Christian Briem
ME 2002 p. 334, 370. Traduit de l’allemand « Da bin ich
in ihrer Mitte » p. 90-105.
Traduction révisée et complétée à partir de l’original.
Les passages faisant allusion au reste du livre ont été conservés
car la traduction en est prévue.
Table des matières :
1 - La signification prophétique des sept lettres (Apoc. 2 et 3)
2 - Laodicée — la chrétienté dans sa dernière phase
2.2 - Christ — le témoin fidèle et véritable
2.3 - Christ — le commencement de la création de Dieu
2.6 - Riche et pourtant pauvre
2.9 - Être vomi de la bouche du Seigneur
Si le Seigneur, juste avant de confier à Jean les messages
destinés aux sept assemblées, parle du mystère
des sept étoiles et des
sept lampes d’or (Apoc. 1:20), cela nous donne une indication claire du fait
que ces lettres ont une portée qui dépasse leur application historique,
actuelle au moment où elles ont été écrites. Car dans l’application directe aux
assemblées qui existaient alors, il n’y a rien de mystérieux. En fait, ces
lettres ne nous offrent pas seulement un aperçu très instructif de l’état dans
lequel étaient alors les diverses assemblées d’Asie (la province romaine
d’Asie), mais elles nous donnent une description prophétique de l’état de toute
la chrétienté professante en sept périodes successives — se recouvrant
d’ailleurs en partie.
La lettre à Éphèse
(2:2-7 ;
« ville du plaisir » ; certains donnent la signification de
« dessein complet ») nous donne une image de l’Église — ou assemblée
— à l’époque du dernier des apôtres et dans les années qui ont suivi son départ,
jusqu’en l’an 167. Les points positifs sont la séparation du mal et le maintien
de l’ordre divin. Le point négatif, c’est l’abandon du premier amour, de la
fraîcheur des affections les meilleures pour le Seigneur Jésus.
À Smyrne
(2:8-11 ; « myrrhe »), nous avons le tableau de l’Église
souffrante. C’est la période dans laquelle les chrétiens ont été persécutés
jusqu’au sang par les Romains ; elle s’étend de 167 à 313. Satan a essayé
d’éradiquer la jeune Église par une persécution jusqu’à la mort. Mais le sang
des martyrs était, comme il l’a toujours été, la semence de l’Église. À cette
assemblée, le Seigneur n’a aucun reproche à faire.
Pergame
(2:12-17 ;
« citadelle », peut-être aussi « beaucoup de mariage »)
nous montre comment l’Église, sous l’empereur Constantin le Grand, est devenue
une Église d’état. Après la cessation des persécutions (en l’an 313), elle
s’est, pour ainsi dire, mariée au monde. Par là, Satan a habité parmi eux. Les
coutumes et fêtes païennes devinrent des fêtes chrétiennes. Les éléments
chrétiens et païens se mélangèrent. Pourtant, le Seigneur peut encore approuver
le fait que cette assemblée tient ferme Son nom et la foi chrétienne.
La quatrième période de l’histoire de l’Église responsable nous
est présentée par l’assemblée de Thyatire
(2:18-29 ; « porte du sacrifice »,
« sacrifice perpétuel »). On voit là la description de l’Église du
Moyen Age, depuis l’an 600 environ. Le Seigneur peut reconnaître l’amour et la
persévérance dans le service, mais Il doit blâmer sévèrement la fornication
spirituelle (le mélange avec le monde) et l’idolâtrie. C’est dans cette épître
qu’Il parle pour la première fois de sa venue
— indication du fait que cet état de Thyatire durera jusqu’à Son
retour. Pour la première fois aussi, un résidu
est distingué de la masse
des chrétiens professants (les « autres qui sont à Thyatire »). Ce
résidu seul est reconnu du Seigneur. Dans sa position, ce groupe de fidèles
croyants est considéré par le Seigneur comme étant la vraie Église de ce
temps-là. Il y a là un principe divin, que l’Écriture applique dans tous les
temps, lorsque la masse est devenu infidèle.
À Sardes
(3:1-6 ;
« résidu ») nous avons l’état du protestantisme dans les temps qui
ont suivi la Réforme, c’est-à-dire depuis la fin du 16ème siècle environ. La
caractéristique dominante de cette période, c’est l’absence de vie spirituelle
malgré le maintien des vérités doctrinales. Ici aussi les vrais croyants sont
considérés comme un résidu. Il n’y en a qu’un petit nombre, à Sardes, dont le
Seigneur peut reconnaître qu’ils ne se sont pas souillés avec le mal. Ils
montrent une vraie marche chrétienne
. Mais dans leur ensemble, les
chrétiens professants seront traités comme le monde : lors de son
apparition, le Seigneur viendra sur eux en jugement comme un voleur.
Philadelphie
(3:7-13 ;
« amour des frères ») présente une période bénie de réveil au sein de
la chrétienté. Elle a commencé dans la première moitié du 19e siècle. Elle a
été caractérisée par une grande fidélité et par un grand amour pour le Seigneur
et pour Sa Parole. Beaucoup de vérités de l’Écriture qui, dans les siècles
précédents, étaient tombées dans l’oubli par l’infidélité de l’homme ont été
redécouvertes par la grâce de Dieu, et répandues dans le monde entier avec une
énergie extraordinaire. L’amour fraternel (c’est la signification du nom de
Philadelphie) a été la base de leur communion pratique. En contraste avec
« ceux qui habitent sur la terre », sur lesquels le Seigneur fera
venir « l’heure de l’épreuve », ils ont réalisé qu’ils étaient étrangers
sur la terre. Car ils ont « gardé la parole de Sa patience », en
attendant Son retour pour les enlever auprès de Lui. Il ne leur fait pas de
reproche ; au contraire, Il leur donne — et cela pour la première fois —
l’assurance de son retour prochain : « Je viens bientôt ». Il
indique par là deux choses : premièrement, que par ce retour Il les
délivrera de l’heure de l’épreuve (*) qui va
venir sur la terre entière, et deuxièmement, qu’au sein de la chrétienté
professante, Philadelphie et sa condition spirituelle subsisteront jusqu’à ce
qu’Il vienne comme « l’étoile du matin ».
(*) Cela signifie les jugements préparatoires commençant à partir d’Apocalypse 6. Cette heure de l’épreuve qui va venir sur la terre entière, ne doit pas être confondue avec la grande tribulation qui atteindra spécialement Israël et Jérusalem.
Ces caractères que le Seigneur apprécie tant ne se trouveront
que dans un résidu, tandis que la profession chrétienne dans son ensemble
suivra un autre chemin : c’est ce qui ressort clairement du dernier
message, celui qui est adressé à Laodicée
(3:14-22 ; « les
droits du peuple »). Les caractéristiques principales de cette période,
qui a déjà commencé au 19e siècle et qui dure encore aujourd’hui, sont la
tiédeur, l’indifférence, le matérialisme, le rationalisme et la satisfaction de
soi-même. Tout ce qui est vraiment chrétien et divin fait défaut. En
considérant la dernière phase de l’Église responsable sur la terre, le Seigneur
n’a plus rien du tout à approuver. Aussi ne parle-t-Il plus de Sa venue, mais
annonce qu’Il va vomir de sa bouche cette profession sans vie.
Après cette vue d’ensemble, nous allons maintenant nous occuper de façon plus détaillée de la lettre à Laodicée. Elle a pour nous une signification toute particulière, puisqu’elle décrit la dernière phase de la chrétienté et qu’elle met chaque vrai chrétien en garde contre les traits de caractère qui la rendent si abominable aux yeux de Christ.
« Et à l’ange de l’assemblée qui est à Laodicée, écris : Voici ce que dit l’Amen, le témoin fidèle et véritable, le commencement de la création de Dieu : Je connais tes œuvres, — que tu n’es ni froid ni bouillant. Je voudrais que tu fusses ou froid ou bouillant ! Ainsi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni bouillant, je vais te vomir de ma bouche. Parce que tu dis : Je suis riche, et je me suis enrichi, et je n’ai besoin de rien, et que tu ne connais pas que, toi, tu es le malheureux et le misérable, et pauvre, et aveugle, et nu : je te conseille d’acheter de moi de l’or passé au feu, afin que tu deviennes riche, et des vêtements blancs, afin que tu sois vêtu et que la honte de ta nudité ne paraisse pas, et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. Et à l’ange de l’assemblée qui est à Laodicée, écris : Voici ce que dit l’Amen, le témoin fidèle et véritable, le commencement de la création de Dieu : Je connais tes œuvres, — que tu n’es ni froid ni bouillant … » (Apocalypse 3:14-18).
Sur le fond sombre du tableau de Laodicée selon ce que nous
avons déjà vu et qui ressort de ces versets, la manière dont le Seigneur Jésus
se présente à cette assemblée est particulièrement belle. Il s’intitule tout
d’abord l’Amen
. « Amen »
signifie vraiment
, certainement
. À la fin d’une prière, ce mot a
le sens d’une confirmation, d’un renforcement : Ainsi soit-il !
La clé qui nous permet de comprendre ce nom du Seigneur se
trouve en 2 Corinthiens 1:20 : « Car autant il y a de promesses de
Dieu, en lui [c’est-à-dire en Christ, le Fils de Dieu] est le oui
et en lui l’amen
, à la gloire de Dieu par nous ». Toutes les promesses
de Dieu trouvent dans le Seigneur Jésus leur confirmation et leur sûreté.
Christ est, pour ainsi dire, le dernier mot de Dieu, son Amen. Quelle
consolation il y a là pour nous, bien aimés ! Quand l’assemblée a
entièrement manqué à garder ce que Dieu lui avait confié, Christ prend sa place
et garantit, en tant qu’Amen
et sur la base d’une rédemption accomplie,
la réalisation de toutes les promesses que Dieu a faites aux Siens.
Si, aujourd’hui, presque toutes les valeurs en rapport avec Dieu et Son Christ sont renversées et échappent à l’homme ; si non seulement tout ordre chrétien, mais même tout ordre moral est abandonné, — le Seigneur Jésus est et demeure « l’Amen ». Tenons-ferme à cela, et méditons le, justement au moment où nous allons jeter un regard sur l’état spirituel de la chrétienté et apprendre le jugement inflexible que le Seigneur porte sur lui.
Le deuxième nom que prend ici le Seigneur — « le témoin fidèle et véritable » — est lui aussi en rapport avec ce que l’assemblée aurait dû être. « Vous serez mes témoins », avait dit le Seigneur ressuscité avant de monter au ciel (Act. 1:8). C’est là précisément ce que l’assemblée devait être devant Dieu et devant le monde : des témoins de Christ ; et c’est justement la signification symbolique des « lampes d’or », comme nous l’avons vu. Dans ce monde de ténèbres, il s’agit de diffuser la lumière au sujet de Christ, une lumière divine sur sa personne excellente, sur la pleine valeur de son œuvre, et sur les conséquences bénies de celle-ci pour les hommes. De façon analogue, l’apôtre Paul compare les croyants à une « lettre de Christ » sur laquelle les hommes peuvent lire qui est Christ (2 Cor. 3:3). Hélas ! quelle misère dans notre témoignage personnel et collectif à cet égard !
Et pourtant, lorsque les individus sont défaillants, lorsque l’assemblée n’accomplit pas sa mission, Dieu ne peut pas se laisser sans témoins. Car il y a Un qui est fidèle, qui l’a été et qui le sera toujours : c’est Christ. Ainsi, le Seigneur Jésus prend aussi à cet égard la place que l’assemblée infidèle aurait dû occuper, et Il se présente Lui-même comme « le témoin fidèle et véritable » (voir aussi Apoc. 1:5). Dans Sa vie et dans Sa mort, Il a été un témoignage parfait de tout ce que Dieu est. Il a révélé d’une manière merveilleuse l’amour et la sainteté de Dieu. Et maintenant encore, comme Fils de l’homme glorifié dans le ciel, Il poursuit par le Saint Esprit ce service béni et témoigne de toutes les bénédictions et de toutes les joies que l’on trouve en Lui, « le second homme » (1 Cor. 15:47).
Le troisième nom que prend le Seigneur — « le commencement
de la création de Dieu » — a été souvent mal compris. Christ n’est pas une
créature ; il est le point de départ de tout ce que Dieu a fait et qu’Il
fera. Christ n’est pas seulement l’aboutissement de toutes les pensées de Dieu
— l’amen
— Il est aussi Sa première
pensée, le commencement de toute Sa création. Christ était déjà le commen
cement
de la première création, et
l’épître aux Colossiens nous dit que « toutes choses ont été créées par
Lui et pour Lui » (Col. 1:16). Mais « Lui est avant toutes choses
, et toutes choses subsistent par Lui »
(Col. 1:17). Et ce passage mentionne ensuite trois gloires du Seigneur qui vont
bien au-delà de la première création, la création visible : Il est le chef
(la tête
) du corps, de l’assemblée, Il est le commencement
et Il
est le premier-né d’entre les morts
(Col. 1:18).
Dans les chapitres précédents, nous nous sommes déjà occupés du
Seigneur Jésus en tant que Tête du corps
. En tant que commencement
,
Il est le chef de la nouvelle création, de ce nouvel ordre de choses spirituelles
qui est fondé sur la mort et la résurrection de Christ d’entre les morts, et
dont l’apôtre Paul parle en 2 Corinthiens 5 : « Si quelqu’un est en
Christ, c’est une nouvelle création : les choses vieilles sont
passées ; voici, toutes choses sont faites nouvelles ; et toutes sont
du Dieu qui nous a réconciliés avec lui-même par Christ » (2 Cor. 5:17,
18).
Si la chrétienté avait — disons même franchement : si nous
avions retenu fermement
le Seigneur Jésus comme le commencement, le chef
de la nouvelle création (et c’est l’objet principal de l’épître aux Colossiens
— voir Col. 2:19), nous n’aurions pas glissé sur cette pente raide qui aboutit
à l’état final décrit par la lettre à Laodicée. N’est-il pas significatif que
l’assemblée à Laodicée ne soit mentionnée que dans un seul autre livre du
Nouveau Testament, justement cette épître aux Colossiens ? Et combien sont
significatives les paroles de l’apôtre : « Et quand la lettre aura
été lue parmi vous, faites qu’elle soit lue aussi dans l’assemblée des
Laodicéens
» (Col. 4:16) ! Nous pouvons certainement en retirer
cette instruction : Si nous avions retenu fermement Christ, la tête, si
nous avions pris à cœur l’enseignement développé dans l’épître aux Colossiens,
la chrétienté ne serait pas arrivée dans l’état honteux que décrit la lettre à
Laodicée, et que nous voyons tous les jours autour de nous.
La signification du mot Laodicée
= les droits du
peuple
est riche d’enseignements. Il faudrait bien être aveugle
spirituellement pour ne pas voir que les principes démocratiques exercent leur
influence partout dans le monde, et malheureusement aussi dans la profession
chrétienne. On aspire aujourd’hui à ces droits du peuple
, et non pas aux
droits du Seigneur. Y a-t-il jamais eu une époque dans laquelle, plus
qu’aujourd’hui, les hommes ont vanté et revendiqué leurs prétendus
droits ? L’homme fait valoir des droits, revendique du pouvoir, même dans
le domaine spirituel. On écoute la voix du peuple, et on trouve que cela va de
soi, et on le tient pour tout à fait normal. Mais qui écoute la voix du
Seigneur Jésus, la voix de sa sainte Parole ? Où reconnaît-on les droits
qui n’appartiennent qu’à Lui seul — Lui qui est la tête du corps, la tête de
l’assemblée ?
Ceci me conduit à une autre pensée, qu’il ne faut pas omettre. Laodicée
résulte du refus du témoignage de Philadelphie
. Car à Philadelphie, on
n’écoutait pas la voix du peuple, mais celle du Seigneur ; en effet,
Lui-même lui dit : « Tu as gardé ma parole… ». À Philadelphie,
ce n’était pas les droits du peuple qui étaient maintenus, mais ceux du
Seigneur : « … tu n’as pas renié mon nom » (3:8). Philadelphie
et Laodicée présentent le contraste le plus complet. On le verra encore plus
clairement plus loin.
Dans la période de Philadelphie, Dieu a fait luire une lumière brillante sur la vérité de l’évangile et a ouvert une porte toute grande pour sa propagation dans la puissance de l’Esprit. L’évangile a été apporté à d’innombrables personnes, et des multitudes se sont converties, sur tous les continents. Beaucoup ont abandonné les églises et les communautés instituées par les hommes et ils se sont rassemblés au nom seul du Seigneur Jésus. Par la mise en pratique de l’amour fraternel, ils ont constitué un témoignage puissant au vrai esprit du christianisme. Leurs actions et leurs pensées étaient guidées par l’attente du retour de leur Seigneur pour enlever au ciel Son assemblée — ainsi qu’Il a dit : « Je viens bientôt » (Apoc. 3:11 ; 22:20). Or tout cela a été vu, en partie admiré, et finalement mis de côté. Le résultat en est « Laodicée » — la chrétienté dans sa forme actuelle (*).
(*) Je ne dirais pas que Laodicée
est issue de Philadelphie
.
Laodicée
est plutôt le résultat du fait que la chrétienté a connu la
vérité de Dieu telle que présentée par Philadelphie
, puis l’a rejetée.
Au lieu de la vérité, elle a accueilli la liberté de pensée. C’est pourquoi
l’affirmation selon laquelle « Laodicée
, c’est Philadelphie
à température tiède » est fausse, à mon avis. Sardes
n’émane pas
non plus directement de Thyatire
. Sardes
nous montre, comme nous
l’avons vu, un état à l’intérieur de la chrétienté qui s’est installé après
la Réformation. Quant à Philadelphie
, elle n’est pas seulement formée à
partir de croyants provenant de Sardes
, mais aussi de Thyatire
.
Naturellement, les états particuliers se trouvent nécessairement dans les
différentes époques ; ils ne pouvaient pas se succéder dans un ordre
inverse ; mais un état ne découle pas
directement de l’état
précédent.
Un point encore. Les différentes lettres décrivent des états
moraux par lesquels la profession chrétienne s’est caractérisée, ou se
caractérise, à différentes époques de son histoire sur la terre. Thyatire
,
Sardes
et Philadelphie
vont jusqu’au retour du Seigneur, ainsi
qu’en témoigne la mention de Sa venue dans les trois lettres qui leur sont
adressées. Elles subsistent encore côte à côte aujourd’hui, bien que les
époques où ont été vus leurs traits les plus caractéristiques soient révolues.
Les temps où l’état de la chrétienté était caractérisé
de façon
particulière par Thyatire
, Sardes
ou Philadelphie
— en
bien ou en mal — sont certainement passés. Cependant, je suis convaincu que Philadelphie
existe encore aujourd’hui. C’est mon vœu le plus profond d’en faire partie.
Mais le temps où le caractère du témoignage chrétien était marqué de cette
manière, n’appartient-il pas en réalité au passé ? Je dis cela d’un cœur
triste et honteux. Quant à Thyatire
et Sardes
, elles débouchent
dans Laodicée
sans cependant perdre pour autant leurs caractères
spécifiques.
« Je connais tes œuvres, — que tu n’es ni froid ni bouillant » (Apoc. 3:15).
L’indifférence — voilà le caractère principal de Laodicée, de la chrétienté d’aujourd’hui. Il n’y a ni la froideur d’un rejet direct et ouvert du Seigneur, ni la chaleur d’une réelle affection pour Lui. On maintient extérieurement le nom de Christ, on professe être un chrétien, mais on n’a pas de cœur pour Celui dont on porte le nom. L’indulgence et la tolérance sont placées au plus haut niveau de l’échelle des valeurs. Tout est supporté avec un cœur large, même le mal. L’essentiel, c’est que chacun soit sincèrement convaincu de ce qu’il fait et pense, car toutes les conceptions religieuses sont considérées comme également bonnes. Il n’y a ni zèle pour ce qui plaît au Seigneur, ni rejet de ce qui Le dénigre. L’indifférence vis-à-vis du vrai bien, l’indifférence vis-à-vis du vrai mal, c’est ce qui déplait tant au Seigneur Jésus qu’Il le vomira de Sa bouche. Cette tolérance libérale, n’est-elle pas écœurante pour l’âme d’un croyant ? En tout cas, le Seigneur Jésus ne peut pas retenir pareille chose dans Sa bouche !
D’où provient cette indifférence totale ? Où sont les
racines de cette tiédeur et de cette insensibilité effrayantes ? Il n’y a
qu’une réponse possible : Le Seigneur Jésus n’est pas réellement aimé
. On commence par l’abandon du
premier amour (Éphèse) et on termine par l’absence totale de cet amour pour le
Seigneur (Laodicée). Ce n’est pas l’ignorance de la vérité qui conduit à la
tiédeur, mais le fait qu’on ne L’apprécie pas, parce qu’on n’apprécie pas
Christ.
Je me suis demandé quelquefois pourquoi le Seigneur dit : « Je voudrais que tu fusses ou froid ou bouillant ». Serait-il vraiment bon que Laodicée soit froide ? C’est que, quand on comprend ce que veut dire froid et bouillant, la réponse n’est pas difficile : Un rejet ouvert serait non seulement plus sincère, mais laisserait quelque espoir. Bien souvent, des ennemis déclarés de Christ ont été vaincus par la grâce de Dieu. Mais être tiède et le rester est la garantie la plus certaine d’être un jour vomi de la bouche du Seigneur. Sardes était et est morte. Laodicée est tiède. Quel état effectivement irrémédiable.
« Tu dis : Je suis riche, et je me suis enrichi, et je n’ai besoin de rien… » (Apoc. 3:17).
À l’indifférence à la personne et aux intérêts de Christ s’ajoute un autre mal : l’étalage de sa richesse — richesse en biens spirituels et en biens terrestres, richesse en influence et en intelligence, richesse en dignités et en fonctions, richesse en instruction et en éducation, richesse en activités philanthropiques et sociales, richesse en compétence technique et en discernement pour pouvoir distinguer si telle et telle partie de la Bible est réellement la parole de Dieu, ou ne l’est pas. De chacun des éléments mentionnés ci-dessus, il ne serait pas difficile de donner de multiples exemples tirés du monde chrétien actuel. Mais je voudrais me contenter de les énumérer ; nous voyons tout cela journellement autour de nous si nous avons des yeux pour le voir. Je voudrais poser encore une fois la question : Y a-t-il jamais eu une époque plus marquée que la nôtre par de telles choses ? On est riche, on est devenu riche, et on n’a besoin de rien. On n’a aucun désir pour les choses divines ; on n’a que faire, par exemple, de la rédemption et du Rédempteur.
La neutralité
à l’égard
de Christ et de la vérité, associée à l’autosatisfaction
de posséder
tout ce qui est important — voilà l’état de Laodicée. L’évangile de la grâce de
Dieu est remplacé par une espèce d’évangile social d’amabilité humaine. En fait
Christ a été remplacé par l’homme naturel. C’est là le point le plus effrayant,
et c’est la base de tout.
Les hommes peuvent se laisser tromper par l’aspect extérieur, mais non pas le Seigneur. Avec Ses yeux comme une flamme de feu, Il voit jusqu’au fond de tout.
« Parce que tu dis : Je suis riche, et je me suis enrichi, et je n’ai besoin de rien, et que tu ne connais pas que, toi, tu es le malheureux et le misérable, et pauvre, et aveugle, et nu » (Apoc. 3:17).
Combien sont importants les mots « et tu ne connais pas » ! À la prétention et à l’autosatisfaction se joint l’ignorance, l’insensibilité à l’égard de son propre état et de sa propre situation. Combien, dans la chrétienté, se vantent d’être riches dans le sens donné ici et pensent posséder tout ce qu’ils estiment digne d’efforts ! Et pourtant, aux yeux de Dieu, ils sont pauvres, et aveugles, et nus. Ils pensent ne pas avoir besoin de l’œuvre rédemptrice de Christ, et en réalité ils ne possèdent rien de ce qui est de Dieu et de ce qui est durable devant Lui. On professe être chrétien, mais la vie divine est absente, et ce qui est fatal, c’est qu’on n’en est même pas conscient.
L’un de mes lecteurs serait-il l’un de ces chrétiens qui, tout en ayant le nom de vivre, sont spirituellement morts ? (Apoc. 3:1). Alors je le prie instamment : qu’il écoute le conseil du Seigneur Jésus ! — non pas mon conseil, mais celui du Seigneur Lui-même. C’est encore le jour de la grâce ; vous pouvez encore venir à Lui et acheter de Lui « sans argent et sans prix » (És. 55:1) ce qui rend réellement riche et heureux.
« Je te conseille d’acheter de moi de l’or passé au feu, afin que tu deviennes riche, et des vêtements blancs, afin que tu sois vêtu et que la honte de ta nudité ne paraisse pas, et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies » (Apoc. 3:18).
Quelle immense grâce du Seigneur de faire encore une telle offre, malgré l’indifférence qui lui est témoignée à Laodicée ! Il y a trois choses qu’Il conseille d’acheter de Lui : de l’or, des vêtements blancs et un collyre.
Cette offre du Seigneur fait en même temps clairement ressortir
que Laodicée (la profession chrétienne dans sa dernière phase) ne possède
pas
ces trois choses. Il est vrai qu’il y a là aussi des croyants, et le
Seigneur s’adresse à eux dans les versets qui suivent. J’y reviendrai au
dernier chapitre de ce livre [ch. 14 : « Voici, je me tiens à la
porte et je frappe »] quand je présenterai les conséquences à tirer de
tout cela. Mais la profession chrétienne telle qu’elle se présente aujourd’hui
est caractérisée par l’absence
de ces trois choses — l’or, les vêtements
blancs et le collyre.
Quant au Seigneur, il se tient dehors, à la porte
, en
dehors de ce système, et il frappe — non pas à la porte de Laodicée mais chez
le croyant individuellement qui peut encore se trouver associé à cela. Mais j’y
reviendrai aussi à la fin de ce livre.
L’or
passé au feu est un symbole dont nous nous sommes
déjà occupés ; il parle de la justice divine — une justice qui, éprouvée
au feu du jugement divin à Golgotha, est imputée à tous ceux qui sont de la foi
de Jésus (Rom. 3:26). La Parole de Dieu dit à leur sujet : « Or vous
êtes de Lui [Dieu] dans le christ Jésus qui nous a été fait sagesse de la part
de Dieu, et justice,
et sainteté, et rédemption » (1 Cor. 1:30).
Combien y a-t-il de personnes aujourd’hui, dans la chrétienté, durant la
période de Laodicée, qui ne possèdent pas cet or de la justice divine et qui, à
ce point de vue essentiel, sont pauvres
! Et combien y en a-t-il qui s’appuient sur leur propre justice,
sur leurs propres efforts ! Or aux yeux de Dieu, ils ne sont qu’un vêtement
souillé
(És. 64:6). Paul ne voulait plus l’avoir, cette propre justice,
après avoir trouvé, par la foi, « la justice qui est de Dieu
»
(Phil. 3:9).
Les vêtements blancs
sont une image de la justice
pratique
du croyant. Nous trouvons cette pensée déjà courtement dans la
lettre à Sardes
(3:4). Au chapitre 19, il nous est dit clairement :
« car le fin lin, ce sont les justices des saints » (19:8). Les vêtements
blancs
doivent être vus des hommes. Mais il n’y a que celui qui possède l’or
de la justice divine, qui peut manifester devant les hommes les vêtements
blancs
de la justice pratique. Ces deux choses vont toujours ensemble, et
on ne les trouve que dans le Seigneur Jésus seul. Cependant, tandis que
l’expression dans le christ
indique la position
du vrai croyant
devant Dieu, l’expression Christ dans le croyant
met l’accent sur la
révélation que le croyant doit donner de Christ dans ce monde. Si le Seigneur
Jésus habite pratiquement par la foi dans nos cœurs (Éph. 3:17), Il sera vu en
nous par ceux qui nous entourent.
Tels sont les vêtements blancs
. Les chrétiens professants
de Laodicée
ne les ont pas. Ils peuvent bien montrer quelque zèle en
faveur de leur prochain et, par là, chercher à se vêtir de leurs propres
œuvres. Mais le Seigneur dit que, de cette manière, la honte de leur nudité ne
peut pas être couverte.
Il leur manque aussi le vrai collyre
[onction des yeux], c’est-à-dire le
Saint Esprit, qui est nommé en 1 Jean 2:20 l’onction de la part du Saint
(c’est-à-dire de Christ). Seule l’onction du Saint Esprit peut ôter
l’aveuglement de l’homme naturel et lui donner un vrai discernement spirituel.
Mais celui qui n’a pas l’Esprit de Christ, celui-là n’est pas à Lui (Rom. 8:9).
L’esprit humain se glorifie aujourd’hui de ses grandes
découvertes, mais tout cela ressemble à la petite flamme fumante d’une mèche
sèche, qui cherche à donner de son mieux malgré l’absence d’huile. Déjà dans la
parabole des dix vierges, le Seigneur Jésus avait montré qu’une partie de la
chrétienté professante aurait bien une lampe
(la profession), mais pas
d’huile
(le Saint Esprit) (Matt. 25:1-13). Au moment décisif où l’on
aurait le plus besoin de la lumière, les lampes s’éteignent. Illusion
fatale ! Prêtons donc encore une fois l’oreille à la voix pleine de grâce
du Seigneur : « Je te conseille d’acheter de moi … un collyre pour
oindre tes yeux, afin que tu voies ».
Encore un mot d’avertissement aux vrais croyants. Nous avons vu ce qui caractérise la chrétienté dans sa dernière phase, et que Laodicée est quelque chose de tiède où manque tout ce qui est de Dieu. Nous allons voir bientôt ce que le Seigneur va faire de cette profession creuse. Mais cher lecteur croyant, vous et moi, nous sommes tous en danger de tomber, plus ou moins, dans l’esprit de Laodicée, que le Seigneur Jésus doit censurer si fortement.
Quand, par l’intermédiaire de l’apôtre Jean à Patmos, le Seigneur a fait parvenir ce message à l’assemblée à Laodicée, le mal n’y était certainement pas encore arrivé à son plein développement — comme il l’est aujourd’hui dans la « Laodicée » au sens figuré, la chrétienté des derniers jours. Ce serait certainement une erreur de conclure qu’il n’y avait pas de vrais croyants dans cette assemblée. Mais le germe de tout le mal décrit, l’esprit même de cet état, était déjà là présent, sinon le Seigneur n’aurait pas parlé de la sorte. Et c’est en cela que se trouve un sérieux avertissement pour nous, enfants de Dieu. Nous pouvons bien ne pas être directement « Laodicée » au sens de l’image prophétique, mais nous pouvons très bien revêtir les caractéristiques de Laodicée, et c’est un très grave danger pour nous.
Qui voudrait contester que parmi nous, enfants de Dieu, il peut aussi y avoir une attitude de tiédeur et d’indifférence à l’égard du Seigneur et de Ses intérêts ? Sommes-nous vraiment dépourvus de l’esprit d’autosatisfaction ? Ne nous arrive-t-il pas, beaucoup trop légèrement, d’être fiers des richesses spirituelles pour lesquelles nos pères ont combattu — non pas nous-mêmes — et qui nous ont été données par la pure grâce de Dieu ? Ne nous comportons-nous pas souvent comme de « pauvres gens », des gens qui ne possèdent rien de plus que les biens de ce monde ? Notre vue spirituelle n’est-elle pas parfois gravement affaiblie, de sorte que nous ne voyons plus que de près et que notre regard ne s’élève guère au-dessus des choses terrestres ?
Ce sont des questions auxquelles tous les croyants doivent réfléchir chacun pour eux-mêmes, en se plaçant réellement dans la lumière de Dieu. Prenons garde à ce que la lettre à Laodicée s’achève aussi par ces mots :
« Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux assemblées » (Apoc. 3:22).
Il n’est pas dit « … ce que l’Esprit dit à
l’assemblée », mais « … ce que l’Esprit dit aux assemblées
».
Ces enseignements n’étaient pas seulement appropriés pour cette assemblée
particulière où cet état de choses débutait, mais ils le sont pour toute
l’Assemblée de tous les temps, et aussi pour nous aujourd’hui. Que le Seigneur
nous accorde d’en tirer profit, pour ne pas laisser entrer l’esprit de Laodicée
dans nos vies, dans nos maisons, dans nos rassemblements.
« Ainsi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni bouillant, je vais te vomir de ma bouche » (Apoc. 3:16).
Je ne connais aucun autre passage de la Parole où le Seigneur
emploie un terme aussi méprisant que celui-ci : vomir
. La tiédeur, l’indifférence, est à
Ses yeux le pire des états. Cet état attire toute l’indignation du Seigneur
contre tout ce qui le caractérise ainsi. Et si l’état de la chrétienté dans sa
dernière phase porte à l’évidence ce caractère d’indifférence — nous avons bien
vu que c’est le cas — alors le Seigneur mettra fin en son temps à ce qui aurait
dû être un témoignage pour Lui sur la terre.
Si la lampe
ne répand plus la lumière divine, le Seigneur
l’ôtera complètement et définitivement de la terre. Voilà le sens de vomir
de Sa bouche
: Le Seigneur ne va plus reconnaître cette professions
chrétienne, cette chrétienté comme Son luminaire [porteur de lumière] dans ce
monde. Ce vomissement n’a pas encore eu lieu, parce que le Seigneur n’est pas
encore venu pour prendre auprès de Lui son Épouse. Il ne vomira jamais de Sa
bouche un seul des Siens qu’Il a racheté par son sang précieux. Il a
déclaré : « Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi »
(Jean 6:37). Mais pour la chrétienté comme telle, le jugement est proche.
« Voici, le juge se tient devant la porte » (Jacq. 5:9).
Pour l’exécution du jugement, il y aura, comme dans le cas du peuple d’Israël, différents stades ou étapes. Il y a d’abord l’avertissement. C’est ce que nous entendons aujourd’hui. Ensuite le Seigneur Jésus enlèvera les vrais croyants de la terre et ira à leur rencontre en l’air (1 Thess. 4:16, 17), afin de les amener là-haut dans la maison du Père. Ce sera un événement infiniment heureux pour nous, mais pour la chrétienté sans vie laissée sur la terre, cet enlèvement des saints sera le décret de condamnation le plus solennel. En effet, il y aura alors une séparation du bien et du mal irréversible, qui ne pourra jamais être remise en cause et qui ne le sera jamais. Ainsi, il semble bien que le moment de l’enlèvement des saints est justement celui où le Seigneur vomira de sa bouche la profession chrétienne sans vie. Pourrait-Il exprimer d’une manière plus claire Son horreur pour Laodicée et Son rejet de Laodicée comme Sa lampe, qu’en prenant les saints célestes auprès de Lui dans la gloire, et en laissant ici-bas la masse de professants sans vie ? C’est une pensée solennelle.
Après l’enlèvement des croyants, Laodicée subsistera certainement encore un moment sur la terre, sous une forme ou une autre ; mais elle ne sera plus reconnue comme une lampe. Le diable s’emparera rapidement de la profession chrétienne sans vie qui restera, jusqu’à ce qu’elle soit finalement éliminée définitivement dans le jugement de la grande Babylone par le Seigneur (Apoc. 18). Alors non seulement il n’y aura plus de lampe chrétienne, mais même plus du tout de chrétienté sur la terre, pas même sous la forme d’une profession extérieure.
Tel est en fait le développement triste et humiliant de l’Église comme lampe sur la terre ! Pourtant le Seigneur a un chemin pour le fidèle dans tous les temps — un chemin sur lequel il peut marcher et glorifier le Seigneur. C’est ce dont nous parlerons encore plus loin.