Pierre Combe
Table des matières :
1 - La succession des générations : le pourquoi du sujet
2 - Ps. 78 : transmission d’une génération à l’autre. Instructions tirées du passé
3 - Différents sens du mot génération
4 - Ce qui se transmet naturellement ou inévitablement
5 - Ce qui n’est pas nécessairement transmis
6 - Les choses qui ne changent pas d’une génération à l’autre
6.2.1 - Le Seigneur demeure le Même
6.2.2 - La Parole qui exprime la pensée de Dieu
6.2.3 - Les ressources du Saint Esprit
7 - Paître le troupeau — Prov. 27:23-25 et Actes 20:28
8 - Être trouvé fidèle en notre génération
9 - Demeurer dans les choses apprises, non par tradition, mais par conviction
10 - Deut. 6:6-9 et 11:18-20 — Enseignement des enfants
10.3 - Cœur nourri ou cou roide
10.4 - Volonté de transmettre aux enfants : exemple d’Abraham
10.5 - Responsabilité des enfants, questions des enfants
10.6 - Expliquer la mer Rouge, le Jourdain, Guilgal
11 - Une autre génération qui ne connaissait pas l’Éternel
11.2 - Appel à la génération actuelle
11.3 - La guerre qu’il faut connaître
12 - Formation des générations dans la communion entre générations
Les divisions et sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
Nous lirons plus tard encore d’autres passages, ayant à cœur d’exprimer quelques brèves pensées sur le sujet de la succession des générations. Nous pensons avec sollicitude et affection à nos chers jeunes qui sont confrontés au monde qui les assaille, et qui se trouvent en face d’un christianisme qui se dépouille progressivement de tous ses caractères propres.
Ce psaume d’Asaph, qui est sous-titré par ces mots « pour instruire », est un rappel de l’histoire d’Israël. Nous y trouvons aussi bien des conditions parfois favorables, des écarts, des abandons de Dieu de la part de ce peuple, des abandons de Ses enseignements, de Ses commandements. Nous y voyons la discipline divine mais aussi les ressources d’une grâce intarissable de Dieu à l’égard de ceux qui Lui appartiennent, de son peuple.
Il est frappant de voir qu’au début de ce psaume, il y a, si nous avons bien compté, l’évocation de quatre générations successives. Et un accent particulier est mis sur la transmission d’un enseignement inchangé de génération en génération. Les générations se succèdent, les instruments que la grâce de Dieu emploie pour le bien des âmes sont retirés ; d’autres sont appelés à remplir leur service ; c’est la même nature, même s’il y a diversité de dons de grâce et le même aliment qui est donné, même si les générations passent.
Le psaume 78 nous est donné pour nous servir d’instruction ; il fait partie de ses Écritures qui sont utiles pour nous enseigner, nous convaincre, nous corriger et précisément nous instruire. Nous avons à retirer instruction de ce que la Parole nous enseigne, à tirer instruction aussi de l’évocation du passé vécu par les générations antérieures, aussi bien quant aux jours heureux, qui ont été marqués par l’approbation et la bénédiction divines, mais aussi par les écueils qui ont été ceux des pères, ceux des générations antérieures. Et comme l’apôtre l’écrit aux Corinthiens (1 Cor. 10:11), toute cette histoire d’Israël, qui était passée depuis longtemps au jour de l’apôtre, était rappelée pour servir d’instruction, constituant des types pour nous avertir, nous que la fin des siècles ont atteints. Nous n’avons pas une parole qui devient obsolète, qui perd son actualité, bien au contraire ; elle est du reste qualifiée de permanente. Le livre de l’Ecclésiaste (1:4) qui nous parle des temps, nous dit qu’une génération vient, une génération passe, une autre succède. En Prov. 27:24 nous avons une déclaration sous forme de question, une couronne dure-t-elle de génération en génération ? Il n’y a pas beaucoup d’hésitation pour devoir répondre malheureusement par la négative. La couronne de l’un ne passe pas nécessairement sur son fils.
Génération, nous savons bien que ce terme comporte différentes significations, même dans les Écritures. Il y a la succession des êtres humains, de père en fils, ce renouvellement, les degrés de filiation. Mais il y a aussi d’autres significations : un espace de temps qui comportent des personnes plus ou moins du même âge, avec une marge de deux décennies.
Nous savons aussi que l’expression « une génération » se rapporte aussi à un état d’esprit, des conceptions, une manière de considérer les choses (qui peut s’étendre sur de nombreuses générations). Quand le Seigneur dit à ses disciples leur parlant des jours à venir, et de ce qu’il adviendrait sur cette terre, Il peut leur dire « cette génération ne passera pas que mes paroles soient accomplies ». On comprend bien qu’il ne s’agissait pas exclusivement de la génération des disciples auxquels Il s’adressait, mais c’était l’esprit de la génération, ce qui donne un sens tout différent aux paroles mêmes du Seigneur. « Cette génération ne passera pas que mes paroles ne soient accomplies » nous montre que l’état d’esprit au jour du Seigneur sur la terre sera le même que celui de la génération d’esprits rebelles et insoumis, et ne craignant pas Dieu, qui appellera sur elle-même le jugement de Dieu ; c’est un esprit de génération.
Dans la succession des générations il y a à ce qui est, on pourrait dire, obligatoirement transmis de l’une à l’autre. L’un de ces héritages n’est en tout cas pas heureux, et pourtant bien assuré :c’est la transmission de la nature pécheresse. Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par lui il a passé à tous les hommes. Depuis Adam pécheur, toutes les générations qui se sont succédées ont été victimes de cet héritage de la nature pécheresse. Voilà un héritage dont on se passerait bien, mais qui est inéluctable.
Mais il y a aussi les transmissions naturelles de génération en génération. De père en fils, on hérite dans une mesure de dispositions, d’inclinations ; il y a même la ressemblance physique : c’est une transmission de génération ; on parle aussi des gènes, et bien des choses qui sont transmises naturellement, selon les lois de la nature. Il y a également ce qui est transmis normalement d’une génération à l’autre : des biens matériels normalement acquis par des pères, sont transmis à la génération suivante. Les acquis, qu’ils soient de nature culturelle ou technique, ou d’autres encore, passent d’une génération à l’autre.
Mais il y a ce qui n’est pas nécessairement transmis. Nous
pensons en cela aux croyants, aux familles chrétiennes : la crainte de
Dieu, la piété, la fidélité, l’obéissance, ce qui est inculqué des parents aux
enfants ; ces choses ne sont pas nécessairement héréditaires. L’adolescent
ne sera pas nécessairement pieux parce que ses parents l’étaient, même s’ils
ont donné un fidèle exemple. Ces choses sont le fruit d’un exercice vécu
personnellement ; c’est bien la raison pour laquelle l’apôtre s’adressant
aux jeunes peut dire « exerce-toi toi-même à la piété ». Bien sûr que
des enfants ayant vu la piété dans la maison familiale, où la lecture de la
parole a une place d’honneur, pourront être enseignés et désireux de suivre une
telle voie de piété. Mais la piété, la fidélité, la communion avec le Seigneur
ne s’héritent pas nécessairement
.
Elles sont le fruit d’un exercice, dont l’exemple fait ressentir le besoin (Dieu
veuille que ce soit le cas), et cet exercice doit être vécu d’une génération à
l’autre. Nous ne parlons pas du salut : personne ne peut, bien sûr, communiquer
la vie de Dieu à sa descendance ; c’est impossible. Nous laissons de côté
le cas des enfants en bas âge, de parents croyants, qui, nous dit la Parole (1
Cor. 7), sont saints relativement
pendant leur temps précédent la responsabilité personnelle, et qui seraient
recueillis au jour de la venue du Seigneur. Toutefois, ça ne veut pas dire
qu’ils seront sauvés au jour du passage à leur état de responsabilité
personnelle. On ne peut pas transmettre le salut, bien sûr.
Il y a donc des choses qui se transmettent obligatoirement, d’autres naturellement, d’autres normalement, et d’autres pas du tout. Et bien sûr que d’une génération à l’autre il y a des choses qui sont immuables, qui ne changent pas du tout, et puis il y en a d’autres qui changent.
On peut dire que d’une génération à l’autre, l’homme, et particulièrement le croyant, sera confronté à la puissance de l’Ennemi, et à la chair qui est en lui : de génération en génération, ils constituent des éléments perturbateurs inchangés. Les siècles écoulés n’ont pas conduit Satan à fléchir dans ses assauts, bien loin de là. On peut dire, on l’a vu dans le livre des Nombres, que plus on s’approche du but, plus l’Ennemi est actif et subtil. La chair qui est en nous d’une génération à l’autre ne s’est pas améliorée, et le croyant a en lui cet élément maléfique qui ne demande qu’à pécher, qui est insoumis à la pensée de Dieu, qui ne se soumet pas parce qu’elle ne le veut pas et ne le peut pas, nous dit la Parole (Rom. 6 à 8). La chair est la même au commencement et à la fin de la vie, qu’il s’agisse d’un croyant ou d’un non croyant. Le privilège du croyant c’est de savoir que Christ a crucifié le vieil homme à la croix, et en le demandant au Seigneur, d’avoir les ressources spirituelles de maintenir la chair là où Christ l’a placée, c’est-à-dire dans la mort. Mais on ne peut jamais crier victoire sur la chair, jamais. Lorsqu’elle se manifeste, on l’a dit bien des fois, même à l’âge le plus avancé, elle est la même que chez un incrédule. Ce qui est chair est chair, ce qui est esprit est esprit ; il n’y a aucune liaison possible ; il n’y a aucune compensation de l’un par l’autre, mais celui qui marche par l’Esprit, dans la dépendance, la crainte du Seigneur, la grâce lui est accordée de faire taire la chair en lui. Mais elle ne demande qu’à se manifester. Et il suffit, nous le réalisons bien pour nous-mêmes, d’un instant où on la laisse agir ; c’est la même chair que l’incrédule. Ce sont des choses qui ne changent pas d’une génération à l’autre, la chair reste la même.
Mais nous avons des éléments, et combien heureux, qui sont la sécurité de la foi, et qui, eux, ne changent pas. Nous avons la connaissance de la pensée du Seigneur qui nous dit : « Je suis le même, hier, aujourd’hui et éternellement » ; comme j’ai été avec les miens hier, dit le Seigneur, je suis le même aujourd’hui, et jusqu’à la fin, je suis le même, moi le Même. Quelle sécurité de savoir que nous avons à faire et que nous appartenons à un Dieu comme Père, à un Seigneur comme ressource suprême, qui ne nous retire aucune de Ses ressources et qui est le même avec les derniers comme Il l’a été avec les premiers !
Nous avons la Parole qui étant la Vérité, l’expression de la pensée même de Dieu, ne change pas. Nous ne pouvons pas adapter la Parole à l’évolution des choses de la terre, c’est impossible. La Parole demeure la même : « mes paroles ne passeront pas, le ciel et la terre passeront mais mes paroles ne passeront pas ». Il n’y aura pas un iota qui ne trouve son application, son accomplissement. Quelle sécurité de savoir que nous avons dans la Parole la lampe de nos pas, la lumière sur notre sentier, la nourriture de nos affections, un aliment sûr, un guide sûr.
Et nous avons aussi les ressources du Saint Esprit qui demeure le même, le Saint Esprit, le Seigneur nous le dit, qui sera avec nous jusqu’à la fin. C’est sans doute la corde triple par excellence, au nombre des autres ressources que nous avons, comme Aggée lui-même pouvait le dire au peuple dans des temps difficiles : « je suis avec vous dit l’Éternel, ma parole et mon esprit demeurent avec vous », des ressources par excellence qui ne subissent aucune ombre de variation.
Lisons dans le livre des Proverbes (27:23-25) : « Connais bien la face de ton menu bétail, veille sur tes troupeaux ; car l’abondance n’est pas pour toujours, et une couronne dure-t-elle de génération en génération ? Le foin disparaît, et l’herbe tendre se montre, et l’on ramasse les herbes des montagnes ».
« Connais bien la face de ton menu bétail, veille sur tes troupeaux », car l’abondance n’est pas une couronne qui dure de génération en génération ; le foin disparaît, l’herbe tendre se montre et l’on ramasse les herbes des montagnes. Veiller sur le troupeau, nous avons souvent cette expression ; paître le troupeau de Dieu, nous le trouvons dans l’épître de Pierre ; du reste l’apôtre Pierre avait reçu ce service, une mission de paître le troupeau de Dieu, de paître les agneaux (Jean 21). Nous avons bien sûr le Souverain Pasteur qui a été ramené (Héb. 13), mais l’exhortation de paître le troupeau, on peut dire qu’elle jalonne les enseignements notamment du Nouveau Testament ; mais nous l’avons déjà ici. Et Paul s’adressait aux anciens d’Éphèse en Actes 20 en disant : « Paissez le troupeau de Dieu, veillez, prenez garde à vous-mêmes » ; ce sont les deux exhortations à l’égard de ceux qui ont une mission à remplir dans le cadre du peuple de Dieu, elles encadrent en quelque sorte la troisième qui se trouve au centre.
Paissez le troupeau de Dieu, mais premièrement veillez sur vous-mêmes. La couronne ne passe pas nécessairement d’une génération à l’autre. Même si elle a passé de la tête de David à la tête de Salomon, Salomon a perdu toute la dignité qui se rattache à une telle couronne. Si on ne crie jamais victoire sur la chair, on ne crie jamais victoire sur un état favorable que la grâce peut produire dans le cœur du racheté, car pratiquement jamais rien n’est acquis.
Le foin disparaît l’herbe tendre se montre, quelle grâce ! Lorsque le foin a été récolté, mis à part, a été absorbé (le foin peut disparaître), ce n’est pas la famine ! L’herbe tendre, la nouvelle herbe se manifeste, et pourra être à son tour recueillie. N’y a-t-il pas dans cette expression, très significative, la pensée de l’enseignement qui a été donné par la génération ou les générations antérieures, enseignement par exemple écrit, comme de l’herbe qui a été conservée, destinée à être conservé, le foin. Il y a aussi le ministère de ceux qui nous ont précédés et qui ont été rappelés, mais il en reste quelque chose. On se souvient, on aime à se souvenir des paroles de nos conducteurs. « Souvenez-vous de vos conducteurs », imitant non pas leur enseignement, ou plutôt la nature de leur service, mais imitant leur foi. Ce qui a été récolté l’année précédente est retiré, mais est remplacé. Et il est frappant de voir que c’est la même nature, que c’est la même nourriture, le foin ou l’herbe fraîche, c’est la même nourriture. On a cette pensée de ce renouvellement dans les générations ; le foin disparaît, des serviteurs sont rappelés, sont retirés, ils nous ont laissé un enseignement profitable auxquels nous aimons à nous nourrir encore, si l’on pense à l’aspect du ministère écrit qui nous a été laissé. Mais on va recueillir l’herbe fraîche : d’autres serviteurs sont appelés à remplir leur service selon ce que le Seigneur et le Saint Esprit leur confient, qui constituera la même nourriture pour une nouvelle génération, et elle est recueillie sur les montagnes : on sait bien que c’est là que l’on trouve l’herbe de la meilleure qualité. C’est sur les lieux élevés que l’on récolte la meilleure nourriture qui est assurée pour la génération future.
Donc il y a d’une part ce qui change d’une génération et d’autre part ce qui ne change pas, mais chaque génération doit être animée d’une disposition, que la grâce divine seule peut produire dans les cœurs, à savoir d’être trouvé fidèle en sa génération. Nous avons Celui qui est le même de génération en génération. Nous ne vivons qu’une génération, la nôtre du début à la fin, mais c’est un exercice permanent d’être trouvé fidèle en notre génération.
Nous sommes exposés, le monde religieux, même chrétien, est exposé à la tradition ; mais spirituellement, pour la vie spirituelle d’une âme, on pourrait dire que la piété de tradition n’apporte pas grand-chose. Si nous devons avoir une haute appréciation de ceux qui ont été fidèles, qui ont marché avant nous et qui nous ont laissé un exemple dans leur marche et une instruction qui demeure après eux quant à leur enseignement, nous ne devons pas marcher d’une manière traditionnelle.
« Demeure dans les choses que tu as apprises », par tradition ? non, mais par conviction, — et desquelles, dit l’apôtre à Timothée, « tu es pleinement convaincu ». Voilà ce qui donne l’énergie spirituelle : ces appréciations personnelles. Cela peut nous avoir été inculqué, mais cela doit être personnellement réalisé et ressenti, comme des choses valables, impérissables, immuables qui appartiennent à Celui qui est le Même. « Demeure dans les choses que tu as apprises » ; s’il n’y avait que cela, ce pourrait être l’aspect d’une tradition, mais « desquelles tu es pleinement convaincu » : voilà ce qui donnera la valeur, voilà ce qui produira le développement spirituel, la croissance spirituelle ; c’est la jouissance que procurent les convictions. La tradition expose obligatoirement à la tiédeur et nous savons bien que la tiédeur ou la timidité (comme nous le trouvons ailleurs dans la Parole à propos des timides) sont même les objets de répréhension, voire de jugement sévère. On est exposé à ces dispositions, peut-être moins maintenant que précédemment, parce que les personnalités sont beaucoup plus développées, et de bonne heure, par les nouvelles générations, mais néanmoins on est exposé à marcher par habitude, par tradition. S’il y a des habitudes qui sont bonnes et que nous avons à conserver, à cultiver, il n’en demeure pas moins que ce n’est pas l’habitude qui va nous faire progresser, mais c’est l’appréciation personnelle qui procure la jouissance dans nos âmes, dans nos cœurs, des trésors que la grâce de Dieu a placés dans nos vases de terre.
Des convictions, c’était la part de Timothée qui avait été enseigné par sa mère, par sa grand-mère plus particulièrement, et l’apôtre de lui dire que ce n’est pas parce qu’il avait été enseigné par sa mère et sa grand-mère (c’était un immense privilège), qu’il était à l’abri, car il faut persévérer. Persévère, c’est une des injonctions de l’apôtre à Timothée dans le chapitre 4 de sa première épître. Persévère, c’est ce qui faisait la qualité spirituelle des premiers croyants au printemps de l’Église ; en Actes 2, ils persévéraient premièrement dans la prière, et ensuite dans les trois caractères de la vie du rassemblement. On pourrait dire : on persévérera par la suite, il n’y a pas d’urgence ; mais n’oublions pas, si nous ne persévérons pas au début, il est fort peu probable que nous soyons animés de persévérance par la suite ; la persévérance commence au début, et on voit ces croyants au nombre desquels il y avait Marie, la mère du Seigneur, persévérer dans la prière à l’aube de l’économie de la grâce, peut-on dire.
Et si l’on a parlé des générations successives, on pourrait lire des passages qui nous sont du reste très familiers dans le livre du Deutéronome aux chapitres 6 et 11. Deutéronome 6:6-9 : « Et ces paroles, que je te commande aujourd’hui, seront sur ton cœur. Tu les inculqueras à tes fils, et tu en parleras, quand tu seras assis dans ta maison, et quand tu marcheras par le chemin, et quand tu te coucheras, et quand tu te lèveras ; et tu les lieras comme un signe sur ta main, et elles te seront pour fronteau entre les yeux, et tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes ». Deutéronome 11:18-20 : « Et mettez ces miennes paroles dans votre cœur et dans votre âme, et liez-les pour signes sur vos mains, et qu’elles soient comme des fronteaux entre vos yeux ; et vous les enseignerez à vos fils, en leur en parlant, quand tu seras assis dans ta maison, et quand tu marcheras par le chemin, et quand tu te coucheras, et quand tu te lèveras ; et tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes ». Voilà des parents qui s’adressent aux enfants, notamment ici, un père.
Nous savons bien combien la mère joue un rôle immense dans le foyer chrétien. Sa sphère d’action c’est la maison, nous comprenons bien que les enfants surtout en bas âge, ont les contacts les plus constants avec leur mère. Nous connaissons bien également dans le livre des Proverbes ce qui est dit à Lémuel, au roi Lémuel (31:1), il s’agit de ce que sa mère lui enseigna. C’est une rare fois où l’on voit une femme qui enseigne, mais elle enseigne dans le cadre qui lui est dévolu, c’est-à-dire dans sa maison et avec ses enfants : Oracles que sa mère lui enseigna.
Ici en Deutéronome 6 et 11, il s’agit du père, cette autorité affectueuse et cette conscience d’un devoir privilégié de transmettre d’une génération à l’autre, comme on l’a vu au Psaume 78 — et non pas occasionnellement, quand on a un moment de libre, quand on pourrait s’en occuper. L’exemple qui nous est présenté est une demeure, on peut dire, imprégnée par la Parole et par ses effets. Il s’agit ici de pères qui saisissent toutes les occasions, certaines qui pourraient même nous paraître étrange ; mais ils saisissent bien toutes les occasions : quand tu marches, quand tu t’assieds, quand tu te couches, quand tu te lèves, sur le chemin, à la maison. C’est un privilège immense que l’enfant n’appréciera peut-être pas toujours au début, mais il y pensera plus tard, Dieu le veuille. Mais c’est en tout cas le privilège et la responsabilité des parents de mettre à profit tous les moments. Cela ne veut pas dire qu’ils ne parlent que de cela tout le jour, mais ils mettent à profit toutes les circonstances, tous les moments pour que leurs enfants soient en contact avec le Seigneur et sa Parole, et cela s’imprime.
Inculquer, cela ne veut pas dire une fois par mois, inculquer,
on se souvient bien combien de fois il a fallu nous dire la même chose. L’apôtre
le dit aussi et ce n’était même pas pénible pour lui. Comment enseigner ? le premier élément qui doit être nourri, bien sûr, c’est le cœur :
lies les pour signe, mettez ces paroles dans votre cœur. Le cœur
est toujours en contraste avec le cou
; le cœur c’est ce qui reçoit,
mais c’est aussi du cœur que sont les issues de la vie, selon son état. Mais le
cou c’est l’élément qui regimbe, et si nous lisions d’autres passages, la
Parole est également mentionnée en rapport avec le cœur et avec le cou, c’est-à-dire
qu’elle doit nourrir les affections et en même temps elle doit maintenir ce qui
regimbe en nous-mêmes, c’est-à-dire le cou. Israël plus d’une fois est
mentionné comme étant une nation au cou roide. On regimbe, c’est bien pour cela
que c’est sur le cou que l’on place le joug.
Mettre à profit tous les moments, c’est là le privilège immense qui est du reste accompagné d’une promesse remarquable : en Genèse 18, lorsque l’Éternel peut dire à propos d’Abraham qu’Il ne va pas lui cacher les choses qu’Il va faire, quel motif donne-t-Il ? Je le connais, je sais qu’il commandera à ses fils après lui. La disposition d’Abraham était de transmettre à ses fils après lui, à la génération future, les communications divines. Dieu lui octroie le privilège de révélations spéciales, et la raison amenant Dieu à le faire réside dans les dispositions du cœur du père de les transmettre pour le profit de ses enfants. Je sais qu’il commandera (c’est l’autorité affectueuse), à ses fils après lui, donc il mérite, en quelque sorte, ces révélations, parce qu’il en fera usage au profit de la génération suivante. Quel encouragement pour les parents !
Mais il n’y a pas seulement la responsabilité privilégiée des
parents, il y a celle des enfants. En Exode 12, nous avons la pâque instituée
et célébrée ; c’est l’élément à la base de la libération de l’esclavage du
peuple hébreu, de sa sortie d’Égypte, et nous lisons (Ex. 12:26) : « Et
quand vos enfants vous diront : Que signifie pour vous ce service ? il arrivera que vous direz : C’est le sacrifice de la
pâque à l’Éternel, qui passa par-dessus les maisons
des fils d’Israël en Égypte, lorsqu’il frappa les Égyptiens et qu’il préserva
nos maisons ». Là ce ne sont plus les parents qui ont l’initiative, ce
sont les enfants, les enfants qui disent quelque chose en rapport avec la pâque :
nous savons bien que la pâque est le type le plus éloquent, le plus merveilleux
qui nous parle du sacrifice de Christ sous l’aspect de l’expiation ; alors
les enfants demandent « que signifient pour vous ce service », celui
de la pâque. Cette pâque devait être célébrée d’année en année ; nous
savons bien que la Parole mentionne la pâque comme un rite à se rappeler d’année
en année, le sacrifice de la pâque, la pâque à l’Éternel.
Alors les enfants demandent aux parents « que signifient pour vous ces
choses », remarquons qu’ils ne disent pas seulement « que signifient
ces choses », mais les parents sont interpellés : « que
signifient pour vous
ces choses ».
Est-ce que ces choses ont une signification pour
vous
, disent-ils, à leurs pères. Il est peut-être assez aisé de dire ce que
les choses signifient, mais il faut faire comprendre, et l’enfant se rendra
compte si elles ont une valeur pour le cœur des parents. « Que signifient pour vous
ces choses » :
est-ce qu’elles ont pour nous
une
véritable signification spirituelle ? Et quel privilège alors, quelle joie
pour les parents de pouvoir leur expliquer. Nous sommes certains que bien
souvent les enfants rentrant du culte, peut-être lorsqu’ils commencent à
observer les choses, disent à leurs pères « que signifie de prendre le
pain et la coupe le dimanche matin » ? Il ne suffit pas de leur dire « voilà
ce que cela représente », mais « voilà la valeur que cela a pour nos cœurs
». Que signifient pour vous
ces choses… Nous avons le
privilège, par grâce, de célébrer la cène du Seigneur (la pâque en est le type),
d’y participer de semaine en semaine, non seulement une fois par année, mais de
semaine en semaine ; quel privilège de pouvoir faire comprendre et
susciter dans le cœur de la nouvelle génération la valeur que cela a pour nos cœurs
. Par la manière selon
laquelle le père, les parents, l’expliqueront, les enfants verront très bien,
sans doute, ce que signifient pour vous
ces
choses, ce service.
Prenons Josué 4 ; on est au Jourdain ; le Jourdain est passé et les pierres ont été placées aussi bien dans le lit du fleuve que sur le rivage de la délivrance ; Josué parle aux fils d’Israël (Jos. 4:21) : « Et il parla aux fils d’Israël, disant : Lorsque dans l’avenir vos fils interrogeront leurs pères, disant : Que sont ces pierres ? vous instruirez vos fils, en disant : Israël a passé ce Jourdain à sec, parce que l’Éternel, votre Dieu, sécha les eaux du Jourdain devant vous jusqu’à ce que vous eussiez passé, comme l’Éternel, votre Dieu, a fait à la mer Rouge, qu’il mit à sec devant nous jusqu’à ce que nous eussions passé ». Il y a une liaison entre la mer Rouge et le Jourdain. La mer Rouge, c’est la délivrance, la conversion, la nouvelle naissance, le fait d’être mis par grâce au bénéfice de la rédemption dont la mer Rouge nous parle. Ensuite le Jourdain est la figure de l’affranchissement, la libération de soi-même par la compréhension que le moi a été enseveli dans les eaux du Jourdain ; c’est notre mort, et les pierres sur le rivage témoignent de notre résurrection avec Christ. — Alors vous leur expliquerez ces choses.
Dieu veuille qu’il y ait beaucoup d’enfants qui posent ces questions. Remarquons que les questions sont très claires ; il est souhaitable que les réponses le soient aussi. Que signifient ces choses ? quelle joie de pouvoir dire « voilà ce qu’elles représentent », suscitant ainsi dans les jeunes cœurs cet intérêt, cette compréhension et ces convictions qui impriment la vie, et qui conduiront, Dieu le veuille, à des choix judicieux dans le cours de la marche future.
On sait bien qu’en Guilgal, il y avait cinq choses faites : a) les deux fois 12 pierres placées dans le fleuve et sur le rivage ; b) la circoncision montrant que la chair ne peut pas hériter des choses de Dieu ; c) la célébration de la pâque que nous avons ici ; d) ensuite la nourriture change, la manne fait place au grain rôti ; on se nourrit dès lors, lorsque l’on a passé spirituellement par cette mort et cette résurrection, de Christ glorifié qui a connu le feu du jugement (c’est le grain rôti), et dont nous apprécions la saveur, et qui devient la nourriture d’un peuple racheté et affranchi ; e) puis il y a l’ange de l’Éternel qui est venu maintenant pour diriger les combats.
Nous avons dit que rien n’est acquis pratiquement ; quand nous passons au livre des Juges (2:10), nous trouvons : « Et toute cette génération fut aussi recueillie vers ses pères ; et après eux, se leva une autre génération qui ne connaissait pas l’Éternel, ni l’œuvre qu’il avait faite pour Israël ». Et les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, et servirent les Baals ». Juges 3 : « Et ce sont ici les nations que l’Éternel laissa subsister pour éprouver par elles Israël, savoir tous ceux qui n’avaient pas connu toutes les guerres de Canaan ; et cela seulement afin que les générations des fils d’Israël connussent, en l’apprenant, ce que c’est que la guerre, ceux du moins qui auparavant n’en avaient rien connu ».
Nous avons dit que l’appréciation spirituelle des valeurs divines n’est pas nécessairement l’héritage d’une génération suivante ; ce devrait l’être ; mais la fidélité, l’appréciation des choses de Dieu ne s’héritent pas nécessairement. Il se lève une nouvelle génération ici (Juges 2 et 3) et il nous est dit trois choses qu’ils ignoraient : a) ils ne connaissait pas l’Éternel : b) ils ne connaissaient pas l’œuvre que l’Éternel avait faite pour Israël ; c) (Jug. 3) ils n’avaient pas appris à lutter, à combattre, ils ne connaissaient pas la guerre. Il paraît inconcevable que d’une génération à l’autre il y ait eu une telle dégradation, que seulement une génération après le passage du Jourdain il se lève une génération qui ne connaissait pas l’Éternel. Leurs pères leur avaient-ils beaucoup parlé de ces choses pour qu’ils les ignorent ? Les enfants s’étaient-ils beaucoup intéressés en posant des questions ? Il paraît inconcevable qu’il puisse être dit que d’une seule génération à l’autre, à la deuxième génération, ils ne connaissaient pas l’Éternel !!
La question peut se poser dans une heure de rassemblement comme celle-ci ; elle peut se poser à la jeune génération : est-ce que tous les jeunes ici appartiennent au Seigneur ? Est ce que tous ici ont une relation de vie avec le Seigneur comme Sauveur premièrement, et Seigneur de leur vie ? Cette question se pose même à une personne présente dans un rassemblement où, peut être depuis des années, elle entend les choses de Dieu. « Je connais le Seigneur, il est mon Seigneur » dira-t-elle ; nous aimons à le croire, mais ce n’est pas le fait d’être mis au bénéfice des plus grands privilèges, d’entendre parler de ces choses (elles peuvent devenir comme une douce musique, comme une habitude, une tradition) — mais cela ne confère pas du tout la vie ; s’il n’y a pas véritablement le travail de conscience et de cœur personnel, ils ne connaissaient pas l’Éternel, et si on ne connaît pas l’Éternel, nécessairement on ne connaît pas Son œuvre. On apprend à connaître le Seigneur en apprenant à connaître l’œuvre qu’Il a accomplie et dont on est bénéficiaire moyennant la foi et la reconnaissance de notre état ; on connaît alors la valeur de Son œuvre. Nous aimons à croire, et supplions qu’il n’y ait aucun jeune ici qui puisse dire « je ne connais pas le Seigneur », ou « je ne connais pas pour moi-même la valeur de Son œuvre ».
En troisième lieu il est dit qu’ils ne connaissaient pas la guerre. Les choses que l’on a, que l’on possède, ont souvent la valeur du prix que l’on a payé pour les acquérir. Ce qui n’a rien coûté, on ne l’apprécie guère ; mais ce pour quoi on a lutté pour l’acquérir, quand on a payé le prix de ce qui nous est accordé, on le tient en haute valeur. La nouvelle génération n’a pas été placée dans des conditions qui requéraient la guerre dans la même mesure que leurs pères ; mais il y a la lutte que connaîtra toujours le racheté dans ce monde. S’il y a combats, luttes, c’est parce que nous réalisons que nous ne sommes plus du monde. Si même en suivant les rassemblements, en étant accoutumés à la lecture de la Parole de Dieu, si nos affections sont pour les choses du monde, nous ne connaissons pas de lutte. La lutte est dans la mesure où nos affections sont pour le Seigneur ; c’est ce qui nous fera connaître un combat face aux assauts de ce monde, parce que nous savons bien qu’il y a trois éléments qui luttent contre la vie de Dieu et contre ceux qui Lui appartiennent : Satan, la chair et le monde. Si on ne lutte pas, on ne connaît pas la guerre. Sommes-nous véritablement liés à Christ, affranchis, pour lui ? Alors des ennemis sont laissés (nous l’avons vu dans le livre de Josué) pour qu’ils apprennent, par la guerre, à réaliser le privilège de celui du peuple de Dieu.
Trois choses qu’ils ne connaissaient pas. Nous ne pouvons pas aller plus loin ; il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur la transmission des générations, et aussi sur la formation de ceux d’une génération qui marche aux côtés de la génération précédente : c’est la communion entre les générations. On pourrait parler de Josué avec Moïse ; on pourrait parler d’Élisée qui a cheminé avec Élie — deux générations, deux hommes dont les ministères sont absolument différents, mais qui marchent ensemble sur le même terrain ; on pourrait parler de Paul et de Timothée qui ont cheminé ensemble 16 ans, animés des mêmes dispositions, et pourtant leur ministère était différent, et ils étaient de deux générations distinctes. Qu’il y ait entre générations cette même pensée quant aux choses de Dieu, une même appréciation qui conduit à une même orientation, marchant comme Élisée et Élie, desquels il nous est dit qu’ils marchaient les deux ensemble, ils marchaient en parlant (2 Rois 2) ; et que ce qui a pu être dit à un David au terme de sa vie (cette vie n’a pas manqué d’écueils ni de graves manquements, mais sa droiture l’a toujours conduit à les reconnaître et à les juger), puisse aussi être dit de nous : il a servi au conseil de Dieu en sa génération (Actes 13:36). Que ce soit le désir de nos cœurs, quelque soit notre génération, aussi bien celle des aînés que celle des plus jeunes ; que le désir de nos cœurs soit d’être des éléments, des instruments, qui par pure grâce, se trouvent dans la main du Seigneur pour servir à Son conseil en notre génération. C’est ce qu’il attend de nos cœurs. Qu’Il forme ce désir aussi pour Sa gloire dans chacun de nos cœurs.