SUR LES RAPPORTS ENTRE CHRÉTIENS

1 - Corinthiens 10:31

C. H. Mackintosh [ajouts Bibliquest entre crochets]

M.E. 1934 p.139-148

[Table des matières :]

1 - [Position du croyant (chrétien) établie selon le Nouveau Testament]

2 - [Position et responsabilité. Distinguer selon qu’on a la vie de Dieu ou pas]

3 - [Rapports des chrétiens entre eux : de quoi sont faites leurs conversations ou entretiens]

4 - [De quoi sont faites nos conversations ou entretiens avec ceux du monde]

5 - [Instructions de la Parole de Dieu sur nos conversations. L’opposé du légalisme]

6 - [Ce qui nourrit les pensées du chrétien et l’effet sur sa marche]


[« Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, ou quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu » (1 Corinthiens 10:31)]


1 - [Position du croyant (chrétien) établie selon le Nouveau Testament]

Avant d’adresser une parole d’avertissement, il très important d’établir le véritable terrain sur lequel une telle parole peut être reçue. Le Nouveau Testament abonde en avertissements et en exhortations ; mais il expose clairement la véritable position dans laquelle se trouve le croyant, avant de l’inviter à les écouter ; et, à moins de bien comprendre cette position et d’y entrer pratiquement, un avertissement ou un précepte peuvent conduire à un esprit de légalisme ou de servitude.

Si nous considérons la position du croyant, telle qu’elle est présentée dans le Nouveau Testament, nous voyons que tout y est complet — la justification et l’acceptation. « Justifiés de tout » (Actes 13:39). « Accomplis en lui, qui est le chef de toute principauté et autorité » (Col. 2:10). « Agréables dans le Bien-Aimé » (Éph. 1:6).

Voilà quelques-unes des expressions employées par le Saint Esprit pour décrire la position du croyant devant Dieu — une position qui, il est superflu de le dire, ne dépend en rien de lui, mais est fondée sur l’œuvre accomplie de Christ. La grâce de Dieu la lui a assignée ; le sang de Christ l’a rendu propre à l’occuper ; et l’opération du Saint Esprit l’a conduit à la comprendre et-à en jouir. Cette position est, par conséquent, le fruit de l’action combinée de la divine Trinité, en dehors de toute intervention de l’homme. La justification du croyant, sa perfection, son acceptation, sont aussi indépendantes de lui-même et de tout ce qui est en lui, que la position du soleil dans le ciel. Le soleil est là, mais qui l’y a placé ? C’est Dieu. Ces deux positions sont aussi indépendantes l’une que l’autre du croyant lui-même, car toutes deux sont également fondées sur ce que Dieu est.

Il est bon d’avoir une notion exacte et nette de ce que nous sommes et de notre position — bon d’être amenés à nous arrêter pour laisser agir la divine grâce à notre égard — bon de laisser Dieu faire pour nous et de nous ce qu’Il veut, et nous placer où Il le veut ; assurés comme nous pouvons l’être que tout est à Sa gloire infinie et à Sa louange. Nous pouvons penser que tout cela est trop bon pour être vrai : et assurément ce serait trop bon, si cela dépendait en aucune façon de nous ; mais non pas puisque cela dépend entièrement de Dieu. Cela peut être trop bon pour que nous l’obtenions ; mais ce n’est pas trop bon pour que Dieu nous le donne ; toute la différence est là. La valeur du don doit dépendre du donateur. Dieu donne une justification parfaite ; Il donne une complète acceptation. À qui ? À des pécheurs. Sur quel fondement ? Le sacrifice de Christ accompli. Dans quel but ? Afin que nous soyons à la louange de sa gloire (Jean 17:2 ; Actes 13:39 ; Rom. 6:23 ; Éph. 1:6 ; Col. 2:10 ; Éph. 1:12).


2 - [Position et responsabilité. Distinguer selon qu’on a la vie de Dieu ou pas]

Il est donc clair que ni avertissement, ni précepte, ni exhortation ne peuvent affecter en quoi que ce soit la position ou la révélation du croyant. Bien au contraire, le fait même que Dieu s’adresse à nous de cette manière prouve qu’Il reconnaît notre relation. Si Dieu me donne un commandement, c’est la preuve qu’Il reconnaît en moi un principe de vie et de puissance par lequel je puis entendre et obéir. Il n’inviterait pas à agir un être qui serait « mort dans ses fautes et dans ses péchés ». À celui-ci Il commande de recevoir comme un libre don la vie éternelle dans son Fils Jésus Christ. Mais lorsque quelqu’un a reçu cette vie, est né de nouveau, est entré dans une relation éternelle basée sur la rédemption, alors et seulement alors il reçoit les exhortations et les avertissements ; et de leur exacte observation dépendent en grande partie sa bénédiction présente, sa consolation et son service.

Nous sommes portés à confondre deux choses très différentes, savoir notre relation éternelle avec Dieu comme Ses enfants, et notre responsabilité présente envers Christ comme Ses serviteurs et Ses témoins. La première est le résultat de l’action de la volonté et de la puissance divines, comme nous le lisons dans l’épître de Jacques : « De sa propre volonté, il nous a engendrés par la parole de la vérité, pour que nous soyons une sorte de prémices de ses créatures ». La deuxième, au contraire, est une chose qui dépend de nous chaque jour et demande une sainte diligence dans l’étude de la Parole et la prière, et une dépendance constante de Dieu. Nous manquons souvent à notre responsabilité envers Christ, nous ne le manifestons pas dans notre marche ni ne lui rendons un témoignage pratique ; mais, béni soit Dieu, cela ne compromet en rien notre relation éternelle avec Lui, quoique cela puisse nuire à notre compréhension et à notre jouissance de cette relation.


3 - [Rapports des chrétiens entre eux : de quoi sont faites leurs conversations ou entretiens]

Ceci m’amène à notre sujet immédiat : les rapports entre chrétiens, un sujet plus important qu’il ne le paraît au premier abord. Je n’entends pas par là les rapports que nous avons ensemble sur les bancs d’une salle de réunion, ou quand nous sommes réunis en des occasions solennelles, pour le culte ou l’édification. Je fais allusion aux sujets de nos entretiens lorsque nous nous rencontrons familièrement et habituellement ; et sur ce point il nous faut beaucoup de vigilance afin que l’Ennemi ne nous entraîne pas à perdre les caractères de pureté et d’élévation qui doivent distinguer ceux qui professent être les membres du Corps de Christ et le temple de son Saint Esprit.

Il est souvent triste et humiliant de constater le genre de conversation qui règne aujourd’hui parmi ceux dont les principes nous feraient attendre des résultats pratiques très différents. En les écoutant parler, on est souvent amené à se demander : Est-il possible que ces gens croient réellement ce qu’ils professent ? Croient-ils qu’ils sont morts et ressuscités avec Christ — que leur appel est céleste — qu’ils font partie du Corps de Christ — qu’ils sont crucifiés avec Christ — qu’ils ne sont pas dans la chair, mais dans l’Esprit — qu’ils sont forains et étrangers, — qu’ils attendent des cieux le Fils de Dieu ? Tous ces principes importants font peut-être partie de la profession de foi à laquelle ils ont donné un assentiment nominal ; mais il est moralement impossible que leurs cœurs en aient été affectés. Comment un cœur qui serait réellement sous l’influence de vérités aussi merveilleuses, pourrait-il trouver du plaisir ou simplement prendre part à des causeries vaines, frivoles et vides, causeries concernant des personnes et des circonstances avec lesquelles il n’a rien à faire, et toutes les bagatelles du jour ? Un cœur rempli de Christ pourrait-il être ainsi occupé ? Et cependant c’est le cas de bien des chrétiens professants.


4 - [De quoi sont faites nos conversations ou entretiens avec ceux du monde]

Ce n’est pas seulement dans nos rapports avec d’autres chrétiens que nous nous oublions nous-mêmes, ou plutôt que nous oublions le Seigneur ; mais aussi dans nos rapports avec le monde. Combien souvent, quand nous rencontrons des inconvertis, glissons-nous dans le courant de leurs pensées, et nous trouvons-nous sur un terrain commun avec eux ! Les uns déplorent cette manière de faire ; d’autres la défendent en se fondant sur une interprétation erronée de l’expression de l’apôtre : « Je suis devenu toutes choses pour tous » [1 Cor. 9:22]. Assurément cela ne signifie pas que Paul entrait dans toutes les folies des hommes du monde. Quel est donc le sens de cette expression ? Elle signifie que Paul faisait abnégation de lui-même parmi toutes les classes d’hommes, afin de pouvoir « de toute manière en sauver quelques-uns ». Son but était d’amener des pécheurs à Christ, et non de se plaire à lui-même en entrant dans leurs vaines et folles conversations.

Considérons le Seigneur lui-même, notre grand Modèle, et cherchons comment Il se comportait envers les hommes de ce monde. Trouvait-Il jamais un objet en commun avec eux ? Jamais. Il se nourrissait toujours d’un seul objet, et en était rempli, et c’est de cet objet qu’Il parlait. Il cherchait toujours à diriger les pensées des hommes vers Dieu. Tel devrait aussi être notre but. Quel que soit l’endroit et le moment où nous rencontrons des hommes du monde, nous devrions diriger leurs pensées vers la Personne de Christ ; et si nous ne trouvons pas de porte ouverte, ne devrions-nous pas du moins souffrir d’être entraînés dans le courant de leurs pensées à eux ? Si nous avons des affaires à régler avec les hommes, il faut que nous les réglions, mais nous ne devrions avoir aucune communion avec eux dans leur manière de penser ou de parler, car notre Maître n’en avait pas ; et si notre sentier diffère du sien en ceci, nous nous éloignerons de la sainteté qui devrait nous caractériser. Nous serons comme « le sel qui a perdu sa saveur et qui n’est plus bon à rien ». Je ne doute pas que le manque de paix assurée et permanente dont plusieurs se plaignent, puisse être attribué aux habitudes de conversations frivoles et oiseuses auxquelles ils se livrent, ainsi qu’à la lecture des journaux ou livres mondains. De telles coutumes attristent le Saint Esprit ; et si le Saint Esprit est attristé, on ne peut jouir de Christ, car c’est l’Esprit seul qui, par la Parole écrite, présente Christ à l’âme.

Je ne veux pas dire que tous ceux qui souffrent du manque de paix se soient forcément engagés dans ce chemin. Mais je dis que ces choses doivent nécessairement compromettre notre santé spirituelle et maintenir l’âme dans un état languissant qui est un déshonneur pour Christ.


5 - [Instructions de la Parole de Dieu sur nos conversations. L’opposé du légalisme]

Certains trouveront peut-être ces principes trop terre à terre. On appellera cela du légalisme, et on accusera l’auteur de chercher à amener les gens dans une sorte de servitude et de les rejeter sur eux-mêmes. Qu’ainsi n’advienne ! Si c’est du légalisme de diriger l’attention sur les sujets de conversation, c’est alors le légalisme de l’épître aux Éphésiens ; car nous y lisons que « les paroles folles ou plaisanteries » ne doivent même pas être nommées parmi nous, « comme il convient à des saints ». Nous lisons encore : « Que votre parole soit toujours dans un esprit de grâce, assaisonnée de sel » (Col. 4:6). Voilà les instructions qui sont clairement énoncées dans l’Écriture ; en outre elles sont en rapport immédiat avec quelques-unes des doctrines les plus élevées de l’inspiration, et nous ferons l’expérience que, si elles n’ont pas tout leur poids sur notre conscience, nous ne jouirons pas non plus des vérités les plus élevées. Je ne puis me réjouir de mon appel céleste, ni marcher d’une manière digne de lui, si je me laisse aller à « des paroles folles ou plaisanteries ».

J’admets pleinement la nécessité d’éviter soigneusement toute sainteté affectée et toute contrainte charnelle. La sainteté affectée ne vaut pas mieux que la légèreté. Mais pourquoi faudrait-il l’une ou l’autre ? L’Évangile nous enseigne quelque chose de beaucoup meilleur. Au lieu de sainteté affectée, il nous parle de sanctification réelle, et au lieu de légèreté il nous donne la joie véritable. Il n’est nul besoin d’affecter quoi que ce soit, car, si je me nourris de Christ, tout est réalité sans effort. Du moment qu’il y a effort, tout est faiblesse. Si je dis que je dois parler de Christ, cela devient un esclavage, et je montre ma faiblesse et ma folie ; mais si mon âme est en communion avec Lui, cela m’est naturel et facile, car « de l’abondance du cœur la bouche parle ». Il existe un petit insecte qui prend toujours la couleur de la feuille dont il se nourrit. Il en est exactement de même du chrétien. Il est facile de dire de quoi il se nourrit.


6 - [Ce qui nourrit les pensées du chrétien et l’effet sur sa marche]

« Mais », diront quelques-uns, « nous ne pouvons pas toujours parler de Christ ». Je réponds à cela que dans la proportion où nous sommes conduits par l’Esprit, nos pensées et nos paroles seront occupées de Christ. Si nous sommes des enfants de Dieu, nous serons occupés de Lui pendant l’éternité ; pourquoi ne le serions-nous pas déjà maintenant ? Nous sommes aussi réellement séparés du monde maintenant que nous le serons alors ; mais nous ne marchons pas par l’Esprit.

Il est vrai qu’en entrant dans le sujet des habitudes de conversation des chrétiens, on se place sur un terrain peu élevé ; mais cela est nécessaire. Il serait beaucoup plus heureux de se maintenir sur un terrain élevé, mais hélas ! c’est là que nous manquons ; et c’est une grâce que la Parole et l’Esprit de Dieu s’occupent de nos manquements. L’Écriture nous dit que nous sommes « assis dans les lieux célestes dans le Christ Jésus », et elle nous dit aussi de ne pas « dérober ». Parler à des hommes célestes de ne pas dérober, c’est se placer sur un terrain peu élevé, dira-t-on ; cependant c’est le terrain de l’Écriture, et c’en est assez pour nous. L’Esprit de Dieu savait qu’il ne suffisait pas de nous dire que nous sommes assis dans le ciel, mais qu’il fallait aussi nous dire comment nous devons nous conduire sur la terre ; et c’est par la pratique de notre marche sur la terre que nous prouverons que nous avons compris notre position céleste.

Je saurai donc, d’après la marche d’un chrétien, comment je puis agir avec lui au sujet de la condition actuelle de son âme devant Dieu. Si sa marche est charnelle et mondaine, il sera évident qu’il ne réalise pas sa position sainte et élevée comme membre du Corps de Christ et temple de Dieu.

C’est pourquoi, à tous ceux qui sont portés à se laisser aller à des habitudes de conversation légère, je voudrais dire avec affection, mais solennellement : Prenez garde à l’état général de votre santé spirituelle. De mauvais symptômes se montrent, qui prouvent une maladie intérieure, une maladie qui affectera peut-être plus ou moins les sources de la vie. Ne laissez pas cette maladie faire des progrès, mais ayez recours au grand Médecin. Votre être spirituel peut être affecté tout entier, et rien ne peut le restaurer, sinon ce que le Seigneur a lui-même à vous donner.

Une nouvelle contemplation de l’excellence, de la valeur et de la beauté de Christ, est la seule chose qui puisse élever l’âme au-dessus de sa basse condition. Toute notre stérilité, toute notre indigence viennent de ce que nous avons laissé échapper Christ. Ce n’est pas Lui qui nous a laissés échapper. Non, béni soit son Nom, cela ne peut être. Mais, pratiquement, nous L’avons laissé échapper ; et en conséquence notre niveau s’est tellement abaissé qu’il est parfois difficile de reconnaître en nous quelque chose de chrétien, excepté le nom seul. Nous nous sommes arrêtés court dans notre carrière pratique. Nous ne sommes pas entrés, comme nous l’aurions dû, dans la signification de la « coupe » de Christ et de son « baptême » ; nous n’avons pas cherché à avoir communion avec Lui dans ses souffrances, sa mort et sa résurrection. Nous connaissons le résultat de ces choses, comme effectuées en Lui ; mais nous n’y sommes pas entrés expérimentalement ; et de là vient notre triste déclin, dont rien ne peut nous retirer, sinon d’entrer davantage dans la plénitude de Christ.