Maurice-Jean Koechlin
Table des matières abrégée :
1 - Je suis là au milieu d’eux — Pensées sur Matt. 18:20
2 - Celui qui s’est abaissé lui-même — Ésaïe 53
4 - Le grand mystère de la piété — 1 Tim. 3:14-16
6 - Que votre cœur ne soit pas troublé — Jean 14:1
7 - Quelques pensées sur l’adoration
Table des matières détaillée :
1 - Je suis là au milieu d’eux — Pensées sur Matt. 18:20
1.1 - La promesse de la présence du Seigneur
1.2 - Elle n’est pas liée à un lieu matériel
2 - Celui qui s’est abaissé lui-même — Ésaïe 53
3.2 - L’homme — Jean 19:5 ; Lam. 3:1
4 - Le grand mystère de la piété — 1 Tim. 3:14-16
4.1 - Dieu manifesté en chair.
4.4 - Prêché parmi les nations
6 - Que votre cœur ne soit pas troublé — Jean 14:1
6.1 - Le Seigneur troublé dans Son esprit et dans Son âme
6.2 - « Il les aima jusqu’à la fin »
7 - Quelques pensées sur l’adoration
7.6 - Une victime offerte en sacrifice. Ses souffrances
7.7 - À ne pas confondre : culte / prière / prédication
7.9 - Conditions pour l’adoration
Les sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
Il y a dans la Parole des expressions et des promesses qui dépassent notre intelligence et notre perception naturelles. Nous ne pouvons pas les comprendre, parce que nos sens sont rattachés à la terre et que nous vivons dans le visible, alors qu’il s’agit de choses invisibles. Aussi longtemps que nous habiterons nos corps mortels, il nous faudra accepter de recevoir tout simplement et seulement par la foi, des vérités grandes et précieuses qui nous sont révélées dans le Saint Livre, sans les sonder, sans les comprendre souvent, et sans chercher à les expliquer ou à les développer en faisant travailler notre imagination.
Il en est ainsi de la promesse de Matt. 18 faite par le Seigneur Lui-même aux siens : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon Nom, je suis là au milieu d’eux ». Le Seigneur est là, invisible, et pourtant personnellement présent simultanément partout où les Siens sont réunis en son Nom. L’incrédule sourit et peut se moquer, mais la foi accepte et s’empare de cette promesse, précieuse entre toutes, sans chercher à la sonder. Le croyant jouit avec une reconnaissance infinie de cette présence bénie au milieu des deux ou trois réunis autour du Lui.
En quittant ses disciples, le Seigneur a promis d’être avec eux tous les jours (Matt. 28:20), c’est-à-dire de se tenir près d’eux en Esprit pour les encourager, les soutenir, les diriger. Il a promis aussi de faire sa demeure chez ceux qui gardent sa Parole (Jean 14:23), et nous avons certainement bien souvent fait individuellement l’expérience de sa fidélité en ce qui concerne ces promesses, mais la précieuse promesse de sa présence au milieu des deux ou trois assemblés en son Nom a un caractère différent, car il s’agit là de la présence réelle de sa sainte Personne elle-même au milieu des siens, sans que leurs yeux puissent le voir. Vérité que la foi saisit avec adoration, sans la comprendre.
Présence réelle, puisque le lieu même en est bien défini : c’est là où deux ou trois sont assemblés en son nom. Il n’est pas dit : dans telle ou telle chapelle, où des croyants se réunissent habituellement pour le culte et consacrée à cet effet, ni dans le local, réservé à l’Assemblée, où les réunions ont toujours lieu. La Parole est précise et ne permet en aucune manière de prétendre à la présence du Seigneur dans un tel local du seul fait qu’il est destiné ou réservé aux réunions.
Cette erreur est peut-être renforcée par le fait qu’on perd de vue qu’au temps des débuts de l’Église, en bien des endroits, si ce n’est en tous, l’Assemblée se réunissait dans les maisons de croyants et ne disposait pas, semble-t-il, d’un local spécialement affecté aux réunions. Si maintenant, faute généralement de place dans les maisons de frères, l’Assemblée se réunit le plus souvent, particulièrement dans les villes, dans un local spécial, gardons-nous d’attribuer une valeur ou un privilège quelconque à ce local. C’est par méconnaissance de cette vérité que nous avons vu à différentes reprises, des frères et des sœurs rester, en alléguant qu’ils y trouvaient la présence du Seigneur, en communion avec des assemblées dont nous avions dû nous séparer, dans lesquelles s’étaient infiltrées des fausses doctrines et dans lesquelles le Seigneur n’avait plus la première place.
Il ne suffit pas de prétendre être réunis en son nom pour qu’il en soit réellement ainsi, et cela nous oblige à bien considérer ce que signifie cette expression « en mon nom » qui constitue la seule condition nécessaire et suffisante, mise par le Seigneur Lui-même à sa présence. Dans le monde même, agir ou parler au nom de quelqu’un, à plus forte raison d’un souverain, c’est agir et parler à sa place, avec la certitude qu’il approuve les actes ou les paroles de son mandataire. N’en est-il pas de même ici ? Les deux ou trois assemblés ne peuvent être assurés de la présence du Seigneur que s’ils agissent et parlent avec sa pleine approbation, c’est-à-dire en conformité avec sa Parole, sous la dépendance et la direction de l’Esprit. Cela exclut naturellement tout rassemblement présidé par un homme, tout doué qu’il puisse être. Il est évident, en effet, que le Seigneur ne peut se trouver en seconde place dans une réunion de personnes assemblées autour d’un prédicateur, pour entendre de sa bouche des paroles d’exhortation, d’édification ou d’évangélisation qui peuvent d’ailleurs être excellentes.
Ce n’est donc pas, et il est nécessaire d’insister sur ce point,
parce que
nous
nous réunissons régulièrement dans un certain local, certains jours et à
certaines heures fixées, qui peuvent même être affichées à la porte, que nous
pouvons affirmer : le Seigneur est là au milieu de nous. Sa présence n’est
pas liée à nos habitudes et à notre horaire. Il faut pour qu’Il soit là que nos
cœurs soient réellement occupés de Lui, que notre piété ne soit pas de pure
forme, que nos prières, nos cantiques, nos paroles, sous la direction de
l’Esprit, répondent à la réalité de Sa présence. En résumé, pour qu’Il se
trouve, Lui,
au milieu de nous, il faut que nous
nous trouvions
autour de Lui
, dans une soumission
entière à sa Parole et sans qu’il y ait de l’interdit en nous.
Ainsi, une réunion autour de Lui constitue un immense privilège et procure à l’âme une joie profonde, la joie même qu’ont connue les onze et ceux qui étaient avec eux dans la chambre haute, lorsqu’au soir de la résurrection, le Seigneur s’est trouvé au milieu d’eux (Luc 24:41), mais cette joie ne doit pas être séparée du sentiment de notre responsabilité, grande aussi, car il s’agit d’une part de maintenir la sainteté qui sied à Sa maison (Ps. 93:5), et, d’autre part, du témoignage que nous avons à rendre.
Nous entendons parfois des personnes traiter de prétentieuse l’affirmation de la présence du Seigneur dans de telles réunions. Nous pouvons dire en pleine assurance qu’il n’en est rien, car nous avons non seulement le droit, mais le privilège de nous approprier toutes les promesses de la Parole.
Les disciples envoyés par le Seigneur pour préparer la Pâque ne savaient pas où aller pour répondre à ce désir de leur Maître (Luc 22:8). Ils n’ont pas été de maison en maison chercher un lieu convenable pour s’y rencontrer avec le Seigneur, comme le font tant de chrétiens qui vont de lieu de culte en lieu de culte, ou de chapelle en chapelle, pour cela. Pierre et Jean ont tout simplement demandé au Seigneur : « Où veux-tu que nous apprêtions la Pâque ? », et le Maître leur a donné des précisions telles qu’ils n’ont pu faire d’erreur. La ressource est la même encore pour ceux qui cherchent le lieu de la présence du Seigneur, aussi réelle qu’elle l’était alors, quoiqu’invisible. Il montrera sans erreur possible, à ceux qui le Lui demandent, le chemin pour se rendre à la grande chambre garnie où Il désire se rencontrer avec ses disciples.
Oui, là, Seigneur, ta présence se trouve,
Mettant le cœur en joie, en liberté,
Et, dans la paix, tout fidèle en éprouve
Et le pouvoir et la réalité.
ME 1948 p. 85
Qui a cru à ce que nous avons fait entendre, et à qui le bras de l’Éternel a-t-il été révélé ? Question sérieuse à laquelle le prophète ne répond pas, laissant au Seigneur lui-même le soin de le faire. « En ce temps-là », c’est-à-dire après qu’Il eut adressé des reproches aux villes dans lesquelles le plus grand nombre de ses miracles avaient été faits, parce qu’elles ne s’étaient pas repenties, après que le bras de l’Éternel se fut manifesté à son peuple et que ce peuple l’eut rejeté, « en ce temps-là », est-il dit, Jésus répondit et dit : « Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre, parce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et que tu les as révélées aux petits enfants » (Matt. 11:25). Réponse divine à la question du prophète. Les sages et les intelligents de ce monde ont lu ce chap. 53 d’Ésaïe et ne l’ont pas compris, mais « la sagesse de ses sages périra, et l’intelligence de ses intelligents se cachera » (És. 29:14). Dans sa grâce, le Seigneur a appelé à Lui les petits enfants, et c’est à eux qu’a été révélé « Christ, la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu » (1 Cor. 1:24). Contemplons-le donc quelques instants dans ce chapitre, comme de petits enfants.
Il montera devant lui comme un rejeton, et comme une racine sortant d’une terre aride. Terre aride et altérée, sans eau, sol sur lequel la malédiction a été prononcée à cause du péché de l’homme. Terre incapable de produire autre chose que des épines, ces épines dont les hommes ont couronné la tête sainte du Seigneur de gloire. Terre incapable de nourrir et de désaltérer. David, sur cette terre, avait désiré voir la force et la gloire de Dieu (Ps. 63:1-2). Il ne les y a pas vues, mais voilà que du tronc d’Isaï est sorti un rejeton et qu’une branche de ses racines a fructifié (És. 11:1). Celui qui est appelé la racine et la postérité de David (Apoc. 22:16), qui était avant David, le Roi éternel, et qui le restera à toujours, quoique maintenant encore Il soit rejeté, Celui dont le royaume n’est pas de ce monde, mais du ciel, a suivi sur la terre ce chemin qui part d’une crèche pour finir à la croix.
Il n’a ni forme, ni éclat. Quel éclat peut avoir aux yeux des hommes celui qui, étant en forme de Dieu, a pris la forme d’esclave (Phil. 2:6, 7) ? Il y eut des hommes qui, menés seuls à l’écart (Marc 9:2), virent sa gloire « comme d’un Fils unique de la part du Père » (Jean 1:14). Mais de sa gloire morale qui brillait, les foules qui l’entouraient n’ont rien distingué, parce qu’il n’y avait pas d’apparence en Lui pour nous le faire désirer. Vers qui avait été tourné autrefois tout le désir d’Israël (1 Sam. 9:20) ? Vers un homme plus beau qu’aucun des fils d’Israël, plus grand que tout le peuple, depuis les épaules en haut (1 Sam. 9:2), vers Saül, un homme désobéissant que Dieu a rejeté. Lorsque l’Homme parfaitement obéissant, venu non pas pour être servi, mais pour servir, a été manifesté, ceux même qui ont été au bénéfice de ses bienfaits, loin de le désirer, « le prièrent de se retirer de leur territoire » (Matt. 8:34).
Il est méprisé et délaissé des hommes. « Il vint chez soi ; et les siens ne l’ont pas reçu » (Jean 1:11). Au commencement du chapitre 6 de l’évangile de Jean, nous voyons une grande foule qui le suivait, ayant vu les miracles qu’il faisait, et dans sa grâce il a rassasié cette foule, mais à la fin du même chapitre, il n’a plus que les douze avec Lui, auxquels il doit demander : « Et vous, voulez-vous aussi vous en aller ? ». Et de ces mêmes douze, l’un était un diable et les autres s’en sont allés plus tard : « Alors tous les disciples le laissèrent et s’enfuirent » (Matt. 26:56).
Homme de douleurs, et sachant ce que c’est que la langueur. C’est ainsi que nous le montrent tant de psaumes. Il a connu les souffrances pendant toute sa vie, lorsqu’il traversait, Lui le saint et le juste, un monde dans lequel régnaient le péché et la mort, les souffrances en présence de la haine de l’homme contre Dieu. Il a su ce que c’était que la langueur, une douleur qui dure, qui a duré jusqu’à la croix. Il a été l’Homme de douleurs à Gethsémané, lorsque sa sueur devint comme des grumeaux de sang découlant en terre, dans l’agonie du combat. Il a été l’Homme de douleurs à la croix lorsque son Dieu même l’a abandonné. Douleurs physiques, douleurs morales, il a tout enduré pour nous.
Parce que ses souffrances ont été marquées sur son visage, défait plus que celui d’aucun homme, ceux mêmes pour lesquels il les a endurées volontairement se sont détournés de Lui comme d’un objet d’horreur et de dégoût ; comme de quelqu’un de qui on cache sa face, de « celui que la nation abhorre » (És. 49:7).
Il est méprisé, et nous n’avons eu pour lui aucune estime. C’est de nuit, pour ne pas compromettre sa réputation, que Nicodème va trouver le Seigneur méprisé. Et lorsqu’un pharisien le reçoit à sa table, il ne lui rend même pas les honneurs qui étaient d’usage envers les plus humbles, il ne lui donne pas d’eau pour se laver les pieds (Luc 7:35-50). Tel est le mépris dans lequel a été tenu le Seigneur de gloire.
Certainement Lui a porté nos langueurs et s’est chargé de nos douleurs, non pas seulement quand il effectuait l’œuvre expiatoire sur la croix, mais tout le long de son chemin. On lui apporta beaucoup de démoniaques ; et il chassa les esprits par une parole, et guérit tous ceux qui se portaient mal : en sorte que fût accompli ce qui a été dit par Ésaïe le prophète, disant : « Lui-même a pris nos langueurs, et a porté nos maladies » (Matt. 8:16-17). Ses compassions sont restées les mêmes, elles sont infinies et éternelles et elles s’adressent à nous maintenant. « Car nous n’avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse sympathiser à nos infirmités, mais nous en avons un qui a été tenté en toutes choses comme nous, à part le péché. Approchons-nous donc avec confiance du trône de la grâce, afin que nous recevions miséricorde et que nous trouvions grâce pour avoir du secours au moment opportun » (Héb. 4:15-16).
Et nous, nous l’avons estimé battu, frappé de Dieu, et affligé. Les hommes ont jeté un défi à Dieu, lorsque, se moquant du Seigneur cloué sur la croix, ils disaient : « Il s’est confié en Dieu, qu’il le délivre maintenant, s’il tient à lui ; car il a dit : Je suis Fils de Dieu. Et les brigands aussi qui avaient été crucifiés avec lui l’insultaient de la même manière » (Matt. 27:43-44). Et ceux même qui ne l’ont pas expressément provoqué et insulté, devant son supplice et sa mort l’ont tenu pour l’objet du châtiment de Dieu. « Mais il a été blessé pour nos transgressions, il a été meurtri pour nos iniquités ». Nos transgressions ont été éloignées de nous à la croix autant que l’orient est éloigné de l’occident (Ps. 103:12). Pour cela il a été blessé : « et on lui dira : Quelles sont ces blessures à tes mains ? Et il dira : Celles dont j’ai été blessé dans la maison de mes amis » (Zach. 13:6). Il a été meurtri pour nos iniquités, ces iniquités dont il a dû dire : « mes iniquités m’ont atteint, et je ne puis les regarder ; elles sont plus nombreuses que les cheveux de ma tête et mon cœur m’a abandonné » (Ps. 40:12).
Ah ! notre iniquité fit peser sur ta tête
Un fardeau de douleurs indiciblement lourd,
Mais maintenant, en paix, nous célébrons la fête
Qui nous rappelle ton amour.
Le châtiment de notre paix a été sur lui, et par ses meurtrissures nous sommes guéris. L’homme s’est révolté contre Dieu et « il n’y a pas de paix, dit mon Dieu, pour les méchants » (És. 57:21). Aucun homme qui ne possède pas le Sauveur ne peut dire qu’il possède la paix, « car c’est lui qui est notre paix » (Éph. 2:14). « Et il est venu, et a annoncé la bonne nouvelle de la paix à vous qui étiez loin et la bonne nouvelle de la paix à ceux qui étaient près » (Éph. 2:17). Nous avons la paix avec Dieu, et nous possédons une paix que personne ne peut nous enlever, une paix qui est celle de Dieu lui-même et qui surpasse toute intelligence (Phil. 4:7). Mais pour nous l’acquérir il a fallu qu’il en portât le châtiment. « Par ses meurtrissures nous sommes guéris ».
Nous avons tous été errants comme des brebis. « Et voyant les foules, il fut ému de compassion pour elles, parce qu’ils étaient las et dispersés, comme des brebis qui n’ont pas de berger » (Matt. 9:36). Des brebis, des êtres sans défense, incapables de se conduire et de se diriger lorsqu’ils sont abandonnés à eux-mêmes, toujours en danger lorsque le berger n’est pas là. Las et dispersés : c’était là notre condition à tous, cherchant un chemin de salut. Nous nous sommes tournés chacun vers son propre chemin, un chemin de propre volonté qui nous éloignait toujours davantage de Lui. Et il est venu, Celui qui est le bon berger ; il a rassemblé ses brebis et les a conduites dans de verts pâturages, il les a menées à des eaux paisibles. C’est Lui qui a cherché ses brebis, souvent bien loin, et qui, tendrement, les a fait entrer dans son troupeau. Mais pour les acquérir l’Éternel a fait tomber sur Lui l’iniquité de nous tous. Si nous faisons partie de ce seul troupeau de ses bienheureux rachetés, c’est parce que Lui, l’agneau divin, a suivi un chemin qui n’était pas son propre chemin, mais le chemin douloureux qui l’a conduit à la croix du Calvaire.
Il a été opprimé et affligé. Et « il commença à être attristé et fort angoissé. Alors il leur dit : Mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort » (Matt. 26:37-38). Et il n’a pas ouvert sa bouche. « Et le souverain sacrificateur se levant lui dit : Ne réponds-tu rien ? De quoi ceux-ci témoignent-ils contre toi ? Mais Jésus garda le silence » (Matt. 26:62). Puis Il a été amené comme un agneau à la boucherie, et a été comme une brebis muette devant ceux qui la tondent ; et il n’a pas ouvert sa bouche. « Alors ils lui crachèrent au visage et lui donnèrent des soufflets ; et quelques-uns le frappèrent, disant : Prophétise-nous, Christ, qui est celui qui t’a frappé » (Matt. 26:67-68). Et enfin devant Pilate, accusé par les principaux sacrificateurs et les anciens « il ne répondit rien » (Matt. 27:12).
Mais la délivrance est venue, il est ôté de l’angoisse et du jugement, et sa génération, qui la racontera ? Car il a été retranché de la terre des vivants. Sa génération n’est pas une génération terrestre, sa famille, composée de tous ceux qui comme l’Éthiopien de la cour de Candace ont reçu cette parole, n’est pas terrestre, mais céleste, car « à tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu, savoir à ceux qui croient en son nom » (Jean 1:12).
Mais il plut à l’Éternel de le meurtrir. Il lui plut, mystère insondable ! Car comment sonder l’amour de Dieu qui l’a fait donner volontairement son Fils lui-même et, sur la croix, l’a soumis à la souffrance. Mais la récompense glorieuse est là : Celui qui a livré son âme en sacrifice pour le péché, Celui qui a parfaitement répondu aux exigences de la justice de Dieu, Celui qui nous a aimés jusqu’à la mort et à la mort de la croix, se reposera dans son amour (Soph. 3:17) parce que toute la plénitude des bénédictions qu’il s’est proposée envers les siens sera atteinte, et son repos sera gloire (És. 11:10), non pas seulement pendant le règne de mille ans, mais pendant l’éternité. Il verra du fruit du travail de son âme et sera satisfait.
Toi-même tu verras ce que ton cœur réclame :
De ton œuvre à la croix le fruit mûr et parfait.
Tu jouiras, Seigneur, du travail de ton âme,
Et ton amour divin en sera satisfait !
ME 1953 p. 150
« Je suis un homme qui laboure la terre » (Zach. 13:5). Il a été un homme au milieu des hommes. Il a partagé avec les hommes le châtiment que l’Éternel avait prononcé sur Adam coupable de désobéissance : « Maudit est le sol à cause de toi ; tu en mangeras en travaillant péniblement tous les jours de ta vie » (Gen. 3:17). Un homme que son apparence ne permettait pas de distinguer de tous ceux qui l’entouraient (És. 53:2), sauf peut-être que son visage était défait plus que celui d’aucun homme. Un homme que personne ne connaissait, mêlé à la foule des pauvres et des misérables qui descendaient au Jourdain pour se faire baptiser. Jean lui-même ne l’eût pas reconnu, si Celui qui l’avait envoyé baptiser ne lui eût dit : « Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre, et demeurer sur lui, c’est celui-là qui baptise de l’Esprit Saint. Et moi, j’ai vu et j’ai rendu témoignage que celui-ci est le Fils de Dieu » (Jean 1:33-34). Un homme souffrant sur le dos duquel des laboureurs ont tracé leurs longs sillons (Ps. 129:3), fatigué, ayant faim, ayant soif, lui qui avait créé les sources d’eau. Un homme abaissé au point de dépendre d’une femme pécheresse pour avoir un peu d’eau à boire. Un homme riche de toutes les richesses du ciel et de la terre, qui a vécu dans la pauvreté afin que par sa pauvreté nous fussions enrichis. Un homme qui n’a trouvé qu’une étable pour y naître et qui n’avait pas un lieu où reposer sa tête. Un homme pauvre parmi les pauvres, un homme humilié parmi les humbles. Mais Il est descendu plus bas.
Non pas seulement un homme, mais l’homme qui, bien que l’Éternel l’ait appelé son compagnon, a vu se réveiller contre lui l’épée de l’Éternel (Zach. 13:7). Et cet homme est sorti portant sa croix, couronné d’épines et vêtu par dérision d’un vêtement de pourpre. Pilate l’a présenté aux Juifs en leur disant : « Voici l’homme ». Voici celui qui a subi seul le jugement que l’homme pécheur avait mérité. Voici l’homme qui a représenté l’humanité entière sous le jugement et dans la mort.
« L’homme parfait, le Fils du Dieu saint, du Dieu fort,
Traversa l’abandon, la colère et la mort. »
Il a pu dire : « Je suis l’homme (non pas un homme) qui ai vu l’affliction par la verge de sa fureur. Il m’a conduit et amené dans les ténèbres et non dans la lumière. Certes c’est contre moi qu’il a tout le jour tourné et retourné sa main » (Lam. 3:1-3). Il a plu à l’Éternel de le meurtrir, il l’a soumis à la souffrance. Aucun autre homme que Lui, l’homme parfait, n’a enduré ces choses de la part de Dieu. Il est descendu encore plus bas :
« Mais moi je suis un ver et non point un homme »
Nous connaissons tous le Psaume 22, mais nous sommes-nous arrêtés à ce verset ? Un ver, l’animal le plus méprisé qui soit, dont on se détourne avec dégoût, que l’on écarte avec horreur. L’Ecriture seule peut employer une expression pareille pour parler de Lui. Plus bas que nous ne sommes, plus bas qu’un homme. L’opprobre des hommes. C’est là la place que le Seigneur de gloire a prise. Mais plus Il s’est abaissé, plus a brillé sa gloire. « Dans la honte a brillé ta gloire » ! Méditons et adorons.
Et pourtant ce n’est pas encore là le fond de son abaissement :
« Comme Moïse éleva le serpent dans le désert,
ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé »
Un serpent dans le désert. Un ver n’est que méprisé et provoque le dégoût, un serpent est craint et provoque la terreur. Un serpent, image et personnification du péché. Lui le Saint et le Juste, traité comme le péché. « Celui qui n’a pas connu le péché, il l’a fait péché pour nous » (2 Cor. 5:21). Jugé comme le péché même et subissant la croix comme tel. Qui pourra sonder ce que cela a représenté pour Lui ? Dieu son Père détournant son regard de Lui, parce qu’ayant les yeux trop purs pour voir le mal, il ne pouvait les diriger sur Celui qui avait été « fait péché ». Mystère profond, mystère insondable de son abaissement, mais mystère de l’amour puisque c’est son amour pour nous qui l’a fait descendre et s’abaisser jusqu’à prendre cette place. Et parce qu’il s’est abaissé lui-même,… « Dieu l’a haut élevé et lui a donné un nom au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus se ploie tout genou des êtres célestes, et terrestres, et infernaux, et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père » (Phil. 2:9-11).
Bientôt nous verrons dans la gloire celui qui pour nous s’est anéanti lui-même.
Ce grand amour qui s’humilie,
Plus bas encore est descendu :
Le Fils de l’homme offre sa vie
Et meurt pour un monde perdu !
Quel encens rare et sans mélange
T’offriraient les tiens en retour ?
Le parfum de notre louange
N’est-il pas, Jésus, ton amour ?
ME 1969 p. 85
L’apôtre Paul s’était proposé de rejoindre Timothée. « Je t’écris ces choses ― lui écrit-il ― espérant me rendre bientôt auprès de toi ; mais, si je tarde, ― afin que tu saches comment il faut se conduire dans la maison de Dieu ». Timothée ne devait pas attendre la venue de Paul pour être instruit sur la manière de se conduire dans la Maison de Dieu. Pour nous, ce n’est pas l’apôtre Paul que nous attendons ; c’est le Seigneur lui-même ! Il va venir et, s’il attend encore parce que le temps de sa patience n’est pas écoulé, la Parole est là en son absence pour nous enseigner de quelle manière nous avons à nous conduire dans la Maison de Dieu.
De quelle Maison de Dieu s’agit-il ? Pour les Israélites, le temple était la Maison de Dieu. Il n’existe plus, mais il y a aujourd’hui dans ce monde une autre maison qui est appelée la Maison de Dieu. C’est l’Assemblée. Elle est constituée de tous les croyants, non seulement des quelques-uns qui se rassemblent ici ou là, mais de tous les croyants où qu’ils se trouvent, de tous ceux qui sont sauvés et qui constituent ensemble cette Maison dans laquelle Dieu habite. Elle est appelée l’Assemblée du Dieu vivant. Dans ce monde le Dieu vivant ne se trouve que dans l’Assemblée. L’humanité tout entière gît dans la mort. Celle-ci est entrée dans le monde avec la désobéissance. Mais Dieu est vivant ; Il a sa Maison et cette Maison c’est l’Assemblée dont la Parole nous déclare qu’elle est la colonne et le soutien de la vérité. Il ne nous est pas dit qu’elle devrait être la colonne et le soutien de la vérité, mais qu’elle l’est. Et si nous ne réalisions plus ce qui est dit d’elle, à savoir qu’elle est le soutien de la vérité, nous cesserions aussi collectivement de porter les caractères de l’Assemblée de Dieu. Cette vérité divine, il faut la connaître pour la soutenir, et c’est la responsabilité que nous avons. Le rôle d’une colonne est de mettre quelque chose en évidence. La vérité nous a été confiée, et nous avons à la tenir bien haut sur la colonne, à la soutenir et à la défendre. Il ne s’agit pas d’une petite chose laissée à notre bon vouloir. Dieu nous a fait l’honneur de ce dépôt. Nous avons la Parole ; notre responsabilité est donc de la maintenir sur sa colonne, de ne pas la dissimuler comme l’homme de la parabole qui avait caché son talent dans la terre.
Quelle est cette vérité ? Le verset 16 la renferme tout entière. La vérité c’est Christ. Il est la Vérité et ce verset 16 nous Le présente d’une manière merveilleuse : Dieu manifesté en chair, le Fils de Dieu, Dieu Lui-même venu dans ce monde comme un homme, voilà la vérité, voilà ce que nous avons à présenter. Et il est dit que « le mystère de la piété est grand ». Il est question de beaucoup de mystères dans la Parole : ainsi le mystère de l’Assemblée (Éph. 3:3), celui de la venue du Seigneur (1 Cor. 15:51), celui de la foi au v. 9 de notre chapitre. D’autres mystères sont encore mentionnés tout au long des épîtres, mais ce sont des mystères révélés ; alors qu’on a pu dire que ce mystère-là, celui de la piété, celui de la Personne même de Christ, ce mystère du Fils de Dieu devenant homme, est si grand que nous ne pouvons le comprendre et que nous ne le comprendrons jamais. La Parole a été vue en Christ au milieu des hommes. En Lui se trouvait toute la plénitude de Dieu manifestée dans cette Personne, et cependant il n’y avait rien en Lui qui nous le fasse désirer. Il est appelé le Pauvre. Il se trouvait au milieu des humbles, Lui, le Fils de Dieu par qui toutes choses avaient été créées, et la seule chose qu’on pouvait dire de son apparence était celle-ci : « Son visage était défait plus que celui d’aucun homme » (És. 52:14). Celui dont le visage était marqué par les souffrances, c’est Lui qui est venu établir les relations de l’homme avec Dieu. Par Lui nous avons affaire avec Dieu ; en Lui Dieu est devenu notre Dieu : voilà le mystère de la piété. C’est une vie qui est en relation avec Dieu par Christ. Comprendrons-nous jamais comment et jusqu’où a été l’abaissement du Seigneur ? Il a été l’homme de douleurs. Non seulement un homme, mais l’homme de douleurs. Lui seul est descendu plus bas que nous n’étions pour pouvoir nous élever et nous faire remonter du bourbier dans lequel nous étions enfoncés. Le mystère de la piété n’est-il pas grand ? Nous avons l’habitude de ces choses, nous parlons facilement du Seigneur Jésus venu dans ce monde ; mais nous entrons peu dans les profondeurs et la grandeur de ce mystère que nous ne pouvons pas sonder, mais adorer : Dieu manifesté en chair, Dieu fait homme. Les hommes ont toujours désiré voir Dieu. Combien d’incrédules demandent : Montrez-moi Dieu et je croirai. C’est déjà de la prétention de penser que nous pouvons voir Celui qui remplit les cieux ! Et pourtant Dieu s’est fait voir des hommes ; il a en quelque sorte répondu à ce désir des hommes. Ils ont pu voir Dieu en Christ. Toutefois pas de la manière qu’ils s’y seraient attendus. Il ne leur est pas apparu dans un palais, mais dans une étable. Son trône a été une croix. Voilà ce que les hommes ont vu et aussi ce qu’ils ont fait de Dieu Lui-même qui s’était fait homme, « Dieu manifesté en chair », est-il écrit. Si Dieu est invisible, en Christ les hommes ont pu le voir, le toucher, et ils lui ont fait « tout ce qu’ils ont voulu ».
Si Dieu a été fait homme, l’homme Christ Jésus était Dieu. La voix même de Dieu s’est fait entendre des cieux pour rendre témoignage : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé » (Matt. 3:17). Celui qui a été appelé le Pauvre a été appelé aussi le Juste. Il était le seul en qui rien n’était contraire à la perfection de Dieu lui-même ; et cependant il était semblable à nous à part le péché. Le péché ne pouvait l’atteindre. Il était le Juste, et malgré cela les hommes ne l’ont pas accepté. Le centurion, en voyant mourir Jésus à la croix, a déclaré : « En vérité cet homme était juste » (Luc 23:47). Et le même centurion en Matt. 27:54 peut ajouter : « Certainement celui-ci était Fils de Dieu ».Dans toute sa vie il a été justifié en Esprit. Le Lévitique nous offre une belle image de cette vie parfaite dans le sacrifice du ch. 2, celui de l’offrande de gâteau. Ce sacrifice devait être pétri à l’huile, et c’est ce que nous trouvons tout le long de la vie du Seigneur. L’évangile de Luc nous présente Jésus comme le Fils de l’homme, et nous y voyons tout spécialement l’Esprit justifier en Lui la perfection de son humanité.
Les hommes l’ont vu, mais les anges aussi l’ont contemplé. Quel spectacle pour eux ! Dans le ch. 6 de son livre, Ésaïe voyait le ciel ouvert et le Seigneur sur un trône haut et élevé (v. 2, 3). Des séraphins se tenaient au-dessus de Lui. Ils ne pouvaient pas considérer la gloire de leur Dieu, mais se voilaient la face en sa présence. Les anges ont vu Celui qu’ils avaient glorifié dans ces paroles : « Saint, saint, saint, est l’Éternel des armées ». Tel est le témoignage qui nous est donné en Luc : les anges annonçant sa naissance aux bergers (Luc 2:10-14). Nous sommes admis à y entendre les louanges de ces anges pour lesquels le mystère était aussi un grand mystère. Ceux même qui se voilaient la face dans le ciel en présence de leur Dieu, le contemplaient dans une crèche comme un petit enfant. Pourquoi ? Pour accomplir cette œuvre de salut en vue de laquelle le Seigneur était venu dans ce monde. À plusieurs reprises il est question des anges dans Luc, et en particulier chaque fois que nous voyons le Seigneur dans son plus grand abaissement. À Gethsémané un ange vint pour fortifier le Seigneur dans l’angoisse de son combat, afin que le vase humain ne soit pas brisé. Un ange vint du ciel pour fortifier celui qui était son Maître et son Dieu ! Au jardin de la résurrection, ce sont encore deux anges qui ont témoigné de la sortie du tombeau du Seigneur. « Il a été vu des anges ».
Ensuite il a été prêché parmi les nations. Quelle grâce ! Venu comme le Messie pour son peuple, celui-ci n’a pas voulu de Lui. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être des enfants de Dieu (Jean 1:11, 12). Il n’y avait aucune promesse faite en dehors du peuple d’Israël. Nous autres, gens des nations, n’avions aucun droit. Eh bien, maintenant le mystère a été prêché parmi les nations. Pendant que dure le jour de la grâce, ce grand salut est prêché parmi les nations. Celui qui est venu dans ce monde, comme un homme, a été annoncé et il l’est encore maintenant.
Nous n’avons pas en nous-mêmes la capacité de croire. La foi est un don de Dieu. Le salut que nous possédons nous vient de Lui : nous l’avons reçu. Considérant ma propre histoire, combien de fois n’ai-je pas résisté aux appels du Seigneur jusqu’à ce qu’il me trouve ! Mais, Dieu soit béni, cette foi est aujourd’hui la part de tous ceux qui ont répondu à son appel.
Il a été cru au monde, mais aussi élevé dans la gloire. Tel est le dernier acte de ce mystère. L’homme Christ Jésus est ressuscité d’entre les morts et se trouve maintenant dans le ciel comme homme. Il est là, les prémices de la résurrection, et nous le rejoindrons dans la gloire. Il a été Dieu sur la terre et il est maintenant homme dans le ciel. Oui, il y a un homme dans le ciel : le Seigneur Jésus Christ, qui nous a fait connaître son touchant désir à notre sujet : « afin qu’ils voient ma gloire » (Jean 17:24). Le voir, être avec Lui, partager sa gloire. Voilà ce que nous garantit sa présence dans le ciel. On l’a dit souvent, la Parole nous parle peu du ciel, du paradis, mais il y a une chose qu’elle nous en dit et qui est essentielle : le Seigneur s’y trouve. Il déclare au brigand : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis ». C’est ce qui a rempli de joie ce pauvre brigand. Avec Lui ! Chaque fois que le Seigneur parle de sa venue pour nous chercher et nous introduire dans le ciel, ce n’est pas de la beauté du ciel qu’il est question, mais de Sa présence. Elevé dans la gloire, l’homme Christ Jésus est là. Il est allé pour nous préparer une place dans la gloire où il est Lui-même. Dieu lui a déclaré : « Assieds-toi à ma droite… » (Ps. 110:1). C’est là que le Seigneur se trouve maintenant, c’est là qu’Etienne l’a contemplé. Il a vu le ciel ouvert, il a vu le Seigneur dans la gloire, prêt à revenir si les hommes avaient accepté le témoignage des apôtres par le Saint Esprit. Nous L’y verrons, avec sur sa tête plusieurs diadèmes correspondant chacun à une gloire différence acquise par Lui dans ce monde.
Que le Seigneur nous donne de l’avoir Lui-même toujours devant nos yeux. Nous ne pouvons pas sonder le mystère de son humanité. Mais il s’agit moins de sonder ce mystère que de l’adorer.
M.E. 1965 p. 7
« Tous ceux de sa connaissance, et des femmes qui l’avaient accompagné depuis la Galilée, se tenaient loin, regardant ces choses » (Luc 23:49). Ces choses, c’est le Seigneur couronné d’épines, en butte au mépris et aux injures des hommes, cloué sur le bois maudit de la croix, entre deux malfaiteurs, et soumis là, par Dieu Lui-même, à la souffrance. Ces choses, c’est l’Agneau de Dieu offert en sacrifice pour le péché, c’est le Fils de l’homme portant sur sa tête sainte tout le poids des transgressions des hommes.
Tous les siens, ceux qui l’ont accompagné dans son chemin, se tiennent loin, contemplant cette scène unique dans l’histoire du monde, incapables cependant d’en sonder la profondeur et d’en saisir la solennité. Ils sont muets devant les souffrances indicibles que traverse leur Sauveur bien-aimé et qu’aucun homme ne peut partager avec Lui. Il est seul sur la croix, buvant la coupe amère. Son Dieu même a dû détourner son regard de Lui, le Fils de son amour. Nous restons loin, comme ses disciples, mais sans cependant perdre de vue Celui qui a été élevé de la terre, dans la sainte crainte de faire comme les hommes de Beth-Shémesh (1 Sam. 6:19) qui, poussés par la curiosité, ont regardé ce qui devait rester caché dans l’intérieur de l’arche. Dieu seul a pu discerner toutes les perfections de sa Personne et la profondeur de ses souffrances. Notre place à nous est à genoux, à la distance qu’impose le plus profond et le plus saint respect. Cette distance est représentée typiquement par les deux mille coudées qui séparaient l’arche portée par les sacrificateurs, du peuple marchant vers le Jourdain (Jos. 3:4). Ensuite, les eaux arrêtées, les sacrificateurs portant l’arche stationnent « de pied ferme sur le sec, au milieu du Jourdain ; et tout Israël passa à sec », par le lieu même où se tenait alors l’arche.
On a souvent cherché à analyser les souffrances physiques du Seigneur de gloire ; gardons-nous de le faire par curiosité ou même par sentimentalité. Ce que la Parole nous en dit, dans une sainte sobriété, suffit pour l’adoration.
Si l’évangile de Luc, l’évangile du Fils de l’homme, nous parle des souffrances qu’Il a endurées à Gethsémané, puis à Golgotha, des souffrances que les disciples, et nous avec eux, sommes appelés à contempler de loin sans pouvoir y entrer, l’évangile de Jean, pour sa part, nous met en présence du Fils de Dieu, accomplissant dans le monde son ministère d’amour ; nous ne nous trouvons plus devant le sacrifice pour le péché, mais bien devant l’holocauste de bonne odeur à l’Éternel. Alors, son service étant terminé, Il peut ouvrir son cœur à Jean et à sa mère pour confier cette dernière au disciple qu’Il aimait. Ce n’est pas de loin qu’Il s’adresse à eux, ils sont tout près de Lui. C’est là aussi qu’est notre place et qu’Il veut nous avoir, dans la contemplation, non plus de ses souffrances, mais de son amour.
M.E. 1966 p. 197
Dans trois circonstances différentes rapportées dans l’évangile de Jean, le Seigneur se présente à nous, troublé dans son esprit et dans son âme.
Nous trouvons cette expression pour la première fois au ch. 11:33, à l’occasion de la mort de Lazare. Le Seigneur a rejoint à Béthanie les sœurs de celui qu’Il a appelé son ami, et là, devant le tombeau de Lazare, la Parole nous montre Jésus pleurant avec ceux qui pleurent et, en même temps, troublé dans son esprit.
Quelle était donc la cause de ses larmes ? Sympathie ? Certainement, car le cœur du Seigneur est toujours ému de compassion envers ceux qui sont dans la tristesse ; n’en avons-nous pas tous fait l’expérience lorsque nous avons passé par la vallée de Baca, la vallée de l’ombre de la mort ? Il s’est trouvé alors près de nous, sympathisant avec nous. Mais le trouble et le frémissement qui ont saisi son âme devant le sépulcre de Lazare ont eu encore une cause plus profonde que la compassion, plus profonde aussi que la perte de l’ami ; car Il savait en effet ce qu’Il allait faire. Il était conscient de la résurrection qu’Il allait opérer ; le frémissement et le trouble eussent donc été, semble-t-il, sans motifs.
Nous sommes habitués ― et notre esprit est de ce fait en quelque sorte endurci ― à la présence de la mort toujours proche de nous et au contact journalier que nous avons avec elle, car « ceux qui mènent deuil parcourent les rues » (Eccl. 12:5). Mais il n’en était pas de même pour le Seigneur, pour Celui qui, comme Dieu, ayant les yeux trop purs pour voir le mal, discernait dans la mort les gages du péché. Nous nous y habituons, mais le Seigneur, de par la sainteté de sa nature, ne pouvait s’y accoutumer comme nous ; il nous est impossible de comprendre combien cela a pesé sur Lui, le Saint et le Juste, de vivre chaque jour, et jour après jour, dans un monde souillé par le péché, de côtoyer sans cesse la mort, de mesurer le pouvoir qu’elle a sur l’homme et de sonder la misère de ce dernier.
Le trouble de son esprit au tombeau de Lazare est ainsi l’expression de la peine profonde, mêlée d’indignation, produite dans son âme à la vue de ce pouvoir exercé par la mort sur l’esprit de l’homme (J.N.D.) et manifesté là.
Si donc les larmes précieuses, répandues devant le tombeau et dont le Seigneur Lui-même a pu dire prophétiquement à Dieu : « Mets mes larmes dans tes vaisseaux » (Ps. 56:8), nous parlent de sympathie, elles manifestent en même temps le trouble profond de son âme sainte.
Comme le semeur du Ps. 126, le Seigneur a semé avec larmes et, si même Il a eu quelques courts instants de rafraîchissement, Il a dû dire cependant : « Mes larmes ont été mon pain jour et nuit » (Ps. 42:3). En présence de ces larmes et du trouble de son âme sainte, nous pouvons nous réjouir à la pensée de « la joie qui était devant Lui » pendant qu’Il traversait le monde, la joie dont Il jouit maintenant dans la gloire, après avoir vaincu la mort, son œuvre de grâce étant terminée.
Au chap. 12:27 de ce même évangile, nous entendons ces mots de la bouche même du Seigneur : « Maintenant mon âme est troublée ». La scène rapportée ici forme en quelque sorte le parallèle à la scène de Gethsémané qui ne se trouve pas mentionnée dans cet évangile ; elle en est l’émouvant raccourci. Le Seigneur, comme le grain de blé qui allait tomber en terre et dont Il vient de parler (v. 24) se place lui-même en présence de la coupe qui devait lui voiler la face de Dieu. Il voit devant lui le « bourbier fangeux » dont Il a parlé à l’avance au Ps. 40:2, dans lequel Il allait entrer. Nous mentionnons bien souvent ce bourbier pour nous réjouir d’en avoir été retirés, mais sans pouvoir sonder la terrible réalité qu’a été pour Lui le fait d’y être plongé. Il va subir de la part de Dieu tous les tourments du Ps. 22, qui a été appelé le psaume de Celui qui a été abandonné de Dieu. En présence de cette nuit profonde dans laquelle Il va entrer, en présence de ces trois heures sombres de la croix, nous entendons les paroles qu’Il a prononcées à Gethsémané dans sa détresse : « Mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort » (Matt. 26:38). Dans l’évangile de Jean ― et cette sobriété divine est bien en accord avec le caractère de l’évangile ― nous entendons cette seule parole qui nous fait quelque peu saisir ce qu’a été l’angoisse de son âme : « Maintenant mon âme est troublée », accompagnée de cette double demande : « Père, délivre-moi de cette heure », mais aussi : « Père, glorifie ton nom ».
Au ch. 13:21, nous trouvons pour la troisième fois l’expression du trouble qui a envahi l’esprit du Seigneur, et cela en présence de la trahison de Judas qui était l’un des douze. Un homme qu’Il avait appelé son « intime ami » (Ps. 41:9), son « conseiller », avec lequel Il avait eu « de douces communications » (Ps. 55:14), un homme auquel Il avait donné une marque spéciale de confiance en lui laissant la bourse. Il a vu cet homme se détacher de Lui, Il l’a vu vendre son Maître pour trente pièces d’argent, et il lui a fallu, dans la prière adressée à son Père (Jean 17:12), l’excepter du nombre de ses disciples bien-aimés sauvés par Lui de la perdition. Ce que cette exclusion lui a causé de tristesse amère, se traduit par ces seuls mots : « Jésus fut troublé dans son esprit ».
Comme nous venons de le voir, le Seigneur a été troublé dans son esprit à la vue du pouvoir de la mort sur l’esprit de l’homme ; Il a été troublé dans son âme devant les heures de ténèbres pendant lesquelles Il allait être abandonné de Dieu ; Il a été troublé aussi dans son esprit en annonçant aux siens la trahison de l’un d’eux ; mais jamais son cœur, siège de ses affections et de son amour, n’a été troublé. C’est bien là ce que la Parole nous fait entendre au ch. 13:1: « Or, avant la fête de Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue pour passer de ce monde au Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’à la fin ». L’amour du Seigneur, comme cela a été écrit, est un amour que la mort n’éteint pas et que la gloire n’arrête pas. Lorsque la grande foule est venue le saisir avec des épées et des bâtons pour ensuite le conduire au supplice, tous ses disciples l’ont abandonné, l’un d’eux même l’a renié, sans cependant que pour cela son cœur fût troublé. Et son amour pour eux est resté le même aussi après qu’Il fut passé de ce monde au Père pour prendre sa place sur son trône, couronné de gloire et d’honneur. Pas plus pour nous maintenant que pour ses disciples alors, son amour ne peut changer, cet amour que beaucoup d’eaux ne peuvent éteindre et que des fleuves ne peuvent submerger (Cant. 8:7).
Mais notre amour à nous peut, hélas, se refroidir, et la parole du Seigneur s’adresse maintenant à nous comme elle l’a été à ses disciples : « Que votre cœur ne soit pas troublé » (Jean 14:1). Il ne sera pas troublé si, les yeux fixés en avant sur Celui qui va nous introduire dans ces « plusieurs demeures » qu’Il a été préparer pour nous dans la maison du Père (14:2), nous gardons ses commandements, nous laissant enseigner par l’Esprit que le Père nous a envoyé (14 v. 15, 16), dans la pleine jouissance de la paix qu’Il nous a donnée, de sa paix qu’Il nous a laissée. Dans un chemin d’obéissance notre cœur ne sera ni troublé ni craintif (14:27) et nous réaliserons ce que nous chantons quelquefois :
« Qui troublerait leur confiance
Quand ils ont la ferme assurance
Que son amour ne change pas ? »
M.E. 1960 p. 10
Adorer Dieu, c’est Lui offrir ce qui Lui est dû. Mais l’homme naturel n’a rien à Lui offrir, car ce qui le caractérise, c’est la haine ; la Parole ne nous dit-elle pas, en effet, que nous sommes « haïssables, nous haïssant l’un l’autre » (Tite 3:3) ? Cela même nous rend inaptes à offrir à Dieu, qui est amour, rien d’acceptable. Les bonnes œuvres de l’homme en Adam, même les meilleures, ne sont que « les œuvres infructueuses des ténèbres » (Éph. 5:11). Impossible de les apporter à Celui qui est lumière.
Si l’homme naturel n’a rien à offrir à Dieu, l’homme en Christ, c’est-à-dire possédant la vie de Christ, a par contre quelque chose à Lui présenter ; ce n’est pas ce qu’il a fait mais bien ce qu’il a reçu, ce que Dieu Lui-même lui a donné. « Ce qui vient de ta main, nous te le donnons » (1 Chron. 29:14). Ce n’est donc qu’en apportant ce que nous avons reçu, sans y rien ajouter qui vienne de nous, que notre adoration sera acceptable.
La première fois qu’il est question d’adoration dans la Parole, c’est au chap. 22 de la Genèse : « Moi et l’enfant », dit Abraham, « nous irons jusque là et nous adorerons ». Et qu’apportait-il à l’Éternel ? Rien de moins que ce que Dieu lui avait donné, son unique fils bien-aimé.
« Que rendrai-je à l’Éternel pour tous les biens qu’il m’a faits ? » (Ps. 116:12), demande le psalmiste. Rendre ? Il ne peut que prendre « la coupe du salut », invoquer « le nom de l’Éternel » et acquitter ses vœux, c’est-à-dire adorer. Nous-mêmes, nous avons reçu plus que la coupe du salut puisque nous avons reçu un Sauveur, don inexprimable qui fait déborder de louange le cœur de Paul, et qui constitue le fondement même de notre adoration. Ce n’est que lorsque la femme samaritaine a connu le don de Dieu et su qui était Celui qui lui demandait à boire, qu’elle a pu saisir quelque chose de ce que doit et peut être la vraie adoration.
Le premier acte de l’Israélite qui s’approchait de l’Éternel consistait à prendre « les prémices de tous les fruits de la terre que tu tireras de ton pays que l’Éternel ton Dieu te donne » (Deut. 26:2). Nous aussi, pour être en mesure d’apporter, nous avons d’abord à saisir par la foi Celui qui est « les Prémices » (1 Cor. 15:23), Christ, et lorsque notre cœur, comme la corbeille de l’Israélite, sera rempli de Lui, jusqu’à en déborder, alors nous aurons, non pas seulement quelque chose, mais quelqu’un à présenter à Dieu comme l’objet de notre culte et de notre adoration.
Ce qui faisait bouillonner le cœur des fils de Coré (Ps. 45) c’était la contemplation de Celui qui est plus beau que les fils des hommes. Notre adoration consiste à faire monter vers Dieu le parfum de Celui qui fait ses délices, dans tout ce qu’Il a été, de ce qu’Il est, et de ce qu’Il sera pour Lui et pour nous. Nous nous contentons souvent de n’exalter que ce qu’Il est pour nous ― et certes nous ne le ferons jamais trop ― mais le culte le plus élevé trouve son expression dans le chap. 5 de l’Apocalypse par le chant du cantique nouveau, dans lequel l’accent est mis sur l’expression « pour Dieu ».
Le culte que nous rendrons dans le ciel ne sera que la continuation dans la perfection de cette adoration que nous avons le privilège immense de commencer sur la terre et qui est la seule partie éternelle de notre service. Il ne changera ni d’objet ni de caractère.
L’adoration est toujours basée sur un sacrifice. Il n’y a pas de culte sans le souvenir de l’Agneau offert une fois pour toutes sur l’autel de la croix. C’est pour cela que la célébration de la cène a tout naturellement sa place dans un service d’adoration et l’amène en quelque sorte à son point culminant. L’adoration ne va pas sans le rappel des souffrances de Celui qui a été cloué sur la croix et sans la contemplation des perfections de la Victime. Mieux nous le connaîtrons, « Lui et la puissance de sa résurrection et la communion de ses souffrances », plus notre culte sera élevé.
Les patriarches ont adoré Dieu sur la base de ce même sacrifice que Christ devait accomplir plus tard, mais qui était préfiguré par les sacrifices offerts sur les autels qu’ils ont dressés. Pour nous, qui avons l’immense privilège de connaître l’Agneau qui a été immolé, c’est sur son sacrifice qu’est fondée notre louange actuelle et éternelle.
L’adoration est en quelque sorte l’inverse de la prière, puisque par la prière nous nous adressons à Dieu pour demander, alors que dans l’adoration c’est pour apporter. Il ne faut donc pas confondre le culte avec une réunion de prières ; il est vrai cependant que nous pourrons être conduits par l’Esprit dans le culte à adresser aussi des prières à Dieu, qui y seront à leur place, sans toutefois en faire réellement partie et que, de même, dans une réunion de prières des expressions de louange jailliront tout naturellement de nos cœurs.
Le culte, ou service d’adoration, ne doit pas non plus être confondu comme c’est bien souvent le cas dans la chrétienté avec l’audition d’un prédicateur qui présente la Parole à ceux qui l’écoutent, croyants et incrédules. Réjouissons-nous que la Parole d’évangélisation et d’édification soit encore apportée au monde. Cependant une telle prédication n’a rien de commun avec le culte, car elle apporte à des hommes la Parole qui vient de Dieu, alors que l’adoration monte vers Lui, sous la conduite de l’Esprit, de l’ensemble des croyants et des croyants seulement. Il n’est pas concevable en effet qu’un incrédule participe à un véritable culte ; que pourrait-il apporter à Dieu s’il a refusé le Sauveur ?
Un croyant ne devrait jamais assister à un culte sans y participer, même en gardant le silence. L’adoration peut être exprimée soit par des actions de grâce rendues par tous et exprimées par un frère qui parle comme étant en quelque sorte la bouche de toute l’assemblée, soit par le chant de cantiques par lesquels tous ensemble d’une même voix expriment la louange. Elle peut aussi être réalisée dans un silence souvent plus éloquent que des paroles. Tout cela est bien différent d’un service religieux conduit par un homme, appelé par des hommes à présider ce qui dans la chrétienté professante est appelé un culte. Il peut arriver ainsi que, durant toute leur vie, dimanche après dimanche, des croyants appelés fidèles, aillent à l’église écouter un sermon sans avoir jamais réalisé ce qu’est le culte en esprit et en vérité.
Pour accomplir ce service d’adorateurs, des conditions sont nécessaires. « Approchons-nous avec un cœur vrai, en pleine assurance de foi, ayant les cœurs par aspersion purifiés d’une mauvaise conscience et le corps lavé d’eau pure » (Héb. 10:22). Lorsque l’Israélite s’approchait de l’Éternel (Deut. 26), il fallait en premier lieu qu’il fût entré dans le pays de Canaan, puis qu’il le possédât et y habitât. Il ne nous suffit donc pas, pour être à même de rendre culte, de connaître le Seigneur et de le posséder comme Sauveur, il faut encore habiter le pays, c’est-à-dire réaliser la communion avec Lui tous les jours de la vie et non pas seulement au moment du culte ou quelques heures auparavant. Cette communion ne sera réelle et ininterrompue que si nous pratiquons le jugement continuel de nous-mêmes. Nos corbeilles ne peuvent être remplies à la hâte le samedi seulement.
La manière dont nous avons à rendre culte est définie par deux mots « en esprit et en vérité » (Jean 4:24). En esprit, non pas seulement conduits par l’Esprit, mais aussi en dehors de toute forme matérielle, de toute tradition, et de tout ce qui fait apparaître l’homme dans la chair et qui n’a aucune place dans la présence du Seigneur. Et en vérité, c’est-à-dire dans une dépendance complète et absolue de la Parole qui est la Vérité et, par cela même, de Celui qui est le chemin, la Vérité et la vie. Impossible d’adorer, si nous avons dans nos cœurs un repli ténébreux que nous fermons à la lumière et si notre conscience est chargée. N’oublions pas non plus que, comme l’Israélite, nous ne pouvons offrir notre don sur l’autel, si notre frère a quelque chose contre nous.
Qui adorons-nous ? Ce n’est pas le Dieu de Sinaï devant lequel les Israélites tremblaient en se tenant loin. Ce n’est pas le Dieu de Garizim où les Samaritains ne savaient pas ce qu’ils adoraient. Ce n’est pas non plus l’Éternel qui avait été obligé de quitter sa maison à cause des infamies qui s’y commettaient (Éz. 10 et 11), c’est, comme le Seigneur l’enseigne à la Samaritaine, le Père ― révélé dans son Fils qui est l’expression de tout ce qu’Il est, Lumière et Amour ― cherchant des adorateurs parmi ses enfants. Il veut être connu d’eux dans cette douce relation de Père, et par cette connaissance Il forme des adorateurs. C’est ainsi que nous sommes rendus capables d’adorer le Père, parce qu’Il nous a aimés, certes, mais tout d’abord parce qu’Il est amour. De même qu’Il ne cherche pas l’adoration, mais des adorateurs, notre part n’est pas d’adorer les gloires de Dieu mais de l’adorer Lui-même, comme Père.
En même temps qu’elle s’adresse au Père, l’adoration ne peut pas ne pas avoir aussi le Fils pour objet. Il est le centre de la louange et le sera éternellement, ainsi que nous le voyons dans le chap. 5 de l’Apocalypse, comme l’Agneau au milieu du trône, et c’est par Lui que notre louange monte jusqu’au Père.
Quel est le lieu de l’adoration ? L’Israélite devait aller « au lieu que l’Éternel a choisi pour y faire habiter son nom » (Deut. 26:2). Ce lieu était caractérisé par la présence du « Sacrificateur qu’il y aura en ces jours-là ». Il en est de même maintenant pour nous. La place de la louange est le lieu de la présence du Seigneur, c’est donc, comme Il l’a dit Lui-même, là ou deux ou trois sont réunis en son nom. Mais, prenons-y garde, il ne suffit pas de dire que nous sommes réunis en son nom, ce doit être une réalité, le Seigneur ne peut sanctionner par sa présence une assemblée qui n’ait pas le caractère de la sainteté qui sied à sa maison et qui tolère dans son sein un mal moral ou doctrinal. Pour entrer dans les lieux saints (Héb. 10:19) il faut être sorti du camp (Héb. 13:13), et c’est sur l’autel d’or des lieux saints que nous pourrons « offrir sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent son nom ».
Il est dit « sans cesse ». L’adoration n’est pas limitée à l’adoration collective du culte du dimanche, bien que ce soit là qu’elle a son expression la plus élevée et la plus complète. Il y a une adoration individuelle qui devrait être continuelle car l’accès dans les lieux saints nous est toujours ouvert et, si nos cœurs sont vraiment occupés et remplis de la Personne du Seigneur, ils se répandront devant Lui en louange, exprimée ou silencieuse. Comme l’apôtre Paul, considérant la profondeur des richesses et de la sagesse et de la connaissance de Dieu, nous dirons : « À Lui soit la gloire éternellement ! Amen » (Rom. 11:36).