Lecture de Genèse 35 v. 1-10, 13-21.
Paul Finet
Les titres et sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
À l’occasion d’un deuil — Loriol — 02 11 1980
Plan de lecture :
1 - Généralités sur le livre de la Genèse
2.1 - Je ne te laisserai pas, Je ne t’abandonnerai pas
2.2 - Première rencontre de Jacob avec Dieu — Gen. 28
3.1 - Troisième rencontre de Jacob avec Dieu — la maison de Dieu
3.2 - Ôter ce qui empêche de venir au Seigneur
3.5 - Quand Dieu parle — 35:14
Beaucoup plus tard dans l’histoire de Jacob, dans le chapitre 48 (50 ans plus tard), Jacob raconte cette scène à son fils Joseph, et lui dit (48:7) : « Et moi… comme je venais de Paddam, Rachel mourut auprès de moi, dans le pays de Canaan, en chemin, comme il y avait encore quelque espace de pays pour arriver à Éphrath ; et je l’enterrai là, sur le chemin d’Éphrath, qui est Bethléem ».
On a souvent dit que la Genèse était comme la Parole de Dieu en raccourci. Il ne fait aucun doute que cette pensée est juste. JND dans l’introduction si remarquable de sa Bible dit que c’est un grand trésor que ce livre, ainsi que les grands principes que Dieu y a déposés. À part la rédemption surtout exposée dans l’Exode, nous avons dans le livre de la Genèse toutes les grandes vérités en germe, et les principes fondamentaux : ils seront développés dans le reste de la Bible au fur et à mesure de tous les développements de la révélation. Cet auteur ajoute qu’au début du livre, Dieu montre pour tous les siècles comment l’homme, tombé aux mains de l’ennemi, pourra être relevé, restauré, rétabli et amené dans une position bien plus élevée que celle qu’il avait perdue par la chute. Ne sont-ce pas des pensées admirables ? Un autre a dit que nous avions précisément, pour illustrer les grands conseils de Dieu, l’histoire de sept hommes, sept patriarches, sept hommes de Dieu dans le Genèse. Nous les citons rapidement espérant intéresser ceux qui sont jeunes à ce sujet si précieux et si enrichissant.
Le premier homme dont il est question, et qui nous intéresse au plus au point, est Abel, car l’épître aux Hébreux nous dit qu’Abel étant mort, il parle encore (Héb. 11). Il avait saisi par la foi qu’il fallait un sacrifice sanglant pour s’approcher de Dieu ; que les droits de Dieu ayant été foulés aux pieds par la chute de l’homme, celui-ci ne pouvait retrouver Dieu et venir dans Sa présence que par un chemin ouvert par le sang, par la vie offerte, — la vie d’une victime à la place du coupable. Au contraire, Caïn, l’homme religieux, prétend s’approcher de Dieu grâce à ses mérites, à ses efforts, à son travail. Abel étant mort parle encore, et montre pour tous les siècles ultérieurs comment Dieu allait nous approcher de Lui par un chemin nouveau, vivant, consacré à travers la chair de Son Fils (Héb. 10:19-22), c’est-à-dire Sa mort sanglante sur la croix.
Le deuxième homme dont l’histoire nous est donnée avec quelques détails, si précieux, c’est Énoch.
En vertu de Son sacrifice, les cieux se sont ouverts pour le Seigneur ; Il est entré au ciel comme précurseur pour nous, et Il est là, comme une ancre de l’âme, sure et ferme, qui entre jusque au-dedans du sanctuaire (Héb. 6:19-20). Énoch aussi est monté au ciel, mais sans passer par la mort. Voici je vous révèle un secret je vous dis un mystère inconnu jusque là : « nous ne nous endormirons pas tous », — dit l’apôtre Paul (1 Cor. 15:51). Nous n’attendons pas la mort, nous attendons le Seigneur. Énoch est ainsi une figure des croyants dont l’assurance et la position reposent sur le sang de la croix, étant monté au ciel sans passer par la mort. Il y aura de même une compagnie de croyants qui va partir au ciel sans passer par la mort, peut-être ce soir, avec le cri de commandement, la voix d’archange — car la trompette de Dieu sonnera et lorsqu’elle se fera entendre, les morts en Christ ressusciteront les premiers, et nous, nous serons tous changés (1 Thes. 4:15-17 ; 1 Cor. 15:51-52). Ceux qui sont délogés, au lieu de perdre quoi que ce soit, auront fait un gain (Phil. 1:21, 23) ; pour eux l’éternité bienheureuse est déjà commencée, ils sont avec le Seigneur. Et être avec Christ, cela n’est-il pas de beaucoup meilleur ? Nous les rejoindrons sur la nuée pour entrer tous ensemble, introduits par le Seigneur, qui pourra dire alors, pour la joie de Son cœur : « Me voici moi et tous les enfants que tu m’as donnés » (Héb. 2:13). Aucun ne sera laissé en arrière, aucun ne sera perdu, et il n’y aura pas d’erreur. Aucun ne sera là par erreur, aucun ne sera là en vertu d’une profession religieuse quelconque. Que chacun y pense car nous sommes sauvés par la foi, et la foi est un engagement personnel, avec le Seigneur, saisissant de sa main le salut qu’Il nous offre et qu’Il a acquis au prix de Sa mort sanglante.
Le troisième homme dont
l’histoire nous est donnée dans ce livre, c’est Noé,
image d’un résidu qui va traverser la grande tribulation à la suite de
l’enlèvement de l’Église. Noé se retrouve à travers le déluge sur une terre
renouvelée, comme ceux-là traverseront la grande tribulation, une crise d’une
gravité sans précédent, et qui n’aura jamais son semblable par la suite ;
après avoir traversé cette crise, ils se retrouveront enfin sur une terre
nouvelle. Là ils verront Celui qu’ils attendent
et qu’ils salueront en disant : « Combien grande est
ta beauté, Combien grande est ta bonté ». Dès qu’ils le verront, ils
diront (Ps. 45:2) : « Tu es plus beau que les fils des hommes
».
Le règne bienheureux commence pour eux, et És. 25 la seule mention que nous
ayons dans l’Ancien Testament de la victoire sur la mort, s’appliquera
littéralement pour ce jour-là ; la mort ne sera plus car pour les croyants
il n’y aura plus de mort dès ce moment-là ; la mort ne frappera plus que
les méchants (És 65:20 ; Ps. 101:8). Noé donc, le juste, fut séparé des
hommes iniques de son temps quand la corruption et la violence atteignirent un
point que Dieu ne pouvait plus le supporter (tout comme aujourd’hui). Le déluge
a frappé les hommes, et ils ne connurent rien, dit le Seigneur, jusqu’à ce que
le déluge vînt. De même aujourd’hui, les hommes essaient d’améliorer les
structures du monde pour redresser, pour rétablir la machine entièrement
grippée ― ils ne connaissent pas que le Seigneur vient, et que le
jugement va fondre sur eux comme l’aigle fond sur sa proie. Noé passe à travers
le déluge et se retrouve sur une terre nouvelle ; le résidu verra le
Seigneur sur la terre et pourra jouir de tout le déploiement de la grâce qu’Il
apportera avec Lui, règne de paix, règne de justice dans lequel il n’y aura
plus de peines, plus de maux ; la mort ne sera plus pour eux, le chagrin,
le gémissement auront fait place pour toujours à la joie éternelle qu’ils
connaîtront.
Le quatrième homme occupe une place importante, celle du milieu, trois avant lui, trois après lui. Abraham est le père de nous tous (les croyants ; Rom. 4:16), le père de la foi, ayant mis sa confiance dans le Dieu qui peut ressusciter les morts (Héb. 11:19), qui appelle les choses qui ne sont pas comme si elles étaient (Rom. 4:17). Il avait confiance dans le Dieu qui fait vivre les morts, qui a reçu en figure d’ailleurs, — mais dans le principe, pour Dieu, la chose était faite, — son fils dans une sorte de résurrection d’entre les morts. Abraham a compris qu’il est le père de nous tous. Il est le croyant qui illustre trois grandes vérités, les trois racines de l’arbre de la grâce. Sans doute beaucoup d’entre nous ont lu ces vérités si précieuses. Nous trouvons dans la vie d’Abraham les trois racines de l’arbre de la grâce, autrement dit : l’élection, l’appel de Dieu et les promesses. À partir de Gen. 12, Dieu ne change plus rien à l’état du monde qui retombe dans l’idolâtrie, mais il fait sortir Abraham d’Ur des Chaldéens, de ce milieu idolâtre. Il fait sortir celui qu’Il avait élu, qu’Il appelle, et sur la tête duquel Il fait reposer toutes les promesses. En vertu du sacrifice de son fils, Dieu pourra dire « parce que tu as fait cette chose là, n’ayant personne de plus grand par qui jurer je lève ma main aux cieux, je jure par moi-même » (Gen. 22:16 ; Héb. 6:13). Dieu a fait des promesses à Abraham sur lesquelles nous nous appuyons pour toute l’éternité, des promesses qui ont pour objet une semence céleste, comme les étoiles des cieux, et une semence terrestre comme le sable qui est au bord de la mer. En vertu du sacrifice d’Isaac, Dieu confirme les promesses qu’Il a faites à Abraham, en qui nous avons, rappelons-le, l’élection, l’appel, et les promesses, les trois racines de l’arbre de la grâce.
Nous venons maintenant au
cinquième homme, son fils Isaac. Que trouvons-nous dans Isaac ? La
position de fils, si précieuse,— c’est l’enseignement
de l’épître aux Galates « nous avons reçu l’esprit d’adoption par
lequel nous disons Abba Père
». Nous
employons ainsi pour parler à Dieu la même expression que le Seigneur Jésus
lorsqu’il veut faire appel à tout ce que le cœur du Père contient pour nous.
N’est ce pas quelque chose d’infiniment précieux, quelque chose qui nous
confond, que nous puissions dire à Dieu, au grand Dieu des cieux et de la
terre, à Elohim, que nous puissions Lui dire : Abba Père. Pourquoi avons-nous été élus, dit Paul dans
l’épître aux Éphésiens ? — pour être adoptés pour Lui par Jésus Christ.
Dans Isaac, nous avons donc la position de fils, et ses privilèges.
Nous arrivons maintenant au sixième homme ; c’est Jacob dont nous avons souvent entendu parler, mais la Parole de Dieu est toujours nouvelle, et ce n’est pas nous répéter lorsque nous nous occupons de la Parole de Dieu. Que trouvons-nous chez Jacob ? On y trouve ce qui vous concerne, ce qui me concerne, ce qui nous concerne les uns et les autres, jeunes ou plus âgés. Cet après midi nous rappelions que selon le propos de Dieu, selon l’appel de Dieu, selon ce que Dieu a dans Ses conseils, il y avait onze journées de chemin pour entrer en Canaan, depuis la sortie d’Égypte,depuis le franchissement de la Mer Rouge ; mais le peuple d’Israël est resté 40 ans dans le désert pour connaître la discipline à laquelle Dieu voulait les soumettre, pour qu’ils connaissent ce qui était dans leur cœur, pour qu’ils apprennent à connaître le cœur de Dieu (Deut. 8). En Jacob nous avons cela, nous avons la discipline à laquelle nous participons tous indistinctement, sans exception pour la bonne raison que nous sommes des fils (c’est l’apôtre qui le dit dans l’épître aux Hébreux).
Après la position de fils (Isaac), nous avons l’histoire de Jacob, celle de la discipline à laquelle nous sommes soumis, le dépouillement auquel Dieu procède envers chacun de nous, nous enlevant les choses les plus précieuses à nos cœurs, sans nous expliquer pourquoi Il le fait, nous demandant non pas de comprendre, mais de nous soumettre et de croire que ce qu’Il fait, Il le fait pour notre bien. Nous ne comprenons pas maintenant : « ce que je fais maintenant, Pierre tu ne le sais pas » (Jean 13:7), mais la main qui appuie sur nous, c’est la main qui a été percée à la croix : Pouvait-il donner une preuve plus grande de Son amour ? Il nous affirme que ce qui nous fait pleurer aujourd’hui en deçà de la scène céleste dans laquelle nous allons entrer, ce qui nous brise aujourd’hui, ce qui nous meurtrit, ce qui grave de si profonds et si douloureux sillons dans notre cœur, va nous émerveiller demain. Nous serons demain en présence du vrai coté des choses. Nous voyons maintenant au travers d’un verre, obscurément, mais l’épreuve de notre foi, bien plus précieuse que celle de l’or qui périt et qui toutefois est éprouvée par le feu, cette épreuve de notre foi sera trouvée tournée ― nous verrons l’autre coté comme un vitrail dont nous ne saisissons pas bien le motif en le voyant de l’extérieur ; il est malaisé de distinguer ce que l’artiste a réussi à placer comme motif dans ce vitrail, mais, lorsque nous voyons ce vitrail de l’autre coté, c’est comme l’épreuve de la foi trouvée tournée à louange, à gloire, et à honneur (1 Pierre 1:7). Nous allons être là-haut émerveillés en voyant que notre tribulation, quelle qu’elle soit, qui n’était après tout que légère et pour un moment, aura mis à notre profit un poids éternel de gloire. C’est infiniment précieux, nous ne comprenons pas, nous ne savons pas, mais nous savons que toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu (Rom. 8:28), même les choses qui nous paraissent les plus opposées au bien. Nous estimons ce dernier selon notre capacité si limitée, mais Dieu a la vue bien plus longue que nous : Dieu n’a jamais trompé la foi et la foi ne s’est jamais trompée en s’appuyant sur Dieu. Jacob a été discipliné dès le moment où il s’en alla pour se sauver ; et il n’a jamais connu autant de revers dans sa vie qu’à partir du moment où il est relevé moralement, et où il est en communion avec Dieu ; il perd alors la nourrice de sa mère Rebecca, il perd son épouse, Joseph va lui être enlevé, et il devra dire : « toutes ces choses sont contre moi » (Gen. 42:36) ; quand ses frères reviennent d’Égypte, ils lui disent « outre Joseph que tu n’as plus maintenant, il faut donner Benjamin, car il est impossible que le grand Chef en Égypte nous accueille encore sans Benjamin avec nous ». Pauvre Jacob ! il dit « tout cela est contre moi ». Mais y avait-il quoi que ce soit dans le cœur de Dieu contre Jacob ? Il n’y avait rien dans le cœur de Dieu contre Jacob ; tout ce qui arrivait pour Jacob était pour son bien, mais Jacob avait une vue si limitée, qu’il ne voyait pas le tableau final que l’Écriture place devant nous lorsqu’il a retrouvé tous ses fils, et qu’il a serré Joseph sur son cœur pour sa consolation et la joie de son cœur, une joie infinie et insurpassable. Mais c’est alors un Jacob qui va boiter, car Dieu lui a touché la hanche (Gen. 32:25) : n’est ce pas une expression qui nous arrête un instant lorsque nous la lisons avec attention ? Dans cette lutte que Jacob soutient avec Dieu, il sera dit (Gen. 32:24) : « Et Jacob resta seul ; et voici un homme lutta avec lui jusqu’au lever de l’aurore. Et lorsqu’il vit qu’il ne prévalait pas sur lui, il toucha l’emboîture de sa hanche ; et l’emboîture de la hanche de Jacob fut luxée, comme il luttait avec lui ». N’est ce pas quelque chose d’extraordinaire de nous dire « lorsqu’il vit qu’il ne prévalait pas sur lui, il lui touche la hanche » et voilà Jacob qui devient boiteux. Apparemment il y avait une contradiction : il était tellement facile de triompher de Jacob puisqu’il suffisait que cet homme qui lutte avec lui, lui touche simplement l’emboîture de la hanche et voilà Jacob déhanché, boiteux pour le reste de ses jours. C’est pourquoi est-il dit : « lorsqu’il vit qu’il ne prévalait pas sur lui ». Et plus loin, au contraire il est dit au verset 28 : « Tu as lutté avec Dieu et tu as prévalu ». Comment se fait il que cet homme si puissant ne prévaut pas sur Jacob ? et même qu’au contraire, l’Esprit de Dieu nous dit que c’est Jacob qui a prévalu sur lui. Et bien, Dieu ne peut pas améliorer, changer, modifier le caractère fondamental de la chair (Rom. 8:7), et Il n’a pas fait plus sur la chair de Jacob. Mais Jacob étant touché dans le motif profond de sa nature, Jacob va prévaloir sur lui. Comment va-t-il prévaloir ? C’est le prophète Osée (12:5) qui nous le révèle : il lutta, il supplia et il pleura. En pleurant, en suppliant, il a obtenu de Dieu ce qu’il attendait en prévalant sur Dieu. N’est ce pas une image touchante pour nous de voir comment Dieu façonne son serviteur à travers toutes les épreuves auxquelles Il le soumet ? mais retenons que Jacob n’a jamais si bien marché que depuis qu’il était boiteux, et il n’a jamais vu aussi clair que depuis qu’il était aveugle. Jacob aura ainsi une vue plus nette des choses de Dieu que son fils Joseph, pourtant si intelligent. Joseph dira « pas ainsi mon Père » — « je le sais, mon fils, je le sais » dit Jacob (Gen. 48:17-19). Jacob a croisé ses mains avec le discernement spirituel que la communion avec Dieu donne après la longue discipline à laquelle il a été soumis et qui a formé son caractère pour jouir enfin paisiblement de la communion avec Dieu.
Le septième homme, c’est Joseph, sur lequel nous n’avons pas le temps de nous étendre. Retenons seulement ceci, comme le dit un de nos chers auteurs M. Bellett : nous ne lisons nulle part que Dieu dise : « Je suis le Dieu, d’Abraham, d’Isaac et de Jacob et de Joseph ». Pourquoi ne dit-il pas qu’il est le Dieu de Joseph ? C’est pourtant un type si précieux de Christ, un homme aux qualités qui nous émeuvent, et qui illustrent et annoncent d’avance ce qui sera si brillant dans la personne de Christ, celui sur lequel le ciel pourra s’ouvrir. Pourquoi Dieu ne dit il pas : « je suis le Dieu de Joseph » ? Et bien c’est M. Bellet qui nous dit ce petit secret, combien précieux : Quand Dieu dit qu’il est le Dieu d’Abraham, il appelle ceux d’Abraham et de sa famille ; quand Il dit qu’il est le Dieu d’Isaac, Ismaël est laissé de coté ; quand Il dit qu’Il est le Dieu de Jacob, Ésaü est laissé de coté ; mais Il ne dit pas qu’Il est le Dieu de Joseph parce qu’avec Joseph il n’y a plus personne à mettre de coté. À partir de Joseph, type de Christ, celui qui a été mis à part de ses frères (Deut. 33:16), la bénédiction de Jacob s’étend à toute sa famille, et lorsque Joseph retrouve ses frères, il les embrasse tous (Gen. 45:15). Et que va-t-il dire dans ce moment sublime, ce moment d’une émotion indicible, lorsque ses frères vont le reconnaître ? qui va-t-il placer au milieu d’eux tous, de qui va-t-il parler, quelle sera sa première parole ? Il va parler du Père (Gen. 45:3), le Père qui vous aime. Joseph nous amène au Père, de sorte que Dieu ne peut pas dire qu’il est le Dieu de Joseph, car il n’y a plus personne qui est écarté de l’amour du Père, qui est écarté du dessein du Père de se faire connaître et d’amener le pécheur dans sa présence.
Voyons rapidement quelques traits essentiels de cette histoire de Jacob. Gen. 35 est donc la troisième rencontre que nous avons de Jacob avec Dieu ; nous savons dans quelles conditions la première a eu lieu. Souvent nous disons pour nous encourager l’un l’autre, le Seigneur a dit : « je ne te laisserai pas, je ne t’abandonnerai pas », et c’est tout à fait vrai, l’expression se trouve dans la Parole de Dieu dans l’épître aux Hébreux (13:5). Mais posons-nous la question : À qui le Seigneur dit-il en premier « je ne te laisserai pas je ne t’abandonnerai pas » ? Qu’Il le dise à un homme comme Josué, capitaine valeureux et successeur de Moïse, pour l’encourager dans un service extrêmement difficile, nous le comprenons bien. Mais quand nous réalisons que c’est à Jacob que Dieu vient le dire pour la première fois, à Jacob, cet homme boiteux, cet homme aux procédés biaisés, qui devra être discipliné — or ceci n’enlève rien dans le cœur de Dieu, rien à l’amour dont il est l’objet, — c’est à lui que Dieu vient dire : « Jacob, je ne te laisserai pas, je ne t’abandonnerai pas » ! N’est-ce pas encourageant ? combien de fois, dans le livre des Psaumes par exemple, Dieu dit-il qu’il est le Dieu d’Abraham ? chacun a certainement réalisé que si nous cherchons, nous trouvons une seule fois que Dieu dit qu’il est le Dieu d’Abraham. Pourquoi ? Nous n’avons pas besoin que Dieu l’affirme beaucoup de fois, nous savons bien qu’Abraham était l’ami de Dieu (Jacq. 2:23), mais combien de fois va-t-il nous dire qu’il est le Dieu de Jacob ? Quand nous affirmons que « bienheureux est celui qui a le Dieu de Jacob pour son secours » (Ps. 146:5), bienheureux qui connaît le Dieu de Jacob, autrement dit le Dieu de la miséricorde… Combien de fois Dieu va-t-il nous le dire ? Il va le dire 21 fois, le chiffre divin multiplié par le chiffre de la perfection, montrant ainsi combien son amour est grand, combien son amour est inaltérable ; rien ne peut y porter atteinte même envers un Jacob.
La première rencontre de Jacob avec Dieu, c’est quand Jacob doit s’en aller pour vingt ans loin de la maison paternelle, après avoir commis l’énorme faute qui va peser sur lui en conséquence gouvernementale pendant 20 ans. Dieu ne va pas enlever un seul mois de ces 20 ans pendant lesquels Jacob devra supporter les conséquences de sa faute, mais à coté de cela, à coté du gouvernement de Dieu envers Jacob, — gouvernement inévitable, auquel personne ne peut se soustraire, quel qu’il soit, car ce qu’un homme sème, il le moissonne, — à coté de cela Dieu dit à Jacob « tu t’en vas pour vingt ans dans une terre d’exil et tu vas beaucoup souffrir, mais je ne te laisserai pas, je ne t’abandonnerai pas ». Nous pouvons bien imaginer ce que devait être la situation de Jacob, combien son cœur était lourd, quand sa conscience lui reprochait cette faute impardonnable commise contre son père, et le soir, fourbu et lassé du chemin, il n’a que le ciel étoilé pour couverture ; il s’étend sur quelque pierre. Qui pourrait donner à ce pauvre proscrit, à ce pauvre exilé quelques paroles de consolation ? Qui pourrait se trouver sur son chemin ? Personne, sauf que, tout à coup sur une échelle est dressée jusqu’au ciel, quelqu’un en descend pour s’occuper de lui, pour venir auprès de lui, et lui dire « Jacob, je ne te laisserai pas, je ne t’abandonnerai pas ». Ce « quelqu’un » sur l’échelle montrait qu’un jour, pour accomplir toutes les promesses faites aux pères, ce ne serait plus sur une échelle qu’Il allait se trouver entre ciel et terre, mais sur la croix. En disant « si je suis élevé de la terre… » (Jean 12:32), le Seigneur parle de Sa mort, de quelle mort Il allait mourir ; c’était pour attirer tous les hommes à Lui-même, et pour confirmer en un Homme toutes les promesses que Dieu a faites aux pères et dont l’accomplissement dépendait de Sa mort sanglante sur la croix, — fondement impérissable à la gloire de Dieu et au déploiement de toutes les promesses qu’il a faites, sans qu’il soit porté la moindre atteinte à sa gloire, à sa justice et à sa sainteté.
La deuxième rencontre, c’est quand il revient, chapitre 32 ; nous en avons déjà parlé.
Ici c’est la troisième
rencontre. Quand Jacob a quitté la maison paternelle pour aller à Paddam Aram, il est arrivé d’abord à Béthel (ch. 28), et
nous revenons à Béthel. Le voyage est long entre Béthel et Paddam
Aram. Jacob revient, et nous avons souligné quelques faits essentiels de notre
lecture pour arriver rapidement à la fin, lorsque le cœur de Jacob est brisé
par le deuil qu’il va connaître, si douloureux et si profond pour lui, mais qui
va nous montrer ce qu’est la foi, dans le cœur d’un croyant, dans notre Dieu, —
la foi de quelqu’un qui sait que le ciel est ouvert pour lui et qui, jusqu’au
bout des collines éternelles (Gen. 49:26), a déjà
compris quelque chose du dessein de Dieu de nous amener devant Sa gloire avec
abondance de joie (Jude 24), au-delà de la mort vaincue et en vertu de l’œuvre
de Celui qui allait paraître à Bethléem ; car nous sommes à Éphrath (comp. Gen. 35:16 et Michée 5:2). Mais n’anticipons pas ;
disons seulement quelques mots des premiers versets, quand Dieu vient dire à
Jacob qu’il faut monter à Béthel (maison de Dieu ; 35:1). Il y a un lieu
où Dieu nous invite à Le rencontrer, à Béthel, la maison de Dieu. Ce n’est pas
un lieu que nous pouvons imaginer, que nous pouvons adopter, que nous pouvons
arranger à notre gré ; il y a un
lieu : si vous prêtez
attention dans cette lecture, vous verrez que sept fois nous avons l’adverbe de
lieu, « là ». Il y a un lieu bien défini pour le rassemblement des
croyants, autour de Christ, reconnaissants la pleine suffisance de Son nom,
l’autorité de Sa parole, la présence et l’opération du Saint Esprit :
« là » où deux ou trois sont assemblés en mon nom (Matt. 18:20). Nous
avons « là » aux v. 1, 3, et deux fois au v. 7. Il nous est parlé
sept fois (nombre parfait) de ce lieu, de Béthel, la maison de Dieu, où Dieu
invite son serviteur à Le rencontrer ; ce n’est pas un
lieu imaginé
par Jacob, mais le
lieu établi par Dieu lui-même. Est-ce différent pour
nous aujourd’hui ? Nous n’avons pas besoin d’insister sur ces vérités,
mais elles sont de la plus haute actualité au milieu de la confusion actuelle,
dans la ruine irrémédiable de l’Église qui va toujours en s’accentuant. Quel
bonheur de connaître ce que le Seigneur a dit, et de réaliser quelle que soit
la faiblesse dans laquelle nous nous trouvons que « là où deux ou trois sont assemblés en mon
nom je suis là au milieu d’eux ».
Jacob monte donc à Béthel. Mais pour monter dans ce lieu où Dieu a promis Sa présence, où Il doit rencontrer Jacob, Jacob a compris tout de suite qu’il y a des conditions morales. Trois choses sont présentées par Jacob, et qui sont pour nous des vérités de la plus haute importance, et d’une actualité frappante pour nous. La première que Jacob place devant nous a rapport avec sa maison : « ôtez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous »… Il faudrait bien nous arrêter longuement sur la valeur de cette phrase : « des dieux étrangers ». Dans ces jours-là, il s’agissait de dieux de bois, de dieux de pierre, de dieux en métal. Nous courrons moins ce risque aujourd’hui de nous jeter par terre devant des dieux aussi grossiers, quoiqu’il existe encore en certains endroits cette sorte d’idolâtrie, d’asservissement, d’abrutissement de la personnalité humaine, sous l’effet de celui qui est Le menteur et Le meurtrier (Jean 8:44). Cela remplit de honte de voir à quel point cette pauvre humanité se trouve asservie. Mais nous sommes quand même concernés par ce « ôtez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous » ; l’apôtre Paul nous parle d’idolâtrie au chapitre 10 de 1 Corinthiens, et l’apôtre Jean nous parle aussi d’idolâtrie dans sa première épître. Que veulent-ils nous dire ? l’idolâtrie est beaucoup plus raffinée aujourd’hui, ne serait ce que la science, si exaltée aujourd’hui par les hommes dans ses réalisations extraordinaires, spectaculaires ; quelqu’un disait : ce n’est peut-être pas très populaire de le dire, mais après tout, ce n’est que la partie supérieure de la corruption humaine, l’esprit de l’homme qui se vante et s’exalte ; voilà une forme raffinée de l’idolâtrie, sans parler d’une multitude d’autres formes idolâtres modernes, raffinées, séduisantes et acceptables, qui ne portent en rien atteinte à la personnalité humaine, mais au contraire qui l’exalte ; or pour Dieu, c’est quand même l’idolâtrie.
En bref, et pour conclure, ce qui empêche quelqu’un de venir au Seigneur, ce qui empêche quelqu’un de répondre à l’appel de Dieu, c’est une idole qu’il serre dans son cœur, que personne ne voit sans doute, mais à laquelle il s’accroche, et qu’il préfère au salut que Dieu offre, s’attachant à des choses qui ne durent qu’un moment. « Car que profitera-t-il à un homme s’il gagne le monde entier et qu’il fasse la perte de son âme » (Marc 8:36). Une idole tient asservi, dans le temps présent, comme un instrument dans la main de celui qui tient l’homme comme esclave. Ce qui empêche quelqu’un de venir au Seigneur, tous et celui qui parle en premier lieu, ce qui nous empêche d’être fidèles, c’est ce qui dans notre cœur prend une place qui n’appartient qu’au Seigneur : voilà une forme d’idolâtrie, ou d’idoles. « Ôtez les dieux étrangers, purifiez vous », et « purifiez vous » (2 Cor. 7:1). Paul montre de quelle manière nous avons à nous purifier, et de quoi : de toute souillure de chair et d’esprit, intérieur comme extérieur. Pas besoin de rappeler quelles souillures se présentent aujourd’hui d’une manière effrayante à la jeunesse, dans la littérature, les journaux ; nous n’avons pas besoin d’épiloguer ; des choses souillent l’âme et dont on ne peut plus se débarrasser. Quel avertissement solennel ! « Ôtez les dieux étrangers, purifiez-vous, changez de vêtement » (35:2). Paul nous invite à changer de vêtement. Il nous invite à dépouiller le vieil homme avec ses passions et ses convoitises et à revêtir le nouvel homme, à revêtir Christ (Col. 3:9-10 ; Éph. 4:23-25 ; Rom. 13:14). « Changez de vêtement » s’adresse à ceux qui sont appelés à se présenter dans la maison de Dieu.
Dépouillez le vieil homme
avec ses mensonges, ses passions et ses convoitises pour revêtir le nouvel
homme, pour que la conduite des croyants réponde à la position qu’ils occupent
devant Dieu en Christ, car le croyant est un homme en Christ
. Et la
nouvelle vie en nous c’est Christ (Col. 3:4) ; le nouvel homme en nous,
c’est Christ, sauf que nous avons à Le manifester, mais non pas d’une manière
légale, parce que Dieu ne nous demande rien sans nous donner la force et les
capacités de le réaliser. Paul pouvait dire « pour moi, vivre c’est
Christ » (Phil. 1:21), et quand on voit les apôtres, on voit la vie de
Christ se déployer comme elle avait été vue en Christ ; évidemment Lui
était le parfait modèle inimitable, mais Paul manifestant cette vie peut dire
« soyez les imitateurs parce que je le suis de Christ » (1 Cor.
11:1).
Changez de vêtements et nous
montons à Béthel (35:2-3). Un peu plus loin lorsqu’il a bâti l’autel, il
l’appelle El Béthel, remarquez ce nom qui signifie « Dieu de la maison de
Dieu ». Quel progrès Jacob fait à partir de l’autel qu’il avait dressé à
la fin du chapitre 33 où vous pouvez comparer les deux significations (33:20 El-Elohé-Israël, Dieu le Dieu d’Israël). Là c’était un
autel qui attestait chez Jacob d’une vue limitée, d’une vue spirituelle
réduite, rétrécie. C’est le Dieu de Jacob, le Dieu personnel de Jacob. Or nous
ne disons pas « Je » quand nous nous adressons à Dieu dans le culte
comme expression de la louange collective. « Béni soit le Dieu et Père de
notre Seigneur Jésus Christ qui NOUS a bénis… » (Éph.
1:3) ; c’est toujours nous
, — À celui qui nous
aime (Apoc. 1:5). Le culte est collectif, mais Jacob, dans ce
chapitre 33, s’en tient à « je », c’est-à-dire un culte personnel,
rétréci, incomplet. Tandis qu’ici au ch. 35, il a fait des progrès, et il
appelle le lieu du nom d’El-Béthel, le Dieu de la
maison de Dieu ; sa vision s’est élargie, et il a là devant lui la pensée
de Dieu selon une largeur spirituelle améliorée, renouvelée — et nous aussi,
nous avons à prendre le pain de la Cène chaque dimanche matin, non pas comme
expression ou symbole d’une assemblée locale, ou des assemblées d’une région,
mais comme symbole du Corps tout entier, envisageant toute la maison de Dieu
composée de pierres vivantes, non seulement ici dans ce pays, mais partout dans
le monde, baptisées d’un seul Esprit pour être un seul corps, avec tous les
membres vivants du Corps de Christ, tous ceux qui participent à Sa vie et dont
nous avons le symbole dans le pain de la Cène. Le Dieu de la maison de Dieu.
Après ces progrès, nous avons
maintenant la mort de Debora au v. 8. Comment se
fait-il, que nous ayons Debora ici, alors qu’on n’en
a plus entendu parler depuis le chapitre 24:59 lorsqu’elle est venue de Paddam-Aram avec Éliezer et
Rebecca ? on s’est bien posé la question et elle
ne manque pas d’être difficile à résoudre. Comment se fait-il que nous la
trouvions ici ? C’est un mystère. Est-elle retournée à Paddam-Aram ?
nous savons que Rebecca avait dit à Jacob
« va-t’en quelques jours chez mon frère et je te ferai tirer de là »
(27:43-44). Pauvre mère ! elle n’a jamais revu
son fils. Il y avait des géants contre le peuple de Dieu dans Son
gouvernement ; il y a aussi des fautes que l’on paie cher. Pauvre femme,
c’est à son instigation que son fils avait commis cette lourde faute ;
elle n’a plus jamais revu son Jacob, son préféré (25:28). Chacun des parents
disait d’un des fils : « c’est mon fils ». La Parole de Dieu le
dit. Quand il voyait Ésaü, Isaac avait le coeur comblé par son caractère :
ce qui manquait à Jacob, il le trouvait complètement chez son fils Ésaü, un
homme ardent, un peu impétueux. Isaac était un homme lymphatique, pourrions-nous
dire. Isaac était fier de son fils, et disait « mon
fils ».
Mais son épouse Rebecca, quand elle voyait Jacob, cet homme doux et docile
(25:27), elle disait « c’est mon
fils ». Chacun avait son
enfant. Elle n’a plus jamais revu son fils. A-t-elle envoyé à Paddam Aram sa nourrice ? c’est
possible ; en tout cas ici nous la retrouvons 20 ans plus tard. Et la
voici qui se meurt. Qu’est-ce que Dieu veut nous dire ? Résumons-le
rapidement. Dieu veut nous dire que désormais, — retenons cette phrase si belle,
et si expressive (elle n’est pas de nous) — : « Dieu tranche
maintenant dans le cœur de Jacob les sources secrètes de sa vie qui le
rattachaient à sa mère, et par sa mère à Paddam-Aram,
par sa nourrice ». Voyez la nourrice qui meurt, celle qui a nourri
Rebecca, et Rebecca moulait son fils. Dieu met fin aux sources secrètes qui
alimentaient la vie de Jacob, qui alimentaient la chair chez Jacob. Dieu
tranche ce lien, et cela ne va pas sans pleurs. Voyez, il enterre cette femme,
la nourrice de sa mère, sous un chêne appelé Allon-Bacuth,
qui signifie selon la note : « chêne des pleurs ». Ah ! quand on taille la vigne, il paraît qu’elle pleure. Nous
savons bien que le Seigneur se présente comme le vrai cep et nous comme les
sarments que le Père émonde (Jean 15:1-5) ; l’émondage ne va pas sans
souffrance et sans peine et sans pleurs ; mais à côté de cela, s’il y a
des pleurs, il y a le chêne : la vie spirituelle, la puissance
spirituelle ; celle-ci ne peut être manifestée, ne peut être connue, ne
peut être réalisée que dans le chemin où la chair est mise de coté : c’est
la nourrice enterrée, la chair que Dieu met dans la mort et qu’il a placé dans
la croix de Son fils. C’est une première étape, la mort. La mort est une étape.
Dieu vient parler à son serviteur et lorsque Il a parlé avec lui, Il monta d’auprès de lui (35:13). Il y a donc un lieu où Dieu vient parler avec nous. C’est à Béthel sur le chemin de Béthel, que Dieu vient parler avec Jacob ; il y a un lieu où nous pouvons rencontrer Dieu ; Il vient nous parler par Sa parole et par le ministère des siens. Quelles sont les conséquences quand Dieu nous parle ? notre cœur ne brûle-t-il pas lorsqu’il nous parle par le chemin (Luc 24:32). Les conséquences sont présentées ici avec une grande simplicité, et avec une clarté et une efficacité qui nous touchent toujours profondément au cœur. Quelle est la conséquence quand Dieu nous a parlé ? Comment parle Daniel quand il entend l’Éternel parler ? « Que mon seigneur parle car tu m’as fortifié » (Daniel 10:19). « Tes paroles se sont-elles trouvées, dira Jérémie, je les ai mangées, elles ont été l’allégresse et la joie de mon âme » ; et vous voyez Jacob (v. 14) : « Jacob érigea une stèle au lieu où il avait parlé avec lui, une stèle de pierre, et il répandit dessus une libation ». Jacob nous montre la joie qu’il possède dans son cœur, qu’il retient dans son cœur après que Dieu est monté auprès de lui et qu’il est venu lui parler. La libation c’est la joie qu’il serre dans son cœur comme Jérémie, comme Daniel, heureux d’avoir reçu en communication les pensées de Dieu ; et non seulement cela, il y versa de l’huile — montrant qu’ainsi, la vie spirituelle a été nourrie et fortifiée. La libation et l’huile, deux éléments essentiels qui nous parlent du résultat des conséquences du fait que Dieu soit venu parler avec son serviteur.
Pour terminer, évoquons rapidement cette dernière scène. Elle ne manque pas de nous émouvoir ; nous allons poser le pied dans la terre de la promesse, le voyage se termine et voilà cette scène de l’enfantement placée devant nous, au cours de laquelle l’épouse de son cœur, Rachel, lui sera enlevée. Combien d’années a-t-il été marié avec Rachel, depuis combien de temps est il marié avec elle ? si nous avons bien compté et compte-tenu de tous les détails donnés, il semble qu’il ait été marié 13 ans avec elle. Ce n’est pas longtemps. À cette scène déchirante, un petit garçon est là comme témoin, c’est Joseph. Quel âge a-t-il ? Il a cinq ans. Ce pauvre père, ce bambin de cinq ans, et cette mère qui s’en va. Quelle scène tragique ? Comme elle illustre la cruauté de la mort, l’empire de la mort, le pouvoir de la mort aux mains de celui qui la détient, mais qui pour nous — quel bonheur, quelle gloire, quel sujet d’actions de grâce — la mort ne peut plus rien contre nous ! Sans doute la pauvre enveloppe mortelle de notre âme peut être touchée car nous avons un grand trésor dans un vase de terre (2 Cor. 4), mais la mort ne peut toucher que ce vase extérieur ; après tout la mort ne fait que libérer notre âme pour s’en aller auprès du Seigneur. Jacob n’a pas encore eu les révélations extraordinaires de l’apôtre Paul, mais la foi des élus avait déjà saisi quelque chose de ces glorieuses vérités, et Jacob va nous le montrer. Elle eut un enfantement pénible et « comme elle était en grand travail pour enfanter, la sage femme lui dit : Ne crains point, car tu as ici encore un fils » Vous voyez les consolations humaines : comme elles sont vaines, comme cela est creux ! La sage femme lui dit : mais tu sais, tu as déjà un fils, c’est Joseph, mais voici tu as encore un fils. Pour la soutenir, pour l’encourager, — quelles consolations sans aucune valeur pour cette pauvre femme qui sent la vie s’écouler d’elle-même ! que peut lui apporter cette parole qu’elle enfante encore un fils ? Voilà les consolations humaines, celles qui paraissent les mieux adaptées, les mieux tournées, les plus dignes d’être reçues, qui émanent de sentiments très beaux, de sentiments de noblesse ! Qu’est-ce que cela peut apporter à l’âme qui souffre, à l’âme comme celle de Rachel qui quitte la scène, sentant cette vie qui s’écoule d’elle-même ? Alors il arriva, comme son âme s’en allait, qu’elle appela l’enfant Ben-oni : cette pauvre femme ne voit que le coté extérieur de ce sombre tableau, la mort qui fait son œuvre, et elle dit Ben-oni « fils de ma peine » ; autrement dit : le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, nous sommes soumis à la mort rien ne peut nous soustraire à ce pouvoir, nous sommes vaincus ; rien ne peut nous délivrer. Elle ne voit que ce tableau sombre, que ce tableau effrayant pour son cœur rempli d’amertume, de détresse et de désespoir ; « Ben-oni » fils de ma peine !
La mort a triomphé :
Comment le père va-t-il réagir ? par sympathie
pour son épouse, pour ne pas lui faire la moindre peine dans ce moment-là, il
aurait pu lui dire : nous allons l’appeler Ben-oni.
— Non, dit-il, nous n’allons pas appeler cet enfant Ben-oni,
nous allons l’appeler au contraire Benjamin. Pourquoi ? Ne serait-ce pas
qu’il entend déjà le chœur des anges — car nous sommes à Bethléem, —
disant : « aujourd’hui, jour de joie et de délivrance, vous avez un
Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur » (Luc 2:11) ; et Paul ne
dira-t-il pas à l’égard de cette scène « si par la faute d’un seul, la mort a régné par un seul, beaucoup plutôt
ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce et le don de la justice
régneront-ils en vie par un seul, Jésus Christ » (Rom. 5:17), par
la grâce d’un seul homme, Jésus Christ, qui allait naître à Bethléem. Jacob a
compris quelque chose de ce qui serait un jour le triomphe de la foi. Non pas Ben-oni, Benjamin « fils de ma droite », car à
Bethléem naîtra le fils de La Droite, le Fils de Dieu qui va se mesurer avec
celui qui est plus fort que nous, avec celui qui détient le plus grand pouvoir
qui se trouve dans le monde, c’est-à-dire la mort. Mais il en aura raison,
comme David en son jour, tirant l’épée du géant, lui tranche la tête avec sa
propre épée, et vient, avec la tête du géant, dire au peuple :
« Voilà le géant, voilà celui devant lequel nous étions tous remplis de
crainte, devant lequel nous tremblions ; plus de terreurs, plus de
cris, plus rien à craindre : ce géant a perdu tout son pouvoir. Non pas,
dit-il, Ben-oni, mais Benjamin. Il érige une stèle
sur le sépulcre. C’est un homme qui veut conserver le souvenir, dans ce lieu,
sinistre entre tous, ce lieu funèbre dans lequel son cœur est brisé, pour
conserver le souvenir de la perte qu’il vient de faire, et pour cela il place
une stèle sur le sépulcre de son épouse. « C’est la stèle du sépulcre de
Rachel, jusqu’à aujourd’hui ». Mais qu’allons-nous trouver en
terminant : un homme écroulé qui se jette par terre, vaincu par la
douleur, dont le désespoir fait peine à voir et qui se tord de douleur sur le
sépulcre de son épouse ? Pas du tout. Comme Abraham son grand-père, il se
lève de devant son mort (Gen. 23:3). Nous avons sans
doute le cœur brisé dans de telles circonstances, et nous pleurons, mais nous
ne pleurons pas comme ceux qui n’ont pas d’espérance (1 Thes.
4). Il ne nous est pas interdit de pleurer. Mais comment le départ de nos biens
aimés, cet arrachement si douloureux, n’arracherait-il pas en même temps les
larmes de nos yeux ? Le Seigneur n’a-t-il pas pleuré lui-même ? Que
fait-il dans la maison de Béthanie avant de présenter la moindre consolation,
le moindre enseignement, et avant de déployer sa puissance pour sortir Lazare
de la mort ? Que fait le Seigneur ? il
commence à mêler ses larmes avec les sœurs qui pleurent leur frère bien-aimé
(Jean 11:35). Nous avons la même chose ici. Ce n’est pas un Jacob
écroulé ; mais comme son grand-père, il se lève de devant son mort au
verset 21. Et Israël partit, — nous ne lisons pas que Jacob
partit.
C’est Israël, un prince de Dieu, qui triomphe de toute la puissance de la mort
qu’il sait déjà être vaincue pour sa foi ; il sait qu’elle sera vaincue.
Il en triomphe déjà, et c’est Israël qui part, comme un pèlerin. Il ne demeure
pas là au bord de cette tombe. Il s’en va vers les collines éternelles,
poursuivant son chemin. Israël partit, et il dresse sa tente, la tente du
voyageur, la tente du pèlerin, la tente de celui qui sait que nous n’avons rien
dans ce monde, que nous ne sommes ici qu’en passant, que nous ne sommes que des
forains, des voyageurs, que notre bourgeoisie est dans les cieux d’où nous
attendons le Seigneur Jésus Christ comme Sauveur, qui va transformer notre
corps d’abaissement en la conformité du corps de sa gloire. Israël partit, et
dresse sa tente au-delà de Migdal-Eder.
En terminant, lisons la note de la Bible au sujet de Migdal Eder, selon qu’elle se trouve au prophète Michée 4:8, et voyez comme elle est intéressante, comme elle empoigne notre cœur et le fait bondir de joie devant la signification de Migdal Eder : « Et toi, tour du troupeau (tour d’Eder), colline élevée … » ; nous sommes donc au même endroit. Migdal Eder veut donc dire « tour du troupeau ». Donc Israël partit, dresse sa tente, et en même temps monte dans une tour, pour voir au loin Celui qui doit venir — pour avoir le premier la vision de celui qui saute sur les montagnes, qui bondit sur les collines pour venir dire à sa bien-aimée : ma bien-aimée, ma bien-aimée l’hiver est terminé, la pluie a cessé, lève toi ma belle et viens rentrons dans la joie de ce beau rêve qui commence, les fleurs paraissent sur la terre (Cant. des cant. 2:10-12). Il monte dans la tour pour voir venir Celui qui saute ainsi les montagnes, et nous avons le v. 8 avec la signification de Migdal Eder, et une pensée complémentaire si douce : « et toi tour du troupeau, Migdal Eder… » ; Jacob monte dans la tour, comme le croyant aujourd’hui vigilant attend la venue du Seigneur, veillant dans la nuit, — « tour du troupeau, colline élevée de la fille de Sion » (Mich. 4:8). Voyez Sion, la montagne de la grâce, en relation avec la tour du troupeau, — et le prophète ajoute « à toi qui attends, qui veille dans la tour du troupeau, arrivera et viendra la domination première, le royaume à la fille de Jérusalem » (Mich. 4:8) car nous sommes déjà montés sur la montagne de Sion (Héb. 12:22), et nous attendons Celui qui vient. Et lorsqu’Il vient, se réalisera ce qui est écrit : « Si nous souffrons avec lui nous allons régner avec lui » (2 Tim. 2:12).