans le ciel (Héb. 5:8-10 ; 8:4). La brièveté de la vie empêchait les sacrificateurs de l’ancienne alliance de demeurer, la mort les atteignait successivement tous. Mais lui, parce qu’il demeure éternellement, a la sacrificature qui ne se transmet pas. Ceux d’autrefois étaient debout chaque jour, accomplissant le service, mais lui est assis, l’œuvre ayant été parfaitement achevée (Héb. 10:11-12). Tel, conduit par l’Esprit de Dieu, le considère d’avance le psalmiste.

Entre les vingt et une citations de ce psaume dans le Nouveau Testament, il y en a que le Seigneur s’attribue, preuve que cette prophétie le concernait bien lui-même (Luc 20:42). Il était alors sur cette terre, son message de grâce était refusé ; mais il avait la perspective de s’asseoir à la droite de la majesté. Plus tard ses ennemis seront pour marchepied de ses pieds.

Pour le passé il est dit au psaume 109:31 : « L’Éternel s’est tenu à la droite du pauvre » ; Jésus n’était-il pas lui-même ce pauvre ? Les hommes le refusaient, mais Dieu était à sa droite. — Le premier verset du psaume 110 est actuel, selon Philippiens 2:9 : suite à son obéissance jusqu’à la mort de la croix, Dieu l’a haut élevé. Mais les ennemis ne sont pas encore sous ses pieds. Plus tard : « Le Seigneur, à ta droite, brisera les rois au jour de sa colère » (v. 5). — Hier l’Éternel s’est tenu à la droite du pauvre aujourd’hui il l’a fait asseoir à sa droite ; demain il sera à sa droite pour juger les nations.

Au psaume 40, Dieu « se penche » (v. 1) vers Celui qu’il avait dû abandonner sur la croix, et le fait monter hors du puits de la destruction (v. 2), pour mettre ses pieds sur le roc de la résurrection. Dans le premier verset du psaume 110, peut-être pouvons-nous découvrir, par l’œil prophétique, le Père voir son Fils s’élever de la montagne des Oliviers vers lui, et l’inviter à s’asseoir à sa droite. Christ recevra le sceptre de la force, un peuple de franche volonté, la sainte magnificence. Mais il est entré dans la gloire non seulement pour cela, mais, comme dit ci-dessus, « selon la puissance d’une vie impérissable » (Héb. 7:16), afin d’être sacrificateur pour toujours, selon l’ordre de Melchisédec, personnage mystérieux apparaissant en Genèse 14:18-20, bénissant Abram et le préservant des tentations ultérieures du roi de Sodome. Le patriarche lui donne la dîme de tout. L’épître aux Hébreux 7:1-10 en parle à nouveau, précisant qu’il est à la fois roi et sacrificateur — roi de justice et de paix, — assimilé au Fils de Dieu.

Actuellement dans le sanctuaire céleste, notre Sacrificateur s’occupe dans sa grâce de ceux qu’il a rachetés et qui lui appartiennent. Il attend le moment où, selon la décision du Père, il descendra lui-même du ciel pour enlever son église, épargnée de l’heure de l’épreuve qui doit venir sur toute la terre. Mais le jour suivra rapidement où « ses ennemis seront mis pour le marchepied de ses pieds » (voir Josué 10:24), où il brisera les rois et jugera les nations (v. 5-6).

Le dernier verset nous rappelle qu’il « boira du torrent dans le chemin, c’est pourquoi il lèvera haut la tête ». L’eau du torrent vient d’en-haut, comme le Saint Esprit, apportant rafraîchissement au combattant, qui peut alors, dans la bataille, lever haut la tête. À la croix, le Seigneur Jésus a brisé la tête du serpent, selon la prophétie de Genèse 3:15 ; il a triomphé de tous ses ennemis invisibles (Col. 2:15). Satan lui a brisé le talon : il est entré dans la mort ; mais « par la mort il a vaincu celui qui avait le pouvoir de la mort ». Au jour de la résurrection il pouvait bien « lever haut la tête » et être élevé dans le ciel pour s’asseoir à la droite de Dieu et exercer cette sacrificature céleste qui n’était pas sa part sur la terre.

On peut aussi penser que pour boire l’eau du torrent, il faut baisser la tête. Combien de fois notre Seigneur l’a fait dans sa course ici-bas, la dernière fois sur la croix du calvaire (Jean 19:30), alors que de son vivant, il n’avait pas eu un lieu où la « reposer » (dans l’original même mot que baisser). Et le verset 7 ajoute : « C’est pourquoi il lèvera haut la tête », comme Philippiens 2:9 l’exprime : « C’est pourquoi Dieu l’a haut élevé ».

Au péril de leur vie, les trois hommes forts de David sont allés chercher l’eau au puits de Bethléhem pour apporter quelque rafraîchissement à leur chef (2 Sam. 23:13-17). Notre Seigneur n’est-il pas rafraîchi quand il voit les siens et de jeunes âmes se grouper autour de lui pour recevoir sa Parole et lui témoigner ainsi leur amour ?


3.6 - Psaume 72 — Le règne : « Son nom sera pour toujours »

À la fin de ses jours, David contemple prophétiquement le règne de paix et de justice de Salomon ; conduit par l’Esprit de Dieu, il parle bien sûr d’un « plus grand que Salomon ».

Le nom de Salomon (shalom) signifie : la paix. Melchisédec était roi de Salem. La paix caractérisera donc le règne de Christ qui, à la fois roi et sacrificateur, amènera la bénédiction millénaire. L’époque de Salomon fait contraste avec celle de David, marquée par les guerres, qui ont hélas aussi ensanglanté toute l’Histoire.

Le texte même du psaume est assez explicite ; il vaut la peine de le lire pour avoir la vision de ces bénédictions du Règne qu’apportera Celui dont le nom sera « pour toujours », une « abondance de paix, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de lune » (v. 7). Avec ces versets, « les prières de David, fils d’Isaï, sont finies » (v. 20). Dans les psaumes qu’il lui a été donné d’écrire, il a considéré les souffrances du Sauveur, l’incompréhension qu’il a rencontrée, la haine des hommes, l’abandon sur la croix sous le jugement de Dieu. Ses regards se sont portés aussi vers sa résurrection et son élévation dans la gloire.

Avant de clore sa carrière, « le doux psalmiste d’Israël » a encore la révélation de « Celui qui domine parmi les hommes, qui sera juste, dominant en la crainte de Dieu ; et il sera comme la lumière du matin, quand le soleil se lève, un matin sans nuages » (2 Sam. 23:3-4).

Les lèvres qui avaient « rendu par avance témoignage des souffrances qui devaient être la part de Christ et des gloires qui suivraient », expriment une dernière prière de louange : « Béni soit le nom de sa gloire, à toujours ; et que toute la terre soit pleine de sa gloire ! Amen ! Oui, Amen ! ».


3.7 - Conclusion

Dans ces quatre derniers psaumes, ne peut-on pas voir un tableau d’une éternité à l’autre. Dans le 2, nous remontons à l’éternité passée ; dans le 8 dans le passé du temps, avec l’abaissement de notre Seigneur et l’annonce de sa gloire future ; dans le 110, nous trouvons le présent et son office actuel de sacrificateur ; et dans le 72, l’avenir et la bénédiction universelle.


Toi qui t’es abaissé de la gloire suprême

Aux profondes douleurs, à la mort de la croix,

Exalté maintenant plus haut que le ciel même,

Jésus, pour t’adorer, nous élevons nos voix.