Notes sur Naaman — 2 Rois 5

Edward Dennett [ajouts de Bibliquest entre crochets]


Christian Friend, vol. 7, 1880, p. 232 — http://www.stempublishing.com/authors/dennett/Naaman.html


Table des matières :

1 - [Richesse de l’Écriture]

2 - [Naaman vu comme homme]

3 - [Naaman vu selon Dieu]

4 - [Un temps spécial préfigurant le temps actuel]

5 - [Le messager de la grâce]

6 - [Le message de grâce]

7 - [L’homme naturel ne comprend pas la grâce]

8 - [Un apostat ne connaît pas où se trouve la bénédiction]

9 - [Le pécheur a besoin d’apprendre qu’il n’est rien]

10 - [La nouvelle naissance offense l’homme]

11 - [Le signe de la mort comme expression du juste jugement de Dieu sur le pécheur, et le type de la puissance de Christ en résurrection]

12 - [Les preuves du changement chez Naaman. Son désir d’être adorateur et l’obstacle des idoles]

13 - [Insensibilité de Guéhazi au travail de la grâce]


1 - [Richesse de l’Écriture]

Les évangélistes en tous genres ont toujours pris plaisir à exposer cette histoire frappante de la grâce. Il n’y a peut-être pas de récit plus familier dans toutes l’Écriture. Ce serait cependant une grande erreur d’en conclure que nous avons appris toutes les leçons qu’il était censé communiquer : nous devons en effet toujours éviter le danger de supposer d’aucune portion de la parole de Dieu que nous la comprenons à fond. Nous ne pourrons jamais, de ce côté de l’éternité, sonder les profondeurs, ni escalader les hauteurs, de l’expression de la pensée divine infinie : « Car nous voyons maintenant au travers d’un verre, obscurément, mais alors face à face ; maintenant je connais en partie, mais alors je connaîtrai à fond comme aussi j’ai été connu » (1 Cor.13:12). Gardant cela à l’esprit, nous offrons sans hésiter quelques notes sur certains points de ce récit très intéressant.


2 - [Naaman vu comme homme]

En ce qui concerne Naaman lui-même, il est évident qu’il est un type de l’homme dans son meilleur état ; ou plus exactement, il est présenté d’abord selon l’estimation de l’homme, et ensuite selon celle de Dieu. Trois particularités personnelles sont soulignées. C’était un « grand homme (devant son seigneur) » ; il était aussi un homme de réussite, « considéré, car par lui l’Éternel avait délivré les Syriens ». Et il jouissait d’une bonne réputation en raison de ses qualités personnelles — « cet homme était fort et vaillant » (5:1). Ces trois choses combinées donnent une image humaine parfaite, et feraient de celui qui les possède un objet d’admiration ou de jalousie dans n’importe quel cercle du monde. Naaman, aux yeux de ses semblables, avait atteint le sommet de l’ambition humaine. Le monde n’avait plus rien à donner à ce vaillant soldat couronné de succès et récompensé. Il devait donc, si c’était possible, être un homme suprêmement heureux.


3 - [Naaman vu selon Dieu]

Mais qu’en est-il de lui si l’on regarde Naaman du point de vue de Dieu, si on le juge selon l’estimation de Dieu ? Cela se résume en un mot : il est lépreux. Ah, quel triste contraste entre les pensées de Dieu et celles de l’homme ! Celui que les hommes admirent, flattent et envient, est considéré par Dieu comme un pauvre lépreux : « car il n’y a pas de différence, car tous ont péché et n’atteignent pas à la gloire de Dieu » (Romains 3:22-23). La lèpre est le type du mal dans la chair, qui a éclaté et a entièrement recouvert l’homme de la souillure et de la culpabilité du péché. Ainsi Naaman, vu de Dieu, n’est qu’un pauvre pécheur coupable ; et c’est bien parce qu’il est tel qu’il est l’objet approprié de la grâce et de la miséricorde souveraines de Dieu.


4 - [Un temps spécial préfigurant le temps actuel]

Il est évident, remarquons-le en passant, que nous avons dans tout le récit une préfiguration de la dispensation présente. Une phrase du premier verset le révèle, en effet. Il est dit que l’Éternel avait opéré par Naaman en faveur de la Syrie, laquelle était franchement ennemi du peuple de Dieu. Cela montre la condition terrible dans laquelle Israël était tombé, et préfigurait sans doute les temps des nations. Ce fait donne un caractère spécial aux voies de Dieu envers Naaman, rapportées dans ce chapitre.


5 - [Le messager de la grâce]

Nous avons donc en premier lieu l’homme comme pécheur, puis ensuite le messager avec la bonne nouvelle du salut. Deux remarques sur ce second point. D’abord le messager de la bénédiction envers Naaman était une petite fille, emmenée captive du pays d’Israël, et qui servait la femme de Naaman. Elle était donc dans une humble position, peut-être méprisée, en tout cas sans valeur dans l’estime du monde. Il en est toujours ainsi au jour de la grâce. Le prédicateur de l’Évangile, s’il occupe sa vraie place, doit toujours être humble et petit en présence de l’orgueil de l’homme. Un apôtre pouvait dire : « nous sommes devenus comme les balayures du monde [et] le rebut de tous jusqu’à maintenant » (1 Cor.4:13). Qu’elle fût du peuple élu de Dieu, peut bien préfigurer la mission d’Israël auprès des nations dans un jour futur.


6 - [Le message de grâce]

Ensuite, deuxièmement, il y a le message. S’il est simple et bref, c’est pourtant l’annonce faite par notre Seigneur à la femme de Samarie. La petite fille dit : « Oh, si mon seigneur était devant le prophète qui est à Samarie ! alors il le délivrerait de sa lèpre » (5:3). Le Seigneur a dit : « Le salut vient des Juifs » (Jean 4:22). Le message est le même. C’est encore celui de Paul, car il parle de « l’évangile de Dieu… touchant son Fils, de la semence de David selon la chair… » (Romains 1:1-4).


7 - [L’homme naturel ne comprend pas la grâce]

Le message n’a pas servi à rien. Naaman est allé parler à son seigneur et à partir de là on a le chemin d’une âme passant des ténèbres à la lumière. Le premier effet de l’évangile (la bonne nouvelle) qu’il a entendue se voit dans son désir de posséder la bénédiction offerte. Elle répond à son besoin en ce qu’elle lui promet la guérison de sa lèpre. Mais immédiatement, comme c’est le cas de nombreuses âmes, il tombe dans l’erreur de supposer qu’il pourrait gagner, ou acheter, la bénédiction convoitée. La grâce n’est jamais comprise par l’homme naturel. Naaman se prépare avec une lettre du roi, dix talents d’argent, six mille pièces d’or et dix vêtements de rechange. Sûrement, avec l’influence d’un roi qui le soutient et avec autant d’argent, il réussira à obtenir ce qu’il veut. Ah ! ne nous souvenons-nous pas tous du temps où nous avons agi sur le même principe, seulement pour nous trouver dans une situation pire que jamais ?


8 - [Un apostat ne connaît pas où se trouve la bénédiction]

L’erreur suivante est de s’adresser au roi d’Israël. Le roi, en tant que chef responsable du peuple de Dieu, aurait dû être le canal de bénédiction. Le fait qu’il ne l’était pas, ne fait que révéler l’état de la nation ; et le fait que le roi ne savait pas où se trouvait la bénédiction, montrait sa propre condition apostate. Mais ni l’état de la nation ni l’ignorance du roi ne peuvent empêcher que la grâce se répande sur ce pauvre païen. Dieu veut se glorifier en dépit de la faillite de son peuple, et même au milieu de cette faillite.


Lorsqu’Élisée, l’homme de Dieu, « eut entendu que le roi d’Israël avait déchiré ses vêtements, il envoya dire au roi : Pourquoi as-tu déchiré tes vêtements ? Qu’il (Naaman) vienne, je te prie, vers moi, et il saura qu’il y a un prophète en Israël » (5:8). Élisée dans son ministère est, dans un sens, un type de la puissance de Christ en résurrection. Oint pour être prophète à la place d’Élie (1 Rois 19:16), le manteau d’Élie tomba sur lui avec une « double portion de son esprit », tandis que son maître montait au ciel dans un char de feu (2 Rois 2:9-11). Il devint donc, dans son ministère, le seul canal de bénédiction pour ceux dont la grâce pouvait ouvrir le cœur au milieu de l’idolâtrie d’Israël.


9 - [Le pécheur a besoin d’apprendre qu’il n’est rien]

En réponse au message du prophète, « Naaman vint avec ses chevaux et avec son char, et se tint à l’entrée de la maison d’Élisée ». Le lépreux est déterminé à obtenir la bénédiction ; mais il est évident qu’il n’est pas encore en état de la recevoir. Les chevaux et les chars sont toujours dans l’Écriture les symboles de la pompe et de la fierté. Naaman devra donc descendre beaucoup plus bas avant de pouvoir être guéri. Il avait appris que l’influence du roi était inutile, et maintenant il doit apprendre que son propre rang et sa grandeur sont des obstacles plutôt que des aides ; car il n’y a pas d’acception de personnes avec Dieu. Mais puisqu’il est venu à la porte d’Élisée, quel que soit l’état de son âme, le message du salut ne peut être retenu. C’était une âme qui cherche, et celles-là ne sont jamais repoussées. « Va, et lave-toi sept fois dans le Jourdain, et ta chair redeviendra [saine], et tu seras pur ». Le prophète ne pouvait pas sortir vers Naaman, car cela aurait faussé leurs positions respectives. Mais il lui envoie cette annonce pleine de grâce quant aux moyens de guérison.

Remarquons l’effet. « Et Naaman se mit en colère ». Pourquoi ? D’abord parce qu’Élisée ne l’a pas traité avec plus de considération personnelle. Assis à l’extérieur dans son char, il avait pensé que le prophète sortirait vers lui, puis invoquerait le nom de l’Éternel son Dieu, et promènerait sa main sur la plaie, et délivrerait le lépreux (5:11). Naaman en tant que lépreux aurait voulu qu’Élisée le guérisse comme s’il était son serviteur. Ah non ! Le pécheur doit d’abord prendre la place de suppliant, comme n’ayant rien et ne méritant rien, avant de pouvoir bénéficier de la grâce. D’ailleurs, qui était Naaman pour dicter au prophète la méthode à suivre ? C’est toujours la même chose : le pécheur s’attend à être sauvé à sa manière.


10 - [La nouvelle naissance offense l’homme]

Or Naaman est encore offensé par autre chose. Pourquoi devrait-il aller au Jourdain ? L’Abana et le Parpar, les rivières de Damas, son propre pays, étaient « meilleures que toutes les eaux d’Israël » selon son estimation. Ne pouvait-il pas s’y laver et être pur ? Ces rivières représentent les sources de la terre, et nous enseignent ainsi que Naaman était prêt à être guéri d’une manière humaine plutôt que divine. En d’autres termes, comme beaucoup de pauvres pécheurs depuis, il voulait être réformé plutôt que naître de nouveau. Combien tombent dans ce piège ! Ils acceptent la nécessité d’un changement moral, mais pas de la nouvelle naissance ; dans un changement moral, tout vient de l’homme, dans la nouvelle naissance, tout vient de Dieu. Naaman ne veut donc pas être guéri dans de telles conditions, et il « s’en alla en colère » (5:12).


11 - [Le signe de la mort comme expression du juste jugement de Dieu sur le pécheur, et le type de la puissance de Christ en résurrection]

Ses serviteurs entrent maintenant en scène. Nous ne savons pas qui ils étaient ; mais quels qu’ils fussent, ils avaient l’intelligence divine. « Mon père » disent-ils « si le prophète t’eût dit quelque grande chose, ne l’eusses-tu pas faite ? Combien plus, quand il t’a dit : Lave-toi, et tu seras pur » (5:13). Ces paroles — qui doivent encore et encore être utilisées partout où l’Évangile est prêché — ont touché l’âme de Naaman avec puissance. L’homme fort et fier est maintenant humilié, et il « descendit et se plongea sept fois dans le Jourdain, selon la parole de l’homme de Dieu » (5:14). Le Jourdain représente la mort ; et la signification de l’acte de Naaman est simplement celle-ci : il s’est incliné sous le juste jugement de Dieu contre le péché de l’homme ; il a accepté la mort comme expression du juste jugement de Dieu sur le pécheur ; et en ce qu’il s’est plongé sept fois, nous apprenons qu’il l’a fait sans réserve — parfaitement, si vous voulez — en reconnaissant toutes les justes exigences de Dieu sur lui, et en s’inclinant devant la sentence de mort qu’Il a prononcé sur le pécheur. C’était la soumission du pécheur aux droits d’un Dieu saint. En conséquence — car on se souviendra qu’Élisée agissait dans la puissance du Christ en résurrection, et donc dans l’efficacité de Sa mort devant Dieu — la grâce se répand sans entrave ni retard. La chair de Naaman redevient comme la chair d’un jeune garçon, et il est pur. Il est né de nouveau par l’eau de la Parole (qui apporte la mort à tout ce que nous sommes en tant qu’hommes dans la chair) et par la puissance du Saint-Esprit. Dieu a rencontré et béni Naaman dans l’exercice de Sa grâce souveraine (voir Luc 4:27), car du moment où Naaman s’est plongé dans l’eau de la mort, Dieu a été libre d’agir selon Son propre cœur plein d’amour et de compassion.


12 - [Les preuves du changement chez Naaman. Son désir d’être adorateur et l’obstacle des idoles]

Il s’ensuit plusieurs preuves nettes du changement que Naaman avait connu. Nous ne ferons que les indiquer brièvement. D’abord, « il retourna vers l’homme de Dieu, lui et tout son camp, et il vint et se tint devant lui » (5:15). Auparavant, comme nous l’avons remarqué, il était resté à la porte du prophète. Maintenant les chevaux et le char ont disparu, et il se tient devant Élisée. En d’autres termes, il a pris une place basse — car se tenir en présence d’un autre signifie, en Orient, prendre une place de serviteur. L’humilité de Naaman manifeste ainsi le changement. Deuxièmement, il confesse de sa bouche. Ayant cru de tout son cœur, il confesse de sa bouche le Dieu d’Israël. Troisièmement, il désire exprimer sa gratitude à Élisée, bien que le prophète ne puisse pas, sans fausser la grâce, recevoir la bénédiction des mains de Naaman. Quatrièmement, il a l’intention, malgré son ignorance, d’être un adorateur ; ou plutôt, il est étreint par le sentiment de ce qu’il lui a été donné de dire, à savoir que désormais il ne sacrifierait qu’à l’Éternel. Enfin, il a un cœur exercé. L’adoration du vrai Dieu et celle des idoles ne peuvent pas coexister. Naaman ressent tout de suite que la connaissance et l’adoration du vrai Dieu doivent nécessairement exclure toute reconnaissance de faux dieux. Par conséquent, il parle à Élisée de sa difficulté en ce qui concerne sa présence avec son maître dans la maison de Rimmon. Ce qui manifeste tout, c’est la lumière ; et le vrai caractère du culte de Rimmon est maintenant révélé à l’âme de Naaman. Que peut-il faire ? Il doit aller avec son maître : voilà son devoir. Il cherche donc à apaiser sa conscience, à tranquilliser son âme exercée, en disant : « Qu’en ceci l’Éternel pardonne à ton serviteur ». La réponse d’Élisée en a surpris beaucoup : « Va en paix ». Mais il ne faut pas supposer un instant qu’elle contienne une approbation implicite de l’entrée de Naaman dans la maison de Rimmon. Ce n’est nullement le cas. Le prophète avec une sagesse divine — que nous ferions bien d’imiter — refuse d’anticiper la difficulté. Il voit que Naaman est exercé ; et il sait que si Naaman ressentait la difficulté avant de le quitter, il la sentirait beaucoup plus au moment où il arriverait en Syrie. Cette réponse signifiait : « Pars en paix, celui qui t’a rencontré avec tant de grâce sera toujours avec toi, et te donnera la grâce et la force quand le besoin s’en fera sentir ». En d’autres termes, il le remet et le recommande au Seigneur, et nous pouvons être sûrs que Naaman n’est jamais entré dans la maison de Rimmon.


13 - [Insensibilité de Guéhazi au travail de la grâce]

Le récit se termine par la conduite triste et lamentable de Guéhazi. Avec un cœur insensible au déploiement de la grâce et de la puissance de Dieu envers cet étranger, il ne pensait qu’à la manière dont il pourrait l’utiliser à ses propres fins égoïstes. Plein de convoitise, il obtient ce qu’il cherche par la tromperie et le mensonge, sans craindre que sa mauvaise conduite mette de la confusion chez Naaman sur ce qu’il comprend de la grâce, et ainsi sans crainte de déshonorer le Dieu d’Israël. Son péché aurait pu faire penser au Syrien, qu’après tout, on pouvait payer le don de Dieu, voire même l’acheter. D’où la sévérité de la punition qui s’abat sur lui. « La lèpre de Naaman s’attachera à toi et à ta semence pour toujours ».