André Georges
Table des matières :
2.1 - Onction (1 Sam. 16:1-13)
2.2 - Premières mises à l’épreuve
2.2.1 - Le lion et l’ours (1 Sam. 17:34-35)
2.2.2 - Goliath (1 Sam. 17:1-54)
3.1.1.1 - Vers Samuel (1 Sam. 19:18)
3.1.1.2 - Devant Jonathan (1 Sam. 20:1)
3.1.1.3 - Auprès d’Akhimélec (1 Sam. 21:1-10)
3.1.1.4 - Vers Akish (21:10-15)
3.1.3 - Poursuites de Saül (1 Sam. 23, 24 et 26)
3.1.3.1 - Kehila (1 Sam. 23:1-13)
3.1.3.2 - Ziph (1 Sam. 23:14-28 ; 26:1-2)
3.1.3.3 - David épargne Saül (1 Sam. 24 et 25)
3.1.3.4 - « En son coeur » (1 Sam. 27)
3.2 - Les efforts de Satan (1 Sam. 25, 29 et 30)
3.3 - Vers le trône (2 Sam. 1 à 4)
4.1 - L’affermissement intérieur
4.1.1 - Jérusalem (2 Sam.5:6-10 ; 1 Chron. 11:4-9).
4.1.2 - L’arche (2 Sam. 6:1-19 ; 1 Chron. 13 ; 15-16:7)
4.1.3 - Le temple (2 Sam. 7 ; 1 Chron. 17)
4.1.4 - Le règne établi (2 Sam. 8:15-18 ; 1 Chron. 18:14-17)
4.2 - La domination extérieure (2 Sam. 5:17-25 ; 8:1-14 ; 10)
4.3.1 - Bath-Shéba (2 Sam. 11 et 12)
4.3.2 - Le dénombrement (2 Sam. 24 ; 1 Chron. 21).
5.1.3 - Mical (2 Sam. 3:13-16)
5.2.1 - Amnon et Tamar (2 Sam. 13)
5.2.2 - Absalom (2 Sam. 14 à 19)
5.2.3 - Adonija (1 Rois 1:5-53, 2:13-25)
6.3.2 - Abiathar (1 Sam. 22:20-23)
6.3.3 - Mephibosheth (2 Sam. 9)
6.3.4 - Ithaï (2 Sam. 15:19-22)
6.3.5 - Hushaï (2 Sam. 15:32-37 ; 17:6-16)
6.3.7 - Barzillai (2 Sam. 17:27-29 ; 19:31-40 ; 1 Rois 2:7)
6.3.8 - Les hommes forts (2 Sam. 23:8-39)
7.2.1 - La mise en place du service religieux (1 Chron. 23 à 26:28)
7.2.2 - Les préparatifs pour le temple
7.3 - Les dernières paroles (2 Sam. 23:1-7)
7.4 - Il s’endormit (1 Rois 2:10 ; Actes 13:36)
« Servir, en sa propre génération, au conseil de Dieu » (Actes 13:36)
L’histoire de David occupe dans la Bible plus de place qu’aucune autre (environ soixante chapitres ; la moitié des psaumes lui sont attribués), sauf celle du Seigneur Jésus lui-même (quatre-vingt-neuf chapitres des évangiles). Son exemple est constamment rappelé, tout spécialement en rapport avec la marche des rois qui lui ont succédé. Dans le Nouveau Testament il est cité cinquante-huit fois. C’est dire l’importance que la vie de cet homme de foi tient dans la révélation divine. Type remarquable de Christ, soit dans plusieurs parties de son histoire, soit à travers les psaumes, il nous est pourtant présenté aussi comme « un homme ayant les mêmes passions que nous ». C’est même une preuve interne bien évidente de l’inspiration divine des Écritures que les fautes d’un serviteur aussi en vue, et des fautes graves, ne soient ni cachées, ni voilées.
Sa carrière peut être
considérée sous son aspect historique
: la formation et la vie d’un
homme de Dieu.
Nous pouvons aussi nous
arrêter à l’enseignement moral
qui en découle pour nous. Que nous
apprend son histoire ? En quoi pouvons-nous l’imiter ? Comment éviter
les écueils qu’il a rencontrés ?
Enfin cette vie a toute sa
signification prophétique
et typique, dans les livres historiques et
dans les psaumes, en nous présentant le Seigneur Jésus lui-même, comme aussi le
résidu futur d’Israël.
Nous retiendrons surtout les
enseignements pratiques qui en ressortent : la foi
qui, dès sa
jeunesse, a été le ressort de sa marche ; la discipline
,
l’éducation que Dieu lui a fait subir pour former l’instrument qui, « en sa
propre génération, devait servir à Son conseil » ; la responsabilité
qui, sous le gouvernement de Dieu, restait attachée à ses actes, et les
conséquences qui en ont découlé ; enfin, d’une façon particulière, sa
vie de famille
, qui n’a pas été à la hauteur de sa jeunesse et de sa vie
intérieure.
La vie de David se déroule approximativement au 11° siècle avant Jésus Christ, les dates de 1085 à 1015 étant avancées, sans trop de certitude. Il avait trente ans lorsqu’il devint roi, et a régné quarante ans (2 Sam. 5:4 ; 1 Chron. 29:27). Né à Bethléhem, où plus tard naîtra son Seigneur, il était fils d’Isaï, donc descendant de Ruth la Moabite (Ruth 4:21-22 ; cf. Matt. 1:5).
À l’encontre de la mission qui lui avait été confiée, Saül n’avait pas entièrement détruit Amalek. Samuel lui avait en conséquence déclaré : « L’Éternel a déchiré aujourd’hui la royauté d’Israël de dessus toi et l’a donnée à ton prochain, qui est meilleur que toi » (1 Sam. 15:28). Depuis ce jour-là, le roi rejeté devait anxieusement s’interroger sur ce « prochain » qui lui ravirait le trône, à lui ou à son fils. De son côté, Samuel menait deuil sur Saül, peu empressé semble-t-il à oindre celui que l’Éternel désignerait.
Pour décider le prophète
d’aller chez Isaï à Bethléhem, il a fallu l’insistance de Dieu : « J’ai vu
parmi ses fils un roi pour moi ».
Samuel avait pris sa fiole —
oeuvre de l’homme — pour oindre
Saül, demandé par le peuple (1 Sam. 10:1). Pour David, choisi par l’Éternel, il
prendra sa corne —
oeuvre divine (1
Sam. 16:1 ; cf. Salomon, 1 Rois 1:39).
À Bethléhem, le vieillard va apprendre une grande leçon. Tant d’années, il avait marché avec Dieu, et pourtant il n’avait pas encore vraiment saisi que « l’Éternel ne regarde pas ce à quoi l’homme regarde, car l’homme regarde à l’apparence extérieure, et l’Éternel regarde au cœur » (v. 7). Repris par son Dieu au sujet d’Éliab, il laisse défiler les sept fils d’Isaï devant lui, sans en choisir aucun. Pourtant l’Éternel avait bien dit qu’il devait oindre un homme de cette famille. « Sont-ce là tous les jeunes gens ? », demande-t-il, étonné. Il y a bien encore « le plus jeune », répond le père, « il paît le menu bétail ». À la demande de Samuel, on va le chercher ; c’est lui qu’il oint au milieu de ses frères. David était le cadet, le moins estimé, celui que l’homme n’aurait pas choisi. Mais Dieu voyait dans son coeur la foi qui déjà y était vivante. Il était beau, comme l’avait été Moïse (Héb. 11:23), comme le sera le Roi de gloire : « Tu es plus beau que les fils des hommes » (Ps. 45). Surtout il était berger, comme l’avaient été Jacob et Moïse. Contraste fréquent dans la Parole entre le berger et le chasseur. Celui-ci trouve sa satisfaction aux dépens de sa victime, tandis que le berger se dépense pour ses brebis et s’y consacre. L’énergie du chasseur marquait un David, homme de guerre ; mais il avait été formé comme berger ; sous ce caractère, il vaincra Goliath, et, plus tard, paîtra le peuple de Dieu.
Avant de devenir le berger d’Israël, il a dû en effet apprendre à soigner le troupeau de Bethléhem, à délivrer la brebis que le lion emportait, en s’exposant lui-même à ses coups. Dans le secret il prouva ainsi la valeur qu’avait pour lui un seul agneau (Luc 15). « La première étape dans notre propre histoire contient et révèle les qualités principales qui distingueront les étapes successives de notre vie ; en conséquence, rien n’est plus important pour le chrétien que l’influence qu’il subit lorsqu’il parcourt cette première étape. » Même après avoir été musicien de Saül, rien n’a changé pour David : « Il allait et revenait d’auprès de Saül pour paître le menu bétail de son père à Bethléhem ».
L’Esprit de l’Éternel le saisit depuis le jour de son onction et dans la suite (v. 13). Quelle transformation cela signifia dans sa vie. Dans ses dernières paroles, il relève encore : « L’Esprit de l’Éternel a parlé en moi et sa parole a été sur ma langue » (2 Sam. 23:2). Tout au long de sa carrière, de quelle manière merveilleuse ne sera-t-il pas conduit et enseigné par cet Esprit.
Il a été oint au milieu de ses frères comme le Seigneur Jésus a été « oint d’une huile de joie au-dessus de ses compagnons ». Joseph aussi avait été « mis à part de ses frères » (Héb. 1:9).
Les hommes forment les jeunes gens, puis les appellent à une tâche. Dieu fait l’inverse. D’abord il appelle. Si, comme le jeune Ésaïe (6:8), on a répondu : « Me voici, envoie-moi », il prépare. Sa formation n’est pas d’un jour, ni d’une année ; elle peut se prolonger longtemps ; quarante ans pour Moïse, trois ans et plus pour Saul de Tarse, bien des années pour David.
En effet, comment ce jeune homme va-t-il accéder au trône ? Il n’en a guère l’âge. Saül est rejeté, mais il règne encore. Le peuple l’acceptera-t-il ? Seule la foi pouvait discerner en lui l’élu de Dieu, foi qu’ont eue ceux qui se retrouveront vers lui à Adullam ou à Tsiklag ; foi qui a animé une Abigaïl ; foi qui est restée agissante dans son propre coeur, et lui a donné la patience d’attendre que soit venu le moment de Dieu pour lui donner Lui-même la couronne.
Cette foi devra être mise à l’épreuve pour en démontrer la réalité ; l’homme lui-même devra être formé à l’école de Dieu. On ne peut pas « servir à son conseil » sans passer par cette école, souvent longue et dure, mais où le Maître reste plein de grâce. « Qui enseigne comme Lui ? » (Job 36:22 ; cf. Matt. 11:29).
Il nous est dit en 1 Timothée 3:10 : « Qu’ils soient premièrement mis à l’épreuve ; ensuite qu’ils servent ». Telle est la manière de Dieu. Ces premiers tests sont si importants dans la carrière d’un jeune chrétien. Saura-t-il y répondre dans sa vie privée, dans son témoignage public, afin que Dieu puisse ensuite lui confier davantage ?
La foi du petit berger de
Bethléhem a été mise à l’épreuve, lorsque, tout seul, il gardait son troupeau.
Surgit un lion qui enlève une de ses bêtes : David va-t-il se dire :
tant pis, le danger est trop grand de la délivrer, ce n’est qu’un mouton. Bien
au contraire ; il poursuit le fauve, délivre l’animal de sa main ;
lorsque le lion s’attaque à lui, il le frappe et le tue. Dans le secret de son
cœur, il en a la persuasion : « L’Éternel
m’a délivré de la patte du lion ». Expérience bénie de la puissance divine
en réponse à la foi, — expérience heureuse que peut faire tout jeune croyant
qui compte sur son Seigneur, dans les problèmes, les choix, les épreuves du
début de sa carrière. Y obtenir la victoire (Ps. 119:9) est le prélude d’une
vie bénie ; se laisser arrêter, décourager, abattre, peut avoir des
conséquences bien regrettables pour la suite, quoique le Seigneur soit fidèle
et restaure celui qui revient à Lui.
Une épreuve bien plus sérieuse attend David. Il va devoir rendre publiquement témoignage de sa foi, et agir en conséquence.
Devant le géant, le peuple, Saül lui-même, sont terrifiés (v. 11, 24). De Jonathan, il n’est rien dit ; en tout cas il ne s’est pas offert à combattre. Mais chez David habite une foi déjà éprouvée. Il peut dire à Saül, sans hésiter : « Ton serviteur ira et combattra avec ce Philistin ». Saül a beau dire : « Tu n’es pas capable » ; David répond : « L’Éternel, lui, me délivrera ».
La foi du jeune berger était, si l’on peut dire, stimulée par une sainte indignation. Comment pouvait-on s’enfuir devant « cet homme-là », ce Philistin qui a jeté l’opprobre sur Israël, qui a insulté les troupes rangées du Dieu vivant, qui a outragé l’Éternel lui-même ? Dieu se doit de délivrer son peuple d’un tel ennemi.
David refuse les ressources humaines, l’armure de Saül ; il choisit pour le combat les instruments du berger : le sac dans lequel il portait sans doute les remèdes nécessaires pour les brebis malades ou blessées, comme aussi sa propre nourriture, — figure de la Parole de Dieu qui nourrit le serviteur et contient les ressources nécessaires à son service. Il y place les cinq pierres lisses, figures d’autant de versets de la Parole appliqués à propos. « Cinq » pierres — peu de chose en apparence, image de la faiblesse de l’homme, mais, dans la main de Dieu, instrument de la victoire.
La foi remplissait son cœur et lui donnait toute assurance ; il venait contre Goliath « au nom de l’Éternel que tu as outragé », afin que toute la terre sache « qu’il y a un Dieu pour Israël », et que toute cette congrégation n’ignore pas que « la bataille est à l’Éternel ».
La confiance en Dieu était la base de telles déclarations en face d’un peuple épouvanté. Plus décisive encore, la hardiesse, au moment précis où le Philistin se lève, s’avance, et s’approche à la rencontre de David. Le jeune homme ne s’enfuit pas à cet instant critique ; au contraire il se hâte et court vers la ligne de bataille, met la main à son sac, prend la pierre, la lance avec sa fronde : la victoire est à lui. Le Philistin est décapité avec sa propre épée, comme il nous est dit du Seigneur Jésus qu’il a vaincu, par la mort, celui qui avait le pouvoir de la mort (Héb. 2:14).
Au jour du combat, David est méprisé par son frère (v. 28) ; il est inconnu de Saül et d’Abner (v. 55) ; mais il devient objet d’attachement pour la foi (Jonathan ; 18:1-4).
David va être soumis à un autre genre d’épreuves : le succès, la popularité, mais aussi l’ingratitude, la haine issue de la jalousie. Qu’en sera-t-il de sa foi ?
(1 Sam. 16:18-23 ; 18:10 ; 19:9) La musique tient une grande place dans la vie du fils d’Isaï. Tout jeune il maniait la harpe ; elle fournit l’occasion de l’amener à la cour pour calmer Saül. Les réactions du roi montrent que la musique apaise, détend, mais ne change pas le coeur. Il n’en est pas autrement aujourd’hui !
David a joué de la harpe pour rendre service au roi, son maître. Il continuera à pratiquer son art, mais en le concentrant sur la louange de Dieu. Au soir de sa vie, il se nommera : « Le doux psalmiste d’Israël ». Il instituera des chantres pour louer l’Éternel, qui, à travers tous les règnes subséquents, accompliront leur service. Même au retour de l’exil, on utilisera encore les « instruments de David » pour le chant (Néh. 12:36).
Après la victoire de David sur Goliath, « Saül l’établit sur les hommes de guerre ». Voilà le jeune homme élevé d’emblée à une très haute position. « Il était agréable aux yeux de tout le peuple, et même aux yeux des serviteurs de Saül. »
Au retour de la bataille, les cortèges de femmes jouent et s’entre-répondent : « Saül a frappé ses mille, et David ses dix mille ». Saül en est très irrité ; il se rend compte que le jeune Bethléhémite est le successeur annoncé par Samuel : « Il n’y a plus pour lui que la royauté. Et depuis ce jour-là et dans la suite, Saül eut l’oeil sur David ». Mais David n’en tire pas gloire, au contraire. Il continue à marcher avec son Dieu : « L’Éternel était avec lui » (18:12).
Saül l’éloigne de sa personne et le dégrade à n’être plus que chef de milliers. David continue pourtant à « sortir et à entrer devant le peuple », et « L’Éternel était avec lui ». Pour chacun il était manifeste qu’il marchait avec Dieu. Tout Israël et Juda l’aimaient. Il n’était pas hautain, mais frayait avec eux. « Il prospérait plus que tous les serviteurs de Saül » et était tenu en grande estime (18:30).
Saül avait promis sa fille Mérab et de grandes richesses à quiconque frapperait Goliath. Au lieu de tenir parole, il va mettre de nouvelles conditions au mariage de David avec son aînée, espérant que, dans de nouveaux combats, la main des Philistins serait sur lui. Puis au moment de donner Mérab à David, elle fut donnée pour femme à Adriel.
Mical, la plus jeune, aime David. Saül y voit une occasion magnifique d’essayer à nouveau de faire périr son rival par la main des Philistins. David ne se laisse pas éblouir par la perspective : « Moi je suis un homme pauvre et peu considérable ». Au lieu de cent prépuces de Philistins, il en rapportera deux cents : il répond au piège tendu, par une nouvelle victoire selon Dieu. Saül est donc obligé de lui donner Mical, et doit se rendre compte que, malgré sa haute position comme gendre du roi, David persévérait dans sa foi, et que « l’Éternel était avec lui » (v. 28).
À la cour, une épreuve plus pénible, plus dure, attendait David. L’élévation ne l’a pas grandi à ses propres yeux, l’ingratitude ne l’a pas rendu amer. Que va faire la jalousie de Saül ?
Le roi a l’œil sur le jeune homme. Il l’abaisse. Il l’expose. Il veut le tuer ou le faire tuer. Il consulte avec ses serviteurs pour le faire mourir. Encore une fois il essaie de le clouer à la paroi avec sa lance. Et quand son gendre réussit à s’échapper, il envoie des messagers pour le mettre à mort dans son lit.
Quelle est la réaction de David ? Le psaume 59 entre autres nous le montre : supplications intenses adressées à Dieu pour être délivré ; confiance en Celui qui est sa haute retraite et use de bonté envers lui ; assurance d’être exaucé : « Je chanterai ta force et dès le matin je célébrerai avec joie ta bonté, car tu m’as été un refuge au jour où j’étais dans la détresse ». Malgré tout, David devra s’enfuir. Il faut qu’il soit formé pour servir au conseil de Dieu. Il doit passer par la discipline, dans les tristesses de la réjection. Sa foi a été mise à l’épreuve, dans le secret, publiquement, à la cour ; elle a triomphé. Mais il faut une école plus douloureuse pour préparer le roi selon le coeur de Dieu à la tâche qui l’attend.
David a été appelé, oint. Sa jeune foi a été mise à l’épreuve par les dangers courus, par les attractions rencontrées à la cour de Saül. Avant d’accéder au trône, il faut encore que, pour remplir selon Dieu ses hautes fonctions, il passe par Sa discipline.
Pour échapper à Saül, David a dû s’enfuir, non sans regrets ; il faut tout quitter : femme, maison, ami, commandement, ressources. Pendant des années il va errer çà et là. Dieu s’en servira pour le faire passer par diverses expériences, fortifier sa foi par l’épreuve, lui faire connaître son propre cour, et l’amener à se reposer sur Dieu seul et sur sa grâce.
Dans sa détresse, David va tout d’abord chercher du secours ici et là.
Il était bien naturel que le fugitif se réfugie auprès du vieux prophète qui l’avait oint, et dont l’expérience pouvait lui être en bénédiction. « Ils s’en allèrent, lui et Samuel, et ils habitèrent à Naïoth. » Bref séjour sans doute, mais combien profitable pour le jeune homme qui entrait à l’école de Dieu, où s’était tenu, pendant tant d’années, le vieillard qui, toutes classes achevées, allait être appelé au repos en Lui. Oasis que le Seigneur ménage avant les solitudes du désert. Autour de Samuel, tout un nombre de jeunes prophètes s’étaient rassemblés : que d’encouragements David a pu recevoir, et donner aussi sans doute, durant ces quelques jours à l’écart. (*)
(*) Voir : Feuille aux Jeunes, No 110 : Naïoth
Plus tard, le jeune Saul passera « quinze jours » chez Céphas (Gal. 1). Souvenirs précieux pour les jeunes qui ont pu ainsi profiter de l’enseignement et de l’expérience de ceux qui ont été avant eux dans le chemin de la foi.
Mais ce n’était pas la pensée de Dieu que David reste vers Samuel. Les messagers de Saül sont, il est vrai, les uns après les autres réduits à l’impuissance ; le roi lui-même ne peut rien faire contre sa victime. Malgré tout, David doit à nouveau s’enfuir.
David conserve-t-il encore l’espoir que la situation s’arrangera ? Il le semble puisqu’il a recours une nouvelle fois à Jonathan qui, dans une première occasion, avait réussi à le faire rentrer en grâce auprès de Saül. Mais tous les efforts des deux amis n’aboutissent à rien.
Ils scellent leur amitié et se font des promesses mutuelles dans la présence de Dieu. Jonathan découvre les intentions réelles de son père et ne peut qu’en transmettre à son compagnon la nouvelle affligeante. Quelle détresse pour David. Ses pleurs « devinrent excessifs » (1 Sam. 20:41). Il se voit abandonné de tous. Tous ses efforts pour servir son peuple, pour le délivrer de la puissance de l’ennemi, ne sont pas reconnus. Tout ce en quoi il mettait sa joie : son ami, ses troupes, le bien d’Israël, tout lui est ôté. Il se lève et s’en va. Jonathan entre dans la ville.
David tente de trouver appui auprès du sacrificateur. Mais son état d’âme n’est guère heureux. Il raconte toute une histoire inventée pour se faire donner des pains et une épée ; il en retirera quelques ressources pour lui-même, mais amènera le malheur sur Akhimélec et sa famille. Avait-il en cette occasion fait preuve de foi ? De nouveau il doit s’enfuir.
David sort complètement du chemin de la dépendance. Il cherche refuge auprès des ennemis de son peuple, ces Philistins qu’il avait lui-même combattus. Impossible de cacher son identité. Il est démasqué, probablement arrêté, et ne s’en tire qu’en faisant l’insensé, le fou, de sorte qu’Akish le renvoie.
Tous les efforts de David pour trouver appui et secours auprès des hommes, ont été vains. Solitaire, il se réfugie dans la caverne d’Adullam.
David est tout seul, au fond de la détresse. Le psaume 142 en rend témoignage : « Il n’y a personne qui me reconnaisse ; tout refuge est perdu pour moi ; il n’y a personne qui s’enquière de mon âme… je suis très misérable… mes persécuteurs sont plus forts que moi ».
Dans son angoisse, il supplie l’Éternel, il crie à lui, il répand devant lui sa plainte, il déclare sa détresse. Il fait alors l’expérience merveilleuse que Dieu est tout près, et « donne des chants de joie dans la nuit » : « Quand mon esprit était accablé en moi, toi tu as connu mon sentier… J’ai crié vers toi, Éternel ! J’ai dit : tu es mon refuge, ma part dans la terre des vivants ».
Abandonné de tous, David apprend à s’appuyer sur Dieu seul : « Jusques-à quand vous jetterez-vous sur un homme et chercherez-vous tous à le renverser ?… Mais toi, mon âme, repose-toi paisiblement sur Dieu ; car mon attente est en lui. Lui seul est mon rocher et mon salut, ma haute retraite » (Ps. 62).
Jusque-là il cherchait aide et secours auprès des autres ; maintenant il va devenir lui-même un centre d’encouragement et de rassemblement pour les pauvres du troupeau. Ses frères, qui précédemment se moquaient de lui, toute la maison de son père, se réfugient auprès de lui dans la caverne. Tout homme qui était dans la détresse, dans les dettes, dans l’amertume, s’assemble vers lui. Il devient leur chef. La petite troupe d’Adullam n’a rien de glorieux, mais la foi l’anime, la foi dans la parole de Dieu qui, par Samuel, a choisi le fils d’Isaï pour être le roi selon son coeur.
David est ici un beau type du Seigneur Jésus, rejeté et méprisé, qui accueille ceux qui reconnaissent leur misère et leur détresse, et trouvent en lui leur centre et leur force.
De ces années errantes, nous retiendrons seulement quelques incidents qui mettent en lumière le genre d’épreuves qu’a dû traverser David, comme aussi son propre caractère.
Les Philistins pillent les aires de Kehila. Que va faire Saül ? Les délivrer ? Il semble ne pas s’en préoccuper. L’intérêt du peuple de Dieu tient trop au cœur de David pour que lui reste inactif. Il interroge l’Éternel pour avoir sa pensée ; lorsqu’il est au clair et a l’assurance de Son chemin, il va avec ses hommes, inflige une grande défaite aux intrus, et délivre les habitants de Kehila.
Qu’en va-t-il récolter ?
Saül ne s’est pas dérangé pour combattre les Philistins ; dès qu’il
apprend que David est à Kehila où il va pouvoir le saisir comme dans une
trappe, il prend ses dispositions pour un siège en règle. David l’apprend,
interroge l’Éternel, qui lui confirme que les hommes de Kehila le livreront aux
mains de Saül. Que faire, sinon s’enfuir encore une fois, mais avec le
sentiment douloureux de l’ingratitude
de
ces hommes pour lesquels, lui et ses compagnons, avaient exposé leur vie. Il
s’en va où il peut, sans se plaindre, sans se venger, sans chercher à faire du
tort à ceux qui le repoussent, reflétant le caractère du Maître bien-aimé qui,
lorsque les Samaritains refuseront de le recevoir dans leur village, simplement
s’en ira plus loin (Luc 9:52-56).
De telles expériences n’arrivent-elles pas aussi aux serviteurs du Seigneur ? Ils ont pu se dévouer, se dépenser pour le bien du troupeau, et n’en récoltent parfois que bien peu de reconnaissance. L’apôtre Paul a pu dire : « Moi, très volontiers, je dépenserai et je serai entièrement dépensé pour vos âmes, si même, vous aimant beaucoup plus, je devais être moins aimé » (2 Cor. 12:15).
Au désert de Ziph, David va
faire une double expérience : la fidélité de Jonathan, et la servilité
des Ziphiens.
Pour la dernière fois, Jonathan et David se retrouvent. Le fils du roi ne craint pas le danger et va vers son ami fortifier sa main en Dieu. Sa foi est persuadée qu’il régnera sur Israël. Mais il ne le suit pas, retourne vers son père, et partagera son sort.
Les Ziphiens désirent se faire bien voir du pouvoir royal. Ils se dérangent pour monter vers Saül à Guibha et lui dire que David se tient caché auprès d’eux. Ils sont tout disposés à le livrer, si le roi descend pour le prendre.
La providence divine délivre David par une action des Philistins, qui oblige Saül à cesser la poursuite (23:27-28), mais un peu plus tard les habitants de Ziph reviennent vers Saül pour s’acquérir sa faveur en indiquant les lieux où David se cache.
Une telle servilité de la part d’hommes qui cherchent l’approbation d’autrui, est une épreuve bien dure pour l’enfant de Dieu qui en est victime. Prenons garde de ne pas dénigrer un serviteur du Seigneur auprès de ceux qui ne l’apprécient guère, ou de le critiquer afin de nous mettre en valeur nous-mêmes auprès de « personnes en vue ». Dans l’espoir de se hausser dans l’estime de « ceux qui sont considérés », certains ne craignent pas de rapporter des choses d’une manière qui fait tort à leurs frères. Le piège est plus grand et plus subtil qu’on ne le croit souvent. Le cœur se serre et voudrait s’indigner… mais ne vaudrait-il pas mieux imiter David et passer outre ?
À deux reprises, durant ces années difficiles, David est placé devant la grande tentation de se débarrasser par sa propre main de son ennemi acharné.
À En-Guédi, dans la caverne, ses hommes lui disent : « Voici le jour dont l’Éternel t’a dit : Voici je livre ton ennemi en ta main, et tu lui feras comme il sera bon à tes yeux » (24:5). Le fugitif aurait pu, légitimement semble-t-il, se défaire de son persécuteur. Il se contente de couper le pan de sa robe, comme preuve de ce qu’il aurait pu faire, et laisse le roi s’échapper. La conscience de Saül le reprend ; il fait des promesses formelles à David de ne plus lui faire de mal, mais il ne tient pas parole.
Quelque temps plus tard, à la colline de Hakila (1 Sam. 26:3-25), une nouvelle occasion est offerte au jeune homme de faire disparaître son ennemi et peut-être de s’assurer ainsi le pouvoir. L’épreuve est plus grande cette fois-ci, puisque Abishaï propose de frapper lui-même le roi endormi. Mais David ne saurait y acquiescer ; la foi et la crainte de Dieu le retiennent : « L’Éternel est vivant, si ce n’est l’Éternel qui le frappera, … Loin de moi, de par l’Éternel, que j’étende ma main sur l’oint de l’Éternel ».
Dans la nuit, de colline à colline, la conversation s’engage entre David et Abner, puis Saül, qui exprime tout son regret, et David tout son chagrin. Le roi dit : J’ai péché ; reviens, mon fils David, car je ne te ferai plus de mal. L’homme de foi ne compte pas sur des promesses humaines, mais exprime sa confiance en Dieu : « Que mon âme soit précieuse aux yeux de l’Éternel, qu’il me délivre de toute détresse ». David s’en va « son chemin », le chemin qui va le conduire finalement à la gloire ; Saül retourne en « son lieu » ; son sort est scellé, la nuit va se refermer sur lui.
David ressentait profondément la haine dont il était l’objet : « Que les fils des hommes qui t’ont incité contre moi, soient maudits devant l’Éternel ». Il souffrait aussi douloureusement d’être éloigné du culte de son peuple : « Ils m’ont chassé aujourd’hui pour que je ne sois pas associé à l’héritage de l’Éternel, disant : Va, sers d’autres dieux ! » Il exprime cette douleur dans le psaume 63, écrit quand il était dans le désert de Juda : « Mon âme a soif de toi, ma chair languit après toi, dans une terre aride et altérée, sans eau, pour voir ta force et ta gloire, comme je t’ai contemplé dans le lieu saint ».
Si l’on oublie ce qu’est le cœur de l’homme, on comprend d’autant moins que David, peu après la magnifique démonstration de sa foi en épargnant Saül, puisse, en consultant ses propres pensées, se dire : « Maintenant je périrai un jour par la main de Saül ; il n’y a rien de bon pour moi que de me sauver en hâte dans le pays des Philistins ». N’avait-il rien appris de sa première expérience ? Il ne consulte pas l’Éternel, mais raisonne avec lui-même, « en son coeur » (*). Il venait d’affirmer sa confiance en Dieu, son assurance qu’il le délivrerait de toute détresse ! Mais sa foi paraît s’évanouir et il suit son propre chemin. Les conséquences en furent amères.
(*) Voir : Feuille aux Jeunes, No 192 : « En son cœur »
À la cour d’Akish, le fugitif trouvera refuge sans doute : Saül renonce à le poursuivre. Lui et ses hommes peuvent habiter tranquilles avec leurs familles. Mais l’ambiance est pénible à Gath ; les idoles et leurs cultes remplissent la capitale.
David obtient d’Akish une ville de la campagne, Tsiklag, où il va habiter un an et quatre mois avec ses hommes. Tout paraît relativement bien aller ; les familles sont réunies ; il ne faut plus sans cesse se déplacer de caverne en caverne pour échapper à la vindicte du roi d’Israël. On fait des incursions sur les ennemis du peuple. Vis-à-vis du chef philistin, on les déguise sous le prétexte de razzias en Juda. Akish en vient à faire de David « le gardien de sa personne », pensant qu’il s’est mis en mauvaise odeur auprès de son peuple.
Mais la situation va s’aggraver : les Philistins décident la guerre contre Israël ; le roi compte sur le fils d’Isaï pour l’accompagner au combat avec ses hommes.
Pour avoir abandonné le chemin de la foi, David s’est mis dans une situation critique, dont il ne sait plus comment sortir. Ainsi le chrétien qui s’associe au monde peut, en un premier temps, paraître prospérer. Mais vient le jour où cette fausse position est intenable.
L’ennemi avait cherché à tuer David par la main de Saül ou par celle des Philistins. Plus tard le roi Hérode fera périr les enfants de Bethléhem pour se débarrasser de Jésus. Mais l’Éternel a délivré son serviteur. Comme le dit David, son âme a été précieuse à Ses yeux.
La violence n’a pas réussi ; Satan va user de ruse pour faire tomber le jeune homme. À la cour, l’orgueil aurait pu le marquer, vu sa position élevée dans l’armée, ou comme gendre du roi. Dans les années errantes, il aurait eu l’occasion de se venger de Saül. À Nob, auprès d’Akhimélec, il a menti, à l’instigation du « père du mensonge ». Va-t-il succomber aux suggestions de celui qui est aussi « meurtrier » ? (Jean 8:44).
L’incident de Nabal met en scène ce nouvel effort de l’adversaire. Ce Nabal, riche en troupeaux, refuse de donner aux jeunes hommes de David les vivres demandés en récompense de la protection que ceux-ci avaient accordée aux bergers du Carmélite (1 Sam. 25). David, très irrité, monte avec sa troupe pour détruire l’homme et tout ce qui lui appartient. Satan va arriver à ses fins : David, sans cause, va verser le sang en se faisant justice à lui-même.
Mais, par le moyen d’Abigaïl, l’Éternel intervient en faveur de son serviteur. La femme de Nabal se hâte et apporte elle-même au jeune chef des vivres en abondance ; elle le met en garde contre le danger de donner libre cours à sa colère. Elle est sûre que la promesse de l’Éternel s’accomplira : David sera prince sur Israël ; mais : « Ceci ne sera point pour toi une occasion de chute, ni un achoppement pour le coeur de mon seigneur, d’avoir sans cause versé le sang et que mon seigneur se soit fait justice à lui-même ». David reconnaît la main de l’Éternel et Lui rend grâces de l’avoir empêché d’en venir aux armes.
Une fois de plus l’ennemi a été déjoué.
Par contre il paraît avoir entièrement réussi lorsque David s’est réfugié chez les Philistins. Dans le défilé des troupes qui montent au combat contre Israël, le fils d’Isaï et ses hommes ne peuvent éviter de passer à l’arrière-garde avec Akish. Quelle détresse sans doute dans l’âme du serviteur de Dieu. Dans quelle fausse situation ne s’est-il pas mis en s’associant aux ennemis de son peuple. Et maintenant, que faire ? S’il combat contre Israël, c’en est fait du trône : jamais le peuple n’acceptera à sa tête un homme qui aurait combattu contre eux. L’oint de l’Éternel donnera-t-il la main aux ennemis de Dieu et des siens ? Cette fois Satan triomphe !
Mais Dieu est fidèle, et dans sa grâce, sa providence intervient en faveur de David. Il se sert des princes des Philistins pour demander à leur chef de renvoyer ces Hébreux. Malgré son désir de conserver son protégé auprès de lui, Akish est ainsi obligé de s’en séparer ; avec quel soulagement, David et ses hommes s’en retournent « au pays des Philistins ». Trois jours de marche les amènent à Tsiklag. On se réjouit de retrouver femmes et enfants, et surtout d’être libérés de la hantise de devoir lutter contre son propre peuple. Mais si Dieu a délivré son serviteur du piège où il s’était mis, la discipline divine va s’exercer.
Tsiklag est détruite, brûlée par le feu ; toutes les femmes, tous les enfants, sont emmenés captifs ; le futur roi et ses hommes sont dans la détresse : ils élèvent leur voix et pleurent jusqu’à ce qu’il n’y ait plus en eux de force pour pleurer. Leur chef, en particulier, est dans une profonde douleur. Le peuple parle de le lapider, car chacun est plein d’amertume à cause de ses fils et à cause de ses filles. Il faut que David touche du doigt les conséquences pénibles d’avoir suivi son propre chemin, de s’être laissé influencer par Satan, sans interroger l’Éternel.
Mais la Parole se plaît à mettre en évidence les ressources de l’enfant de Dieu. Du fond de sa détresse, David peut quand même regarder en haut : « Il se fortifia en l’Éternel, son Dieu ». Un nuage avait éclipsé sa foi, mais la discipline a fait son oeuvre. Dieu reste « son Dieu ». C’est vers Lui qu’il se tourne, en Lui qu’il se fortifie. Depuis son départ du pays d’Israël, pendant les seize mois chez Akish, pas un mot de Dieu, pas une prière, pas un psaume. Il faut les grandes eaux et la profondeur de l’épreuve pour l’amener de nouveau à crier.
Dieu répond. La communion est rétablie. David interroge l’Éternel, qui clairement l’engage à poursuivre les Amalékites. Tout est recouvré, femmes, enfants, butin. Objet de grâce, à son tour David use de grâce envers ceux qui sont restés près du bagage (v. 24), et fait bénéficier ses amis du butin pris sur les ennemis du peuple de Dieu (v. 26-31). Au même moment, Saül périssait sur les montagnes de Guilboa.
Satan n’a pas atteint son but. Il se retire pour un temps, mais saura plus tard revenir à la charge.
David a été formé pour la tâche qui l’attend. Satan a été et sera déjoué. De qui le fils d’Isaï recevra-t-il la couronne ?
L’alliance avec Jonathan semblait la lui garantir, mais ce n’est pas de Jonathan qu’il devait la recevoir.
Il aurait pu se l’assurer lui-même, en tuant Saül, lorsqu’à deux reprises il en a eu l’occasion. Ce n’était pas le chemin de Dieu.
Va-t-il l’accepter de la main de l’Amalékite qui la lui apporte, après avoir dépouillé le cadavre de Saül sur la montagne de Guilboa ? (2 Sam. 1) David traite cet homme comme il l’a mérité d’après ses propres paroles, et le met à mort pour avoir étendu sa main sur l’oint de l’Éternel. Ce n’est pas de l’Amalékite qu’il doit recevoir la couronne.
D’ailleurs, par son attitude chez les Philistins, il avait perdu moralement tout droit au trône. Seule la grâce pouvait l’y placer : « Ainsi dit l’Éternel des armées : je t’ai pris des parcs, d’auprès du menu bétail, pour que tu fusses prince sur mon peuple d’Israël ; et j’ai été avec toi partout où tu as marché ; et j’ai retranché tous tes ennemis de devant toi, et je t’ai fait un grand nom, comme le nom des grands qui sont sur la terre » (2 Sam. 7:8-9).
Après la mort de Saül, conscient de cette grâce, David interroge l’Éternel pour savoir où aller. Dieu le conduit à Hébron. Et là, les hommes de Juda, apparemment sans qu’il les ait sollicités, viennent et l’oignent pour roi sur la maison de Juda (2:4).
David a trente ans, âge qu’aura son divin Maître lorsqu’il entrera dans son ministère (2 Sam. 5:4 ; Luc 3:23). N’est-il pas frappant qu’il ait composé la plupart de ses psaumes avant cet âge-là ? Tout particulièrement ceux qui parlent le plus de foi, de confiance, de communion avec Dieu. Ce ne sont pas les années qui comptent, mais la communion et l’attachement au Seigneur ; un croyant marchant avec lui peut faire plus de progrès en peu de temps, qu’en toute une vie si son coeur est partagé.
Mais de qui le fils d’Isaï recevra-t-il la couronne d’Israël ? Abner prend Ish-Bosheth, fils de Saül, et l’établit roi sur le peuple tout entier. Il en résulte une guerre civile, qui fut longue, entre la maison de Saül et la maison de David (3:1). À la suite d’une dispute avec Ish-Bosheth, Abner veut faire alliance avec David et lui assurer la domination sur tout le peuple. Mais ce n’est pas d’Abner que David doit recevoir la couronne d’Israël. L’assassinat du général par Joab n’a pas lieu à l’instigation du roi (3:37), mais Dieu s’en sert pour éviter que, de la main d’un homme si bien intentionné fût-il, la couronne soit donnée à son oint.
David n’acceptera pas non plus l’offre des meurtriers d’Ish-Bosheth, qui se vantent de l’avoir assassiné dans son lit, et apportent sa tête à Hébron. Il fait mettre à mort ces violents et ne s’en sert pas, comme eux l’espéraient, pour affermir son royaume.
Vingt ans peut-être se sont écoulés depuis que le jeune berger a été oint par Samuel. Années de mise à l’épreuve de la foi, de tentations, de discipline. Le moment de Dieu est arrivé : « Toutes les tribus d’Israël vinrent vers David à Hébron, disant : …L’Éternel t’a dit : Tu paîtras mon peuple Israël et tu seras prince sur Israël. Et tous les anciens d’Israël oignirent David pour roi sur Israël » (5:3).
Le chemin avait été long ; la foi avait eu ses hauts et ses bas, et ses éclipses ; malgré tout elle avait été maintenue ; elle trouvait enfin sa récompense.
Non que la formation soit terminée ; elle durera toute la vie ; pourtant, façonné à l’école de Dieu, David entre dans une nouvelle période de sa carrière, celle de roi responsable.
David avait donc trente ans lorsqu’il devint roi à Hébron. Sept ans et demi plus tard, il était oint sur tout Israël.
Le règne débutait dans une époque difficile. Le désastre de Guilboa avait remis Israël sous la coupe des Philistins. La guerre civile entre Juda et les tribus n’était pas faite pour apaiser les esprits et fortifier le peuple.
Qu’allait-il advenir du jeune roi qui commençait son règne dans des circonstances aussi défavorables ?
Lors de la conquête du pays, Juda s’était temporairement emparé de Jérusalem (Juges 1:8) ; la ville avait été rapidement reprise par les Jébusiens (Juges 1:21), qui en avaient gardé la possession jusqu’aux jours de David. Elle était pourtant le lieu que l’Éternel avait choisi « pour y faire habiter son nom » (Deut. 12:11). David en fait la conquête, malgré les vantardises des habitants, qui prétendaient que les aveugles et les boiteux suffiraient à repousser le roi d’Israël et ses troupes. Jérusalem, qui de fait n’appartenait à aucune tribu, mais se trouvait entre Juda et Benjamin, devient ainsi la capitale politique du pays, évitant d’avantager la tribu royale par rapport aux autres, ou celles-ci vis-à-vis de Juda. Surtout elle devient le centre religieux, où l’arche sera amenée.
Le secret de la victoire de David est souligné une fois de plus : « L’Éternel était avec lui » (2 Sam. 5:10 ; 1 Chron. 11:9).
Au désert, l’arche, type de Christ, était le centre d’Israël lorsqu’ils campaient (Nomb. 1:52-53) et lorsqu’ils se mettaient en route (Nomb. 10:21). À certaines occasions elle allait devant eux : pour leur chercher « un lieu de repos », en Nombres 10:33 ; pour ouvrir le chemin à travers le Jourdain, fleuve de la mort, et les introduire dans le pays promis, en Josué 3. Sur la montagne d’Ébal elle contrebalançait la malédiction qui y était prononcée (Josué 8:33 ; cf. Gal. 3:13 !). Établie ensuite à Silo (Josué 18:1) où vint Samuel (1 Sam. 1:3), elle en fut tirée par le peuple avec le dessein d’en être secouru dans sa lutte contre les Philistins (1 Sam. 4:4). Ceux-ci s’en emparent et la conservent quelques mois ; mais comme elle n’attire sur eux que des jugements, ils la renvoient en Israël, sur le chariot tiré par les vaches qui d’elles-mêmes se dirigent vers la frontière de Beth-Shemesh. L’arche demeure à Kiriath-Jéarim, dans la maison d’Abinadab, où elle semble oubliée (1 Sam. 7:1 ; Ps. 132:6), si grand était le désordre moral au sein du peuple.
Durant les jours de Saül, on ne la consulte pas (1 Chron. 13:3). Enfin David prend à cœur, comme en témoigne le psaume 132, de la faire monter en Sion.
Il se concerte avec les chefs de l’armée, et rassemble toute l’élite de ses troupes pour transporter le précieux coffret de Kiriath-Jéarim à Jérusalem. Au lieu de rechercher dans la loi de Moïse comment l’arche devait être portée, David imite les Philistins qui l’avaient mise sur un chariot (2 Sam. 6:3 ; cf. 1 Sam. 6:7-8). Malheur s’en suit ; les boeufs ayant trébuché, Uzza touche l’arche risquant de tomber, et meurt sur-le-champ. Le roi, très irrité, la fait détourner dans la maison d’Obed-Édom, où elle séjourne trois mois et amène la bénédiction sur sa famille.
La discipline divine porte ses fruits ; David se rend compte qu’il ne convient pas que l’arche de Dieu soit portée par personne, excepté les lévites. L’Éternel avait fait une « brèche » parmi le peuple, car ils ne l’avaient pas recherché « conformément à l’ordonnance » (1 Chron. 15:2, 13).
Ce récit ne nous montre-t-il pas l’importance de nous soumettre à la Parole, tout spécialement lorsqu’il s’agit de rendre culte à Dieu ? « Nous rendons culte par l’Esprit de Dieu » (Phil. 3), non selon des rites, ou une liturgie, ou sous une direction humaine. D’autre part, il faut l’assurance du salut pour réellement louer Dieu de sa grâce et de sa délivrance en Jésus Christ : « Par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés… Ayant donc une pleine liberté pour entrer… par le sang de Jésus … approchons-nous » (Héb. 10). Il importe aussi d’être réunis au nom du Seigneur (Matt. 18:20), avec tout ce que cela implique : la certitude de sa présence, et notre union, avec lui et tous ses rachetés, en un seul corps. Rendre culte sur une autre base ne peut pas être conforme à la pensée de Dieu et rencontrer sa pleine bénédiction. Les bonnes intentions ne suffisent pas.
Depuis la Mer Rouge, sauf au puits de Beër (Nomb. 21:16), pratiquement on n’avait plus chanté. Lorsque l’arche monte en Sion, portée par les lévites, David institue les chantres, avec les instruments de musique qu’ils font retentir en élevant leurs voix avec joie. Il remet entre les mains d’Asaph, ce psaume, « le premier, pour célébrer l’Éternel » (1 Chron. 16:7). La joie remplit les coeurs (1 Chron. 15:25, 28), et des sacrifices sont offerts lorsque l’arche est placée dans la tente dressée pour elle en Sion.
Le psaume composé par le roi pour l’occasion, rappelle les délivrances de l’Éternel, annonce les gloires futures, et surtout souligne : « La force et la joie sont dans le lieu où Il habite » (1 Chron. 16:27).
Le règne de David a été affermi. Il habite maintenant dans une maison de cèdre ; mais l’arche est « sous des tapis » (1 Chron. 17:1). D’où l’excellente pensée de construire pour elle, pour l’Éternel, une maison digne de Son nom. C’était en harmonie avec Exode 15:17.
Le désir était bon, mais David n’était pas l’instrument que Dieu avait en vue pour cela. Le prophète vient le lui déclarer : « Tu ne me bâtiras pas de maison pour y habiter, dit l’Éternel… Je susciterai après toi ta semence, qui sera un de tes fils, … lui me bâtira une maison. »
David rappellera plus tard le motif d’un tel choix, motif discrètement tu en 1 Chroniques 17, mais que lui-même rapporte : Tu es un homme de guerre, et tu as versé le sang (1 Chron. 28:3).
N’arrive-t-il pas que l’on souhaite accomplir tel ou tel service pour le Seigneur, et voilà, il n’en ouvre pas la porte, malgré nos prières ? L’intention était bonne, le désir dans la ligne de sa Parole, mais… Dieu avait en vue un autre instrument pour ce service-là. Que faire ?
David, à la nouvelle apportée par Nathan, « entre et s’assied devant l’Éternel » (v. 16). La déception est grande, sans doute ; mais il la prend de la main de son Dieu, avec toute humilité, dans le sentiment des grâces nombreuses dont il a été, dont il est, et dont il sera l’objet. Lui ne saurait bâtir une maison à l’Éternel, mais l’Éternel lui bâtira une maison. La bénédiction de Dieu reposera sur sa descendance « à toujours », expression qui prolonge la vision jusqu’au Messie, le vrai Fils de David, dont le règne glorieux amènera la paix sur la terre.
Même si Dieu ne peut donner suite au voeu de son serviteur, il le bénit. N’en sera-t-il pas de même de tout jeune croyant, qui, ayant désiré accomplir un service pour Lui, verra cette porte se fermer, et un autre remplir la tâche entrevue ?
Qu’il entre dans la présence du Seigneur, qu’il repasse devant lui toutes les bénédictions dont il l’a comblé et qu’il lui promet encore. Qu’il accepte la déception de sa main, et reste à sa disposition pour tout autre service que lui choisirait.
Les versets ci-dessus donnent un petit résumé de l’ordre que David a su, sous la direction de Dieu, instituer dans son royaume. Il règne sur tout Israël ; il fait droit et justice ; tout est bien organisé, soit pour « les affaires de Dieu », soit pour « les affaires du roi » (1 Chron. 26:32).
En 2 Samuel 20:23-26, nous retrouvons à peu près les mêmes termes, vers la fin du règne, après la révolte d’Absalom. Une différence cependant ressort : il n’est plus parlé des fils du roi, qui en 2 Samuel 8 étaient « les principaux officiers » ! La sombre tragédie qui a dévasté la famille de David, suite à sa faute, a laissé ses traces. Le roi s’était réjoui d’avoir ses fils autour de lui, leur confiant des charges appropriées ; maintenant un Ira, le Jaïrite, est le principal officier ; et combien d’intrigues surgiront quant à la succession au trône, jusqu’à ce que Salomon y soit établi.
Le règne de David commence immédiatement après les malheurs de Guilboa. Les Philistins, qui asservissaient Israël du temps des Juges, même au début du règne de Saül, et s’étaient vus partiellement repoussés hors du pays, triomphent de nouveau. À peine apprennent-ils que David est roi sur tout Israël, qu’ils montent pour le chercher (2 Sam. 5:17-25).
Que va faire le roi ? Saül a été défait. Le peuple est encore faible, mal organisé ; tous ont les yeux sur lui. Comme dans les années de sa jeunesse, il ne manque pas de consulter l’Éternel. Celui-ci l’engage à monter et promet de livrer les Philistins en sa main. Première victoire. Une nouvelle attaque amène une dépendance renouvelée. l’Éternel indique un autre chemin, une nouvelle victoire est assurée ; David inflige aux Philistins une grande défaite.
Après l’établissement de l’arche en Sion et le désir du roi de construire le temple, David alors subjugue les Philistins et les domine (2 Sam. 8:1). Pourtant le combat contre ces ennemis intérieurs du peuple ne cessera pas ; au chapitre 21, v. 15-22, que de fois ne lisons-nous pas « encore » et « encore ».
Les Philistins représentent l’opposition interne au sein du peuple de Dieu. Dans la chrétienté, beaucoup qui portent le nom de Christ sont, de fait, ses ennemis : ceux qui démolissent la Parole de Dieu, en nient l’inspiration, la dissèquent ; ceux qui introduisent les éléments humains ou les erreurs funestes dans l’enseignement ou le culte. La lutte contre de tels ennemis durera jusqu’à la fin.
Israël était entouré de toutes sortes de peuplades qui lui voulaient du mal. Successivement David soumet Moab, Hadadézer, Tohi, les Syriens, Édom, les fils d’Ammon (2 Sam. 8 et 10).
Retenons surtout l’expression répétée : « L’Éternel sauvait David partout où il allait » (2 Sam. 8:6, 14). Aussi, dans le cantique qu’il adresse à son Dieu « le jour où il l’eut délivré de la main de tous ses ennemis et de la main de Saül », entendons-nous le roi attribuer toute la victoire au Seigneur : « L’Éternel est mon rocher, mon lieu fort, et celui qui me délivre… mon bouclier et la corne de mon salut, ma haute retraite et mon refuge… C’est lui qui a donné de grandes délivrances à son roi, et qui use de bonté envers son oint, envers David, et envers sa semence à toujours » (2 Sam. 22).
À la cour, au désert, Satan avait cherché à faire disparaître, ou à faire tomber David. Pendant la première partie de son règne, il semble se tenir un peu à l’écart, malgré des manquements que la Parole relève ici ou là chez David. Mais lorsque le roi dépasse l’âge de cinquante ans, l’ennemi revient à la charge. Le fait que la Parole de Dieu ne cache pas ses fautes, mais nous les présente avec une grande précision, n’est-il pas une démonstration interne de l’inspiration de la Bible ? En effet, si l’on songe au prestige national, convenait-il que, dans les Écritures sacrées d’Israël, soient relevées de telles chutes, avec leurs conséquences ? Ne valait-il pas mieux les passer sous silence ? Les hommes l’auraient certainement fait, si la main de Dieu et son Esprit n’avaient été là pour nous conserver ce qui devait servir d’avertissement à bien des générations successives de croyants.
Tout avait si bien été jusqu’ici. David, roi responsable, marchant avec Dieu et comptant sur lui, avait assuré à son peuple stabilité intérieure et victoires extérieures. Pourquoi n’en serait-il pas de même jusqu’au bout ?
Mais Satan cherchait l’occasion de faire tomber le roi selon le coeur de Dieu. « Que celui qui croit être debout, prenne garde qu’il ne tombe » (1 Cor. 10), reste une exhortation toujours actuelle.
David avait veillé au matin, lorsque, jeune homme, il gardait le bétail, ou combattait Goliath, ou se trouvait être soudain l’objet des honneurs de la cour. Il avait veillé à midi lorsque, roi responsable, avec le secours de Dieu, il affermissait son royaume. Plus des deux tiers de la vie s’étaient écoulés, et l’homme mûr ne veille pas ! Joab et l’armée s’en vont combattre les fils d’Ammon ; lui reste à Jérusalem ; il passe une partie de la journée sur son lit de repos ; « au temps du soir » ( !), il se promène sur le toit de sa maison et… « le voyageur » dont parlera Nathan (2 Sam. 12:4) vient chez « l’homme riche », le roi comblé des faveurs de Dieu, qui a montré sa fidélité, sa foi, son obéissance pendant tant d’années ! La convoitise du désir attire les regards de David ; il la satisfait et, quand il en apprend les conséquences, au lieu de se repentir, il ne cherche qu’à dissimuler sa faute. « Chacun est tenté, étant attiré et amorcé par sa propre convoitise ; puis la convoitise, ayant conçu, enfante le péché ; et le péché, étant consommé, produit la mort » (Jacq. 1:14-15).
La pente est glissante ; Satan sait bien entraîner sa victime toujours plus loin dans le mal. Il faut absolument qu’Urie revienne au foyer, mais celui-ci refuse ; David l’enivre, mais sans succès. Que faire, sinon ordonner à Joab de placer le soldat dans la première ligne de bataille, où il trouvera la mort par la main des fils d’Ammon. Le deuil passé, David recueille la femme de son capitaine ; l’enfant naît ; tout va bien, rien n’est connu… « mais la chose que David avait faite fut mauvaise aux yeux de l’Éternel ».
Dieu aimait trop son serviteur pour le laisser dans cet état. Il va intervenir. Pendant près d’un an, il attend la repentance, mais la conscience de David ne parle pas. Il n’y a pas un mot de l’Éternel dans tout le chapitre 11. Nous comprenons qu’un Saül ait voulu faire périr David par la main des ennemis. Mais comment concevoir que l’homme qui a écrit tant de psaumes, qui a su exprimer la foi et la confiance en son Dieu comme peu d’autres, qui a proclamé la grandeur et la bonté de l’Éternel, puisse rédiger la lettre suivante : « Place Urie sur la première ligne au fort de la bataille, et retirez-vous d’auprès de lui, afin qu’il soit frappé et qu’il meure » ! Cela nous fait toucher du doigt ce que nous sommes et où nous pouvons tomber, si nous manquons de vigilance et que la grâce de Dieu ne nous garde pas. C’est le meurtre après l’adultère.
La loi était catégorique contre ces péchés (Deut. 5:17-18) ; David le savait. Lévitique 20:10 commandait de lapider de tels hommes. Pourtant, ce vrai croyant, aveuglé par Satan et par sa propre passion, ne se rend pas compte de ce qu’il a fait.
Il faut la visite de Nathan, la parabole qu’il raconte, la déclaration terrible : « Tu es cet homme », pour que les yeux du coupable s’ouvrent et que, atteint au plus profond de sa conscience, il déclare : « J’ai péché contre l’Éternel ».
À celui qui se repent et confesse sa faute, le pardon de Dieu est accordé : « L’Éternel a fait passer ton péché : tu ne mourras pas ». Au psaume 51 il reconnaît son crime, il en voit toute la noirceur, et compte sur la grâce divine pour laver, pour purifier, pour effacer. « Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité » (1 Jean 1). « Juste », non envers nous, mais envers Christ qui a porté nos fautes et les a expiées à la croix, — les nôtres, aussi bien que celles de David.
Si, quant à la culpabilité et à ses résultats éternels, Dieu pardonne, il subsiste néanmoins, — sous son gouvernement, et dans la mesure où il le juge nécessaire, — les conséquences de nos fautes.
Nathan rappelle à David toutes les bontés de Dieu envers lui. Mais il ne minimise pas son péché : « Tu as frappé avec l’épée Urie… sa femme tu l’as prise… Maintenant l’épée ne s’éloignera pas de ta maison à jamais, parce que tu m’as méprisé… Tu l’as fait en secret, et moi je ferai cette chose-là devant tout Israël ».
La « brebis » devra être rendue au quadruple : David verra mourir l’enfant de Bath-Shéba ; Amnon sera assassiné ; Absalom perdra la vie dans la bataille ; et Adonija sera mis à mort.
Après avoir délivré son message, « Nathan s’en alla dans sa maison ». Il va laisser le roi coupable, seul avec sa conscience dans la présence de Dieu, pour près d’une année (cf. 12:25). Les psaumes 51 et 32 et peut-être 38, témoignent des exercices d’âme de David durant cette période douloureuse. L’Éternel frappe l’enfant, qui tombe très malade ; le roi supplie ; il manifeste extérieurement son repentir par le jeûne et en passant la nuit couché sur la terre. Pendant sept jours, il mène deuil, il pleure à cause de son fils. Mais la discipline de Dieu est sur lui ; le châtiment s’accomplit ; l’enfant meurt ; les serviteurs n’osent le dire, mais le père s’en rend compte.
Alors — et là brille la réalité de la foi et de la vie divine en lui — David se lève, se lave, s’oint, change de vêtements ; il entre dans la maison de l’Éternel et se prosterne. Quelle soumission dans ce silence qui s’incline devant la volonté suprême qui l’a frappé, et dont il accepte la discipline. Les serviteurs s’étonnent, mais David témoigne de sa foi, sa foi en la résurrection, même si celle-ci n’est encore révélée qu’en figure : « Moi, je vais vers lui, mais lui ne reviendra pas vers moi ». Il se courbe sous la main de Dieu, et s’en remet à sa grâce infinie.
Il peut consoler Bath-Shéba ; et l’Éternel met son sceau sur la restauration de son serviteur en lui donnant un fils qui sera son héritier, Salomon, le roi de gloire, Jedidia, le bien-aimé de l’Éternel.
Nos cœurs ont grand-peine à
concevoir la restauration complète
d’un
frère tombé ; mais la Parole nous montre que, si les conséquences
terrestres de la faute peuvent subsister et le discernement spirituel être
affaibli, l’âme peut retrouver la lumière et la joie de son Seigneur, s’il y a
eu un profond
jugement de soi. Quelle
chose admirable que la restauration d’une âme après une telle chute ! Le
service de David comme roi est maintenu ; dans le psaume 51 il pourra même
dire : « J’enseignerai tes voies aux transgresseurs, et des pécheurs se
retourneront vers toi ». Il écrira encore des psaumes ; il pourra préparer
tout ce qu’il faut pour le temple, et ne s’endormira qu’après avoir vu Salomon
installé sur le trône d’Israël. C’est la grâce ! Cette grâce que nous
avons tant de peine à recevoir dans sa plénitude pour nous-mêmes, et encore
moins pour les autres.
Mais les suites de sa chute vont obscurcir, longtemps encore, les dernières années de la vie de David. Il donnera la preuve de la restauration de son âme en acceptant ces châtiments successifs, humblement et en silence.
L’Éternel avait dit qu’il multiplierait Israël comme les étoiles des cieux (1 Chron. 27:23). Au début de son règne, le roi n’avait que quelques centaines d’hommes autour de lui. Avec les années, toute une armée avait été formée, équipée, exercée. Dans le cœur de David montait un certain orgueil de savoir de combien d’hommes il disposait maintenant. Voulait-il en faire parade ? Voulait-il s’appuyer sur ses troupes plus que sur l’Éternel qui l’avait si manifestement sauvé partout où il allait ? La Parole ne le dit pas. Mais en précisant que d’un côté l’Éternel l’incita à dénombrer Israël, et d’un autre côté que Satan le poussa à le faire, ne nous montre-t-elle pas que Dieu permet la tentation pour manifester ce qui est dans le cœur de son serviteur ? Dieu voit ce qui nécessitait sa discipline et se sert même de l’ennemi pour cela.
Malgré la réticence de Joab, il faut plus de neuf mois à David pour se rendre compte de son erreur : son « coeur le reprit » (2 Sam. 24:10). Il reconnaît qu’il a grandement péché, et demande à Dieu de faire passer son iniquité. Le pardon est acquis, mais Dieu ne peut supporter l’orgueil : celui qui s’élève doit être abaissé. Là encore son gouvernement va suivre son cours. De la part du Seigneur, le prophète Gad impose au roi le choix entre trois châtiments ; David s’en remet aux mains de l’Éternel plutôt qu’aux mains des hommes.
La peste sévit dans le pays. David s’offre lui-même en rançon pour le peuple : « Voici, moi j’ai péché, et moi j’ai commis l’iniquité ; mais ces brebis, qu’ont-elles fait ? Que ta main je te prie soit sur moi et sur la maison de mon père ». Mais Dieu ne saurait accepter un tel sacrifice : « Un homme ne pourra en aucune manière racheter son frère, ni donner à Dieu sa rançon (car précieux est le rachat de leur âme, et il faut qu’il y renonce à jamais), afin qu’il vive encore, à toujours, et qu’il ne voie pas la fosse » (Ps. 49:7-9).
À l’injonction du prophète, le roi monte pour dresser un autel à l’Éternel dans l’aire d’Arauna, le Jébusien. Lui-même ne peut s’offrir pour détourner sur sa maison le châtiment de son peuple ; il doit présenter à l’Éternel un holocauste et des sacrifices qui parlent d’un plus grand que David, de la Victime parfaite et sans tache, qui s’offrira pour ôter nos péchés.
Sur le mont Morija, là où Abraham avait offert Isaac, s’élève la fumée du sacrifice qui monte vers Dieu et arrête son jugement. Salomon discernera que là doit être construit le temple, « sur la montagne de Morija, où l’Éternel était apparu à David, son père, sur l’emplacement que David avait préparé dans l’aire d’Arauna, le Jébusien ».
N’est-il pas frappant de constater que l’autel vient en premier lieu, puis le temple ? D’abord le sacrifice de Genèse 22, d’abord l’holocauste de l’aire d’Arauna, d’abord l’autel en Esdras 3 ; ensuite la construction de la maison. On ne peut s’approcher de Dieu comme pécheur que par la croix. On ne peut venir devant Lui comme adorateur que sur la base du sacrifice parfaitement accompli à la colline du Calvaire, tout près de Morija.
Après les années de formation et de mise à l’épreuve, David était devenu roi responsable. Malgré ses chutes il reste un modèle de foi et de fidélité envers Dieu pour toutes les générations qui ont suivi. Pourquoi n’en fut-il pas de même comme père de famille ? Sans y insister outre mesure, la Parole nous a laissé, dans divers incidents, un tableau qui montre sa faiblesse, parce qu’il était trop souvent conduit par ses sentiments naturels. C’est surtout le deuxième livre de Samuel, écrit sous l’angle de la responsabilité, qui relève ses fautes, tandis que le premier livre des Chroniques, présenté du point de vue de la grâce, les passe en général sous silence.
La polygamie était d’usage en Israël. Pourtant, quant au roi, il était dit : « Il n’aura pas un grand nombre de femmes » (Deut. 17:17). Au commencement il n’en était pas ainsi. Le Nouveau Testament, par la voix du Seigneur Jésus dans les Évangiles, par l’apôtre dans les épîtres, nous montre que le mariage chrétien est d’une conception bien différente : « Que chacun ait sa propre femme, et que chaque femme ait son mari à elle » (2 Cor. 7:2). Tant Jésus que Paul rappellent les paroles de la Genèse : « L’homme laissera son père et sa mère et sera uni à sa femme ; et les deux seront une seule chair » (Matt. 19:5 ; Éph. 5:31). Cette union intime des époux chrétiens, telle que Éphésiens 5:22-33 la décrit, est bien différente de la famille que pouvait concevoir l’époque d’Israël. On ne saurait donc appliquer littéralement au mariage chrétien, tout ce qu’il en est dit dans les livres de Moïse en particulier.
Si David a eu plusieurs femmes, ce n’est pas en cela qu’il nous est utile, mais plutôt en considérant le caractère de quelques-unes d’entre elles.
La femme de Nabal n’était pas seulement belle de visage ; elle avait du bon sens (v. 3). Qualité qu’il fait bon rencontrer, et qui fait plus pour la solidité et l’harmonie d’un foyer que la haute intelligence ou le rang social ! Tout le chapitre développe ce bon sens, et la foi qui l’animait. Abigaïl ne mettait pas en doute la promesse de l’Éternel que David serait un jour prince sur Israël (v. 30). Avertie par un de ses serviteurs, elle se hâte de mettre tout en oeuvre pour parer le coup qui menace sa maison. Elle va donner abondamment à David les vivres qu’il a souhaités ; elle paie de sa personne en allant au-devant de lui ; et surtout elle a à cœur qu’il ne commette pas un acte qui serait pour lui un achoppement, le jour où il régnerait (v. 31).
David voit dans son intervention la main de l’Éternel et l’en bénit (v. 32 et 39).
Lorsque nous nous lançons à faire quelque chose sous l’empire de la colère ou de l’indignation, demandons-nous ce que nous en penserons plus tard. Y aura-t-il des regrets de s’être livré à tel ou tel acte ? et qu’en sera-t-il au jour où tout sera mis en lumière au tribunal de Christ ?
« L’Éternel m’a retenu » (v. 39). Ne pouvons-nous pas en dire autant ? Que de fois le Seigneur, même à notre insu, nous retient de commettre un acte malheureux, ou de nous livrer à une démarche que nous regretterions ensuite. C’est la grâce prévenante de notre Ami fidèle.
Lorsque David la demande pour épouse, Abigaïl se lève en hâte et répond à son voeu : « Voici ta servante sera une esclave pour laver les pieds des serviteurs de mon seigneur ». Elle qui avait été l’épouse d’un grand propriétaire, prend une place humble, et va lier son sort à un fugitif, qui erre de caverne en caverne, toujours en danger de mort. Elle accepte l’inconfort, les risques (pillage à Tsiklag !), l’opprobre qui s’attache à David, parce qu’elle l’aime. Sans l’amour, pur, profond, une union ne peut se développer dans une harmonie heureuse, sous le regard du Seigneur.
Akhinoam et Abigaïl ne suffisaient-elles pas à David ? Pourquoi prend-il encore Maaca ? Lui fallait-il, pour son prestige, du sang royal dans sa famille ? Elle était en effet fille de Talmaï, roi de Gueshur. Mais cet avantage extérieur était acheté bien cher : s’unir à une princesse venant d’un milieu étranger et idolâtre. Elle sera mère d’Absalom, dont le nom seul suffit à rappeler tous les malheurs qui finalement découlèrent d’une telle union. D’aucune manière et en aucun temps, il ne convient à un enfant de Dieu de s’allier à un incrédule. C’est le « joug mal assorti », avec tout ce qu’il comporte de souffrances et de dangers.
Mical, fille de Saül, avait été la première femme de David ; quand il s’était enfui, elle avait été donnée à Paltiel, fils de Laïsh. Lorsqu’Abner propose une alliance au roi, celui-ci exige de recouvrer Mical. Là aussi, sans doute, question de prestige : elle était la fille de Saül, une princesse. Peu importe la douleur de son mari, David la veut.
2 Samuel 6:20-23 nous montre quels chagrins il en a récoltés. Tout heureux du retour de l’arche, ayant béni le peuple au nom de l’Éternel, il s’en retourne pour bénir sa maison ; Mical vient à sa rencontre, non pour l’honorer, ni pour apprécier ce qu’il a fait, mais pour se moquer de lui. David a voulu le prestige, il rencontre le dédain. Plusieurs n’en ont-ils pas fait l’expérience à sa suite ?
Entre-temps David a pris plusieurs autres femmes : à Hébron (2 Sam. 3:2-5), puis à Jérusalem (2 Sam. 5:13). Bien plus tard, Bath-Shéba entre dans sa maison, dans les circonstances que nous avons vues. Elle était petite-fille d’Akhitophel (2 Sam. 11:3 ; 23:34) et devint donc la mère de Salomon. Son influence fut importante dans la succession au trône (1 Rois 1:11, 31), quoique David agisse dans l’assurance de la pensée de Dieu.
David avait trouvé à Hébron une maison, une famille, de jeunes enfants, sept ans de joie. Mais rapidement ses descendants n’étaient-ils pas devenus trop nombreux pour que leur père puisse s’en occuper utilement ? (2 Sam. 3:2-4 ; 5:13-16.) Pendant les quelque vingt premières années de son règne, alors qu’ils étaient jeunes, David était sans doute fort absorbé par ses devoirs de roi et de chef d’armée, par le service religieux du temple et l’organisation du royaume. Pourtant ses fils avaient reçu la place de « principaux officiers » (2 Sam. 8:18). Mais, après l’affaire de Bath-Shéba, se montrent tous les fruits qu’une éducation insuffisante a portés.
En Amnon nous voyons la chair
se donner libre cours. Au lieu de
juger ses sentiments coupables, il en est tourmenté jusqu’à en tomber malade.
Son ami Jonadab, homme très habile, qui ne cherchait que son propre avantage,
est pour lui un bien mauvais conseiller (v. 5), et au moment critique,
l’abandonne : lorsqu’Absalom a décidé d’assassiner son frère, Jonadab
n’avertit pas son cher ami Amnon (v. 32). Prenons garde aux amis trop habiles,
qui savent flatter nos passions, et quand nous sommes en difficultés, nous
laissent froidement tomber. L’amitié dans le Seigneur est l’un des plus grands
bienfaits de la vie, mais il faut du discernement avant d’accorder sa confiance
à quelqu’un.
Avec l’empressement de la chair, Amnon suit le conseil de son ami. Lorsque David doit donner son acquiescement à la visite de Tamar auprès de son frère malade, dans la chambre intérieure, le roi ne se méfie de rien. Pourvu qu’il fasse plaisir à ses enfants ! Lui-même engage sa fille à aller dans la maison d’Amnon et à lui apprêter un mets.
La jeune fille était attrayante, disposée à rendre service ; pourtant, si elle avait eu affaire avec Dieu, se serait-elle laissée inconsciemment entraîner au piège qui l’a désolée ? Dina, fille de Jacob, en Genèse 34, ne se rendait pas compte des suites de sa visite de politesse à Sichem. Mais Dieu le savait. Combien il importe de veiller, et aussi d’avoir affaire avec le Seigneur, avant d’accepter une invitation ou une proposition quelconque. On peut agir dans l’innocence de son cœur, sans entrevoir du tout ce qui en découlera ; mais le Seigneur le sait d’avance, et il peut garder celle qui se confie vraiment en Lui : « Il y a telle voie qui semble droite à un homme, mais des voies de mort en sont la fin ».
Le malheur une fois arrivé, combien les conséquences en furent pénibles. Amnon hait Tamar ; Tamar est désolée, David, très irrité ; Absalom abhorre son frère aîné, n’attendant que l’occasion de le faire périr.
Après avoir fait frapper Amnon (13:28), Absalom s’enfuit. La désolation est générale dans la famille. Les fils du roi arrivent, élèvent leur voix et pleurent ; le roi aussi, et tous ses serviteurs, versent des larmes très amères. Mais… le roi David languissait d’aller vers Absalom !
Les sentiments naturels de son coeur de père le pousseront finalement à faire revenir le fils coupable (14:23) ; et après deux ans d’attente, à le recevoir et à le baiser (14:33). Dans un sens, on peut comprendre ce pardon, mais était-il selon Dieu ? Certainement pas. Dieu pardonne à qui se repent, mais il demande d’abord la repentance et la confession : « Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité ». Dans sa grâce, il pardonne, et peut tirer le bien du mal ; mais dans son gouvernement, les conséquences doivent souvent subsister, selon la discipline éducative du Père.
David pardonne à Absalom selon des sentiments humains, sans se préoccuper si, à l’exemple de son père lors du meurtre d’Urie, le jeune homme s’est repenti ; la faiblesse du roi ne donne aucune suite à la vengeance exercée par son fils. Faut-il s’étonner qu’après cela David manque complètement de discernement et ne se rende pas compte des intrigues de l’ambitieux, qui dérobe les cœurs des hommes d’Israël, et va se faire proclamer roi à Hébron ?
David avait environ soixante-cinq ans ; depuis douze ou treize ans Urie était mort ; le châtiment continuait : l’épée ne s’éloignait pas de sa maison, et la corruption allait s’y montrer au grand jour (16:22).
Pour épargner Jérusalem, le roi décide de fuir, acceptant de la part de Dieu cette nouvelle épreuve : « Si je trouve grâce aux yeux de l’Éternel, alors il me ramènera… Et s’il dit ainsi : Je ne prends point de plaisir en toi ; — me voici, qu’il fasse de moi ce qui sera bon à ses yeux ».
Il courbe la tête sous la discipline divine ; quand un peu plus tard, Shimhi le maudit, lançant des pierres et calomniant, David l’accepte comme de la main de Dieu, en disant : « Laissez-le, et qu’il maudisse ! car l’Éternel le lui a dit. Peut-être l’Éternel regardera mon affliction et l’Éternel me rendra le bien pour la malédiction qui tombe aujourd’hui sur moi ».
David est âgé maintenant ; il est fatigué du chemin ; mais une épreuve, plus dure pour son cœur, l’attend encore. Dans la bataille de la forêt d’Éphraïm, les hommes d’Israël sont défaits devant les serviteurs du roi ; Absalom, pris par la tête entre les branches d’un arbre, est achevé par Joab. Douleur émouvante du vieux père qui, « en allant, disait ainsi : Mon fils Absalom ! mon fils ! mon fils Absalom ! Fussé-je mort à ta place ! Absalom, mon fils, mon fils ! » Cette fois, son coeur est brisé, car il aimait profondément ce fils révolté, et il lui en coûte terriblement d’accepter sa mort de la main de Dieu. Joab doit l’en reprendre sévèrement et lui montrer combien c’était faire peu de cas de ses chefs et de ses serviteurs, qui avaient exposé pour lui leurs vies (19:6).
En Adonija, nous voyons la vanité
.
Il n’avait pas l’envergure ni le caractère d’un Absalom. Mais, imbu de
lui-même, très bel homme, il était prompt à se vanter.
Quatrième fils de David, par la mort d’Amnon et d’Absalom et la disparition de Kileab (peut-être mort en bas âge), il était l’héritier présomptif du trône.
Point n’était nécessaire pourtant de se proclamer lui-même roi, après s’être procuré cinquante hommes qui couraient devant lui ! (1 Rois 1:5). Le plus étrange est que, dès sa jeunesse, « son père ne l’avait jamais chagriné, en disant : pourquoi fais-tu ainsi ? » Faiblesse évidente de David devant les allures de vantardise de son fils. Petit à petit, le jeune homme y avait pris goût, et maintenant risque l’affaire du trône, avec l’appui de Joab et d’Abiathar, les vieux compagnons de son père.
Mais cette fois, David, bien qu’avancé en âge et fort affaibli, fait preuve de toute la dignité royale qu’il avait reçue de Dieu. Il ne fuit nullement Jérusalem comme devant Absalom ; il n’attaque même pas Adonija… il feint de l’ignorer, et fait proclamer roi Salomon, son plus jeune fils, comme l’Éternel l’avait dit. Il suffit de mettre à sa place l’élu de Dieu, et tout rentre dans l’ordre. Ne ferions-nous pas souvent la même expérience, si dans les difficultés qui peuvent survenir au milieu de nous, nous savions donner au Seigneur la place qui Lui revient : « Qu’en toutes choses il tienne, Lui, la première place ».
Quand Adonija et ses invités apprennent l’onction du fils de Bath-Shéba, ils sont frappés de terreur ; chacun s’enfuit de son côté ; Adonija ne voit d’autre chance de salut que d’aller saisir les cornes de l’autel. Temporairement épargné, il sera mis à mort quelque temps après par Salomon, pour avoir osé prétendre à la main d’Abishag, qui avait soigné son père dans ses vieux jours.
Le psaume 2 proclame l’onction du Roi en Sion et souligne l’invitation à se soumettre à lui. Il a en vue essentiellement le Messie, le Fils. Mais n’y a-t-il pas à la base un écho certain de la révolte d’Adonija et de l’onction de Salomon, type lui-même du Roi de gloire ?
Second fils de Bath-Shéba, Salomon avait été nommé par Nathan le prophète : Jedidia, le bien-aimé de l’Éternel (2 Sam. 12:25). Quoique beaucoup plus jeune que les autres (1 Chron. 29:1), il avait été expressément choisi par Dieu pour succéder à David (1 Chron. 28:5).
Aussi, après l’onction privée de 1 Rois 1:39, David réunit-il à Jérusalem tout ce qui comptait en Israël, (1 Chron. 28:1) pour installer officiellement Salomon sur le trône.
En présence de tous ceux qui étaient assemblés, il engage son fils à connaître le Dieu de son père, à le servir avec une âme qui y prenne plaisir — se rappelant que l’Éternel sonde tous les coeurs — à Le chercher, à se fortifier et à agir (1 Chron. 28:9-10). Exhortations successives, qui sont bien de mise pour nous : connaître personnellement le Seigneur, non pas seulement parce qu’il était le Dieu de nos parents, mais d’une connaissance directe et intime. Le servir avec joie, non pas comme un devoir ou pour s’acquérir des mérites, mais avec un cœur qui y prenne plaisir, dont tout le bonheur soit d’être à la disposition de celui qui nous a tant aimés. Se rappeler qu’il sonde les coeurs et les pensées ; ne pas manquer de laisser cette lumière pénétrer en nous, pour manifester ce qui n’est pas selon Lui. Le rechercher : non seulement prier brièvement chaque jour, mais prendre le temps d’être devant Lui pour chercher sa face. C’est le secret de la force et de l’énergie.
David dit à Salomon, comme autrefois Moïse à Josué : « Fortifie-toi et sois ferme… car l’Éternel… sera avec toi : il ne te laissera point et ne t’abandonnera point » (1 Chron. 28:20), promesse que nous pouvons bien prendre aussi pour nous-mêmes (Héb. 13:5).
Du vivant de David, Salomon s’assied sur le trône de l’Éternel, comme roi à la place de son père (1 Chron. 29:23). Tous se soumettent à lui, même ses frères. L’Éternel lui donne une majesté royale telle qu’aucun roi avant lui n’en avait eu en Israël. Joie des dernières heures de la vie du vieux roi de voir sur le trône d’Israël ce fils qui dans un sens rappelait ses fautes, mais surtout la grâce infinie de son Dieu.
Sur la route d’Émmaüs, le Seigneur ressuscité rappelle à ses deux disciples « qu’il fallait que le Christ souffrît ces choses et qu’il entrât dans sa gloire ». Commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur explique « dans toutes les Écritures les choses qui le regardent ». Certaines pages de l’Ancien Testament, comme Ésaïe 53 ou le psaume 22, se réfèrent directement au Sauveur souffrant et glorieux. Mais aussi divers personnages sont autant de types de Christ. Parmi eux, trois ressortent tout spécialement : Joseph, Moïse et David.
Joseph fut séparé
de
son père, comme en un sens le Seigneur Jésus vint ici-bas « d’auprès du Père »
pour « chercher ses frères », quoique Lui pût dire : « Je suis dans le Père,
et le Père est en moi ». Moïse a été éloigné du peuple qu’il aimait et a dû
s’enfuir quarante ans en Madian. David a été rejeté loin du trône pendant bien
des années, comme le Seigneur Jésus, venu sur la terre pour régner, n’a reçu
qu’une couronne d’épines.
Les frères
de Joseph le vendent, comme plus tard Judas vendra son
Seigneur. Les frères de Moïse ne comprennent pas qu’il leur donnerait la
délivrance par sa main. De même, les frères de Jésus ne croyaient pas non plus
en lui (Jean 7:5). Le frère de David le blâme de vouloir combattre
Goliath ; les pharisiens et les scribes ne cesseront d’adresser des
reproches à Celui qui mettait en lumière leurs propres fautes.
Joseph délivrera
les siens de la famine ;
Jésus n’est-il pas le pain de vie, lui qui donne la vie éternelle ?
Moïse délivre son peuple de l’esclavage
de
l’Égypte, comme le Seigneur nous a libérés de l’esclavage de la loi et de la
chair. David vaincra la puissance
de
l’ennemi qui effrayait tant son peuple, comme le Seigneur Jésus a eu la
victoire sur celui qui avait le pouvoir de la mort.
Joseph recevra le titre
de sauveur du monde ; Moïse
sera berger et conducteur d’Israël ; David lui-même deviendra roi. Autant
de noms qui nous rappellent notre bien-aimé Sauveur.
David naquit à Bethléhem, où Ruth, son aïeule, la Moabite, était venue se réfugier sous les ailes du Dieu d’Israël ; elle était ainsi entrée dans la lignée du Messie ; dans l’humble bourgade, selon la parole du prophète, s’accomplira l’inscrutable mystère de la Parole faite chair.
David a été oint au-dessus de ses frères ; Jésus est « oint d’une huile de joie au-dessus de ses compagnons ».
Après l’onction de Samuel, l’Esprit saisit David ; après le baptême de Jean, l’Esprit, onction divine, descend comme une colombe sur Jésus.
Nous avons vu en David le caractère de berger ; son divin Maître sera le grand pasteur des brebis, lui le Bon Berger.
Et si David, dans sa gloire royale, n’est pas un type complet du Seigneur Jésus dans son règne, le type se prolonge en Salomon, le roi de gloire.
Bien des psaumes, dit « messianiques », qui sont attribués à David, parlent des souffrances et des gloires du Seigneur Jésus. Les circonstances que David a traversées produisaient en lui des sentiments et des expériences que le Saint Esprit, par sa bouche, développe et applique directement au Seigneur Jésus.
Ainsi au psaume 2, nous avons la gloire du Fils de Dieu, né dans ce monde, avec lequel tous doivent se réconcilier. Au psaume 8 nous voyons le Fils de l’homme, fait un peu moindre que les anges, qui, comme homme, est couronné de gloire et d’honneur, et reçoit la domination sur toute la création. Au psaume 110, aussi de David, le Seigneur, élevé à la droite de Dieu, est sacrificateur pour toujours, selon l’ordre de Melchisédec. Ces trois psaumes sont repris dans l’épître aux Hébreux pour souligner les gloires variées du Seigneur Jésus.
Au psaume 16, nous voyons Jésus, homme parfait, dépendant de Dieu, le glorifiant sur la terre. Il doit passer par la mort, mais a la certitude de la résurrection et des « plaisirs à la droite de Dieu pour toujours ». Le psaume 22, présente d’une façon toute particulière les souffrances du Seigneur sur la croix, mais aussi quelques rayons de la gloire qui en découle. Cette gloire est affirmée au psaume 24, où les portails éternels s’élèvent pour laisser entrer le Roi de gloire. Au psaume 40 nous trouvons tout l’abaissement de Celui qui est venu ici-bas pour accomplir la volonté de Dieu et s’offrir lui-même en sacrifice. Le psaume 69 nous donne un tableau des souffrances solitaires du Sauveur, qui à trois reprises implore : « Réponds-moi… réponds-moi », et, dans sa détresse, ne trouve pas de consolateurs. Au psaume 102, nous avons la prière de l’affligé, mais aussi « la joie qui était devant lui », quand l’Éternel bâtira Sion et quand les peuples seront rassemblés pour le servir.
On pourrait en citer bien d’autres, mais ceux-ci montrent comme, avant tout par la bouche de David, l’Esprit de Dieu a voulu placer devant nos cœurs les souffrances et les gloires de Celui dont David n’était qu’un faible type.
Lorsque David s’était enfui de sa maison pour échapper à Saül, il avait cherché appui à gauche et à droite, pour aboutir, solitaire, à la caverne d’Adullam, où il a composé le psaume 142. Ayant passé lui-même par une profonde détresse, abandonné de tous, mais trouvant en son Dieu les ressources nécessaires, il devient centre d’attraction pour la maison de son père, et pour tout homme qui était dans la détresse, dans les dettes, ou qui avait de l’amertume dans l’âme. Ils s’assemblent vers lui, il devient leur chef (1 Sam. 22:1-2). N’en est-il pas ainsi du Seigneur Jésus qui, ouvrant ses bras, dit : « Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos ».
1 Chroniques 12 nous montre comment successivement des groupes divers se sont joints à David.
« Dans le lieu fort », des Gadites, exercés pour la guerre, armés, prompts, viennent à lui « combattre les combats de l’Éternel ». Ils n’ont pas peur des obstacles : ils traversent le Jourdain lorsqu’il regorge par-dessus tous ses bords. Ils mettent en fuite les ennemis. Pour être fort, il faut revêtir l’armure complète de Dieu (Éph. 6) et se grouper autour du Chef.
D’autres venaient de la tribu de Benjamin. Décision difficile assurément, de quitter Saül auquel les attachaient les liens de la chair, pour venir auprès de David, encore pourchassé dans le désert. Il y fallait la foi, une foi vivante que David met à l’épreuve, faisant jaillir de la bouche de leur chef ce cantique : « Nous sommes à toi et avec toi. Paix, paix à toi et paix à ceux qui t’aident ». Belle figure des croyants tirés du monde, qui doivent rompre des liens souvent bien chers, pour s’attacher au vrai David.
D’autres rejoignent le roi rejeté à Tsiklag. Ils savaient tirer de l’arc, se servant de la main droite et de la main gauche et leurs flèches ne manquaient pas le but. « Les armes de notre guerre ne sont pas charnelles » : la Parole de Dieu, l’épée de l’Esprit. Un verset cité à propos est comme une flèche qui atteindra la conscience ou encouragera le coeur ; mais comment nous servirions-nous de ces « flèches » si nous n’étions d’abord exercés à les manier ? Il faut que « la Parole habite en nous richement » ; en avoir éprouvé pour nous-mêmes les divers effets, permet d’en user, à notre tour, envers autrui.
D’autres se rallient à David à Hébron. Parmi eux se trouvaient les fils d’Issacar « qui savaient discerner les temps pour savoir ce que devait faire Israël ». Nous sommes tous appelés à un sain discernement ; mais on doit reconnaître aussi que le Seigneur a donné à certains parmi nous un discernement et une sagesse particuliers (1 Cor. 12:7, 11). Ne convient-il pas alors que, comme ceux d’Issacar, nous soyons soumis aux conducteurs que le Seigneur a doués pour paître son peuple ? (1 Chron. 12:32).
Ceux de Zabulon « gardaient leur rang, n’ayant point un coeur double ». À la place où ils avaient été mis, remplissant leur tâche, y étant « tout entiers », ils n’étaient pas jaloux du service d’un autre, et ne voulaient pas s’immiscer dans ce qui ne leur avait pas été confié.
Puis « d’un seul coeur », tout le reste d’Israël se rassemble autour de David, jour de joie où il y avait nourriture et rafraîchissement en abondance (v. 39-40).
Joie plus grande encore quand tous se groupent autour de l’arche à Jérusalem : des sacrifices sont offerts ; David bénit le peuple et distribue à chacun, tant aux femmes qu’aux hommes « un pain et une ration de vin et un gâteau de raisin », nourriture, joie et réconfort. Alors éclate la louange dans le sanctuaire : « en ce jour » David remet entre les mains d’Asaph et de ses frères « le premier » psaume pour célébrer l’Éternel (1 Chron. 16:1-7).
Dans toute sa carrière, David a suscité autour de lui le dévouement de ceux qui se sont attachés à lui, l’ont aimé, l’ont servi dans les fonctions les plus diverses ; ils lui ont été fidèles dans l’adversité et ont combattu avec lui « les combats de l’Éternel ».
David, vainqueur de Goliath, se présente devant Saül, la tête du Philistin à la main. Jusqu’alors, Jonathan avait remporté les victoires de la foi (14). Un autre est maintenant l’instrument de la délivrance. Quelle va être la réaction du fils du roi ? Il aurait pu, comme son père, être jaloux, et tâcher de minimiser la victoire du héros du jour. Au contraire : « L’âme de Jonathan se lia à l’âme de David, et Jonathan l’aima comme son âme ». Cet amour profond ne s’est pas traduit seulement en paroles, mais Jonathan s’est dépouillé de sa robe, de ses vêtements, de son épée, de son arc, de sa ceinture, pour mettre tout à la disposition de David. Belle figure du croyant qui, attiré par l’amour du Seigneur, met à Son service tout ce qu’il possède.
Cette affection de Jonathan pour David n’a pas été limitée à un moment d’enthousiasme, comme trop facilement, dans une ambiance propice, quelque jeune peut se déclarer prêt à suivre le Seigneur où qu’il l’envoie. Jonathan est resté fidèle au fils d’Isaï quand Saül a commencé à le maltraiter ; il a intercédé pour lui, ne cachant pas son affection, risquant même sa vie sous les insultes de son père (20:30-33).
Au désert de Ziph, dans un bois, le fils de Saül viendra encore encourager son ami dans sa solitude et fortifier sa main en Dieu.
Jonathan aurait-il dû quitter la cour et abandonner son père malheureux et coupable, pour suivre, au désert, David qu’il était certain de voir régner un jour ? Rien dans le texte ne nous paraît l’impliquer positivement, sauf que son attachement à Saül (Ex. 20:12 ?) l’a amené à tomber avec lui à Guilboa. Mais si l’on pense à Celui dont David est la figure, à la lumière du Nouveau Testament, il est certain que ceux qui veulent suivre le Seigneur peuvent être appelés à quitter même leur famille (Luc 14:26), si celle-ci s’oppose fondamentalement à l’Évangile, et que le Seigneur conduise vraiment à ce pas lourd de conséquences. (Il n’en est en tout cas pas ainsi de l’épouse dont le mari est incrédule, à moins que ce soit lui qui l’abandonne (1 Cor. 7:2-16) ; d’autre part 1 Timothée 5:4 conserve toujours sa valeur).
Après le passage de David à Nob, Saül a fait massacrer tous les sacrificateurs, « homme et femme, enfant et celui qui tète, boeuf et âne, et mouton, par le tranchant de l’épée » (22:19). Un des fils d’Akhimélee, Abiathar, réussit à s’enfuir. Où a-t-il trouvé refuge dans sa peine, sinon auprès de David, qui l’accueille en disant : « Demeure avec moi, ne crains point… près de moi, tu seras bien gardé ».
Il faut parfois le deuil et la détresse pour que des âmes soient conduites au Seigneur, mais quel refuge et quelle consolation elles trouvent auprès de Lui ! Plus tard, Marie n’ira pas, comme le pensaient les Juifs, au sépulcre pour y pleurer, mais aux pieds de Jésus, qui pleurera avec elle.
À la mort de Saül et de Jonathan, la nourrice du petit Mephibosheth, âgé de cinq ans, s’était enfuie, craignant les représailles de David. Dans sa fuite, elle avait laissé tomber l’enfant qui en devint boiteux pour le reste de ses jours.
Vingt ans peut-être avaient passé, et le jeune Mephibosheth s’était réfugié à Lodebar, chez Makir fils d’Ammiel, où sans doute il vivait dans le dénuement, perclus des deux pieds.
C’est là qu’un jour la nouvelle l’atteint que David, celui que son grand-père a tant pourchassé et haï, le convoque à Jérusalem. Le messager aura ajouté que David veut « user envers lui d’une bonté de Dieu » ; mais c’est certainement avec des sentiments très mélangés de crainte et de confiance que Mephibosheth entreprend ce long voyage pour venir personnellement vers celui qui l’appelle.
Beau tableau de l’Évangile qui s’adresse à une âme dans la crainte et la misère spirituelle, loin de Dieu, et la sollicite de venir au Sauveur. Le « voyage » sera plus ou moins long, jusqu’à ce moment décisif de la rencontre personnelle avec Jésus. Rencontre pourtant indispensable, car ce n’est ni le messager, ni le serviteur qui peuvent donner la paix à l’âme. Seul le Seigneur en a le pouvoir.
David accueille le jeune homme prosterné devant lui, en l’appelant simplement par son nom « Mephibosheth ! » (Jean 10:3). Il ajoute bien vite : « Ne crains point, car certainement j’userai de bonté envers toi ». Non seulement David fait grâce, mais il rend l’héritage ; il reçoit même le fils de Jonathan à sa table, où continuellement il pourra manger le pain. « Si quelqu’un entend ma voix et qu’il ouvre la porte, j’entrerai chez lui, et je souperai avec lui et lui avec moi » (Apoc. 3:20). Intimité bénie et constante, du racheté avec son Seigneur ; communion plus précieuse encore autour du mémorial auquel il lui est donné de participer avec les croyants réunis autour de Lui.
David fait davantage : il va traiter Mephibosheth « comme un des fils du roi » : « À tous ceux qui L’ont reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu ».
Le chapitre se termine en nous rappelant que, quoique mangeant toujours à la table du roi, Mephibosheth restait « boiteux des deux pieds ». La vieille nature n’est pas changée ; si même, devant Dieu, nous ne sommes plus « dans la chair », elle est toujours là, en nous, tant que nous sommes sur la terre ; si nous ne veillons pas, elle produira ses fruits (Rom. 7:25). Combien il importe de se tenir près du Seigneur, afin de « marcher en nouveauté de vie, marcher par l’Esprit », et de pouvoir jouir sans entrave de la communion qu’il veut nous faire éprouver chaque jour.
Il était facile de se soumettre à David roi ; on y trouvait son propre intérêt. Mais lorsque David dut s’enfuir devant Absalom, les cœurs se manifestent. D’aucuns, comme Akhitophel, l’abandonnent ; d’autres lui restent fidèles. « Un Christ rejeté attire le dévouement, et c’est dans ces circonstances qu’on peut voir si les siens lui sont attachés. » Plusieurs restèrent à Jérusalem, mais Ithaï, quoique venu depuis peu auprès de David, ne veut pas le laisser. Il est mis à l’épreuve. Est-il venu de Gath pour s’attacher au roi d’Israël dans sa gloire et dans sa puissance, ou à la personne de David, même s’il faut partager avec lui la fuite au désert ? La foi d’Ithaï brille dans sa réponse : « L’Éternel est vivant, que dans le lieu où sera le roi mon seigneur, soit pour la mort, soit pour la vie, là aussi sera ton serviteur ! » Écho de la décision du cœur d’une Ruth ou d’une Rebecca ; exemple pour celui qui répondra au désir de Jésus : « Si quelqu’un me sert, qu’il me suive ; et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur » (Jean 12:26).
Ithaï va donc accompagner David, mais non pas seul ; il passe « avec tous ses hommes et tous les enfants qui étaient avec lui ». Bel encouragement pour les parents à suivre sans hésitation le Seigneur avec toute leur famille, tout en se souvenant que seul Dieu pourra opérer à salut chez leurs enfants.
Tous ne sont pas appelés au même service. Ithaï devait suivre David ; Hushaï, son ami, est appelé, sur son ordre exprès, à le quitter pour s’en aller à Jérusalem, au péril de sa vie, y accomplir la mission délicate qui lui est confiée : annuler le « conseil d’Akhitophel ». Hushaï n’hésite pas ; il montre son dévouement à celui qu’il aime, et par son moyen, Dieu répond à la prière du roi (15:31 ; 17:14), et permet la victoire qui suivra.
Akhimaats est celui qui court, le messager. En 2 Samuel 17:17-21, il ira transmettre les recommandations d’Hushaï à David ; au chapitre 18:19-28, il veut être le premier à apporter au roi la nouvelle de la victoire. Malgré les obstacles, malgré l’opposition de Joab, « quoi qu’il arrive, il veut courir ».
« Ne savez-vous pas que ceux qui courent dans la lice courent tous, mais un seul reçoit le prix ? Courez de telle manière que vous le remportiez » (1 Cor. 9:24).
À l’encontre des précédents, Barzillaï est un vieillard. À quatre-vingts ans, il aurait pu estimer avoir fini sa tâche ; mais lorsque David, passant le Jourdain, vient à Mahanaïm, son village, Barzillaï, avec tous ses biens, entretient le roi et sa suite, affamés et fatigués dans le désert. Il semble n’y avoir pas de fin à la liste de tout ce qu’il met à la disposition du souverain et de ses hommes (17:28). Galates 6:6 nous rappelle que « celui qui est enseigné dans la parole, fasse participer à tous les biens temporels celui qui enseigne » ; et la parabole de l’économe de Luc 16 souligne notre responsabilité d’administrer pour le Seigneur les biens matériels qui lui appartiennent, et qu’il a pu nous confier pour un temps : « richesses injustes » dans l’administration desquelles il importe d’être fidèle. Peu de chose sans doute, puisqu’elles sont appelées : « ce qui est très petit », mais fidélité qui amène à se voir confier les « vraies richesses », les biens spirituels qui sont nôtres, ceux que personne ne pourra jamais nous ôter.
David voudrait donner une récompense à Barzillaï, mais le vieillard ne peut le suivre à Jérusalem ; il reçoit le baiser du roi et sa bénédiction (19:39) ; par contre, Kimham, son fils, — plus tard même tous ses fils (1 Rois 2:7) — mangeront à la table royale.
David est arrivé à la fin de sa vie. Il a prononcé ses dernières paroles ; ses regards considèrent la route parcourue avec ceux qui, sur le chemin, lui ont été fidèles. Il va dresser la liste de ses « hommes forts ». Au jour du tribunal de Christ, tout sera mis en lumière. Le Seigneur se souviendra de tout ce qui aura été fait pour lui ; et avec sa sagesse et selon la mesure du sanctuaire, il donnera les récompenses et les couronnes, pour sa propre gloire dans les siens, trouvant à louer en eux ce que sa grâce y aura produit.
Parmi les hommes forts de David, plusieurs se sont dévoués pour le peuple de Dieu. Par leur moyen, l’Éternel a opéré de grandes délivrances. « Avec David », ils avaient combattu contre les Philistins ; et tel Shamma, avaient aussi préservé ce qui devait servir de nourriture au peuple de Dieu. À travers les âges, combien de croyants ont lutté pour l’Évangile et pour la Parole, la nourriture de nos âmes ! Quelle perte immense nous éprouverions si nombre de chrétiens, appelés par le Seigneur à ce travail, n’avaient lutté pour conserver le texte des Écritures et le mettre à notre portée, dans notre langue, en toute facilité et clarté.
Trois des trente chefs prouvent à David leur affection toute simple, lorsqu’un jour d’été, dans une remarque peut-être casuelle, il exprimait son désir de boire de l’eau fraîche du puits de Bethléhem. Exploit inutile à première vue, que l’action de ces trois hommes qui forcent le passage à travers le camp des Philistins pour rapporter un peu d’eau à leur chef. Mais ils avaient voulu lui plaire, lui offrir ce qu’il désirait ce jour-là. Plus tard, Marie brisera son vase de parfum pour oindre la tête du Roi (Matt. 26:7), les pieds du Fils de Dieu (Jean 12:3) ; sacrifice déplacé aux yeux des disciples, de Judas surtout, mais offrande précieuse au cœur du Maître, qui voudra qu’en quelque lieu que l’Évangile soit prêché, on parle de ce que cette femme a fait en mémoire d’elle. « Ces trois hommes forts firent cela. »
David n’a pas voulu que se clôture la liste de ses hommes vaillants sans mentionner « Urie le Hétien » ! Il aurait bien pu faire biffer cette mention qui rappelait « tout son passé de honte et de châtiment ; mais, se condamnant lui-même et exaltant la grâce qui l’avait restauré, il n’aurait jamais songé à effacer ce nom du livre où il était enregistré » (H. R.).
Tous ces hommes, fidèles à David au temps de son rejet, ont partagé sa gloire : « Si quelqu’un me sert, le Père l’honorera ».
Toute la vie intérieure de David est marquée par ces trois choses : la foi, la communion, la crainte de Dieu.
Dans le tableau des hommes de
foi d’Hébreux 11, David est mentionné, conducteur d’antan dont nous avons aussi
à « imiter la foi ». Cette foi se marque dans sa confiance
en Dieu. Sans doute y a-t-il eu parfois « un nuage » ;
mais fondamentalement, et tout le long de sa vie, combien était réelle et
solide la confiance de David en l’Éternel, telle qu’il l’exprimera en tant de
psaumes. Elle se traduisait aussi par la dépendance ;
souvent David interroge l’Éternel pour avoir sa pensée, soit durant les
années errantes, soit durant son règne. Et cette foi lui a donné la hardiesse
avec laquelle il s’attaquait
au lion, se présentait devant Goliath, ou coupait le pan de la robe de Saül.
La communion
de David avec son Dieu ressort de nombre de psaumes. Elle
se traduit en prières, en supplications, mais aussi en louange et en
reconnaissance. Plus encore, cette communion l’a conduit à avoir, par l’Esprit
de Dieu, une vision de Celui qui, vrai Fils de David, répondrait lui seul en
tous points à la pensée de Dieu.
Enfin la crainte de Dieu
a marqué sa marche. Elle l’a conduit, lorsqu’il
était tombé, à la repentance et à la confession, et à l’acceptation du
châtiment. Elle l’a gardé de maints écarts : « Je me suis toujours proposé
l’Éternel devant moi » (Ps. 16), paroles sincères dans la bouche de David, quoiqu’accomplies
uniquement par Christ.
Cette vie intérieure de David au travers des circonstances variées de sa carrière, s’est reflétée dans maints psaumes, dont nous allons considérer quelques-uns.
Soixante-treize d’entre eux sont attribués à David, sans que nous puissions nécessairement penser que leurs suscriptions soient inspirées. Ils expriment ses propres expériences, ses détresses, ses supplications, les délivrances dont il a été l’objet, et la louange et la reconnaissance qui jaillissaient de son cœur.
Mais ces pages sont aussi pleines d’enseignements pour nous, qui traversons des épreuves diverses et pouvons trouver dans ces versets tant d’encouragement et de réconfort.
Ils ont aussi leur portée prophétique, dirigeant les regards vers le résidu futur d’Israël, et par-dessus tout vers le Messie, le Christ. En effet, David relatant ses expériences, a été conduit bien au-delà par l’Esprit de Dieu, afin de révéler les sentiments mêmes de Christ à travers les faits qui seront relatés dans les Évangiles.
« Qu’y a-t-il dans ce livre de cent cinquante poèmes, pour que depuis bientôt deux millénaires les couvents et les ghettos, les églises et les communautés chrétiennes les plus diverses, les relisent et les chantent sans jamais se lasser ?… Quelle saveur en l’âme de ceux qui ne renoncèrent jamais aux paroles reprises des lèvres mêmes de David, pour qu’ils aient traversé toutes les nuits, toutes les guerres… Ils avaient emporté ce livre dans leurs exils : ils vécurent dans leur chair, dans leur sang, chacun de ces versets ; c’était écrit : ils le vivaient comme ils le lisaient, et c’était aussi nécessaire de le vivre que de le lire ». Comment expliquer, en effet, que ce recueil composé au cours de plusieurs siècles, mis en ordre sous la direction de l’Esprit de Dieu quand il l’a voulu, ait pu être en bénédiction, en consolation, en encouragement, à tant de générations successives ? Ce n’est pas la valeur littéraire qui en a fait la saveur. On relit Homère, Virgile, mais qu’y a-t-il pour l’âme ? David lui-même a donné la réponse à l’étonnement des hommes : « L’Esprit de l’Éternel a parlé en moi et sa parole a été sur ma langue » (2 Sam. 23:2). Seule l’inspiration de l’Esprit de Dieu rend la Parole éternelle, immuable, vivante et opérante.
Parmi ces nombreux psaumes de David, nous en retiendrons quelques-uns qui, par leur suscription, indiquent se rapporter à des circonstances particulières de sa vie.
Le plus connu, le plus aimé, qui pendant trois mille ans a soutenu la foi des croyants de tout pays, de toute race, de toute époque. David l’a-t-il composé tout jeune, quand il était berger lui-même, ou plus tard en repassant sa vie ? On ne saurait le dire. Ce psaume n’a pas de date. Il ne vieillit pas. Ses six versets s’appliquent à tous les âges, à tous les temps ; aux jours de joie, aux nuits d’épreuve ; aux malades et aux bien-portants ; il réjouit la foi aussi bien au début de la vie qu’aux approches de la mort ; et fait converger tous les regards vers l’avenir éternel qui, pour nous, est la maison du Père.
« L’Éternel est mon
berger » : sa fidélité, sa présence, sa communion, vont remplir la vie.
Tout d’abord l’âme parle de
Lui (v. 1-3) ; puis, ayant fait des
progrès dans sa connaissance, elle s’adresse directement à
Lui :
« Tu es avec moi… Tu dresses… Tu as oint. » Enfin, considérant la course qui
est encore devant elle, elle peut dire avec assurance : « Oui, la bonté et
la gratuité me suivront tous les jours de ma vie ». Dirigeant enfin ses regards
vers l’avenir, elle ajoute : « Mon habitation sera dans la maison de
l’Éternel pour de longs jours ».
Ces trois psaumes montrent la confiance de David dans le danger. Dans le premier, il est surveillé dans sa maison par les émissaires de Saül, qui ont ordre de le mettre à mort ; dans le second, il est apparemment détenu dans Gath, où il s’est enfui de devant le roi d’Israël ; dans le troisième, les Ziphiens ont averti son persécuteur qu’il se tient caché auprès d’eux, afin qu’il puisse le prendre.
Dans les trois psaumes, la prière, la supplication montent à Dieu pour être délivré des ennemis. Mais il y a en même temps la certitude que « Dieu est ma haute retraite », « Dieu est pour moi », « Dieu est mon secours ». Et dans cette assurance, dans la confiance que Dieu répondra, jaillit la louange : « À toi je chanterai », « Je te rendrai les louanges », « Je célébrerai ton nom ».
Psaume de l’exaucement, il suit moralement le 56 : « J’ai cherché l’Éternel et il m’a répondu, et m’a délivré ». « Ils ont regardé vers lui, et ils ont été illuminés… Cet affligé a crié ; et l’Éternel l’a entendu, et l’a sauvé de toutes ses détresses ».
Ayant fait l’expérience de cette réponse magnifique à ses supplications, David peut se tourner vers les autres et les engager à se confier en Dieu : « Les justes crient, et l’Éternel entend, et il les délivre de toutes leurs détresses. L’Éternel est près de ceux qui ont le coeur brisé, et il sauve ceux qui ont l’esprit abattu ».
Dans le sentiment de la faute qu’il avait commise, en s’enfuyant vers un ennemi de son peuple, il peut ajouter : « Aucun de ceux qui se confient en Lui ne sera tenu pour coupable ».
Psaume de la repentance après la chute, avec tout l’exercice d’âme amenant à la restauration.
Conscient de son crime, David n’a plus d’autre recours que la grâce de Dieu : « Use de grâce envers moi, ô Dieu ! selon ta bonté ». Il ne cache rien : « Je connais mes transgressions, et mon péché est continuellement devant moi ». Il est amené à confesser qu’il a péché contre Dieu, non pas seulement contre Urie : « Contre toi, contre toi seul, j’ai péché, et j’ai fait ce qui est mauvais à tes yeux ».
Alors, à deux reprises, il peut supplier : efface, lave, purifie.
Il reconnaît non seulement ses fautes (v. 9), mais aussi sa nature pécheresse : « Dans le péché ma mère m’a conçu ». L’épître aux Romains le démontrera avec tant d’évidence ; il n’y a pas seulement les péchés, fruits de l’arbre, mais le péché lui-même, cette mauvaise nature qui est en nous, la chair. Il faut donc être amené au jugement de soi-même, pour produire « la vérité dans l’homme intérieur ».
Alors la grâce opère la restauration : « Renouvelle au-dedans de moi un esprit droit… Rends-moi la joie de ton salut… J’enseignerai tes voies aux transgresseurs… » Le salut n’est pas perdu, mais bien la joie, et seul le retour à Dieu pourra la rendre. La restauration est complète ; non seulement la faute est effacée, mais l’âme qui a retrouvé la communion avec Dieu, peut enseigner ses voies aux pécheurs, et dire au Seigneur : « Ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange ».
David reste conscient que les sacrifices, les offrandes que lui pourrait apporter à Dieu n’expient pas le péché. Dieu demande plus que des regrets : un esprit brisé, la repentance et la confession. Alors il pardonne, et il restaure, parce qu’il a en vue l’œuvre de Christ à la croix (Rom. 3:25-26).
Ce psaume vient tout naturellement après le 51 : l’âme, qui jouit à nouveau de la communion avec son Dieu, rappelle ses expériences.
Les deux premiers versets présentent un double « bienheureux », soulignant la reconnaissance de celui dont la transgression est pardonnée, à qui l’Éternel ne compte pas l’iniquité. David rappelle que lorsqu’il cachait sa faute, la main de Dieu s’appesantissait sur lui, il était dans la détresse — expérience que bien des âmes ont faite après lui, sous le poids de leurs péchés. Mais il ajoute : « Je t’ai fait connaître mon péché et je n’ai pas couvert mon iniquité ; j’ai dit : je confesserai mes transgressions à l’Éternel ; et toi tu as pardonné l’iniquité de mon péché ».
L’accès du sanctuaire est de nouveau ouvert : « Tout homme pieux te priera au temps où l’on te trouve ». Dieu protégera, il gardera de la détresse, il délivrera.
Il faut reprendre la route avec une nouvelle décision ; la voix du Seigneur se fait entendre : « Je t’instruirai et je t’enseignerai le chemin où tu dois marcher ; je te conseillerai, ayant mon oeil sur toi ».
Dépendance bénie du croyant qui écoute la voix de son Maître et persévère dans sa communion. Refuserait-on de « s’approcher de lui » ? Dieu doit alors employer « la bride et le mors », c’est-à-dire exercer la discipline, pour que, bon gré mal gré, on marche dans son chemin.
Le psaume se termine sur une note de bonheur : « Réjouissez-vous en l’Éternel et égayez-vous, justes ! et jetez des cris de joie, vous tous qui êtes droit de cœur ». Qui d’autre que notre Dieu pourrait ainsi donner la joie et la louange après la détresse où le péché avait plongé ?
Mais avant que l’expérience de notre psaume puisse se réaliser, il a fallu le 22 !
David a composé beaucoup moins de psaumes depuis qu’il est devenu roi que durant les années de détresse avant son accès au trône. Sa fuite de devant Absalom le replace dans des circonstances similaires à celles de sa jeunesse. De nouveau sa prière s’adresse à Dieu devant le nombre de ses ennemis, de ceux qui disent : Il n’y a point de salut pour lui en Dieu.
Comme autrefois, il est sûr que : « Toi Éternel ! Tu es un bouclier pour moi ; tu es ma gloire, et celui qui élève ma tête ». Anticipant Philippiens 4, il crie de sa voix à l’Éternel, et peut ensuite se coucher et s’endormir, car le Seigneur le soutient : « En toutes choses exposez vos requêtes à Dieu… et la paix de Dieu gardera vos coeurs ». Il peut conclure en disant : « L’Éternel est le salut », comme Jonas terminera sa prière en affirmant : « La délivrance est de l’Éternel ».
David sort de ses épreuves et de son affliction avec un chant de triomphe et de louange. Il avait appris dans ses souffrances à connaître Dieu ; « le jour où l’Éternel l’eut délivré de la main de tous ses ennemis et de la main de Saül », il veut chanter sa reconnaissance. Il semble n’avoir pas assez d’expressions pour qualifier les ressources qu’il a trouvées en Dieu : mon rocher, mon lieu fort, Celui qui me délivre, mon bouclier, la corne de mon salut, ma haute retraite, mon refuge. Quelles que soient les épreuves traversées, il affirme que « la voie de Dieu est parfaite ». Peut-être avait-il trouvé cette voie dure, incompréhensible, quand il devait fuir de lieu en lieu, qu’il était méprisé par Nabal et rencontrait l’ingratitude des hommes de Kehila. Mais une fois l’épreuve terminée, regardant en arrière, il reconnaît que Dieu l’a bien conduit, qu’il a « aplani parfaitement sa voie ». « C’est toi qui fais luire ma lampe ». Tout n’a pas été facile et aisé certes, mais lorsqu’il a rencontré des difficultés qui à première vue semblaient insurmontables, il a fait l’expérience que Dieu rendait ses pieds « pareils à ceux des biches, et le faisait tenir debout sur ses lieux élevés ».
David avait eu à coeur de faire remonter l’arche de Kiriath-Jearim jusqu’en Sion (Ps. 132). Dans ce jour de joie, où le roi a pu bénir le peuple qui l’entourait, distribuer à chacun nourriture et rafraîchissement, et inviter les chantres à louer l’Éternel, il considère ce grand rassemblement autour de l’arche, et s’écrie : « Voici, qu’il est bon et qu’il est agréable que des frères habitent unis ensemble ! »
Finie, la guerre civile qui opposait la tribu de Juda à toutes les autres ; Israël a trouvé son centre : l’arche de l’Éternel à Jérusalem ; l’unité fraternelle est « comme la rosée de l’Hermon qui descend sur les montagnes de Sion ; car c’est là que l’Éternel a commandé la bénédiction, la vie pour l’éternité ».
Sans qu’il soit attribué expressément à David, ce psaume place devant nous le roi, qui, au soir de la vie, considère son fils Salomon. Mais le regard de sa foi s’étend bien au-delà, vers Celui qui est « plus grand que Salomon », le Roi de gloire, dont la bénédiction « descendra comme la pluie sur un pré fauché ». En Ses jours il y aura abondance de paix ; sa domination s’étendra sur toute la terre ; son nom sera pour toujours ; toutes les nations le diront bienheureux.
Les lèvres du psalmiste vont se clore ; devant ses yeux resplendit la beauté de Celui qui, un jour, viendra établir son règne de paix sur la terre. La carrière s’achève, « les prières de David, fils d’Isaï, sont finies » (v. 20), mais c’est dans la vision de la gloire de Christ qu’il va s’endormir.
Après la révolte d’Absalom et sa mort, celle de Shéba qui lui aussi a trouvé sa fin, l’ordre est rétabli en Israël ; David, qui a dû consacrer tant d’efforts aux « affaires du roi », va se tourner, avec ses dernières forces, vers « les affaires de Dieu » (1 Chron. 23:1-3). Celui qui a souffert est le même qui ordonne tout pour le sanctuaire et le royaume.
Le roi fait dénombrer les lévites et définit avec précision leurs tâches (1 Chron. 23). Il divise les sacrificateurs en vingt-quatre classes, institution qui durera jusqu’à la venue de Jésus sur la terre, puisque nous retrouvons en Luc 1, Zacharie, de la classe d’Abia, exerçant la sacrificature devant Dieu « dans l’ordre de sa classe » (Luc 1:5, 8).
David met aussi en place les chantres (1 Chron. 25), qu’il divise de même en vingt-quatre classes. Puis il précise le rôle des portiers, et leur confie leurs charges. Il institue les préposés sur les trésors de la maison de Dieu et sur les trésors des choses saintes (26:20).
« Dieu me dit : Tu ne
bâtiras pas une maison à mon nom, car tu es un homme de guerre et tu as versé
le sang… ton fils, c’est lui qui bâtira ma maison et mes parvis » (1 Chron.
28:3, 6). La maison de Dieu va pourtant remplir les derniers jours de David,
tellement il l’a à cœur. « Dans son affliction
», il a préparé d’immenses
richesses pour élever cet édifice. Dieu lui en a donné « le modèle » (28:11-12,
19) ; il instruit Salomon avec précision sur les plans du temple qu’il
doit bâtir.
David ajoute : « De toute
ma force
j’ai préparé pour la maison de Dieu de l’or… de l’argent… »
(29:2). D’autre part : « Dans mon affection
pour la maison de Dieu,
je donne pour la maison de Dieu, de ce que j’ai d’or et d’argent m’appartenant
en propre… » (v. 3).
Puis il engage les chefs, le peuple, à offrir volontairement pour le temple. David bénit l’Éternel de cette franche volonté et s’écrie : « Qui suis-je, et qui est mon peuple, pour que nous ayons le pouvoir d’offrir ainsi volontairement ? Car tout vient de Toi, et ce qui vient de ta main, nous te le donnons ». Offrandes matérielles pour ce qui était alors la maison terrestre de Dieu. Offrandes spirituelles que nous pouvons, dans le sanctuaire, offrir aujourd’hui au Père par le Seigneur Jésus, en lui présentant ce qui vient de lui, ce qu’il nous a révélé : les perfections de son Fils bien-aimé et de son oeuvre.
Quel contraste entre ces dernières paroles et le chant de triomphe qui terminait les épreuves du désert. David est au soir de la vie. Il a derrière lui toutes les années de prospérité, les années de règne avec leur gloire, leurs victoires, mais aussi leurs chutes.
Il nous est présenté sous quatre caractères. Il est « le fils d’Isaï » : l’humble berger qui, derrière le désert, gardait les troupeaux de son père et n’était même pas invité à la fête de famille. Il est aussi « l’homme haut placé », celui que Dieu a pris d’entre les parcs des brebis pour le mettre à la tête de son peuple, « l’oint du Dieu de Jacob », le roi que la grâce a choisi. Mais tout du long, il a pu être « le doux psalmiste d’Israël », le prophète et le chantre qui, au-delà de ses expériences personnelles, a exprimé celles des autres, jusqu’à s’élever aux pensées, aux sentiments, aux douleurs de Christ lui-même.
Rien d’étonnant, car
« l’Esprit de l’Éternel a parlé en lui, et sa parole a été sur sa langue ». C’est
l’inspiration divine de l’Écriture. En outre, les communications qu’il
recevait, comme instrument pour les transmettre à d’autres, étaient aussi pour
lui « Le Rocher d’Israël m
’a parlé ».
Que reste-t-il devant la vision du vieillard dont la vie va s’éteindre ? Il décrit non ce qu’a été, mais ce que sera « Celui qui domine parmi les hommes ». Tourné vers l’avenir, il considère ce Roi de gloire qui un jour viendra et dominera en la crainte de Dieu, « comme la lumière du matin, quand le soleil se lève, un matin sans nuage ». Il voit Christ, sa justice, sa splendeur. Il semble dire : voilà ce que j’aurais dû être ; je ne l’ai pas été, mais un Autre le sera.
En effet, il ajoute : « Ma maison n’est pas ainsi avec Dieu ». Quelle humiliation, et en même temps quelle simplicité, dans ce peu de mots ! Il ne veut pas parler de lui-même, ni de sa famille. De quoi pourrait-il se glorifier ? Simplement, regardant en arrière, il confesse : ma maison n’est pas ainsi avec Dieu.
Cependant : « Il a établi avec moi une alliance éternelle, à tous égards bien ordonnée et assurée, car c’est là tout mon salut et tout mon plaisir ». Assurance du salut devant la mort, parce que ce salut ne dépend pas des oeuvres, de la marche, mais de la grâce infinie de Celui qui a établi, pour les siens, une alliance éternelle, bien ordonnée et sûre.
Pour les rebelles, les fils de Bélial, le jugement est inévitable : « Ils seront entièrement brûlés par le feu sur le lieu même ».
La longue vie s’achève. « Tout son règne, sa puissance, et les temps qui passèrent sur lui » (1 Chron. 29:30), ne sont plus qu’un souvenir. Les regards du mourant se sont portés sur Christ, sur sa gloire. Par-dessus tout il a rappelé sa grâce.
Et maintenant les yeux qui ont vu tant de choses, versé bien des larmes amères, vont se fermer ; les lèvres qui ont supplié et crié, mais aussi béni et loué, vont se clore ; David entre dans le repos bienheureux de tous les rachetés : « Il s’endort ». Il attend ce jour glorieux de la venue de Christ, où « ceux qui se sont endormis par Jésus » seront ressuscités ; comme il l’a dit lui-même, « Moi, quand je serai réveillé, je serai rassasié de Ton image » (Ps. 17:15).
« Après avoir, en sa propre génération, servi au conseil de Dieu, il s’est endormi » (Actes 13:36). David occupait une grande place dans ces conseils divins ; il fut le premier roi selon le coeur de l’Éternel ; c’est lui qui donna à Israël ce centre de Jérusalem que Dieu avait choisi pour y mettre son nom ; c’est lui qui fit la grandeur du peuple terrestre, et qui, plus encore, fut de tant de manières, un type du Seigneur Jésus.
Pourtant, ne peut-on pas dire que, de chacun de ses enfants, Dieu attend qu’il serve, en sa propre génération, à son conseil ? À l’époque où ils vivent, dans le milieu où ils sont placés, Dieu a en vue une tâche précise pour eux. Il veut se servir d’eux, chacun selon la mesure qu’Il départit, pour accomplir « son oeuvre sur la terre ». Y aura-t-il plus beau témoignage au jour où tout sera manifesté, que d’entendre la voix du Seigneur dire que son racheté, malgré beaucoup de fautes, de faiblesse, de manquements, aura « servi à son conseil », et accompli, comme un esclave fidèle, le service pour lequel il l’avait laissé ici-bas ? « Entre dans la joie de ton Maître ».
Mais il est un bonheur plus grand encore : considérer Celui qui lui-même est la Lumière, ce Soleil de justice qui au jour du matin sans nuage, éclairera tous les cœurs, particulièrement ceux qui, tout près de Lui dans la maison du Père, contempleront sa gloire :
Toujours dans la lumière
De la maison du Père !
Toute ombre a disparu devant l’éclat du jour.
Et, bien loin de la terre,
Notre âme toute entière
Goûtera, près de Lui, le repos de l’amour.