Table des matières :
1 - Premiers pas après la mort de Josué — Chapitre 1
2 - Déclin et chute du peuple d’Israël en Canaan — Juges 1:17-36 ; 2
3 - Les premiers libérateurs : Othniel, Éhud et Shamgar — Juges 3
4 - Barak et Débora — Juges 4 et 5
5 - Histoire de Gédéon — Juges 6-8
6 - Histoire d’Abimélec — Juges 8: 22-33 ; 9
7 - Histoire de Jephté — Juges 10-12
8 - Histoire de Samson — Juges 13-16
Bonne Nouvelle 1888 pages 7 à 14.
— D’où vient ce nom de livre des Juges ?
— Il est nommé ainsi parce qu’il renferme l’histoire des juges ou libérateurs qui affranchirent les Israélites de la domination de leurs ennemis. Ensuite, ils les jugeaient, c’est-à-dire qu’ils exerçaient parmi eux l’autorité suprême.
— Comment les Israélites, le peuple de Dieu, pouvaient-ils être ainsi assujettis à des nations étrangères ? C’est donc qu’ils avaient péché ?
— Oui, sans cela l’Éternel n’aurait pas permis que leurs ennemis soient plus forts qu’eux. Aussi longtemps que nos cœurs restent attachés au Seigneur, nous n’avons à craindre aucun ennemi. Tout le temps que vécurent Josué et les anciens qui avaient vu la grande œuvre que l’Éternel avait faite pour eux, les Israélites servirent l’Éternel. Mais ensuite, ils l’abandonnèrent et servirent les faux dieux des nations qui étaient autour d’eux et parmi eux. Pour les châtier, l’Éternel permit qu’ils soient assujettis à l’une ou l’autre de ces nations qui les opprimaient durement. Mais il ne les abandonna pas entièrement et quand, accablés par l’esclavage, ils se repentaient et imploraient son secours, Dieu suscitait un libérateur sous lequel ils secouaient le joug de leurs oppresseurs et jouissaient de quelque temps de repos. Le premier chapitre nous montre ce qui se passa immédiatement après la mort de Josué. C’était encore un temps de fidélité. Lis le premier verset.
— « Et il arriva, après la mort de Josué, que les fils d’Israël interrogèrent l’Éternel, disant : Qui de nous montera le premier contre le Cananéen, pour lui faire la guerre ? » (Juges 1:1).
— Les Israélites étaient décidés à combattre les nations qui n’avaient pas encore été dépossédées, et à se laisser conduire par l’Éternel. La décision du cœur pour Dieu et la dépendance de Lui sont les dispositions qui lui plaisent. Aussi lisons-nous plus loin que l’Éternel fut avec eux. La tribu de Juda fut désignée par l’Éternel pour combattre la première et, aidée par la tribu de Siméon dont le lot était près du sien, ils firent la guerre à Adoni-Bézek.
— Où demeuraient ces Cananéens ?
— Vers le sud de Jérusalem. Bézek était sans doute leur ville principale et Adoni-Bézek leur roi. Son nom signifie « seigneur de Bézek ». Il semble avoir été un puissant guerrier qui avait vaincu soixante-dix rois, et aussi un cruel tyran car, après les avoir faits prisonniers, il leur avait fait couper les pouces des mains et des pieds, et les obligeait, comme des chiens, à manger les restes sous sa table.
— Pourquoi les avait-il mutilés ainsi au lieu de les tuer tout de suite ?
— Peut-être pour les rendre incapables de porter les armes et pour jouir de son triomphe et montrer en eux des trophées de sa puissance.
— Quelle méchanceté !
— Oui, et tel est le cœur de l’homme dominé par Satan. On voit, hélas, bien des exemples semblables dans l’histoire. Rappelle-toi le traitement que Nébucadnetsar fit subir à Sédécias (2 Rois 25:7). Mais, quelle que fût la puissance d’Adoni-Bézek, l’Éternel le livra entre les mains de Juda et de Siméon. Ses armées furent vaincues. En vain voulut-il s’enfuir. Il fut pris et le sort qu’il avait infligé à ses captifs, il le subit à son tour.
— C’était un juste jugement de Dieu.
— Certainement. Et Adoni-Bézek le reconnut. « Comme j’ai fait », dit-il, « ainsi Dieu m’a rendu » (1:7). Cela ne peut-il pas nous faire espérer qu’il se repentît et que Dieu lui fit grâce ? Il mourut à Jérusalem où on l’avait amené.
— Jérusalem existait donc alors ?
— Déjà du temps d’Abraham, elle est mentionnée sous le nom de Salem (Genèse 14:18 ; Ps. 76:2). C’était la ville dont Melchisédec était le roi. Les descendants de Juda s’en étaient aussi emparés, mais ni eux, ni les descendants de Benjamin sur le territoire duquel elle se trouvait, ne purent déposséder les Jébusiens qui y habitaient et qui y occupaient une forteresse.
— S’ils avaient eu une plus grande confiance en l’Éternel, ils seraient parvenus à prendre la plus forte forteresse.
— Je le pense aussi. Il y avait déjà un déclin dans leur foi et, par conséquent, dans leur énergie. Ce qui nous rend forts contre Satan et le monde, c’est notre foi. L’apôtre Jean dit : « C’est ici la victoire qui a vaincu le monde, [savoir] notre foi. Qui est celui qui est victorieux du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ? » (1 Jean 5:4-5). Les descendants de Juda et Benjamin laissèrent donc ces Cananéens au cœur du pays. Ce ne fut que bien longtemps après que David, l’homme selon le cœur de Dieu détruisit cette dernière forteresse de l’ennemi (2 Sam. 5:6-9). Et dès lors Jérusalem devint la capitale du royaume, la ville du grand roi, où l’Éternel eut son temple (Ps. 48:2).
Après avoir pris Jérusalem, les enfants de Juda, Caleb à leur tête, s’emparèrent d’autres portions du pays et en particulier de Hébron, la ville des géants, comme nous l’avons vu. Ce fut à Hébron, ville des sacrificateurs, ville de refuge aussi, que David fut reconnu roi, et il y régna pendant sept ans (2 Sam. 2:1-3 ; 5:4). Ensuite les descendants de Juda prirent Kiriath-Sépher.
— Nous avons lu aussi dans le livre de Josué que Caleb donna sa fille Acsa en mariage à Othniel, son cousin, parce que c’est lui qui avait pris Kiriath-Sépher. Elle demanda à son père une bénédiction parce qu’elle n’avait reçu de lui que des terres exposées aux ardeurs du midi, et elle désirait une terre avec des sources d’eau. Et son père lui donna en abondance ce qu’elle demandait. C’est ainsi que Dieu, dans sa bonté, nous bénit et nous donne au-delà même de ce que nous demandons.
— Nous pouvons voir aussi dans ces sources d’eau jaillissantes, si précieuses après la traversée de l’aride désert, l’accomplissement de la promesse de l’Éternel souvent répétée : « L’Éternel, ton Dieu, te fait entrer dans un bon pays, un pays de ruisseaux d’eau, de sources, et d’eaux profondes, qui sourdent dans les vallées et dans les montagnes » (Deut. 8:7). L’Éternel donnait à son peuple des bénédictions terrestres, mais comment ne pas songer à ces bénédictions infiniment plus précieuses de la Canaan céleste dont parle le Seigneur ? Déjà, pour ici-bas, il dit : « Quiconque boit de cette eau-ci aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai, moi, n’aura plus soif à jamais ; mais l’eau que je lui donnerai, sera en lui une fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle » (Jean 4:13-14). C’est le Saint Esprit en nous qui nous fait jouir de l’amour de Dieu.
— Ces paroles du Seigneur Jésus rafraîchissent le cœur. Il dit également : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive » (Jean 7:37), et aussi : « À celui qui a soif, je donnerai, moi, gratuitement, de la fontaine de l’eau de la vie » (Apocalypse 21:6).
— Vois aussi dans ce même livre au chapitre 7 ce qui est promis à la multitude des sauvés de toutes les nations qui auront passé par la grande tribulation.
— « L’Agneau qui est au milieu du trône les paîtra et les conduira aux fontaines des eaux de la vie, et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux » (7:17). Comme cela réjouit le cœur et console ! Mais il y a aussi un verset en Apocalypse 22. C’est au verset 1 : « Il me montra un fleuve d’eau vive, éclatant comme du cristal, sortant du trône de Dieu et de l’Agneau ». C’est dans la Jérusalem céleste que Jean vit cela, n’est-ce pas ?
— Oui. Dans tous ces passages, il est question des bénédictions de paix, de repos dans la sainteté, la lumière, la gloire et l’amour dont le Saint Esprit fait jouir, auprès de Dieu, ceux qui sont sauvés. Maintenant, c’est par la foi sur la terre. Plus tard, ce sera dans le ciel. Continuons maintenant notre chapitre. Les enfants de Juda poursuivirent leurs combats, et comme ils obéissaient à l’Éternel, il fut avec eux de sorte que trois des principales villes des Philistins tombèrent en leur pouvoir. Mais, avant de mentionner cela, la parole de Dieu cite un fait important qui renferme une leçon pour nous. C’est ce qui se rapporte au Kénien. Lis le verset 16.
— « Et les fils du Kénien, beau-père de Moïse, étaient montés de la ville des palmiers, avec les fils de Juda, au désert de Juda, qui est au midi d’Arad ; et ils allèrent et habitèrent avec le peuple ». Mais le beau-père de Moïse était Jéthro, et il était sacrificateur de Madian.
— C’est vrai. Il se nommait aussi Rehuel, et il était de la tribu des Kéniens qui habitaient au pays des Madianites. Te rappelles-tu comment Moïse fit connaissance avec Jéthro ?
— Oui. Il vint en aide aux filles de Jéthro en abreuvant leurs troupeaux, et Jéthro lui donna l’hospitalité. Plus tard, Moïse épousa une de ses filles (Exode 2:15-22).
— Ce fut une bénédiction pour Jéthro d’avoir ainsi exercé l’hospitalité envers celui qui devait être un grand serviteur de Dieu, Hébreux 13:2. Dieu montra sa grâce envers ce gentil qui ne faisait pas partie du peuple de Dieu, car nous pouvons bien supposer que Moïse lui parla du vrai Dieu. Te rappelles-tu encore quelque chose de Jéthro et de sa famille ?
— Oui, il vint trouver Moïse au désert après avoir appris les grandes choses que l’Éternel avait faites à son peuple.
— En les entendant de la bouche de Moïse, Jéthro dit : « Maintenant je connais que l’Éternel est plus grand que tous les dieux » (Exode 18:11). Et il offrit des sacrifices à ce Dieu puissant. Jéthro apprit donc à connaître l’Éternel. Mais il y a encore un fait qui se rapporte à sa famille et qui nous apprend comment ses fils se trouvaient en Canaan avec les Israélites. En Nombres 10:29-32, nous voyons que Hobab, fils de Jéthro, se trouve avec les Israélites au moment où ils vont partir pour leur voyage à travers le désert. Moïse lui demande de venir avec eux parce que Hobab connaissait le désert et les lieux favorables pour les campements, et il lui promit qu’Israël lui ferait du bien.
— Comment connaissait-il si bien le désert ?
— Les Madianites étaient un peuple commerçant. Nous les voyons du temps de Joseph joints à une caravane d’Ismaélites, porter en Égypte des épices, du baume et de la myrrhe (Gen. 37:25-30) ; voyez Ésaïe 60:6. Hobab, qui avait vécu au milieu des Madianites, avait sans doute fait partie de ces caravanes. Il refusa d’abord à Moïse, mais celui-ci insista, lui promettant, s’il venait, qu’il participerait aux biens que l’Éternel ferait à Israël. Et nous voyons, par le passage de notre chapitre, qu’il céda aux instances de Moïse et accompagna les Israélites. Ses descendants, si ce n’est pas lui-même, montèrent avec les fils de Juda de la ville des palmiers, c’est-à-dire Jéricho, et ils habitèrent avec Israël. Les Kéniens eurent part à ses bénédictions, et nous les retrouvons à plusieurs reprises dans l’histoire du peuple de Dieu, et toujours dans des circonstances d’un grand intérêt. Ainsi, le bien fait à Moïse par le Kénien ne perdit pas sa récompense, et nous voyons la faveur de Dieu accompagner ses descendants. Une autre fois nous continuerons ce chapitre.
Bonne Nouvelle 1888 pages 23 à 28.
— Je suis étonnée de voir qu’un chapitre nous donne tant de leçons.
— C’est vrai. La parole de l’Éternel est d’une grande étendue et un trésor d’où l’on tire des choses nouvelles et des choses vieilles (Ps. 119:96, Matthieu 13:52). Nous trouverons d’autres leçons dans la suite de notre chapitre, mais elles sont humiliantes. Nous y voyons combien rapidement les Israélites se lassèrent de combattre, et comme leur foi défaillit. Déjà Juda n’avait pas dépossédé les habitants de la vallée parce qu’ils avaient des chariots de fer, et Benjamin n’avait pas chassé le Jébusien, ainsi que nous l’avons vu.
— Mais la maison de Joseph se montra courageuse et l’Éternel fut avec eux. Ils s’emparèrent de la ville de Béthel. Était-ce le même endroit où Jacob avait eu son songe ?
— Oui, cette ville s’appelait autrefois Luz, mais Jacob lui donna le nom de Béthel, ce qui veut dire : « maison de Dieu » (Gen. 28:19). C’est là que l’Éternel avait fait à Jacob la promesse de lui donner la terre où il était couché, et il l’accomplissait alors en livrant Béthel aux descendants de Joseph, car Dieu est fidèle. Mais du verset 27 jusqu’à la fin du chapitre, nous avons un tableau court mais bien triste du manque d’énergie des enfants d’Israël de quelque tribu que ce fût.
— En effet, Manassé ne dépossède pas les habitants du pays qui
lui était échu, et les Cananéens voulurent
y habiter et continuèrent d’y habiter au milieu de ceux des tribus d’Éphraïm,
de Zabulon, d’Aser et de Nephtali. Et même les Amorrhéens
repoussèrent ceux de la tribu de Dan dans les montagnes.
— Cela n’était pas selon la volonté de l’Éternel et provenait de ce que les Israélites oubliaient que l’Éternel était présent au milieu d’eux. S’ils y avaient pensé, cela les auraient rendus forts et, en même temps, leur aurait fait comprendre que la présence des Cananéens était une souillure dans la terre de l’Éternel. C’était un déshonneur jeté sur le nom de l’Éternel. Les conséquences de leur manque d’énergie furent désastreuses pour eux. Ces ennemis laissés au milieu d’eux furent un piège et les enfants d’Israël ne tardèrent pas à y tomber et à être entraînés dans le mal comme le montre le chapitre 2. Ils attirèrent ainsi sur eux la colère de l’Éternel. C’est un avertissement pour nous. Nous ne devons pas pactiser avec le mal, mais nous en séparer et prendre au sérieux les paroles de l’apôtre : « Ne vous mettez pas sous un joug mal assorti avec les incrédules ; car quelle participation y a-t-il entre la justice et l’iniquité ? Ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres ? Et quel accord de Christ avec Bélial ? Ou quelle part a le croyant avec l’incrédule ? Et quelle convenance y a-t-il entre le temple de Dieu et les idoles ? » (2 Corinthiens 6:14-18).
— C’est très sérieux, mais on comprend bien que si Dieu ne peut tolérer le mal, nous devons aussi nous en tenir séparés.
— Comme je te l’ai dit, le chapitre 2 fait voir les conséquences du manque de foi, d’énergie et de fidélité des Israélites. Relis les cinq premiers versets.
— « Et l’Ange de l’Éternel monta de Guilgal à Bokim ; et il dit : Je vous ai fait monter d’Égypte, et je vous ai introduits dans le pays que j’avais promis par serment à vos pères, et j’ai dit : Je ne romprai jamais mon alliance avec vous ; et vous, vous ne traiterez point alliance avec les habitants de ce pays, vous démolirez leurs autels. Et vous n’avez pas écouté ma voix. Pourquoi avez-vous fait cela ? Et aussi j’ai dit : Je ne les chasserai pas de devant vous, et ils seront à vos côtés, et leurs dieux vous seront en piège. Et il arriva que, comme l’Ange de l’Éternel disait ces paroles à tous les fils d’Israël, le peuple éleva sa voix et pleura. Et ils appelèrent le nom de ce lieu-là Bokim ; et ils sacrifièrent là à l’Éternel ». Pourquoi l’Ange de l’Éternel monta-t-il de Guilgal à Bokim ?
— La présence de l’Éternel s’était manifestée à Guilgal. Là le peuple lui avait été consacré. Il y revenait après chaque victoire pour y reprendre de nouvelles forces dans leur consécration à Dieu. C’était le lieu du triomphe. Mais maintenant, les Israélites n’avaient pas été fidèles. Ils avaient laissé subsister au milieu d’eux les habitants du pays avec leurs idoles. Guilgal n’était plus le lieu qui leur convenait, mais bien Bokim qui veut dire : « ceux qui pleurent ». L’Éternel ne les abandonne pas. Dans sa grâce il les avertit et il va avec eux au lieu de l’humiliation.
— L’Éternel se montre bien miséricordieux avec eux. Il les avertit avec une grande douceur en disant : « Pourquoi avez-vous fait cela ? » On comprend bien que leur cœur fut touché et qu’ils pleurèrent.
— En effet, Dieu est rempli de bonté et de patience. Il ne se lasse pas d’avertir le pécheur afin qu’il se détourne du mal, et il accepte la repentance de celui qui s’humilie (1 Rois 21:27-29). Aussi voyons-nous que les Israélites, après avoir pleuré, peuvent offrir un sacrifice. Mais les conséquences de leurs fautes demeurent, selon le juste gouvernement de Dieu. Ils n’ont pas détruit les Cananéens et leurs idoles, ils les auront constamment à leurs côtés, comme une épreuve perpétuelle.
— Mais ils n’étaient pas obligés de les imiter.
— Assurément non. Au contraire ils devaient se tenir tout à fait séparés d’eux. Mais cela demandait de leur part beaucoup de vigilance et de dépendance de Dieu. En ayant constamment sous leurs yeux la conduite des Cananéens, leurs idoles et leurs fêtes, il y avait grand danger qu’ils ne fussent entraînés dans le mal. Ce danger existe pour le chrétien s’il ne se tient pas à l’écart du monde : « Les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs » (1 Cor. 15:33). Si les Israélites avaient été d’abord obéissants et fidèles, ils n’auraient pas été exposés à ce piège. Ce qui nous garantit des pièges du monde et du diable, c’est l’obéissance entière, implicite à Dieu. Nous allons voir si les Israélites surent se garantir du mal qui les entourait. Relis pour toi les versets 6 à 10.
— D’après ces versets, les enfants d’Israël servirent l’Éternel tout le temps que vécurent Josué et les anciens qui avaient vu les grandes œuvres que l’Éternel avait faites pour son peuple. C’étaient, je pense, ceux qui, comme Caleb, Éléazar et Phinées, avaient été dans le désert, avait pris part au passage du Jourdain, à la prise de Jéricho et à toutes les grandes victoires remportées par l’armée de l’Éternel.
— Tu as raison. Bien que, dans les jours qui suivirent immédiatement Josué, les Israélites aient commis la faute de ne pas déposséder entièrement les Cananéens, cependant ils servirent l’Éternel et n’allèrent point après des idoles. Mais bientôt se fit sentir, pour la génération qui les suivit, le fruit amer de leur négligence comme le montre la fin du chapitre.
— Que veut dire le verset 10 : « Et après eux, se leva une autre génération qui ne connaissait pas l’Éternel » ?
— Je pense que cela signifie que cette génération n’avait pas expérimenté, au milieu des difficultés et des combats, la puissance et la fidélité de l’Éternel. Il en était d’eux comme des enfants de chrétiens qui savent bien qu’il y a un Dieu et un Sauveur, mais qui ne l’ont pas reçu dans le cœur et la conscience. Vivant au milieu des Cananéens et de leur impuretés, et ne connaissant pas l’Éternel dans leur cœur et dans leur conscience, les Israélites se mirent à imiter le mal qui était sous leur yeux ; puis ils abandonnèrent le culte du vrai Dieu, de l’Éternel, le Dieu de leurs pères, qui les avait comblés de tant de grâces, et se mirent à servir les dieux abominables des peuples qui les entouraient.
— Quelle triste chute ! L’Éternel ne pouvait pas continuer à les bénir assurément.
— Non. Toutefois il n’abandonna pas son peuple. Il le châtia parce qu’Il s’occupait de lui. Les Israélites furent laissés à leurs propres forces, et firent l’expérience qu’ils ne pouvaient rien contre leurs ennemis qui les pillèrent, les assujettirent et leur firent éprouver toutes sortes de maux. Accablés sous cette cruelle oppression, ils sentaient qu’ils avaient eu tort d’abandonner l’Éternel, et criaient à Lui dans leur détresse. À maintes reprises, Dieu fut touché de leur douleur et leur suscita des libérateurs appelés juges qui, se mettant à leur tête, au nom de l’Éternel, les délivrèrent de leurs oppresseurs. C’est l’histoire de ces chutes, de ces repentirs et de ces délivrances, suivies de nouvelles chutes, que nous verrons dans les chapitres suivants. C’est l’histoire du misérable et méchant cœur de l’homme, toujours prêt à abandonner Dieu, en même temps que celle de la patience et de la fidélité de Dieu. Mais ce livre des Juges rappelle encore une autre histoire dans laquelle nous voyons la fidélité de Dieu. C’est l’histoire de l’Église. D’abord eurent lieu les beaux jours de la Pentecôte (Actes 2:42-47 ; 4:32-37), puis ceux qui suivirent tandis que vivaient les apôtres, bien que le mal tendît à s’y introduire (Actes 20: 28-30). Mais bientôt l’Église perdit son premier amour, Apoc. 2:4, de faux docteurs s’y élevèrent, des doctrines corrompues s’y introduisirent, 2 Pierre 2:1, Apoc. 3:14-16, et la chute de l’Église devint complète, bien qu’il y eût toujours des chrétiens fidèles isolés (Apoc. 2:20, 24). Mais Christ, le Chef de l’Église, suscita aussi à certaines périodes de saints hommes dont il se servit pour réveiller les âmes (tels furent Calvin, Luther, Farel, et d’autres à l’époque de la Réformation). Les juges ne rétablirent pas Israël dans sa splendeur primitive, les réformateurs ne rétablirent pas l’Église, mais ils délivrèrent les âmes qui, par eux, crurent en Christ et s’attachèrent à la parole de Dieu. Depuis il y a eu bien des réveils partiels, comme par exemple celui qui eut lieu en Angleterre par le moyen de Whitefield et de Wesley). Ainsi, jusqu’à la fin, jusqu’à ce qu’Il vienne, Christ s’occupe de l’Église, comme l’Éternel s’occupa d’Israël.
Bonne Nouvelle 1888 pages 46 à 53
— L’Éternel avait laissé subsister dans le pays des nations pour éprouver son peuple et voir s’il serait fidèle. C’étaient les Philistins au midi, et des Cananéens au nord. Qu’auraient dû faire les Israélites ?
— Combattre ces nations et les chasser.
— En effet, il ne devait pas y avoir d’alliance entre eux. Dieu permet que nous soyons laissés dans un monde méchant. Mais ce n’est pas pour nous associer à lui. Au contraire, c’est pour en rester séparés et lutter pour que ses mauvais principes n’envahissent pas nos cœurs. Le Seigneur a dit au Père en priant pour ses disciples : « Je ne fais pas la demande que tu les ôtes du monde, mais que tu les gardes du mal ». Et l’apôtre Jean exhorte les jeunes chrétiens par ces paroles : « N’aimez pas le monde, ni les choses qui sont dans le monde ». « L’amitié du monde est inimitié contre Dieu », dit Jacques. « Quiconque donc voudra être ami du monde, se constitue ennemi de Dieu » (Jean 17:15 ; 1 Jean 2:15, Jacques 4:4). Les enfants d’Israël auraient donc dû rester séparés des Cananéens, leur faire la guerre, les chasser peu à peu, et l’Éternel aurait été avec eux. C’est ce qu’ils ne firent pas. Ils s’allièrent par mariage avec des Cananéens et furent entraînés à servir les dieux abominables de ces peuples impies. Tu peux lire le résultat de cette infidélité au verset 8 de notre chapitre.
— « Et la colère de l’Éternel s’embrasa contre Israël, et il les vendit en la main de Cushan-Rishhathaïm, roi d’Aram-Naharaïm. Et les fils d’Israël servirent Cushan-Rishhathaïm huit ans ». Où était le pays de ce roi ?
— Le mot « Aram-Naharaïm » veut dire la Syrie des deux fleuves. C’est le pays situé entre le Tigre et l’Euphrate et nommé à cause de cela Mésopotamie, ce qui veut dire « Au milieu des fleuves ».
— Sait-on quelque chose sur le roi dont il est parlé ici ?
— Non, il n’apparaît que comme un instrument dont Dieu se servit pour châtier son peuple infidèle, comme ce fut le cas plus tard par le moyen des rois d’Assyrie et de Babylone qui venaient de ces mêmes contrées. L’Éternel châtiait son peuple pour le ramener à Lui. C’est ainsi que Dieu agit aussi à notre égard. « Il nous discipline pour notre profit, afin que nous participions à sa sainteté » (Hébreux 12:10). La servitude fut sans doute rude mais salutaire. Les enfants d’Israël, opprimés et malheureux, se souvinrent du Dieu qui les avait autrefois délivrés et bénis, et ils crièrent à l’Éternel.
— Et Dieu vint à leur secours, n’est-ce pas ?
— Oui, il leur suscita un libérateur dans la personne d’Othniel.
— Est-ce le même qui avait pris Hébron et épousé la fille de Caleb ?
— Oui, c’est le même. C’était donc dans un temps encore bien rapproché de Josué, et cela nous montre avec quelle rapidité les enfants d’Israël s’étaient détournés de l’Éternel.
— Pourquoi Othniel n’avait-il pas empêché les Israélites de se détourner de Dieu ?
— Je ne doute pas que lui et d’autres ne soient restés fidèles au milieu de l’infidélité générale et qu’ils n’aient exhorté les autres à ne pas se laisser aller au mal. Mais est-ce que l’on est toujours docile à écouter la voix des serviteurs de Dieu qui nous avertissent ?
— Non, on aime mieux suivre ses propres désirs et son méchant cœur.
— C’est sans doute ce qui arriva. Mais lorsque les enfants d’Israël se retournèrent vers l’Éternel, alors Dieu choisit un de ceux qui lui étaient restés attachés. L’Esprit de l’Éternel fut sur Othniel, l’énergie de Dieu l’anima, il se mit à la tête du peuple et l’Éternel livra en sa main le roi de Mésopotamie de sorte qu’Israël fut délivré.
— Les Israélites recommencèrent alors à servir l’Éternel et rejetèrent les idoles.
— Certainement, car sous l’autorité d’Othniel comme juge, le pays fut en repos quarante ans. Cela n’aurait pu avoir lieu s’ils avaient continué à servir les idoles, car on ne peut avoir de vrai repos quand on ne sert pas Dieu (Ésaïe 48:22 ; 57:21).
— Les enfants d’Israël devaient bien voir la différence qu’il y avait pour eux, suivant qu’ils étaient obéissants ou non.
— C’est vrai. Mais leur exemple nous montre que le cœur de l’homme est incorrigible. Dès qu’Othniel fut mort et que son énergie ne soutint plus le peuple, ils se laissèrent de nouveau aller à leurs mauvais penchants et firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, c’est-à-dire qu’ils s’allièrent de nouveau aux Cananéens et retombèrent dans l’idolâtrie.
— Qu’ils étaient insensés ! Mais alors Dieu les châtia encore.
— Sans doute. Il ne les abandonna pas mais les livra de nouveau à des oppresseurs étrangers. Cette fois ce fut Églon, roi de Moab, un de leurs voisins, qui s’unit aux Ammonites et aux Amalékites pour combattre contre Israël. Églon fut vainqueur car Israël n’avait aucune force.
— Ces Amalékites étaient le peuple qui avait attaqué Israël dans le désert, n’est-ce pas ?
— Oui, et l’Éternel avait dit qu’il y aurait toujours la guerre contre Amalek. Dans le désert, Amalek avait été vaincu ; plus tard, le roi de Moab qui avait voulu faire maudire Israël par Balaam avait été vaincu (Ex. 17, Nombres 31). Mais maintenant les Israélites sont sans force et ils deviennent la proie de leurs ennemis, selon ce que Moïse avait déclaré s’ils étaient désobéissants : « L’Éternel fera que tu seras battu devant tes ennemis » (Deut. 28:25). Il est dit d’Églon qu’il frappa Israël et prit possession de la ville des palmiers, c’est-à-dire de Jéricho.
— Mais n’avait-il pas été défendu de rebâtir cette ville ?
— Sans doute, mais Églon s’empara de la portion du pays où avait été située Jéricho et qui continuait d’en porter le nom, et il s’établit là.
— Cela aurait dû rappeler aux Israélites leur péché car c’est là que l’Éternel avait montré, d’une manière remarquable, sa puissance en leur faveur. Églon les opprima-t-il longtemps ?
— Dix-huit ans durant lesquels, eux, le peuple de l’Éternel qu’il avait délivré d’Égypte, furent en servitude.
— Quelle honte pour eux !
— Et quel opprobre pour le nom de l’Éternel, leur Dieu. Quand le peuple de Dieu ne marche pas fidèlement, le monde en jette le blâme sur Dieu même. Il n’y avait plus de différence entre les Israélites et les nations. Mais à la fin, les Israélites ouvrirent les yeux sur la cause de leur misère et crièrent à l’Éternel qui, dans sa miséricorde, leur suscita un libérateur.
— C’était sans doute un de ceux qui étaient restés fidèles.
— Je le pense, bien que rien ne nous soit dit de la vie antérieure de ce libérateur. Il s’appelait Éhud, de la tribu de Benjamin, sur le territoire de laquelle Jéricho était située. L’Éternel avait mis au cœur d’Éhud de délivrer son peuple. Mais Éhud avait un défaut corporel : il était gaucher.
— Pourquoi cela nous est-il dit ?
— La parole de Dieu nous rapporte ce fait pour nous montrer que l’apparence extérieure ou une infirmité n’arrête pas Dieu dans le choix d’un instrument. « Sa puissance s’accomplit dans l’infirmité », dit Paul qui avait une écharde dans sa chair, et dont la présence personnelle était faible et la parole méprisable (2 Cor. 12:9 ; 10:10 ; Gal. 4:13-14). Moïse aussi avait la parole pesante (Ex. 4:10). Quoi qu’il en soit, l’Éternel fournit bientôt à Éhud l’occasion d’exécuter ce qu’il lui avait mis au cœur. Et Éhud devait d’abord être seul à la brèche.
— Combattit-il seul contre les moabites ?
— Non, mais tu vas voir ce qu’il fit. Les enfants d’Israël le choisirent pour porter à Églon un présent, sans doute en signe d’hommage. Éhud sut ainsi que le moment était arrivé pour délivrer Israël de son ennemi. Il se fit faire une courte épée à deux tranchants qu’il cacha sous ses vêtements, sur son côté droit puisqu’il était gaucher.
— Pourquoi prit-il toutes ces précautions ?
— Parce que, venant d’un peuple vaincu, il ne pouvait se présenter devant le roi avec des armes. Ayant fait ce dont il avait été chargé par le peuple, il songea à accomplir l’œuvre que l’Éternel lui avait dit de faire. Pour cela, il s’en retourna d’abord avec ceux qui avaient apporté le présent, mais les quitta ensuite dans le voisinage de Guilgal et revint seul vers Églon.
— Que pouvait-il faire seul contre un roi entouré, sans doute, de ses gardes ?
— C’était le secret d’Éhud entre l’Éternel et lui. Ses compagnons ne le connaissaient pas, et s’il était revenu avec eux, cela aurait pu exciter les soupçons du roi.
— Tu m’as dit que c’est près de Guilgal qu’il laissa ses compagnons. Ne penses-tu pas que le souvenir de Guilgal devait l’encourager ?
— Oui, et sans doute aussi celui de Jéricho dont les murailles étaient tombées sous la seule puissance de l’Éternel. Éhud pouvait se dire : « Je suis seul, je vais contre un roi puissant, mais l’Éternel qui m’envoie et qui a renversé Jéricho, est le Tout-puissant, il est avec moi, je n’aurai donc pas de crainte ». C’est ce qu’exprimait plus tard le roi David qui lui aussi avait marché seul contre un redoutable ennemi (Ps. 27:1-3). Éhud revint donc vers Églon et lui dit : « J’ai pour toi une parole secrète, ô roi ! »
— Le roi ne pouvait donc s’étonner de le voir revenir seul.
— Tu as raison. C’était en effet une parole secrète qu’Éhud seul connaissait. Églon fit donc sortir tout le monde et resta seul avec le messager de l’Éternel. Éhud découvrit alors son secret : « J’ai », dit-il au roi, « une parole de Dieu pour toi ». Quelle parole terrible ! C’était celle du jugement et de la mort prononcée contre tout ennemi de Dieu et de son peuple. Éhud accomplit son message ; il transperça de son épée à deux tranchants l’oppresseur d’Israël, puis s’échappa et se sauva à Séhira, ville d’Éphraïm, dans la montagne.
— Cette épée aiguë à deux tranchants me fait penser à ce qui est dit dans l’Apocalypse, que de la bouche du Seigneur sort une épée à deux tranchants (19:14, 21). Qu’est-ce que cela veut dire ?
— C’est la parole de jugement que prononcera le Seigneur et qui détruira ses ennemis.
— Mais comment Éhud put-il échapper ? Les serviteurs du roi ne le poursuivirent-ils pas ?
— Ils ne s’aperçurent pas immédiatement de ce qui était arrivé car Éhud, en sortant, avait fermé soigneusement les portes. Les serviteurs pensèrent que leur maître se reposait. Éhud eut donc tout le temps de s’enfuir, et quand les Moabites virent que leur chef était mort, ils se trouvèrent sans doute dans la confusion et la perplexité.
— Mais l’armée des Moabites restait encore.
— Éhud ne perdit pas de temps pour en débarrasser le pays. Il rassembla les enfants d’Israël, probablement ceux d’Éphraïm et de Benjamin qui étaient les plus proches, et se mit à leur tête en leur disant : « Suivez-moi, car l’Éternel a livré en votre main vos ennemis, les Moabites ». Les Israélites s’emparèrent des gués du Jourdain par lesquels les Moabites auraient pu essayer de se sauver dans leur pays, et ne laissèrent passer personne. Quatre-vingts ans de repos furent le résultat de l’énergie d’Éhud, repos durant lequel les Israélites servirent l’Éternel qui les délivrait.
— Retournèrent-ils donc encore vers les idoles ?
— Oui, ce fut leur triste histoire durant des siècles. Le chapitre quatre commence par ces mots : « Et les fils d’Israël firent de nouveau ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel ; or Éhud était mort ». Ces derniers mots nous montrent bien que l’énergie du juge, homme de Dieu, ayant autorité sur eux, les maintenait dans le droit chemin. Cette triste histoire des Israélites qui retombent toujours est en même temps la merveilleuse histoire de la patience et de la fidélité de Dieu.
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— Après la mort du vaillant Éhud, les enfants d’Israël recommencèrent à faire ce qui déplaît à l’Éternel et se mirent encore à adorer de faux dieux. Leur penchant continuel était de se conformer aux mauvaises pratiques des nations païennes. Ils retombaient constamment dans le même piège. Mais comme ils étaient le peuple de Dieu, l’Éternel ne pouvait les laisser faire le mal sans les châtier. Cette fois il se servit des Philistins qui habitaient sur les bords de la mer Méditerranée, vers le sud-ouest du pays de Canaan.
— La Bible parle souvent d’eux, n’est-ce pas ? Le géant Goliath était Philistin.
— Oui. Les Philistins furent toujours les ennemis acharnés d’Israël. Le livre des Juges ne nous donne pas beaucoup de détails sur la servitude qu’ils firent subir cette fois aux enfants d’Israël. Nous voyons seulement qu’elle dût être rude. Les grands chemins étaient délaissés, les malheureux Israélites devaient se glisser par des chemins détournés pour éviter leurs ennemis, sans doute toujours prêts à les piller ; le pays était désolé et les chefs sans force (5:6-8). Il semble même que, comme ils le firent plus tard, les Philistins empêchaient les Israélites d’avoir des armes (1 Sam. 13:19-22).
— Comment donc purent-ils être délivrés, sans armes pour combattre ?
— Nous avons vu plus d’une fois que Dieu n’a pas besoin des forces, ressources et armes humaines pour délivrer (Ps. 20:7-8 ; 33:16-117). Il se glorifie toujours dans la faiblesse des siens (2 Cor. 12:9). Éhud, le gaucher, tua Églon ; David, le jeune berger, abattit le géant Goliath d’un coup de fronde. Ici, nous voyons le libérateur Shamgar défaire les Philistins avec un aiguillon dont on se sert pour diriger les bœufs. C’était une arme bien faible, n’est-ce pas, et qui aurait dû se rompre au bout de quelques coups. Mais l’arme ne se rompit pas, et le bras qui la maniait ne se fatigua pas. Dieu était avec Shamgar qui frappa six cents Philistins avec son instrument rustique et délivra Israël. Comme David, Shamgar allait au nom de l’Éternel des armées. C’était là sa force (1 Sam. 17:45, 47).
— C’est bien beau. On est bien heureux d’avoir la force de Dieu avec soi. Que craindrait-on ? Cela me rappelle le premier verset du Psaume 27 : « L’Éternel est ma lumière et mon salut : de qui aurai-je peur ? L’Éternel est la force de ma vie : de qui aurai-je frayeur ? » Mais ne sait-on rien de plus sur Shamgar ?
— Non. Il n’est question de lui qu’à la fin du chapitre 3 des Juges et dans un verset du chapitre 5. Mais n’est-ce pas une chose glorieuse d’avoir son nom écrit dans le livre de Dieu comme libérateur de son peuple ?
— Oui, bien plus glorieuse que si c’était dans les livres des hommes. Mais cela me fait penser que nos noms, à nous, sont écrits dans le livre de vie et dans les cieux. Le Seigneur Jésus disait à ses disciples que c’est ce dont ils devaient se réjouir (Phil. 4:3, Luc 10:20).
— Après cette délivrance dont nous ne connaissons pas la durée, nous retrouvons les Israélites de nouveau livrés entre les mains de leurs ennemis à cause de leurs péchés. Cette fois, c’est un ennemi du nord, un de ces Cananéens que le manque d’énergie du peuple avait laissés subsister dans le pays. C’était Jabin, roi de Hatsor.
— Josué avait pris et brûlé une ville Hatsor dont le roi se nommait Jabin, Josué 11. Était-ce la même ville ?
— Je le pense. Elle avait été sans doute reconstruite par les Cananéens, et le roi qui régnait était peut-être un descendant du Jabin que Josué défit et tua. En tout cas, ce roi était devenu fort puissant. Il avait neuf cents chariots de fer et, à la tête de son armée, un chef sans doute très célèbre et habile puisque son nom nous a été conservé. C’était Sisera qui habitait une ville forte nommée Harosheth des nations, située sur le territoire d’Issacar, assez loin au sud de Hatsor qui appartenait à la tribu de Nephtali. Sisera était là comme en garnison avec l’armée de Jabin, pour tenir en servitude les malheureux Israélites opprimés.
— Pourquoi nommait-on cette ville Harosheth des nations ?
— C’est peut-être parce qu’elle n’avait pas cessé d’appartenir aux nations païennes. En tout cas, nous voyons que Jabin étendait sa domination très loin, car la tribu de Nephtali avait son territoire au nord-ouest de la mer de Kinnéreth, appelée plus tard le lac de Tibériade, tandis que la tribu d’Issacar habitait au sud-ouest de ce lac. Entre ces deux tribus se trouvait encore celle de Zabulon. Les enfants d’Israël auraient dû chasser les Cananéens, n’en pas souffrir un seul dans le pays de l’Éternel. Au lieu de cela, leur courage défaillit ; ils préférèrent jouir du repos, et pendant ce temps, les Cananéens se fortifièrent et s’étendirent. Ensuite, les Israélites devinrent infidèles à leur Dieu, et ils furent livrés entre les mains de Jabin qui les opprima fortement pendant vingt ans.
— Comme c’est triste et humiliant !
— Sans doute. Mais cela nous apprend, à nous aussi, que si nous ne sommes pas vigilants et tolérons quelque mal en nous, si nous caressons quelque mauvais penchant, Satan en prendra avantage, nous poussera dans le mal, et il faudra alors que Dieu nous châtie (Jacques 4:1-10).
— Les Israélites devaient pourtant se souvenir qu’autrefois ils avaient été vainqueurs d’un autre Jabin.
— C’est vrai, mais tant qu’ils étaient infidèles, ils n’avaient aucune force et ne pouvaient se délivrer eux-mêmes. Dieu seul donne la puissance contre nos ennemis, mais pour jouir de son secours, il faut renoncer au mal. Il y avait sans doute parmi les Israélites, des hommes de foi qui priaient pour eux, et qui les exhortaient à se détourner du péché et à revenir à l’Éternel. Mais ce ne fut que lorsque, accablés sous leurs maux, ils se tournèrent vers leur Dieu et crièrent à Lui, qu’Il vint encore une fois à leur aide, car il est un Dieu miséricordieux, toujours prêt à pardonner (Ex. 34:6-7, Ézé. 18:31-32 ; 33:11).
— Comment furent-ils délivrés de Jabin ?
— En ce temps si triste où la force manquait aux chefs du peuple, Dieu intervint encore par un instrument bien faible, afin de montrer d’autant plus sa puissance et sa souveraineté. C’est à une femme qu’il confia le soin de relever le courage et l’énergie de son peuple. Elle se nommait Débora et était prophétesse, c’est-à-dire que Dieu parlait par sa bouche. Elle-même se disait une mère en Israël, pour avoir compassion et prendre soin de ce pauvre peuple. Débora habitait entre Béthel et Rama, à environ douze à seize kilomètres au nord de Jérusalem et, par conséquent, loin de la résidence de Jabin. Là elle jugeait Israël avec la sagesse et le discernement que l’Esprit de Dieu lui donnait : « Les fils d’Israël montaient vers elle pour être jugés » (Jug. 4:5).
— Y a-t-il eu d’autres femmes qui étaient des prophétesses ?
— L’Ancien Testament en nomme trois. D’abord Marie, la sœur d’Aaron. Dieu parlait par sa bouche, mais elle s’enorgueillit de cette grâce et l’Éternel la châtia (Ex. 15:20, Nom. 12). Ensuite au temps du roi Josias, vivait la prophétesse Hulda (2 Rois 22:14). Et enfin Néhémie parle d’une prophétesse nommée Noadia qui voulait détourner Néhémie du service qu’il accomplissait pour l’Éternel (Néh. 6:14).
— Celle-ci n’était pas une vraie prophétesse, n’est-ce pas ?
— Dans cette occasion, au moins, elle ne parlait pas selon Dieu.
— Y a-t-il encore des prophétesses ?
— Non, dans le sens des prophétesses de l’ancien Testament, il n’y en a assurément pas car l’apôtre Paul dit que la femme ne doit pas prendre autorité sur l’homme (1 Tim. 2:12). Or Débora, par exemple, avait cette autorité. Dans le Nouveau Testament, le nom de prophétesse n’est donné qu’à une femme de l’assemblée de Thyatire, nommée Jésabel, qui se disait prophétesse (Apoc. 2:20), qui prétendait l’être mais qui faisait égarer les serviteurs du Seigneur.
— Mais Philippe l’évangéliste avait quatre filles qui prophétisaient (Act. 21:9).
— C’est très vrai, mais elles ne sont pas appelées des prophétesses. Elles avaient le don de prophétie, c’est-à-dire qu’elles recevaient de Dieu des révélations qu’elles communiquaient afin d’enseigner, d’exhorter et d’édifier les saints (1 Cor. 14:3, 25, 29-31). Mais elles n’étaient pas, comme Débora et Hulda, revêtues d’une charge qu’elles auraient exercée constamment et publiquement. C’est pourquoi elles ne sont pas nommées des prophétesses.
— Et ce don de prophétie, l’a-t-on encore maintenant ?
— Pas dans le sens de recevoir des révélations de la part de Dieu pour les communiquer à l’église, car maintenant la parole de Dieu, c’est-à-dire l’ensemble de ce que Dieu voulait révéler, a été complétée (Col. 1:25-26). Au commencement l’église n’avait pas tous les livres du Nouveau Testament. Le Seigneur les donna peu à peu. Pour instruire les saints des pensées de Dieu, il y avait donc des prophètes, ou bien des saints qui prophétisaient ; maintenant, ce n’est plus nécessaire. Nous avons toute la Parole de Dieu. Mais le Seigneur donne des serviteurs capables de l’expliquer aux intelligences et de l’appliquer au cœur et à la conscience des auditeurs, afin qu’ils soient instruits et édifiés. L’apôtre Paul donne à Timothée des directions à cet égard. Il lui dit de s’attacher à la lecture, d’avoir un modèle des saines paroles qu’il a entendues de lui, d’exposer justement la parole de la vérité, de demeurer dans les choses qu’il a apprises (1 Tim. 4:3, 2 Tim. 1:13 ; 2:15 ; 3:14-17).
— Où les filles de Philippe prophétisaient-elles ? Est-ce qu’elles prêchaient dans les réunions ?
— D’abord, prophétiser n’est pas prêcher. L’un est faire part d’une révélation donnée de Dieu, l’autre est exposer en public les vérités de la parole de Dieu. Ensuite nous pouvons être sûrs que les filles de Philippe ne prophétisaient pas en public dans l’assemblée, car l’apôtre Paul dit que les femmes doivent se taire dans l’assemblée. Autre part il dit aussi qu’il ne permet pas à la femme d’enseigner et de prendre de l’autorité sur l’homme (1 Cor. 14:34-35 ; 1 Tim. 2:11-12). Les femmes donc qui voudraient s’autoriser de l’exemple de Débora ou de Hulda, ou de ce qui est dit des filles de Philippe, pour prêcher, diriger les âmes, ou agir en public d’une manière quelconque, se trompent et ne suivent pas la parole de Dieu. La place de la femme est dans la soumission, la modestie et le silence, accomplissant sa belle tâche pour le Seigneur, dans le cercle intime de la famille et le soulagement des pauvres.
— C’est une bonne et heureuse place, comme celle de Marie aux pieds du Seigneur.
— Oui. Mais tout cela nous a conduits loin de Débora.
— Les enfants d’Israël opprimés par Jabin, roi de Hatsor crièrent à L’Éternel pour qu’il vînt à leur secours. Et il leur répondit par la bouche de Débora, la prophétesse qui jugeait Israël. Elle fit appeler Barak.
— Qui était-il ?
— La parole de Dieu ne nous dit, sur sa famille et sa vie, rien de plus que ce qui se trouve ici dans le livre des Juges. Il était fils d’Abinoam, de la ville de Kédesh dans la tribu de Nephtali. Kédesh était un peu au nord de Hatsor. Il demeurait donc tout près du cruel tyran qui opprimait les enfants d’Israël, et sentait ainsi plus durement le poids de la servitude. Nul doute aussi qu’il ne fut un Israélite pieux, car il est mentionné parmi les héros de la foi dans Hébreux 11 verset 32. Il attendait certainement que Dieu intervînt en faveur de son peuple, mais ne pensait pas que ce fût lui qui dût marcher à la tête d’Israël pour le délivrer de ses ennemis.
— Qu’est-ce que Débora lui dit de faire pour cela ? Il ne devait pas y aller seul comme le brave Éhud.
— Non. Débora lui commanda, au nom de l’Éternel, de lever dix mille hommes de Nephtali et de Zabulon, et de se rendre avec cette armée au mont Tabor qui était sur le territoire de cette dernière tribu. « Et j’attirerai vers toi », lui dit l’Éternel par la voix de Débora, « vers le torrent de Kison, Sisera, chef de l’armée de Jabin, et ses chars, et sa multitude, et je le livrerai en ta main » (Jug. 4:7).
— C’était bien positif. Barak s’empressa d’obéir à ce que l’Éternel lui disait, n’est-ce pas ? Bien que son armée fût petite devant la multitude des ennemis, il pouvait marcher sans crainte puisque Dieu lui avait assuré qu’il livrerait Sisera en sa main.
— Barak ne semble pas avoir eu de crainte en mesurant les forces de ses ennemis et la faiblesse de sa propre armée. Ce n’était pas ce qui le préoccupait, mais il voulait avoir avec lui un appui bien visible, l’instrument dont Dieu se servait pour lui parler. Il dit à Débora : « Si tu vas avec moi, j’irai ; mais si tu ne vas pas avec moi, je n’irai pas » (Jug. 4:8). C’était un défaut dans sa foi. La parole de Dieu ne lui suffisait pas pleinement, il ne savait pas s’appuyer directement sur l’Éternel. Cela me rappelle que l’apôtre met en garde les Philippiens contre ce danger de rechercher l’appui d’un homme, quelque excellent et approuvé de Dieu qu’il soit. Il dit : « Vous avez toujours obéi, non seulement comme en ma présence, mais beaucoup plus maintenant en mon absence » (Phil. 2:12). Nous devons certainement écouter ceux qui nous parlent de la part de Dieu, mais pour obéir, il nous faut rechercher notre force et notre motif en Dieu seul.
— Débora alla-t-elle avec Barak ?
— Oui, mais ce ne fut pas à son honneur, comme elle le lui dit. Elle lui annonça que Sisera ne tomberait pas sous ses coups mais sous la main d’une femme. Au lieu d’honorer l’Éternel en s’appuyant par la foi sur Lui seul, il voulait l’appui d’une femme ; eh bien, une femme, et non pas lui, serait l’instrument dont Dieu se servirait pour délivrer Israël du chef des ennemis.
— C’est très parlant. Cela montre à quel degré de faiblesse les hommes d’Israël étaient arrivés.
— Tu as raison, mais cela n’arrête pas le dessein de Dieu. L’homme faillit et manque, Dieu reste le même et se glorifie dans la faiblesse même des instruments qu’il emploie.
— Sisera ne s’était-il pas aperçu que Barak rassemblait une armée ?
— Sans doute, mais Barak avait eu le temps de le faire parce que Harosheth était assez loin de Kédesh. Cependant, dès que Sisera eut appris que Barak s’était établi sur le mont Tabor, il rassembla ses neuf cents chars de fer et son immense armée, et s’avança contre Barak.
— Les autres tribus d’Israël n’étaient-elles pas venues au secours des tribus de Nephtali et de Zabulon ?
— Quelques unes s’étaient mises en mouvement dans ce but : Éphraïm, Manassé, Benjamin, Issacar sont nommées au chapitre 5. Mais ce fut aux dix mille hommes de Nephtali et de Zabulon que revint le principal honneur. Ils étaient les plus rapprochés de l’ennemi. Il leur avait été dangereux de se réunir dans le pays qu’habitait l’oppresseur, aussi est-il dit d’eux : « Zabulon est un peuple qui a exposé son âme à la mort, Nephtali aussi, sur les hauteurs des champs ». Ce fut Débora qui, après la victoire exalta ainsi leur courage dans son chant de triomphe (5:14, 15, 18). Mais d’autres tribus, Ruben, Aser, Dan, restèrent impassibles devant le danger auquel s’exposaient leurs frères.
— C’était bien égoïste.
— Sans doute, aussi Débora flétrit-elle leur conduite (5:16-17). Il y eut même une ville nommée Méroz, de la tribu de Zabulon, dont les habitants se tinrent à l’écart du combat par prudence ou bien par lâcheté, et Débora les maudit. Dans les combats pour l’Éternel, personne ne pouvait rester neutre. Et il en est de même pour Christ (5:23 ; Luc 11:23).
— Comment s’accomplit ce que Débora avait dit à Barak, que Sisera serait tué par une femme ?
— Nous allons le voir. Débora dit à Barak : « Lève-toi, car c’est ici le jour où l’Éternel livrera Sisera en ta main. L’Éternel n’est-il pas sorti devant toi ? » Et à cet ordre, la petite armée israélite, sur les pas de son chef, fondit sur l’armée de Sisera.
— Que veulent dire ces paroles : « L’Éternel n’est-il pas sorti devant toi ? » Était-ce simplement pour assurer Barak que Dieu était avec lui ?
— L’Éternel venait de donner un signe manifeste de sa présence en faisant lever un violent orage qui jeta la confusion dans l’armée cananéenne.
— Qu’est-ce qui te fait penser cela ?
— Plusieurs passages du chapitre 5 où Débora, dans son cantique, décrit ce que l’Éternel fit et ce qui arriva à l’armée ennemie. Ces passages sont exprimés dans un style magnifiquement poétique : « Éternel ! Quand tu sortis de Séhir, quand tu t’avanças des champs d’Édom, la terre trembla, et les cieux distillèrent, et les nuées distillèrent des eaux ». On voit un orage qui monte, la voix de l’Éternel, le tonnerre, qui fait trembler la terre, et les torrents d’eau qui descendent des cieux. Il y a plus ; au verset 20 nous lisons : « On a combattu des cieux ; du chemin qu’elles parcourent, les étoiles ont combattu contre Sisera ». Ne semble-t-il pas que ce soit comme dans une autre occasion où, en Josué 10:10-11, une grêle violente frappa l’armée ennemie ? Et enfin : « Le torrent de Kison les a emportés » (Jug. 5:21). Dans son cours naturel, ce torrent peut être passé à gué, mais par une pluie abondante, il grossit ; et dans cette occasion, il avait sans doute enflé d’une manière extraordinaire. L’Éternel était donc sorti devant Barak et sa petite armée, et avait mis en déroute Sisera, et tous ses chars, et toute l’armée. Les Israélites se précipitèrent sur les fuyards et les passèrent tous au fil de l’épée. Ils cherchaient bien à regagner Harosheth, leur forteresse ; mais il fallait passer par des plaines marécageuses et inondées par la pluie, ou par des défilés étroits où coule le Kison, de sorte qu’aucun n’échappa, malgré leurs chars et leurs chevaux.
— Et Sisera, que lui arriva-t-il ?
— L’orgueilleux chef des Cananéens dut descendre de son char qui s’embourbait sans doute dans les champs détrempés, et s’enfuit à pied. Il arriva ainsi près de la tente de Jaël, femme de Héber le Kénien.
— Les Kéniens étaient les descendants de Hobab, le beau-frère de Moïse, n’est-ce pas ? Ils avaient accompagné les enfants d’Israël dans le désert et étaient entrés avec eux en Canaan. Mais je croyais qu’ils s’étaient établis près de la tribu de Juda.
— C’est vrai. Mais l’un d’eux, nommé Héber, s’était séparé de ses frères et était venu dresser sa tente près de Kédesh, car les Kéniens n’habitaient point les villes (Comparez 1 Chron. 2:55, Jér. 35:6-10). Il y avait paix entre Jabin, roi de Hatsor, et la famille de Héber. C’est pourquoi Sisera vint chercher asile dans la tente de Jaël, femme de Héber. Jaël connaissait sans doute le chef des armées de Jabin, car elle vint à sa rencontre et l’invita à entrer dans sa tente. Sisera, fatigué et assoiffé, lui demanda à boire ; elle lui donna du lait, puis il s’étendit dans la tente pour se reposer, et elle plaça sur lui une couverture.
— Alors, Jaël était pour les ennemis du peuple d’Israël ? Je croyais que les Kéniens étaient des amis puisque Dieu leur avait fait du bien.
— Tu vas voir quels étaient les sentiments des Kéniens. Sisera recommanda à Jaël de se tenir à l’entrée de la tente pendant qu’il se reposerait et lui dit : « S’il arrive qu’on vienne et qu’on t’interroge et dise : Y a-t-il quelqu’un ici ? Tu diras : Non ». Puis il s’endormit profondément. Alors Jaël prit un de ces grands piquets qui servaient à fixer les cordages des tentes, puis le marteau ou maillet avec lequel on plantait les piquets en terre, et s’avançant doucement vers Sisera endormi, elle lui enfonça le piquet dans la tempe, de sorte qu’il pénétrait dans la terre. Ainsi mourut Sisera.
— C’est terrible à entendre ! Comment a-t-elle eu le courage de faire cela ? On voit bien l’accomplissement de la parole de Débora à Barak que ce serait à une femme que l’Éternel livrerait Sisera. Mais n’était-ce pas mal de la part de Jaël d’avoir invité Sisera à entrer chez elle pour le tuer ensuite ?
— Tu vois par cette action que Jaël et sans doute les autres Kéniens avec elle étaient pour les enfants d’Israël. Tout en étant à l’abri de la main tyrannique de Jabin, ils souffraient sans doute de voir les Israélites opprimés par lui. Maintenant Jaël voit que l’Éternel se déclare ouvertement pour son peuple repentant et l’Éternel livre en sa main le plus redoutable de ses ennemis, et elle agit en harmonie avec la pensée de l’Éternel qu’elle servait et qui, sans doute, lui avait mis au cœur de concourir à la délivrance de son peuple. C’est ainsi que Rahab autrefois avait reçu les espions, et sa foi est louée dans la parole de Dieu. Et nous voyons que Débora, la prophétesse inspirée de Dieu, loue et exalte Jaël. Elle venait de maudire Méroz dont les habitants n’étaient pas venus au secours de l’Éternel en combattant avec son peuple, et maintenant elle s’écrie : « Bénie soit, au-dessus des femmes, Jaël, femme de Héber, le Kénien ! Qu’elle soit bénie au-dessus des femmes qui se tiennent dans les tentes ! » Ainsi l’Éternel lui-même par la bouche de Débora met son sceau à l’acte de Jaël, si terrible qu’il nous semble. Elle avait exécuté le jugement de Dieu.
— Je trouve que nous sommes bien heureux de ne pas vivre dans des temps semblables.
— La grâce règne maintenant, et non le jugement (Rom. 5:21). Ce n’est pas contre les hommes que nous avons à combattre, mais contre les puissances spirituelles de méchanceté (Éph. 6). Que Dieu nous donne d’être fidèles dans ces combats, comme les vrais Israélites l’étaient dans les combats qu’ils devaient livrer aux peuples cananéens.
— Nous est-il dit quelque chose de plus sur Barak et Débora ?
— Oui. Barak poursuivait Sisera, mais arrivé près de le tente de Jaël, celle-ci vint à sa rencontre et lui dit : « Viens, et je te montrerai l’homme que tu cherches ». Et il entra et vit Sisera mort. Par son manque de foi, Barak avait été privé de l’honneur d’abattre l’ennemi de l’Éternel. Une femme l’avait fait. Arès cette victoire Débora chanta un hymne magnifique à l’Éternel, le Dieu d’Israël, et Barak se joignit à elle. Ce cantique se termine ainsi : « Qu’ainsi périssent tous tes ennemis, ô Éternel ! Mais que ceux qui t’aiment soient comme le soleil quand il sort dans sa force ! » Ce n’était pas contre les ennemis de Barak ou de Débora, ni même d’Israël, qu’on avait combattu, mais contre les ennemis de l’Éternel. Quand Israël était fidèle, ceux qui l’attaquaient étaient les ennemis de l’Éternel.
— Jabin fut-il aussi détruit ?
— Sa puissance avait été brisée, et les Israélites le combattant toujours finirent par l’exterminer complètement. Alors le pays fut en repos durant quarante ans.
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— Après la délivrance accordée à Israël par le moyen de Débora et de Barak, le pays fut en repos durant quarante ans. Mais quand ils ne furent plus là, les fils d’Israël recommencèrent à faire ce qui déplaît à l’Éternel.
— Quelle folie ! Ne se souvenaient-ils donc pas que, toutes les fois qu’ils avaient abandonné Dieu, ils avaient été malheureux ?
— C’est la folie du cœur naturel. Il est, dit Jérémie, trompeur et incurable (Jér. 17:9). Toute l’histoire d’Israël est là pour nous l’apprendre. Nous portons ce même cœur en nous, et c’est pourquoi le Seigneur dit : « Il vous faut être nés de nouveau » (Jean 3:7). Sans cela, d’une manière ou d’une autre, notre mauvaise nature a toujours le dessus.
— Mais n’y eut-il donc aucun des Israélites qui fut « né de nouveau » ?
— Tous les saints hommes de Dieu ont eu et auront la vie divine, sans cela on ne peut « entrer dans le royaume de Dieu » (Jean3:3, 5). Mais comme peuple, Israël placé sous l’obligation d’obéir à la loi, s’est montré constamment rebelle car « la chair », notre mauvaise nature, « est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas » (Rom. 8:7). Le temps viendra où le peuple d’Israël sera, par grâce, ramené à Dieu. Alors l’Éternel mettra sa crainte dans leurs cœurs pour qu’ils ne se retirent pas de Lui. C’est quand une nouvelle alliance basée, non sur l’obéissance, mais sur le sang de Christ aura été établie par l’Éternel avec les maisons d’Israël et de Juda, et que l’Éternel mettra sa loi au-dedans d’eux et l’écrira sur leurs cœurs (Jér. 32:39-40 ; 31:31-34).
— Sommes-nous sous cette nouvelle alliance ?
— Non. Nous avons part, pour notre rédemption, au sang précieux de la nouvelle alliance (Matt. 26:28 ; Éph. 1:7), car le sang de Christ est le seul fondement de toute bénédiction pour tout homme, mais les chrétiens ont bien plus qu’une alliance. Ils sont bénis en Christ de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes, et sont ainsi un peuple céleste. Ils sont enfants de Dieu, membres du corps de Christ et appartiennent à l’assemblée, l’épouse de Christ (Éph. 1:3 ; 1 Jean 3:1-3 ; Éph. 5:30, 25). Tout cela est bien au-dessus de l’alliance de Dieu avec son peuple terrestre, mais nous ne possédons ces bénédictions qu’en vertu du sang de Christ.
— C’est vrai, ce sont de grandes grâces que Dieu nous a accordées. Nous ne méritions rien, pas plus qu’Israël. Mais je pense que ce qui déplaisait à l’Éternel, c’est que les enfants d’Israël avaient recommencé à adorer des idoles, n’est-ce pas ?
— Sans doute, car l’Éternel était leur Dieu, et il leur avait expressément défendu l’idolâtrie en leur disant qu’il est un Dieu jaloux qui ne peut donner sa gloire à un autre. Il a droit à l’hommage de toutes ses créatures, et combien plus à celui du peuple qu’il avait choisi, délivré et béni (Ex. 20:4-5 ; És. 42:8). Adorer des idoles, c’était le mépriser, jeter le déshonneur sur son nom.
— Ils étaient bien coupables, en effet, d’abandonner Dieu après tout ce qu’il leur avait dit et tout ce qu’il avait fait.
— C’est pourquoi, selon son juste gouvernement, l’Éternel ne pouvait pas laisser ce mal impuni. Il ne les rejette pas, mais il les châtie pour les ramener à Lui.
— Dieu les assujettit-il de nouveau à un roi Cananéen comme Jabin ?
— Non. La verge dont l’Éternel se servit pour châtier son peuple fut un ennemi de dehors qui habitait de l’autre côté du Jourdain. C’étaient les Madianites qui, autrefois, s’étaient unis aux Moabites avant que les Israélites ne passent le Jourdain, et qui avaient été vaincus (Nom. 31).
— C’est quand Balak, roi de Moab, fit venir Balaam pour maudire les enfants d’Israël, et qu’au contraire il fut obligé de les bénir.
— C’est cela. Cette fois les Madianites ne s’étaient pas alliés aux Moabites mais à d’autres ennemis d’Israël, les Amalékites, ceux qui avaient attaqué les Israélites au désert peu après leur sortie d’Égypte. Josué les avait vaincus à cette époque, et l’Éternel avait déclaré qu’il y aurait toujours guerre contre Amalek.
— Et lors de ce combat, Moïse était sur la colline, et quand il élevait les mains, Israël était vainqueur (Exode 17:8-16).
— Oui. Avec Madian et Amalek, il y avait encore des peuplades appelées « fils de l’Orient », sans doute des tribus nomades d’Arabie.
— Tous ces peuples étaient-ils venus s’établir en Canaan pour dominer sur les enfants d’Israël ?
— Non, mais leurs hordes passaient le Jourdain au temps de la moisson, se répandaient partout, ravissant et emportant tout. Les malheureux Israélites, pour échapper à ces rapaces ennemis et sauver quelque chose de leurs mains, étaient obligés de se creuser des antres et des cavernes dans les montagnes, et de se réfugier dans les lieux forts, c’est-à-dire des rochers d’accès difficile.
— Ces ennemis d’Israël étaient donc bien nombreux.
— « Nombreux comme des sauterelles », dit l’Écriture, pour nous faire comprendre en même temps leurs terribles ravages. Quand les sauterelles, ce fléau redoutable de l’Orient, s’abattent par millions sur une contrée, elles ne laissent rien. L’herbe, les grains, les feuilles et même l’écorce des arbres, tout est dévoré (Lisez Joël 1:4-12 ; 2:1-11 ; le prophète annonce l’invasion d’un peuple du nord dans la terre d’Israël, sous la figure d’une invasion de sauterelles). De même, ces tribus venaient dans le pays d’Israël avec leurs chameaux « sans nombre ». Elles remplissaient le pays, plantant leurs tentes, établissant leurs troupeaux dans les pâturages, ravissant les vivres, les grains, les troupeaux, les ânes des Israélites, et en se retirant, elles ne laissaient derrière elles qu’un pays ravagé et appauvri. Et quelle force aurait pu avoir les Israélites, même si leurs ennemis avaient été moins nombreux ? L’Éternel leur avait déclaré d’avance : « Si tu n’écoutes pas la voix de l’Éternel, ton Dieu, … Ton bœuf sera tué devant tes yeux, et tu n’en mangeras pas ; ton âne sera enlevé devant toi, et ne reviendra pas à toi ; ton menu bétail sera livré à tes ennemis, et tu n’auras personne qui sauve … Tu n’auras aucune force en ta main. Un peuple que tu ne connaissais pas, mangera le fruit de ta terre et tout ton labeur » (Deut. 28:15, 31-33). Ils goûtaient les fruits amers de leur désobéissance.
— Combien leur condition devait, en effet, être triste ! Cela dura-t-il longtemps ?
— Sept années de suite la main de Madian s’appesantit sur Israël. Pense un peu quelle angoisse devait remplir leur âme en voyant revenir chaque année ces insatiables ennemis. Ils avaient labouré, semé, travaillé, et tout cela en vain. Peut-être crurent-ils, la première année, que c’était un fait isolé, une incursion accidentelle. Les Madianites n’étaient pas restés dans le pays. Les Israélites se dirent peut-être : Les voilà partis, nous en sommes délivrés. Mais la seconde année arrive, les moissons sont mûres, et tout à coup le bruit se répand : les Madianites ont passé le Jourdain, les voilà de nouveau. Tout est perdu. Cependant, ils s’en vont et l’on respire. On espère qu’ils ne reviendront pas. Et le troisième printemps arrive et les ramène. Ah ! Pour cette fois, le découragement s’empare du cœur des Israélites.
— Dieu continuait à les frapper pour qu’ils se demandent d’où venait leur malheur et afin de les ramener vers Lui.
— Tu as raison. Sept années de misère croissante se passèrent ainsi, et enfin ils se souvinrent de l’Éternel, leur Dieu, et ils crièrent à Lui pour qu’il les délivrât.
— Et Dieu les exauça, n’est-ce pas ?
— Oui, Dieu est toujours prêt à écouter celui qui l’invoque. Il a dit : « Invoque-moi au jour de la détresse : je te délivrerai, et tu me glorifieras » (Ps. 50:15). Mais il ne suffisait pas que les Israélites crient à l’Éternel parce qu’ils souffrent. Dieu veut que le pécheur malheureux à cause de ses péchés remonte à la source de sa misère (Jac. 4:9, 10). Il veut que la conscience soit exercée. La première chose par laquelle l’Éternel montra qu’il avait entendu les Israélites, ce ne fut pas en les délivrant, mais en plaçant devant eux leur péché.
— Comment Dieu leur fit-il connaître la cause de leur péché ? Leur conscience ne le leur disait-elle pas ?
— Elle aurait dû leur parler, mais Dieu se sert souvent de sa parole, ou directement apportée à l’âme, ou appliquée par un de ses serviteurs, pour montrer à un pécheur son état. Cette fois l’Éternel envoya un prophète aux Israélites, non pour leur susciter un libérateur comme Débora lorsqu’elle fit appeler Barak, mais pour les reprendre. Lis les versets 8 à 10 du chapitre 6.
— « L’Éternel envoya aux fils d’Israël un prophète qui leur dit : Ainsi dit l’Éternel, le Dieu d’Israël : Je vous ai fait monter d’Égypte, et je vous ai fait sortir de la maison de servitude, et je vous ai délivrés de la main des Égyptiens et de la main de tous vos oppresseurs ; et je les ai chassés de devant vous, et je vous ai donné leur pays. Et je vous ai dit : Moi, je suis l’Éternel, votre Dieu ; vous ne craindrez point les dieux de l’Amoréen, dans le pays duquel vous habitez. Et vous n’avez pas écouté ma voix ».
— L’Éternel leur rappelle donc toute sa bonté envers eux et leur ingratitude. Il leur fait ainsi toucher du doigt la cause de leur misère : « Vous n’avez pas écouté ma voix ». Ne pas écouter Dieu, le Dieu qui nous aime, c’est choisir le malheur ; au contraire, écouter la voix de Dieu et la suivre, c’est le secret du bonheur. Pour le moment, l’Éternel laisse les Israélites avec le sentiment amer de leur péché et dans l’attente d’une nouvelle invasion, car c’était le temps de la moisson.
— Mais il ne les laissa pas ; il leur envoya un libérateur, n’est-ce pas ?
— Oui, quand Dieu a commencé une œuvre dans le cœur du pécheur et lui a donné la conviction de son état de péché, il ne le laisse pas, il achève son œuvre et lui fait voir la délivrance.
Dieu leur avait préparé un libérateur ; car, tandis qu’il ne nous est rien dit sur l’appel d’Éhud, et très peu sur celui de Barak, la parole de Dieu s’étend au contraire sur l’appel, les sentiments et les exercices de cœur de Gédéon.
— C’était donc le nom de celui qui allait être juge d’Israël.
— Oui, et ce nom lui convenait bien car il signifie « destructeur ». Gédéon était de la tribu de Manassé et son père se nommait Joas l’Abiézérite parce qu’Il descendait d’Abiézer, l’un des fils ou petit-fils de Manassé (Josué 17:2). Il demeurait dans un endroit nommé Ophra, qu’il faut distinguer de la ville du même nom dans la tribu de Benjamin (1 Sam. 13: 17). Joas semble avoir occupé un certain rang parmi ses concitoyens mais, comme eux, il était adonné à l’idolâtrie. L’autel de Baal était chez lui ; c’était là que les gens de la ville venaient adorer la fausse divinité.
— Qu’est-ce que c’était que Baal ? Il en est souvent question dans la Bible.
— Baal veut dire seigneur ou maître (Osée 2:16). C’était le nom que les peuples de l’Orient donnaient à leur faux dieux. Chez les Phéniciens et peut-être les autres Cananéens, c’était le soleil que l’on adorait sous ce nom. Ashtoreth, ou Astarté, était le nom des divinités féminines ; sous ce nom, les Phéniciens adoraient la lune. Le culte de ces divinités était accompagné d’abominations de toutes sortes, souvent avec des sacrifices humains, par exemple d’enfants qu’on brûlait (Ps. 106:37, 38).
— Est-ce que ce fut un prophète qui vint lui parler de la part de Dieu ?
— Non, c’était quelqu’un de plus grand qu’un prophète. « Et un ange de l’Éternel vint, et s’assit sous le térébinthe qui est à Ophra, lequel était à Joas, l’Abiézerite » (Juges 6:11).
— Mais qui était cet Ange de l’Éternel ? Tous les bons anges sont des anges de Dieu, n’est-ce pas ?
— Sans doute, mais Celui qui est nommé Ange de l’Éternel est à part des autres. Il est le représentant de l’Éternel lui-même et est appelé l’Éternel comme on le voit dans différents cas où il apparaît et dans l’histoire même de Gédéon (Gen. 16:7-14 ; 18:1, 17, 20, 22, 33 ; 22:11 ; Ex. 3 ; Juges 6:12, 14, 16). L’Éternel apparaissait sous une forme d’homme (Gen. 18:1-2 ; 32:24, 29-30 ; Juges 13:3, 6, 10-11, 16, 18, 21-22) ; c’était là l’Ange de Dieu, l’Ange de l’Éternel, Dieu lui-même se manifestant à quelqu’un de ses serviteurs, ou en faveur de son peuple, ou même pour châtier Israël (Nom. 22:22, 28, 31, 35 ; 1Chron. 21:15-18). C’était donc l’Éternel, le Dieu d’Israël lui-même qui était assis sous le térébinthe.
— Gédéon était-il là ?
— Gédéon ne le vit pas d’abord. Il était occupé à battre du froment dans le pressoir.
— Était-ce la coutume de battre le blé dans les pressoirs ? N’est-ce pas là qu’on fait le vin ?
— Tu as raison. Mais Gédéon et, sans doute, d’autres Israélites étaient obligés de se cacher pour battre leur blé afin de le dérober aux recherches des Madianites. Le battage du blé se faisait au moyen de bœufs traînant sur les épis, soit une espèce de plateau, soit des rouleaux, avec des dents qui hachaient la paille (Voir Ésaïe 41: 15:16). On choisissait pour les aires des endroits ouverts et élevés, de sorte que le vent pût emporter la balle (Ps. 1:4 ; 35: 5 ; Osée13:3 — La balle est le symbole des méchants emportés par le jugement de Dieu). Mais il aurait été dangereux pour les Israélites de battre ainsi leur froment tandis que les Madianites occupaient le pays. Les pressoirs, au contraire, se trouvaient au pied des vignobles situés sur le flanc des collines et étaient ainsi moins visibles. Gédéon était rempli d’humiliation et de douleur en pensant à la triste condition de son peuple. Mais quand le cœur est occupé de ce qui entre dans les pensées de Dieu, quand on est humilié devant Lui, alors Il s’approche de nous (Jacques 4:10). L’Ange de l’Éternel, qui s’était d’abord assis sous le térébinthe, entra dans le pressoir et apparut à Gédéon.
— Combien il dut être surpris !
— Oui, et plus encore par la salutation que lui adressa l’Ange de l’Éternel : « L’Éternel est avec toi, fort et vaillant homme », lui dit-il. Et c’était bien vrai ; l’Éternel était là, devant lui et avec lui parce que son cœur était occupé de ce qui occupait aussi le cœur de Dieu. Ce qui occupait Gédéon, c’était la condition du peuple de Dieu, et c’était aussi ce à quoi l’Éternel pensait. Gédéon était en communion avec Dieu. Dieu était avec lui (Voyez à l’égard de cette communion Jean 14:23 pour ce qui nous concerne).
— Gédéon savait-il qui était Celui qui lui parlait ?
— Non. Peut-être croyait-il que c’était un prophète. Ce n’est que plus tard qu’il reconnaît que c’était l’Éternel lui-même qui lui apparaissait sous la figure d’un homme. Mais il est tout surpris de cette salutation. Comment pouvait-on dire à un homme qui se cachait pour battre son blé : « fort et vaillant homme » ? Tout ne montrait-il pas sa faiblesse ?
—Oui, mais il était fort parce que l’Éternel était avec lui.
— Tu as raison, c’est le seul moyen d’être fort contre l’ennemi. L’apôtre Paul le savait bien. Le Seigneur lui avait dit les mêmes paroles : « Je suis avec toi » (Actes 18:9, 10 ; Phil. 4:13 ; 2 Cor. 12:10). Mais Gédéon avait le cœur tout rempli de l’état misérable du peuple d’Israël, il ne pense pas à lui-même et ne se plaint pas pour lui-même ; il pense aux autres et dit : « Si l’Éternel est avec nous, pourquoi donc toutes ces choses nous sont-elles arrivées ? Et où sont toutes ces merveilles que nos pères nous ont racontées, en disant : L’Éternel ne nous a-t-il pas fait monter hors d’Égypte ? Et maintenant l’Éternel nous a abandonnés, et nous a livrés en la main de Madian ».
— Gédéon semble tout à fait abattu et découragé.
— Oui, en comparant les merveilles que Dieu avait opérées autrefois en faveur de son peuple, et en le voyant maintenant abandonné et livré par l’Éternel entre les mains d’ennemis impitoyables, le cœur de Gédéon est accablé de tristesse. Il ne savait pas où trouver le secours et la délivrance puisque, dit-il, « L’Éternel nous a abandonnés ». Il ignorait que l’Éternel avait entendu le cri de son peuple. Dieu lui montre alors qu’il n’a pas abandonné Israël pour toujours et quel est le libérateur qu’il a choisi. Lis le verset 14.
— « Et l’Éternel le regarda, et [lui] dit : Va avec cette force que tu as, et tu sauveras Israël de la main de Madian. Ne t’ai-je pas envoyé ? » Quel beau verset ! Comme cette parole a dû encourager Gédéon. Il voyait que c’était bien l’Éternel qui lui parlait, n’est-ce pas ?
— Oui. Ce regard a dû pénétrer jusqu’au fond de l’âme du pauvre Israélite et y répandre la consolation. « Ses yeux [sont] comme une flamme de feu » (Apoc. 2:18). La force de Gédéon n’était pas la sienne mais celle que Dieu lui donnait, et l’Éternel lui-même l’envoyait pour délivrer Israël. Tout cela était bien propre à donner de l’assurance à son cœur ! Il voyait bien maintenant que l’Éternel pensait à son peuple repentant.
— Gédéon s’occupa-t-il tout de suite de ce qu’il fallait faire pour délivrer Israël ?
— Non, l’Éternel ne le lui avait pas dit. Gédéon avait encore à apprendre plusieurs choses auprès de l’Éternel. Et à côté de son tendre intérêt pour son peuple et de sa foi en l’Éternel, un autre trait touchant de son caractère nous est manifesté. C’est son humilité. Il exprime devant Dieu, le sentiment qu’il a de sa petitesse et de son indignité. Lis le verset 15.
— « Et il lui dit : Ah ! Seigneur, avec quoi sauverai-je Israël ? Voici, mon millier est le plus pauvre en Manassé, et moi je suis le plus petit dans la maison de mon père ». Je suis frappée de voir que Dieu se sert toujours d’instruments si faibles.
— C’est bien vrai. Dieu choisit ce qu’il y a de faible dans le monde pour accomplir ses desseins et renverser les choses fortes, afin que toute la gloire lui en revienne (1 Cor. 1:27-29, 31). Gédéon était peut-être le plus jeune fils de Joas, peut-être était-il méprisé à cause de sa foi et le chargeait-on de travaux pénibles comme ce fut le cas plus tard pour David (1 Sam. 16:7, 11-13 ; 17:28). Quoi qu’il en soit, Gédéon ne s’enorgueillit pas du choix que Dieu fait de lui comme libérateur d’Israël, au contraire il reconnaît toute sa petitesse. Or, « Dieu résiste aux orgueilleux, mais il donne la grâce aux humbles » (Jac. 4:6). L’Éternel, dans sa bonté, prend soin d’encourager celui qu’il a choisi pour délivrer son peuple.
Dans sa condescendance, Il lui dit des paroles bien propres à
l’encourager et à le fortifier. Ce n’est plus seulement : « Va avec
cette force que tu as » mais : « Moi
je serai avec toi ; et tu frapperas Madian comme un seul
homme ». Cette immense multitude d’hommes armés ne devait pas être plus
forte qu’un seul homme devant Gédéon soutenu par l’Éternel.
Il pouvait dire comme plus tard David : « L’Éternel
est la force de ma vie : de qui aurai-je frayeur ? … Quand une armée
camperait contre moi, mon cœur ne craindrait pas » (Ps. 27:1-3).
— Je pense qu’après cela Gédéon n’hésita plus. Que pouvait-il craindre si l’Éternel était avec lui ?
— Rien, assurément. Et il est bien touchant de voir que c’est toujours ainsi que le Seigneur fortifie ses serviteurs quand il les charge d’une mission. Il leur donne l’assurance que Lui, le Dieu tout-puissant, est avec eux. Il dit à Moïse et à Josué : « Je serai avec toi », et quand Jésus envoie ses disciples dans le monde pour y annoncer l’évangile, il leur dit aussi : « Voici, moi je suis avec vous jusqu’à la consommation du siècle » (Ex. 3:12 ; Jos. 1:5, 9 ; Mat. 28:20 ; voyez aussi Actes 18:10).
— Mais nous qui n’avons pas à remplir des missions aussi grandes que Josué et les apôtres, pouvons-nous être assurés comme eux que Dieu est avec nous ?
— Certainement. Nous sommes aussi impuissants pour servir Dieu dans les moindres choses de notre vie journalière, pour résister aux tentations de l’ennemi et pour le combattre, que ces grands serviteurs de Dieu l’étaient pour accomplir l’œuvre dont Dieu les chargeait. Mais Dieu est avec nous aussi. Le Seigneur dit : « Je ne te laisserai point et je ne t’abandonnerai point ; en sorte que, pleins de confiance, nous disions : « Le Seigneur est mon aide et je ne craindrai point » (Héb. 13:5-6). Mais revenons à Gédéon. Il ne se rendit pas tout de suite à l’appel de Dieu. Il sentait bien dans son cœur que Celui qui lui parlait était plus qu’un prophète, mais il désirait en avoir la certitude, hésitant à penser que lui, le pauvre Abiézérite, avait devant lui l’Éternel lui-même. Il demande donc un signe qui lève tous ses doutes : « Je te prie », dit-il, « donne-moi un signe que c’est toi qui parles avec moi ». Et il prie l’Ange de l’Éternel d’attendre jusqu’à ce qu’il ait été chercher un présent pour le déposer devant Lui. Et l’Éternel condescend encore au désir de sa faible créature.
— Quelle bonté et quelle patience !
— Il en use de même avec nous. Gédéon rentra et apprêta un chevreau et des pains sans levain, les apporta avec le bouillon dans lequel le chevreau avait cuit, et les présenta à l’Ange. Mais celui-ci, au lieu de manger, ordonna à Gédéon de poser les mets sur un rocher qui se trouvait là et de verser le bouillon dessus. Puis il étendit le bâton qu’il avait en main et en toucha la viande et les pains, et aussitôt le feu monta du rocher et consuma le tout.
— C’était là le signe. Gédéon savait maintenant que c’était l’Éternel qui était là.
— Oui. L’Éternel avait agréé l’offrande de son serviteur, en se manifestant en même temps à lui. L’Ange de l’Éternel disparut de devant ses yeux ; mais le sentiment d’avoir été en la présence immédiate de Dieu remplit de crainte le cœur de Gédéon. Pourra-t-il vivre, lui un pécheur, après avoir vu le Saint ? C’est toujours l’effet produit quand une âme est amenée devant Dieu (És. 6:1-7). Le sentiment de son indignité anéantit Gédéon et lui fait oublier tout autre chose, même le grand service auquel Dieu l’appelle. Mais l’Éternel ne le laisse pas sous cette impression profonde de crainte. Dieu a toujours la parole de paix pour un pécheur qui sent son indignité en sa présence. Il dit à Gédéon : « Paix te soit ; ne crains point, tu ne mourras pas ».
— Cela me rappelle Pierre dans la barque avec Jésus, disant : « Retire-toi de moi, Seigneur ; car je suis un homme pécheur. Jésus ne se retira pas, mais il lui dit : « Ne crains pas » (Luc 5:1-11). Jésus ne se retire pas de nous, pauvres pécheurs. Il nous aime, nous sauve, et nous n’avons plus rien à craindre. Aussi je comprends bien qu’après cela, Pierre laisse tout pour suivre Jésus.
— Gédéon sentit aussi toute crainte disparaître de son cœur et, en signe de reconnaissance et d’adoration, ainsi que pour perpétuer le souvenir de cette scène mémorable dans sa vie, il bâtit un autel à l’Éternel et le nomma : « l’Éternel de paix » (Jéhovah-Shalom). Longtemps après, ce monument de sa reconnaissance subsistait encore à Ophra. C’est ainsi que, quand nous avons trouvé la paix avec Dieu par Jésus, le besoin de notre cœur est d’adorer et de servir le Seigneur. Maintenant que Gédéon est rassuré et en paix, sachant que l’Éternel est avec lui, il peut commencer son service. Mais la première chose à faire n’est pas de chasser les Madianites. Il y avait dans la maison même du père de Gédéon et, par conséquent, en Israël, une chose qui ne s’accordait pas avec l’autel de l’Éternel que Gédéon venait d’élever. C’était l’autel de Baal. « Quelle convenance y a-t-il entre le temple de Dieu et les idoles ? » (2 Cor. 6:16). La gloire de l’Éternel passait avant la délivrance d’Israël. La souillure des idoles devait être ôtée de la maison de Gédéon et de la terre de l’Éternel pour que Dieu puisse agir en faveur de son peuple. En même temps, il fallait que l’impuissance de Baal soit publiquement manifestée. L’Éternel commanda donc à Gédéon de démolir l’autel de Baal et de bâtir un autel à l’Éternel au sommet du haut lieu, puis de mettre en pièces l’ashère, c’est-à-dire l’idole de bois qui était près de l’autel de Baal, d’en placer les débris sur l’autel de l’Éternel, et d’offrir sur ce bois, en holocauste, un taureau que l’Éternel lui désigna parmi ceux qui appartenaient à son père. L’Éternel indiquait ainsi minutieusement à Gédéon tout ce qu’il avait à faire. C’est ainsi que les serviteurs de Dieu doivent en tout se laisser guider par Lui dans leur service.
— Mais Joas, le père de Gédéon, le laissa-t-il faire sans rien dire ?
— C’était de nuit que l’Éternel avait donné ses ordres à Gédéon, et ce fut aussi de nuit que celui-ci fit ce que Dieu lui avait commandé. De jour, il aurait craint la maison de son père et les gens de la ville. Et comme il n’aurait pu accomplir seul cette entreprise dans un court espace de temps, il se fit aider par dix de ses serviteurs.
— Les gens de la ville durent être bien surpris de ne plus retrouver leur autel et leur idole.
— Ils vinrent de bonne heure le matin, sans doute pour offrir leurs hommages au faux dieu, mais ils trouvèrent l’autel démoli, l’idole coupée et, sur un autel où fumaient les débris de l’ashère, un taureau offert en holocauste. Leur irritation fut grande. Qui avait pu commettre un tel acte ? De quelle peine n’était-il pas digne ? Ils cherchèrent le coupable et parvinrent à découvrir que ce n’était autre que Gédéon, le fil de Joas, celui-là même à qui l’autel appartenait. Ils ne doutèrent pas un moment que Joas qui, depuis si longtemps, abritait l’idolâtrie dans sa maison, ne se joindrait à eux pour venger l’injure faite à Baal. Et le seul châtiment qui leur sembla convenir, c’était la mort. Mais la fidélité de Gédéon et son courageux témoignage avaient déjà porté leurs fruits dans la maison. Dieu avait ouvert les yeux de Joas sur l’inanité des idoles et leur impuissance, en même temps que sur la puissance de l’Éternel. Il prit en main avec hardiesse la cause du vrai Dieu, et répondit : « Est-ce vous qui plaiderez pour Baal ? Est-ce vous qui le sauverez ? Celui qui plaide pour lui, qu’il soit mis à mort, d’ici au matin. S’il est dieu, qu’il plaide pour lui-même, car on a démoli son autel ». Et en effet, ce n’était pas celui qui détruisait les idoles qui devait mourir, mais, selon la loi de Moïse, c’était celui qui les soutenait (Deut. 13:6-11). Et quelle preuve plus grande de l’impuissance de Baal que d’avoir laissé, sans agir, démolir son autel.
— C’est beau de la part de Joas d’avoir agi ainsi. Il était converti tout à coup des idoles au Dieu vivant et vrai, et il ne craint pas de le confesser.
— En effet. Maintenant Gédéon pourra rassembler Israël, au nom de l’Éternel, pour combattre Madian. En souvenir de ce débat entre Joas les gens d’Ophra, on donna à Gédéon le surnom de Jérubbaal, ce qui veut dire : Que Baal plaide.
Nous avons parlé longuement de l’appel de Gédéon et de ce qu’il eut d’abord à faire pour purifier de l’idolâtrie la maison de son père. Maintenant il a une mission à accomplir, délivrer Israël de ses ennemis. Les Madianites, les Amalékites et les tribus nomades passèrent encore cette année-là le Jourdain à l’époque accoutumée pour opérer leurs razzias habituelles. Mais ils ignoraient ce qui s’était passé entre l’Éternel et son peuple.
— Les Israélites avaient crié à l’Éternel qui avait préparé Gédéon comme libérateur, n’est-ce pas ?
— Les ennemis d’Israël croyaient donc pouvoir accomplir leurs méfaits comme auparavant. Mais quand ils se furent répandus dans la vallée de Jizréel et eurent planté leurs tentes, l’Esprit de l’Éternel revêtit Gédéon. Tu vois que le serviteur de Dieu attendit l’ordre de Dieu pour agir. C’est ce que nous voyons aussi dans les Actes quand Paul et Barnabas sont envoyés prêcher l’évangile aux nations (Act. 13:2, 4). Gédéon ayant donc appris que le moment de l’action était venu, sonna de la trompette, et les Abiézérites s’assemblèrent autour de lui. En même temps il envoya des messagers par toute la tribu de Manassé dont il faisait lui-même partie, et aux tribus d’Aser, de Nephtali et de Zabulon qui demeuraient au nord de Manassé, de l’autre côté de la plaine de Jizréel, et de toutes ces tribus des gens de guerre vinrent vers lui.
— Cela devait faire une grande armée.
— Trente-deux mille hommes, mais nous verrons que ce n’est pas par cette grande armée que l’Éternel délivra Israël. En la voyant autour de lui, Gédéon se sentait encore faible, sa foi avait besoin d’être soutenue et, malgré les assurances que l’Éternel lui avait données qu’il était avec lui, il demanda à Dieu de lui donner un signe, et Dieu condescendit à la demande de son serviteur.
— Mais n’était-ce pas un manque de foi ?
— Gédéon avait une grande œuvre devant lui ; il sentait toute sa faiblesse, il avait besoin d’une entière assurance en Dieu, et il valait mieux que, dans son infirmité et se sentant chanceler, il eût recours à Dieu plutôt que d’être présomptueux et de se glorifier de son armée. Pierre aussi, quand il voit les vagues et le vent, qu’il a peur et qu’il enfonce, s’écrie : « Seigneur, sauve-moi ! », et Jésus étend la main et le sauve (Matt. 14:29-31). De même Dieu a toujours compassion de notre faiblesse quand nous nous tournons vers lui. « Approchons-nous donc avec confiance du trône de la grâce, afin que nous recevions miséricorde et que nous trouvions grâce pour [avoir du] secours au moment opportun » (Héb. 4:16).
— Quel signe l’Éternel donna-t-il à Gédéon ?
— Lis les versets 36-40 du chapitre 6.
— « Et Gédéon dit à Dieu : Si tu veux sauver Israël par ma main, comme tu l’as dit, voici, je mets une toison de laine dans l’aire : si la rosée est sur la toison seule, et que la sécheresse soit sur toute la terre, alors je connaîtrai que tu sauveras Israël par ma main, comme tu l’as dit. Et il arriva ainsi. Et il se leva de bonne heure le lendemain, et il pressa la toison et exprima la rosée de la toison, plein une coupe d’eau. Et Gédéon dit à Dieu : Que ta colère ne s’embrase pas contre moi, et je parlerai seulement cette fois : encore une seule fois, je te prie, je ferai un essai avec la toison ; je te prie qu’il n’y ait de la sécheresse que sur la toison, et que sur toute la terre il y ait de la rosée. Et Dieu fit ainsi cette nuit-là : et la sécheresse fut sur la toison seule, et sur toute la terre il y eut de la rosée ». Ainsi, Gédéon demanda deux signes à Dieu, et Dieu les lui donna : quelle bonté de sa part, et quelle patience !
— Oui, il est précieux de connaître un tel Dieu et de se confier en Lui. Maintenant Gédéon part avec son armée et s’établit sur les collines au sud des Madianites qui campaient dans la vallée et qui, sans doute, avaient eu connaissance du mouvement des Israélites et se tenaient sur leurs gardes. Gédéon attendait que l’Éternel lui donnât ordre d’attaquer. Mais l’Éternel lui dit : « Le peuple qui est avec toi est trop nombreux, pour que je livre Madian en leur main, de peur qu’Israël ne se glorifie contre moi, disant : Ma main m’a sauvé. Et maintenant, crie aux oreilles du peuple, disant : Quiconque est peureux et tremble, qu’il s’en retourne et s’éloigne ». C’est ce que Moïse aussi avait ordonné avant le combat (Deut. 20:8).
— Y en eut-il beaucoup qui craignirent les ennemis ?
— Le cœur d’un très grand nombre fut ainsi mis à découvert. Vingt-deux mille hommes quittèrent Gédéon. Ces hommes au cœur craintif auraient été une entrave dans le combat. Pour résister à l’ennemi, il faut être fort dans le Seigneur (Éph. 6:10) ; alors on n’a pas peur. Mais les dix mille restants étaient encore trop nombreux. Dieu comme toujours voulait montrer sa puissance à Lui dans la faiblesse extrême de l’homme (2 Cor. 12:9, 10). Dans le premier cas, les craintifs s’étaient manifestés eux-mêmes, sans que Dieu les nommât. Maintenant d’entre les dix mille, l’Éternel choisira lui-même ceux dont il veut se servir.
— Dieu les nomma-t-il à Gédéon ?
— Non, mais il les lui fait connaître par un moyen qui révélait le caractère qui convenait à l’œuvre qu’ils devaient faire. L’Éternel commanda qu’ils descendent tous vers l’eau pour boire, et dit à Gédéon de mettre à part ceux qui prendraient l’eau dans leur main et la porteraient à leur bouche pour la laper avec leur langue. Trois cents seulement se rafraîchirent ainsi ; tous les autres se mirent à leur aise sur leurs genoux afin de boire plus commodément à longs traits. L’Éternel dit alors à Gédéon : « Par les trois cents hommes qui ont lapé [l’eau] je vous sauverai, et je livrerai Madian en ta main ».
— Pourquoi l’Éternel a-t-il choisi ceux-là ?
— Il n’y a aucun mal à se désaltérer commodément. Mais, s’il veut être entièrement propre pour le service de Dieu, un homme ne doit pas rechercher ses aises. L’apôtre Paul disait : « Je mortifie mon corps et je l’asservis » (1 Cor. 9:27). Celui qui cherche ce qui plaît à ses sens ne sera pas prêt à être content, comme Paul, dans les circonstances où il se trouve (Phil. 4:11-12), et sera en danger de murmurer ou de faiblir quand les difficultés viendront. Ces hommes que l’Éternel mit à part montraient, par un simple acte, qu’ils ne se souciaient pas de leur confort, et étaient prêts à affronter les dangers. Comme dit encore l’apôtre : « Nul homme qui va à la guerre ne s’embarrasse dans les affaires de la vie » (2 Tim. 2:4). Tels étaient les trois cents, et tels nous devrions être pour le service de notre maître, ne nous inquiétant que d’une seule chose : Lui plaire.
— C’est bien difficile de s’oublier soi-même.
— C’est en étant occupé du Seigneur que nous nous oublions. L’Éternel connaissait bien le cœur de son serviteur Gédéon qui était facilement envahi par la crainte comme, je pense, plus tard celui de Timothée que Paul devait encourager à ne pas avoir honte du témoignage du Seigneur quand l’apôtre était prisonnier et que tous l’abandonnaient (2 Tim. 1:6-8, 15). Gédéon se demandait sans doute comment combattre cette multitude innombrable avec trois cents hommes. Mais la nuit même du jour où il avait mis à part cette petite troupe, l’Éternel lui dit de descendre vers le camp des Madianites pour écouter ce qu’ils disaient, et qu’alors il serait fortifié. Et Dieu ajouta même : « Si tu crains d’y descendre, descends vers le camp, toi et Pura, ton jeune homme ». Gédéon et Pura descendirent donc jusqu’aux avant-postes des Madianites.
— Ils devaient avoir peur d’aller seuls si près des ennemis. Mais l’Éternel les gardait puisque c’était sur son ordre qu’ils étaient descendus. Qu’est-ce qu’ils entendirent ?
— Tu peux le lire au chapitre 7 versets 13 et 14.
— « Et Gédéon arriva, et voici, un homme racontait un songe à son compagnon ; et il disait : Voici, j’ai songé un songe ; et voici, un gâteau de pain d’orge roulait dans le camp de Madian, et il arriva jusqu’à la tente et la heurta, et elle tomba ; et il la retourna sens dessus dessous, et la tente était là renversée. Et son compagnon répondit et dit : Ce n’est pas autre chose que l’épée de Gédéon, fils de Joas, homme d’Israël : Dieu a livré Madian et tout le camp en sa main ». Cela dut singulièrement fortifier Gédéon. L’Éternel avait envoyé le songe à un Madianite et avait mis au cœur de l’autre l’interprétation.
— Aussi l’émotion et la reconnaissance de Gédéon furent-elles grandes. Devant cette nouvelle preuve que Dieu était avec lui, chose que même ses ennemis reconnaissaient, il sentit son âme remplie d’adoration et il se prosterna devant l’Éternel. Il comprit aussi que le moment d’agir était venu.
— Pourquoi Gédéon et son épée sont-ils représentés par un pain d’orge ?
— L’orge était une nourriture grossière. C’étaient les pauvres qui s’en nourrissaient, et encore maintenant en ces contrées, « mangeur de pain d’orge » est un terme de mépris. Gédéon avait dit de lui : « Mon millier est le plus pauvre en Manassé, et moi je suis le plus petit dans la maison de mon père » (6:15). Le pain d’orge était donc une image bien choisie pour montrer la petitesse et la faiblesse de Gédéon aux yeux des hommes. Mais ce pain d’orge renverse le camp puissant des Madianites. La puissance de Dieu agissait par ce faible instrument. Et cela nous rappelle les paroles de Paul aux Corinthiens quand il leur parle de la croix de Christ qui, pour le monde, était un opprobre et une folie, mais qui était la puissance et la sagesse de Dieu pour sauver ceux qui croient : « Dieu a choisi les choses viles du monde, et celles qui sont méprisées, et celles qui ne sont pas, pour annuler celles qui sont ; en sorte que nulle chair ne se glorifie devant Dieu » (1 Corinthiens 1:28-29).
L’Éternel avait encouragé Gédéon. Maintenant le moment d’agir était venu, et Gédéon, revenu vers ses trois cents hommes leur dit : « Levez-vous, car l’Éternel a livré le camp de Madian en votre main ».
— Comment, avec une si petite armée, osa-t-il attaquer une si grande armée ?
— « Rien n’empêche l’Éternel de sauver, avec beaucoup ou avec peu de gens », disait plus tard Jonathan au jeune homme qui portait ses armes (1 Samuel 14:6), et Gédéon comprenait cela aussi. Il n’attaqua pas immédiatement les Madianites mais, dirigé par la sagesse que Dieu lui donna et confiant dans l’intervention puissante de l’Éternel, voici ce qu’il fit. Il divisa ses hommes en trois corps de cent hommes chacun, puis il donna à tous des trompettes, des cruches vides et des torches allumées dans les cruches.
— Était-ce là leurs armes ?
— Ils avaient aussi, sans doute, leurs épées à leur côté, mais ce n’était pas de leurs épées qu’ils avaient d’abord à se servir ; c’était de ces instruments en apparence très inoffensifs, mais propres à produire l’effet que se proposait Gédéon. Dieu se sert des choses viles du monde pour annuler les choses fortes. Nous voyons cela partout et toujours dans ses voies. Gédéon plaça ses trois bandes autour du camp endormi, lui-même resta avec l’une d’elles, et il leur dit : « Regardez ce que je vais faire, et faites de même ; voici, quand j’arriverai au bout du camp, alors ce que je ferai, vous le ferez de même ; et quand je sonnerai de la trompette, moi et tous ceux qui sont avec moi, vous aussi vous sonnerez des trompettes autour de tout le camp, et vous direz : Pour l’Éternel et pour Gédéon ! ».
— Cela me fait penser que nous devons aussi regarder ce que Jésus a fait, et agir comme Lui.
— Et tu as raison. Il nous a laissé un modèle afin que nous suivions ses traces (1 Pi. 2:21). Et en particulier il nous faut combattre Satan comme Lui l’a fait, par la parole de Dieu et par la prière. Voyons donc ce que fit Gédéon. Un peu après le milieu de la nuit, lorsque tout le camp était plongé dans un profond sommeil, Gédéon et ses cent hommes avancèrent en silence près de l’extrémité du camp et, tout d’un coup, sonnèrent de la trompette et, brisant les cruches qu’ils tenaient dans leurs mains gauches, firent briller dans les ténèbres de la nuit la lumière des torches. Au même instant, les deux autres troupes placées de chaque côté du camp les imitèrent, et tous ensemble crièrent dans la nuit : « L’épée de l’Éternel et de Gédéon ! »
— Quel effroi dut saisir les pauvres Madianites soudainement réveillés par le son éclatant des trompettes et les cris des Israélites !
— Oui. Le cœur de ceux qui ne connaissent pas Dieu est facilement rempli de frayeur. L’éclat de trois cents torches et le son éclatant de trompettes pouvait faire croire aux Madianites qu’ils avaient affaire à une armée considérable. Aussi, dans le désordre des pensées d’un réveil brutal, dans la confusion produite par les ténèbres, sans pouvoir distinguer les ordres de leurs chefs, tous se mirent à courir, à pousser des cris de détresse et à fuir. Mais, empêchés les uns par les autres, se prenant mutuellement pour des ennemis, toujours poursuivis et excités par le son incessant des trompettes, ils tournèrent les armes les uns contre les autres, et un grand nombre s’entretuèrent. Tous ceux qui restèrent s’enfuirent vers le Jourdain dans une déroute complète.
— Gédéon les poursuivit-ils ?
— Sans doute, mais non pas seul avec les trois cents hommes. Les troupes qu’il avait d’abord renvoyées se joignirent à lui. Maintenant que la foi de Gédéon et de sa petite bande avait remporté la victoire, les timides prirent courage. Gédéon envoya aussi des messagers aux Éphraïmites pour leur dire de garder les passages du Jourdain par où les Madianites auraient pu s’enfuir. C’est ce qu’ils firent. Ils s’emparèrent de deux des principaux chefs des Madianites, nommés Oreb et Zeëb, qu’ils tuèrent et dont ils firent apporter les têtes à Gédéon. Mais en même temps, ils lui adressèrent des reproches.
— Que leur avait-il fait ?
— Ils se plaignirent de ce que Gédéon ne les avait pas appelés à se joindre à lui quand il avait commencé la guerre contre Madian. C’était facile à dire maintenant que la victoire était remportée ; mais, si au commencement ils avaient eu vraiment à cœur la gloire de l’Éternel et le bien de son peuple, ils n’auraient pas eu besoin que Gédéon les invitât à se joindre à lui.
— Gédéon fut-il fâché contre eux ?
— Non, Gédéon, conduit par l’Esprit de Dieu, comprenait qu’il ne doit pas y avoir de dissensions entre ceux qui font partie du peuple de Dieu. Et c’est à quoi nous devons nous appliquer aussi. Si quelqu’un nous dit une parole blessante, ou nous accuse injustement, nous devons répondre avec douceur. C’est ce que fit Gédéon. Il fit ressortir devant les Éphraïmites le grand service qu’ils avaient rendu à Israël et l’excellence de leur tribu. « Qu’ai-je fait maintenant en comparaison de vous ? Les grappillages d’Éphraïm ne sont-ils pas meilleurs que la vendange d’Abiézer ? » leur dit-il, « Dieu a livré en votre main les princes de Madian, Oreb et Zeëb ; et qu’ai-je pu faire en comparaison de vous ? » « La réponse douce apaise la fureur » est-il écrit (Prov. 15:1), et ainsi les Éphraïmites furent-ils apaisés. L’apôtre nous dit : « Que, dans l’humilité, l’un estime l’autre supérieur à lui-même, chacun ne regardant pas à ce qui est à lui, mais chacun aussi à ce qui est aux autres » (Phil. 2:3-4). C’est ainsi que les querelles seront évitées.
— Est-ce que tous les Madianites furent détruits ?
— Cent vingt mille hommes étaient tombés ; il en restait quinze mille qui, avec leurs deux rois Zébath et Tsalmunna avaient réussi à passer le Jourdain. Gédéon suivi de ses trois cents hommes continuait à les poursuivre. Nous voyons comme l’Éternel les avait bien choisis. Quoique fatigués, ils ne s’arrêtaient pas. Il y avait en eux, comme en Gédéon, un dévouement entier, un oubli complet d’eux-mêmes. C’est ainsi qu’il doit en être du combat chrétien et le service du Seigneur. Comme Paul le dit de lui-même : « Abattus, mais ne périssant pas », et « nous ne nous lassons point » (2 Cor. 4:8, 9, 16).
— Paul aimait le Seigneur Jésus, voilà pourquoi il ne se lassait pas de travailler pour Lui.
— Tu as raison, et que Dieu nous donne d’être comme lui. Mais en servant le Seigneur, on ne trouve pas toujours l’aide et l’encouragement de la part de ceux dont on serait en droit de l’attendre. C’est ce qu’éprouva Gédéon. Il demanda aux habitants de Succoth et de Pénuel du pain pour restaurer ses hommes fatigués. Les uns et les autres y répondirent par un refus insultant, mettant même en doute le succès de Gédéon, ce qui prouvait un manque de foi en l’Éternel et un manque de cœur pour son peuple. Gédéon passa outre, annonçant toutefois à ces hommes au cœur dur le châtiment qu’il leur réservait à son retour. En effet, après avoir mis en déroute les ennemis et s’être emparé des deux rois, il revint et châtia ceux qui s’étaient refusés à soutenir la cause du peuple de Dieu.
— Ils l’avaient bien mérité. Gédéon ne leur demandait rien de bien difficile. Ce n’était pas d’exposer leur vie comme lui la sienne, mais d’aider ceux qui combattaient si vaillamment pour Israël. Il devait être très peiné de voir des Israélites si peu zélés.
— Sans doute. Bien longtemps après, l’apôtre Paul éprouva quelque chose de semblable quand il se trouva aux prises avec des ennemis redoutables, Satan et les puissances de ce monde. Il était en prison et devait comparaître devant le puissant empereur romain. Dans cette situation, au lieu de lui venir en aide, tous ses amis le laissèrent. « Dans ma première défense, personne n’a été avec moi, mais tous m’ont abandonné » (2 Tim. 4:16-17). Penses-tu que l’apôtre ait demandé au Seigneur de les châtier ?
— Oh, non ! C’était tout autre chose. Gédéon était sous la loi qui demandait vengeance contre les ennemis de l’Éternel, et ceux qui se joignaient à eux. Mais Paul était l’imitateur du Seigneur Jésus qui priait pour ses ennemis.
— Oui, et cela fait une immense différence. Aussi Paul, rempli de l’Esprit de son Maître, dit-il : « Que cela ne leur soit pas imputé ». Et il ajoute cette belle parole : « Mais le Seigneur s’est tenu près de moi et m’a fortifié ». Tous pouvaient abandonner Paul, et sans doute il en souffrait dans son cœur, mais Quelqu’un était là, qui ne l’abandonnait pas : le Seigneur était avec lui. Cela suffisait à le consoler et lui faire remporter la victoire. Et il peut dire aussitôt : « J’ai été délivré de la guerre du lion ». Il en fut de même de Gédéon. L’Éternel se tint près de lui pour le fortifier, en dépit de tout le mauvais vouloir des gens de Succoth et de Pénuel. Les deux rois de Madian furent mis à mort, la force des ennemis d’Israël fut anéantie, et le peuple entièrement délivré et enrichi des dépouilles des Madianites. « Et Madian », est-il dit, « fut humilié devant les fils d’Israël ; et il ne leva plus sa tête. Et le pays fut en repos quarante ans, aux jours de Gédéon ».
Bonne Nouvelle1888 pages 208 à 215
— Après la victoire si complète remportée sur les Madianites, Dieu permit que la fidélité de Gédéon fût mise à l’épreuve. Les Israélites lui proposèrent de devenir leur roi et ses descendants après lui. « Domine sur nous, et toi et ton fils, et le fils de ton fils ; car tu nous as sauvés de la main de Madian » (Juges 8:22).
— Il me semble que les Israélites ne pensaient pas à Dieu en proposant cela à Gédéon. C’est l’Éternel qui les avait sauvés. Sans Lui, Gédéon n’aurait rien pu faire.
— Tu as raison. Et les Israélites ne se demandaient pas non plus si c’était la volonté de Dieu ; ils suivaient leur propre pensée. Le fidèle serviteur de Dieu repousse la proposition qui lui était faite et, dans sa réponse, tourne les regards des Israélites vers leur vrai Libérateur, l’Éternel. « Je ne dominerai point sur vous », dit-il, « et mon fils ne dominera point sur vous ; l’Éternel dominera sur vous » (8:23). Les vrais serviteurs de Dieu ont toujours refusé la gloire pour eux-mêmes et l’ont rendue à Dieu. Lisez à ce sujet Actes 3:12-13 ; 14:14-15 ; 1 Cor. 3:5. Mais si Gédéon refusa la royauté, il fit seulement une demande aux Israélites : « Donnez-moi chacun de vous les anneaux de son butin » (8:24). C’étaient les anneaux d’or que portaient les Madianites aux oreilles et peut-être au nez. Les Israélites répondirent qu’ils les donneraient volontiers car ils éprouvaient une vive reconnaissance pour Gédéon et étaient heureux de lui en donner la preuve.
— Qu’est-ce que Gédéon voulait faire de ces anneaux ? Était-ce pour lui-même qu’il les demandait ?
— Non, Gédéon ne voulait pas s’enrichir. Il ne demandait rien pour lui-même. Avec tous ces anneaux et d’autres dépouilles provenant des Madianites, il fit un éphod qu’il plaça à Ophra, sa ville.
— Qu’est-ce que l’éphod ?
— C’est une espèce de manteau sans manches, attaché autour du corps par une ceinture tirée de l’éphod même. Les sacrificateurs le mettaient par-dessus leurs autres vêtements dont il formait la pièce essentielle quand ils accomplissaient les cérémonies du culte. Même les sacrificateurs des idoles en portaient un (Juges 17:5). Pour indiquer la cessation de tout culte chez les Israélites rejetés et dispersés à cause de leurs péchés, Osée dit : « Les fils d’Israël resteront beaucoup de jours … sans sacrifice … et sans éphod » (Osée 3:4). Le souverain sacrificateur de l’Éternel avait un éphod d’une grande richesse, fait selon le modèle même que Dieu avait donné à Moïse (Ex. 28:5-14).
— Que voulait-il faire de cet éphod dans sa ville ? Il n’avait quand même pas la pensée d’avoir une idole dans sa ville, lui qui avait renversé l’autel de Baal.
— Je ne le pense pas. Gédéon resta certainement attaché à l’Éternel jusqu’à la fin car, « le pays fut en repos quarante ans, aux jours de Gédéon », est-il dit. Il fit peut-être cet éphod dans la pensée d’honorer Dieu, comme un trophée et un mémoriel de la victoire que l’Éternel avait accordée aux Israélites, et afin que ceux-ci s’en souvinssent. Peut-être aussi était-ce dans le but d’offrir des sacrifices à Ophra sur l’autel que l’Éternel lui avait dit d’élever. Il avait sans doute une bonne intention mais cela ne suffit pas pour honorer Dieu. Gédéon n’avait reçu aucun ordre de Dieu pour faire un éphod ; il aurait dû se souvenir que le tabernacle, l’autel de l’Éternel, se trouvait à Silo ainsi que le souverain sacrificateur établi de Dieu et qui seul portait l’éphod consacré par l’Éternel. C’était là que l’Éternel avait mis son nom, et là que Gédéon aurai dû ramener le peuple (Deut. 12:4-14), pour rendre culte à Dieu. Il ne le fit pas, et la parole de Dieu le blâme en disant que « tout Israël se prostitua là après celui-ci », c’est-à-dire se détourna de Dieu à Ophra, et que « cela devint un piège pour Gédéon et pour sa maison ». Non seulement il faut adorer Dieu, mais il faut le faire de la manière prescrite par sa parole et non selon nos propres pensées. Aussi qu’arriva-t-il ? C’est que « quand Gédéon fut mort, il arriva que les fils d’Israël retournèrent et se prostituèrent après les Baals, et ils s’établirent Baal-Berith pour dieu ».
— L’Éternel les punit-il en envoyant contre eux des nations ennemies pour les assujettir.
— Non. Leur châtiment fut des divisions intestines, ils se combattirent entre eux. Quand le cœur est éloigné de Dieu, il devient la proie des convoitises et de toute espèce de passions coupables (Rom. 1:21-24 ; Tite 3:3). C’est ce que l’on voit dans la conduite des Israélites après la mort de Gédéon. Ils commencèrent par se livrer à l’idolâtrie, puis tombèrent dans toutes sortes de méchancetés.
— N’y eut-il point de juge pour continuer à gouverner les Israélites ?
— Non. Dieu, qu’ils avaient abandonné, les laissa pour un temps livrés à eux-mêmes, et ce fut une triste époque où se montra toute la méchanceté du cœur sans Dieu. La famille de Gédéon était très nombreuse. Il avait soixante-dix fils qui demeuraient avec lui à Ophra, et un autre, nommé Abimélec, qui restait à Sichem d’où était sa mère. Sichem est une ville de la tribu d’Éphraïm et s’appelle maintenant Naplouse. C’est une des plus anciennes villes du monde. Elle existait déjà du temps de Jacob (Gen. 33:18). Elle est située dans une étroite vallée, entre le mont Hébal et le mont Garizim (Deut. 27), au milieu d’une belle et fertile contrée. Cet Abimélec était un homme ambitieux, rusé et cruel, sans crainte de Dieu. Tout différent de Gédéon, son père, il voulait être roi. Pour réussir dans son dessein, il commença par gagner la confiance des habitants de Sichem. Il les persuada que les soixante-dix fils de Gédéon voulaient dominer sur eux, et qu’il vaudrait mieux n’avoir qu’un seul chef. Les gens de Sichem le crurent et tirèrent du trésor de leur dieu Baal-Bérith une somme d’argent qu’ils lui donnèrent. Avec cet argent d’iniquité, Abimélec leva une troupe de gens turbulents et sans crainte de Dieu, comme lui, afin de l’aider dans ses mauvais desseins. Il alla avec eux à Ophra, s’empara de tous ses frères et les fit mettre à mort. Un seul échappa, ce fut Jotham, le plus jeune.
— Quelle chose affreuse ! Et personne à Ophra ne prit leur défense ?
— Non. L’Écriture dit : « Les fils d’Israël ne se souvinrent pas de l’Éternel, leur Dieu, qui les avait délivrés de la main de tous leurs ennemis tout à l’entour ; et ils n’usèrent pas de bonté envers la maison de Jerubbaal, [qui est] Gédéon, selon tout le bien qu’il avait fait à Israël » (Juges 8:33). L’oubli de Dieu entraîne l’ingratitude envers les hommes, la cruauté et l’absence des affections naturelles. C’est le triste tableau qui est ici sous nos yeux, et c’est ce que produit le cœur naturel. L’apôtre Paul énumère tout au long ces mauvais fruits, en Romains un et trois, où il dit des hommes qui n’ont pas voulu garder la connaissance de Dieu, qu’ils sont « remplis de toute injustice, de méchanceté, de cupidité, de malice, — pleins d’envie, de meurtres … sans affection naturelle », et que « leurs pieds sont rapides pour verser le sang ». Nous voyons tout cela dans l’histoire d’Abimélec et des habitants de Sichem et d’Ophra.
— Les autres Israélites ne repoussèrent-ils pas Abimélec à cause de son horrible action ?
— Loin de là. Il revint à Sichem dont les habitants l’établirent roi, et il semble bien que sa royauté passagère fut reconnue car il nous est dit qu’il fut prince sur Israël. Tout au moins, les autres tribus ne s’opposèrent pas à son règne.
— Mais Dieu avait vu toute sa méchanceté et je suis sûre qu’Il le punit.
— Certainement. Dieu est le juste juge (Ps. 7:11), et « l’inique ne sera point tenu pour innocent » mais « le méchant tombe par sa méchanceté », il « fait une œuvre trompeuse » (Prov. 11:21, 5, 18), et c’est ce qui nous est présenté d’une manière frappante dans la suite de notre histoire. Le châtiment de Dieu fut dénoncé à Abimélec et aux Sichémites par Jotham. Après qu’on eut établi Abimélec comme roi, il monta sur la montagne de Garizim et dit : « Écoutez-moi, hommes de Sichem, et Dieu vous écoutera ! »
— Que voulait-il dire par là ?
— C’est comme s’il eût dit : Dieu n’est pas indifférent à vos actes, il sait tout ce que vous dites et faites aussi certainement que vous entendez ma voix. Puis après leur avoir montré leur noire ingratitude envers Gédéon qui avait exposé sa vie pour Israël, et dont ils avaient laissé tuer les fils, il termine en disant : « Qu’un feu sorte d’Abimélec, et qu’il dévore les hommes de Sichem et la maison de Millo ; et qu’un feu sorte des hommes de Sichem et de la maison de Millo, et qu’il dévore Abimélec ! » Et cette juste malédiction s’accomplit : ils périrent les uns par les autres.
— Abimélec fut-il longtemps roi ?
— Il garda trois ans son pouvoir. Puis la discorde s’installa entre lui et ceux qui l’avaient fait roi. « Dieu », est-il dit, « envoya un mauvais esprit entre Abimélec et les hommes de Sichem ; et les hommes de Sichem agirent perfidement envers Abimélec, afin que la violence commise sur les soixante-dix fils de Jerubbaal vînt [sur lui], et que leur sang fût mis sur Abimélec, leur frère, qui les avait tués, et sur les hommes de Sichem, qui avaient fortifié ses mains pour tuer ses frères ». Dieu peut tarder à exécuter le jugement, mais il ne laisse pas le mal impuni. Il a toujours la haute main sur tout, et le monde entier le saura un jour (Actes 17:31). Les hommes de Sichem se lassèrent d’obéir à Abimélec et voulurent se débarrasser de lui par ruse. Ils agirent perfidement avec lui et se choisirent un autre chef nommé Gaal dans une fête qu’ils célébrèrent dans la maison de leur dieu. Mais Abimélec fut averti de leur complot et marcha avec son armée contre Sichem. Gaal avec son armée vint à sa rencontre, mais il fut battu et s’enfuit.
— Quelle triste chose de voir des Israélites se combattre entre eux.
— Oui, cela montre le misérable état dans lequel ils étaient tombés en s’éloignant de Dieu. Rien n’est plus douloureux que de voir le peuple de Dieu désuni et divisé en partis qui se combattent les uns les autres. Les Israélites, Abimélec à leur tête, oubliaient complètement qu’ils étaient frères. Il n’y avait plus dans leur cœur de pitié ou de miséricorde. Sichem fut prise par Abimélec, et tous les principaux avec un millier d’hommes et de femmes s’étaient réfugiés dans une tour près du temple de leur dieu, croyant peut-être qu’il les protègerait. Alors Abimélec dit à ses guerriers : « Ce que vous m’avez vu faire, hâtez-vous, faites-le comme moi ! »
— C’est ce que Gédéon avait dit à ses hommes quand ils combattaient les Madianites.
— Oui, mais là c’était contre les ennemis d’Israël. Ici, c’est contre des Israélites. On peut être imitateurs du mal comme on doit l’être du bien. « Bien-aimé », dit l’apôtre Jean à Gaïus, « n’imite pas le mal, mais le bien » (3 Jean 11).
— Mais qu’avait fait Abimélec ?
— Il avait coupé une forte branche d’arbre et tous firent comme lui. Puis ils mirent tout le bois contre la tour, y mirent le feu et brûlèrent ainsi la tour et tous ceux qui s’y trouvaient.
— Cela fait frémir. Comment peut-on être aussi cruel ?
— Que pouvait-on attendre de celui qui avait fait tuer ses propres frères sous ses yeux ? Le feu était sorti d’Abimélec et avait dévoré les habitants de Sichem, et Abimélec pensait peut-être dans son orgueil que rien ne lui résisterait, oubliant la seconde chose que Jotham avait dite. Mais Dieu n’oublie pas et sa parole est ferme. Il y avait une ville nommée Thébets qui était du parti des Sichémites. Abimélec la prit, et comme les habitants s’étaient réfugiés dans une tour forte au milieu de la ville, il voulut employer le moyen qui lui avait si bien réussi à Sichem. Mais Dieu avait fixé là le terme de sa vie d’iniquité. Comme il approchait de la porte de la tour pour y mettre le feu, une femme du haut de la muraille jeta sur lui une meule tournante d’un des moulins à bras dont on se servait pour moudre le blé et lui brisa le crâne.
— Mourut-il tout de suite, ou eut-il le temps de se repentir ?
— La parole de Dieu ne dit pas qu’il se soit repenti. Au contraire, il se montra plein d’orgueil dans sa mort comme dans sa vie. Se sentant frappé à mort, il dit au serviteur qui portait ses armes : « Tire ton épée et tue-moi, de peur qu’on ne dise de moi : Une femme l’a tué. Et son jeune homme le transperça, et il mourut ». Le feu était sorti des hommes de Sichem et avait dévoré Abimélec. Car « on ne se moque pas de Dieu ; car ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera » (Galates 6:7).
Bonne Nouvelle1888 pages 231 à 237.
— Après la mort d’Abimélec, Dieu montra encore sa patience et sa bonté envers son peuple si souvent égaré. Pour les sauver de la main de leurs ennemis et pour les gouverner, Il leur suscita deux juges, l’un nommé Thola de la tribu d’Issacar et l’autre nommé Jaïr du pays de Galaad de la tribu de Manassé. Ainsi s’écoulèrent encore quarante-cinq années paisibles.
— Ces pauvres Israélites auraient été plus heureux s’ils étaient toujours restés fidèles. Comment de si nombreuses expériences ne leur montraient-elles pas qu’il valait mieux servir l’Éternel ?
— C’est l’histoire de notre cœur. Nous savons bien que nous ne sommes heureux que dans le chemin de l’obéissance, et pourtant combien de fois ne nous en écartons-nous pas ? Malgré leurs nombreuses expériences, les enfants d’Israël se détournèrent encore une fois de l’Éternel et se mirent à servir les abominables divinités des nations qui les entouraient. Et ce fut par une de ces nations, les Ammonites, que Dieu les châtia. Ils commencèrent par écraser sous leur joug les tribus qui étaient de l’autre côté du Jourdain, puis ils passèrent le Jourdain pour faire aussi la guerre aux tribus de Juda, Benjamin et Éphraïm. Israël se trouva ainsi dans une grande détresse.
— Ils virent alors, sans doute, combien ils avaient été coupables.
— Oui, et ils se tournèrent vers Dieu en confessant leur péché. « Nous avons péché contre toi », dirent-ils, « car nous avons abandonné notre Dieu, et nous avons servi les Baals » (10:10).
— Dieu eut certainement compassion d’eux. Un verset d’Ésaïe dit : « Que le méchant abandonne sa voie, et l’homme inique ses pensées, et qu’il retourne à l’Éternel, et il aura compassion de lui, — et à notre Dieu, car il pardonne abondamment » (És. 55:7).
— C’est vrai que les compassions de Dieu sont en grand nombre. Mais l’Éternel voulait que, non seulement les enfants d’Israël sentent le besoin de son secours pour leur délivrance et reconnaissent qu’ils avaient péché contre Lui, mais aussi qu’ils abandonnent leur mauvaise voie. C’est pourquoi Il leur rappelle leurs délivrances passées, leur ingratitude, et leur dit : « Allez, et criez aux dieux que vous avez choisis ».
— Ces dieux-là ne pouvaient pas les délivrer, mais je pense que l’Éternel le leur disait pour leur montrer leur folie de s’attacher à des idoles qui ne sont rien.
— Et puisqu’elles n’étaient rien d’autre qu’une chose abominable aux yeux de Dieu, il fallait les rejeter. C’est ce que firent les enfants d’Israël. En renouvelant la confession de leurs péchés, ils montrèrent leur sincérité en ôtant du milieu d’eux les dieux des étrangers, et servirent l’Éternel. Ils cessèrent de mal faire et commencèrent à bien faire (Ésaïe 1:16). L’Éternel fut alors touché de la misère de son peuple.
— Leur choisit-Il un libérateur comme Gédéon ?
— Non, mais comme il est le Maître souverain des cœurs et des pensées, il dirigea tout de manière à ce que les enfants d’Israël trouvent un libérateur. Les Ammonites s’étaient rassemblés et avaient installé leur camp dans le pays de Galaad. Les Israélites se réunirent aussi contre eux à Mitspa, mais il leur fallait un chef pour les conduire. Il y avait d’entre les Galaadites un homme vaillant nommé Jephté. Il avait été chassé par ses frères de la maison de leur père et ainsi privé de son héritage parce qu’il n’était pas de la même mère qu’eux. Obligé de s’enfuir et sans ressources, il était devenu le chef d’une troupe de gens sans aveu qui, sans doute, vivaient de pillage. Sa réputation de bravoure et d’habileté était bien établie, et ce fut à lui que les principaux de Galaad s’adressèrent pour être chef de l’armée d’Israël.
— Quelle chose étrange et humiliante pour les Israélites de s’adresser à un tel homme.
— En effet, mais cela montre d’un côté comme Israël était tombé bas, et d’un autre que l’Éternel se sert des choses viles de ce monde et des méprisées pour annuler les choses que le monde estime (1 Cor. 1: 28). Nous voyons d’ailleurs que Jephté connaissait l’Éternel car il convient avec les principaux de Galaad devant l’Éternel, qu’ils prennent à témoin, qu’il resterait leur chef après avoir vaincu les Ammonites. Nous voyons aussi qu’il connaissait bien l’histoire d’Israël comme la rapporte Moïse dans le Deutéronome.
— Comment voyons-nous cela ?
— Jephté n’engagea pas tout de suite le combat. Il envoya des messagers au roi d’Ammon pour lui demander raison de son agression. Celui-ci répondit que c’était pour reprendre ce que les Israélites avaient enlevé aux Ammonites quand ils venaient d’Égypte. Mais Jephté lui rappela que le pays dont s’étaient emparé les Israélites était celui des Amorrhéens et non des Ammonites, comme cela se lit Nombres 21 et Deutéronome 2. Loin de là, l’Éternel avait défendu aux enfants d’Israël de faire la guerre aux Moabites et aux Ammonites parce qu’ils descendaient de Lot, le neveu d’Abraham. Mais le roi des Ammonites ne voulut pas écouter Jephté.
— Dans l’épître aux Hébreux, il est parlé de Jephté. Il est à côté de Gédéon et d’autres hommes qui par la foi ont remporté des victoires (Héb. 11:32).
— Les paroles de Jephté nous montrent en effet qu’il se confiait en l’Éternel pour la victoire. « L’Éternel, le Dieu d’Israël », dit-il au roi d’Ammon, « livra Sihon et tout son peuple en la main d’Israël » ; l’Éternel, le Dieu d’Israël, a dépossédé les Amoréens devant son peuple Israël, et toi, tu nous en dépossèderais ? … Nous aurons la possession de tous ceux que l’Éternel, notre Dieu, aura dépossédés devant nous … L’Éternel, le juge, jugera aujourd’hui entre les fils d’Israël et les fils d’Ammon ».
— On voit bien par ces paroles que Jephté reconnaissait l’Éternel comme le Dieu d’Israël qui avait donné autrefois la victoire à son peuple et qui saurait le maintenir dans la possession de ce qu’Il lui avait donné.
— Maintenant l’Éternel montre comment il répondait à la foi et sanctionnait le choix qu’Israël avait fait de Jephté pour chef. Le roi d’Ammon avait rejeté les paroles de Jephté et refusé de se retirer. Alors l’Esprit de l’Éternel fut sur Jephté, qui réunit les Galaadites et ceux de la tribu de Manassé et avec eux il marcha contre les Ammonites.
— Il ne pouvait pas manquer de remporter la victoire.
— Sans doute. Mais encore ici nous avons un exemple bien frappant de l’imperfection de l’homme. Jephté aurait dû avoir en l’Éternel une confiance implicite, mais un doute surgit dans son esprit. Il croit qu’il s’assurera mieux la victoire en faisant lui-même quelque chose. Il promet solennellement à l’Éternel que, s’il avait la victoire, il offrirait en holocauste ce qui sortirait de sa maison à sa rencontre quand il reviendrait en paix. L’Éternel ne demandait rien pour délivrer son peuple et rendre Jephté victorieux. C’est ainsi que l’homme à toujours tendance à vouloir ajouter quelque chose au salut purement gratuit que Dieu lui donne. Comme Jephté eut lieu de regretter ce vœu téméraire ! Il en sera de même de celui qui veut ajouter ses œuvres au salut.
— La première personne qui vint à sa rencontre ce fut sa propre fille, n’est-ce pas ?
— Oui, et c’était bien naturel. L’Éternel avait livré entre les mains de Jephté ses ennemis. Le bruit de cette victoire éclatante qui affranchissait le peuple d’Israël était parvenu jusqu’à Mitspa, la demeure de Jephté, et que pouvait faire sa fille unique sinon sortir au devant de son père vainqueur avec tous les témoignages de joie et d’honneur ? « Sa fille sortit à sa rencontre avec des tambourins et des danses » (11: 34).
— Quelle douleur dut remplir le cœur de Jephté !
— La parole de Dieu fait ressortir ce que cette douleur devait avoir d’intense en nous disant : « Et elle était seule, unique ; il n’avait, à part elle, ni fils ni fille ». Et cependant il n’essaya même pas de revenir sur un vœu qui laissait sa maison vide et désolée ; et sa fille, avec une abnégation touchante, se soumit heureuse de voir son père vainqueur et Israël délivré.
— Jephté était-il obligé d’accomplir un vœu si terrible ?
— Jephté s’en tenait à la parole de l’Éternel
qui dit : « Quand tu voueras un vœu à l’Éternel,
ton Dieu, tu ne tarderas pas à l’acquitter ; car l’Éternel,
ton Dieu, le redemandera certainement
de ta part, et il y aura du péché sur toi » (Deut.
23:21). Aussi Jephté dit-il : « J’ai ouvert [ma] bouche à l’Éternel, et ne puis revenir en arrière » (11:35).
C’était une immense souffrance pour lui, il n’aurait pas dû faire ce vœu, mais
l’ayant fait il estimait que l’obéissance à la parole de l’Éternel
passait avant les sentiment de son cœur.
— Cet exemple de Jephté nous montre avec quel soin nous devons veiller sur nos paroles.
— Malgré cette cruelle leçon, Jephté montra encore ce trait de son caractère, la précipitation et le manque de sagesse patiente. Les gens de la tribu d’Éphraïm, jaloux comme au temps de Gédéon parce qu’une autre tribu qu’eux avait délivré Israël et se trouvait ainsi à la tête du peuple, se plaignirent qu’on ne les eût pas appelés pour combattre et menacèrent de brûler Jephté et sa maison sur lui. C’était comme une déclaration de guerre. Mais si Jephté avait, comme Gédéon, répondu avec douceur, il aurait évité un grand mal. Au lieu de cela, il rassembla les guerriers de Galaad et combattit les Éphraïmites qui furent vaincus et traités sans pitié. Comme ils fuyaient vers le Jourdain, les Galaadites y étant arrivé avant eux les massacrèrent au passage. Pour reconnaître ceux d’Éphraïm ils faisaient prononcer à quiconque voulait passer le fleuve le mot « Shibboleth ». Les Éphraïmites ne pouvait pas bien le dire et sur ce signe, ils étaient mis à mort.
— C’est bien triste de voir des frères s’entretuer ainsi.
— Oui, cela montre dans quel triste état les Israélites étaient descendus peu à peu. Jephté ne jouit pas longtemps de sa position de juge. Au bout de six ans, il mourut.
— Les Israélites retombèrent-ils encore dans l’idolâtrie.
— Pas de suite. Dieu dans sa miséricorde leur suscita encore des juges de différentes tribus qui se succédèrent pendant 25 ans et sous lesquels Israël fut en paix.
Bonne Nouvelle 1889 pages 7-14, 24-29, 41-49
— Samson est le dernier juge dont il est parlé dans ce livre des Juges. C’est une histoire bien instructive. Les enfants d’Israël avaient recommencé à faire le mal, et l’Éternel les avaient livrés entre les mains des Philistins qui dominèrent sur eux quarante ans. Ce n’étaient pas, comme les Moabites et les Ammonites, des peuples demeurant hors du pays de Canaan ; ils avaient été laissés dans le pays par les Israélites, et maintenant, ceux-ci étant infidèles à leur Dieu, ils furent abandonnés à ces ennemis acharnés.
— Les Israélites crièrent donc de nouveau à Dieu pour être délivrés.
— Cela ne nous est pas dit. Les Israélites étaient descendus si bas qu’ils semblent s’être habitués à ce joug étranger et l’avoir accepté sans chercher de délivrance. C’est durant ces quarante années de la domination des Philistins, que Samson exerça sa charge de juge, et nous voyons que parfois les Israélites mêmes se mirent contre lui. Ils allèrent même une fois jusqu’à lui reprocher ses exploits contre les ennemis de son peuple, et ils voulurent même le livrer entre leurs mains. « Ne sais-tu pas », lui disent-ils, « que les Philistins dominent sur nous ? » (Juges 15:11). Ce qui caractérise Samson c’est qu’il est seul contre les Philistins, sans trouver d’aide et de soutien auprès de ses frères israélites.
— Le Seigneur Jésus était aussi seul au milieu de son peuple. Bien peu suivaient ses pas.
— Tu as raison et sous ce rapport Samson a été un bien beau type du Seigneur. Seul, il a préparé par ses victoires, l’affranchissement des Israélites, achevé par Samuel et David, et dans sa mort, il a abattu la puissance de l’ennemi. Samson a été consacré à l’Éternel dès sa naissance.
— C’est donc sans que les Israélites l’aient demandé que l’Éternel leur prépara et leur envoya un libérateur ?
— Oui, et c’est ainsi que Dieu nous a aussi envoyé son Fils pour nous sauver quand nous étions loin de Lui et que nous ne pensions pas à Lui. Comme le dit plus tard le prophète : « Je suis recherché de ceux qui ne s'enquéraient pas [de moi], je suis trouvé de ceux qui ne me cherchaient pas. J'ai dit : Me voici, me voici, à une nation qui n'était pas appelée de mon nom » (Ésaïe 65:1). Si les Israélites oubliaient leur Dieu, Lui n’oubliait pas le peuple qu’il avait élu.
— L’apôtre Paul a dit : « Si nous sommes incrédules, lui demeure fidèle, car il ne peut se renier lui-même » (2 Timothée 2:13). Penses-tu que cela puisse s’appliquer aux Israélites ?
— Oui, et à nous aussi. Il nous arrive trop souvent, hélas, de manquer de confiance, mais Dieu reste le même. Son amour ne change pas, bien qu’il soit parfois obligé de châtier les siens quand ils s’égarent.
— De quelle tribu était Samson ? Les parents de Samson étaient-ils de fidèles Israélites ?
— Ses parents étaient de la tribu de Dan, dont le territoire était tout près du pays des Philistins, et demeuraient à Tsorha. Tout ce qui nous est dit d’eux démontre que c’étaient des Israélites pieux, connaissant l’Éternel et lui restant attachés en dépit de l’infidélité générale. Nous l’avons déjà vu pour Gédéon, et on le voit aussi du temps du Sauveur où, au milieu du formalisme de la masse du peuple, se trouvaient des âmes comme Zacharie, Élisabeth, Joseph, Marie et Anne. C’est une grande consolation de savoir que, dans les temps les plus sombres, Dieu a toujours ses témoins. Le père de Samson se nommait Manoah, mais il ne nous est pas dit le nom de sa mère. Ils n’avaient jamais eu d’enfants et ne semblaient pas espérer en avoir.
— C’était comme Abraham, et aussi comme Zacharie et Élisabeth, les parents de Jean le baptiseur.
— En effet, et c’était sans doute pour eux un grand chagrin. Mais Dieu allait les consoler. Tandis que la femme de Manoah était seule, l’Ange de l’Éternel lui apparut et lui annonça qu’elle allait avoir un fils. Jusqu’à sa naissance, elle devait s’abstenir de boire du vin ou des boissons fermentées, et de ne manger rien d’impur parce que l’enfant devait être nazaréen, c'est-à-dire consacré à l’Éternel dès sa naissance. Le rasoir ne devait pas passer sur sa tête, les longs cheveux étant le signe du nazaréat (Nombres 6).
— L’ange Gabriel avait dit à Zacharie qu’il aurait un fils qui serait aussi nazaréen. Et Jésus a été le nazaréen parfait toute sa vie.
— C’est vrai, dans sa marche toute entière notre précieux Sauveur était absolument pur et séparé du mal, et nous devons être comme Lui (Jean 17:19). L’Ange dit aussi à la femme de Manoah que son fils commencerait à délivrer Israël de la main des Philistins.
— Cela dut être un sujet de joie pour elle car les Israélites fidèles étaient sans doute très affligés de voir les Philistins dominer sur eux. C’était une grande grâce que Dieu accordait à elle et à son peuple.
— Après avoir entendu ces bonnes paroles, la femme alla les annoncer à son mari. « Un homme de Dieu est venu vers moi », lui dit-elle, « et son aspect était comme l'aspect d'un ange de Dieu, très terrible ; et je ne lui ai pas demandé d'où il était, et il ne m'a pas fait connaître son nom ».
— Elle n’avait pas reconnu qui lui parlait, elle avait pris l’Ange de l’Éternel pour un homme.
— Il apparut en effet sous la figure d’un homme, et elle le prend pour un homme de Dieu ou un prophète. Mais elle voyait bien, dans son aspect, quelque chose qui la frappait et la troublait car elle oublie de lui demander d’où il était, et lui ne lui dit pas qui il était. Manoah, ayant entendu les choses extraordinaires que lui disait sa femme, désira beaucoup en avoir une entière certitude. Mais à qui s’adresser puisqu’il ne savait ni le nom ni la demeure de celui qui était venu ?
— Il pouvait le demander à Dieu puisque évidemment le message venait de Dieu.
— C’est ce que fit Manoah, et sa prière toute simple montre sa confiance touchante en l’Éternel. Il supplia l’Éternel et dit : « Ah, Seigneur ! Que l'homme de Dieu que tu as envoyé, vienne encore vers nous, je te prie, et qu'il nous enseigne ce que nous devons faire au jeune garçon qui naîtra » (Juges 13:8).
— C’est une bien belle prière, il demande si humblement.
— Nous pouvons être sûrs qu’elle plut à Dieu qui exauça la voix de Manoah. Comme il est beau de voir Dieu condescendre aux supplications d’un pauvre pécheur et descendre, pour ainsi dire, à sa voix. Le Seigneur lui-même nous dit : « Demandez et vous recevrez » (Jean 16 :24). En réponse à la prière de Manoah, l’Ange de Dieu revint auprès de la femme, aux champs. Elle courut promptement chercher son mari qui vint et dit à l’Ange : « Es-tu l'homme qui a parlé à cette femme ? Et il dit : C'est moi ». Alors Manoah demanda ce que l’enfant devrait faire, mais l’Ange se borna à répéter ce qu’il avait dit à la femme.
— Manoah reconnut-il dans cet homme l’Ange de l’Éternel ?
— Non, il croyait que c’était un prophète. Aussi lui demanda-t-il de rester avec eux pendant qu’on lui apprêterait un chevreau pour son repas. L’Ange refusa en lui disant d’offrir plutôt un holocauste à l’Éternel. Alors Manoah lui demanda son nom afin de lui faire un présent quand l’enfant serait né. L’Ange de l’Éternel lui répondit : « Pourquoi demandes-tu mon nom ? Il est merveilleux ».
— En effet, bien merveilleux car c’est celui de Dieu.
— Ce nom que l’Ange se donne nous apparaît d’une manière plus frappante encore si nous pensons au passage d’Ésaïe annonçant la venue de Christ. Lis Ésaïe 9:6.
— « Car un enfant nous est né, un fils nous a été donné, et le gouvernement sera sur son épaule ; et on appellera son nom : Merveilleux, Conseiller, Dieu fort, Père du siècle, Prince de paix ». L’Ange de l’Éternel c’était le Seigneur Jésus, n’est-ce pas ? Mais que fit Manoah ?
— Il prit le chevreau et le gâteau et les offrit en holocauste sur un rocher qui se trouvait là.
— C’est comme lorsque Gédéon se trouvait avec l’Ange de l’Éternel.
— Oui, et comme dans le cas de Gédéon, l’Ange fit connaître à ce moment-là qui il était. Manoah avait allumé le feu pour consumer l’holocauste. Lui et sa femme regardaient le feu monter de l’holocauste. Alors l’Ange monta dans la flamme de l’autel et disparut. Manoah et sa femme reconnurent alors que c’était l’Ange de l’Éternel et ils tombèrent sur leurs faces pour adorer.
— Eurent-ils très peur ?
— Le sentiment de Manoah fut bien différent que celui de sa femme. Il dit : « Nous mourrons certainement, car nous avons vu Dieu ». Le pécheur qui ne voit en Dieu que sa sainteté et sa justice, peut bien trembler en sa présence et redouter la mort. Mais l’âme qui a reconnu en Dieu sa grâce et qui l’apprécie, n’a point de crainte. C’est le cas de la femme de Manoah. Elle avait appris à connaître le caractère du Dieu de miséricorde et se confiait en Lui. Elle répondit : « Si l'Éternel eût pris plaisir à nous faire mourir, il n'aurait pas accepté de notre main l'holocauste et le gâteau, et il ne nous aurait pas fait voir toutes ces choses, et ne nous aurait pas fait entendre, dans ce moment, des choses comme celles-là ».
— C’est bien vrai. L’holocauste et le gâteau étaient des offrandes d’agréable odeur à l’Éternel (Lévitique 1:17 ; 2:2). Ces offrandes représentaient le Seigneur Jésus qui s’est offert pour nous à Dieu (Hébreux 9:14 ; Éphésiens 5:2). Et si nous croyons en Lui, nous n’avons pas peur de périr.
— Tu as raison. Mais ne vois-tu pas autre chose dans les paroles de la femme de Manoah ?
— Dieu avait fait une promesse qui n’aurait pas pu s’accomplir s’ils étaient morts. Et Dieu est fidèle.
— Et c’était une promesse de grâce dans un moment très fâcheux, dans un temps de ruine. La femme de Manoah s’y attache avec foi, et ainsi elle honore Dieu. Et nous avons à suivre son exemple.
— L’Éternel accomplit sa promesse. La femme de Manoah eut un fils qu’elle appela « Samson », ce qui veut dire « mon soleil ». Et en effet, c’était pour elle ainsi que pour Israël, comme un soleil qui se levait dans la sombre nuit où se trouvait plongé le peuple de Dieu.
— Nous est-il dit quelque chose de l’enfance de Samson ?
— Seulement qu’il grandit et que l’Éternel le bénit. Extérieurement, aux yeux des hommes, l’enfant se développait comme tout autre, mais il était l’objet de la faveur spéciale de l’Éternel qui voulait, par son moyen, faire du bien à son peuple.
— Il est dit que le Seigneur Jésus croissait et se fortifiait, et que la faveur de Dieu était sur lui (Luc 2:40, 52).
— C’est vrai mais il y avait une grande différence entre Lui et Samson. Le Seigneur était le Fils bien-aimé de Dieu et sans péché. Samson était un pécheur, et c’était par grâce que la bénédiction de Dieu reposait sur lui. Nous ne savons pas quel âge avait Samson quand l’Esprit de Dieu commença à la saisir. L’Écriture nous dit que ce fut à Mahané-Dan. Ensuite il alla dans une ville nommée Thimna, qui avait appartenu à la tribu de Juda, mais les Philistins s’en étaient emparés et y demeuraient. Là Samson vit une fille philistine qu’il voulut épouser.
— Mais cela ne convenait pas. C’était sans doute une païenne et une ennemie d’Israël, et la loi de Moïse défendait de tels mariages, n’est-ce pas ?
— Oui, selon Exode 34 ; aussi ses parents lui firent-ils des remarques ; mais il nous est dit que cela venait de l’Éternel et que Samson cherchait quelque occasion contre les Philistins. Dieu permettait que Samson suivit sa propre pensée, afin de la faire servir au dessein qu’il avait de commencer à délivrer Israël. Samson insista donc auprès de ses parents qui vinrent avec lui à Thimna. Alors, pour la première fois, se montra sa force extraordinaire.
— Est-ce contre les Philistins ?
— Non, d’abord il ne combattit pas les hommes. Comme il était en route vers Thimna, un jeune lion rugissant vint à sa rencontre. Qu’aurait pu faire un homme seul contre un lion dans sa force ? Rien, mais l’Éternel voulut donner à Samson un gage de la puissance qu’il pourrait déployer contre les Philistins. L’Esprit de l’Éternel le saisit et, sans armes, il déchira le lion aussi aisément qu’il eut fait d’un chevreau ; puis il jeta de côté le cadavre. Cela nous rappelle la victoire que le Seigneur remporta sur Satan, le terrible lion rugissant (1 Pierre 5:8-9). Et nous aussi, si nous sommes fidèles au Seigneur, nous surmonterons les pièges de l’ennemi par la puissance de l’Esprit saint. Samson garda le secret sur sa rencontre avec le lion, il n’en dit rien à ses parents.
— Pourquoi cela ?
— Il ne pensait pas nécessaire de divulguer le secret de sa force. C’était entre lui et l’Éternel, et on la verrait bien quand il aurait à en faire usage avec les ennemis d’Israël. De même, il n’est pas besoin que le chrétien parle de ses expériences intimes. Il suffit qu’on voie, dans sa conduite, que Dieu est avec lui. Samson, quelques temps après, repassa par le même chemin et voulut voir le corps de l’animal qu’il avait tué. L’ardent soleil, et peut-être les bêtes fauves, avaient consumé la chair ; il ne restait que le squelette dans lequel des abeilles sauvages avaient déposé leur miel. Samson en mangea et en apporta aussi à ses parents sans leur dire où il l’avait trouvé.
— Pouvons-nous tirer quelque leçon de ce miel que Samson trouva ainsi dans le corps du lion ?
— Nous pouvons apprendre qu’il y a de la joie pour nos cœurs quand le Seigneur nous a donné la victoire sur Satan, et que nous sommes alors rendus capables de faire participer d’autres personnes à la bénédiction que nous avons reçue.
— Samson épousa-t-il la fille philistine ?
— Cela ne nous est pas dit positivement. En tout cas, elle ne vint pas demeurer chez lui, Dieu ne le permit pas. Mais les cérémonies et les fêtes du mariage eurent lieu à Thimna durant sept jours. On donna à Samson trente compagnons ou amis de noce (voyez Luc 5:34 ; Jean 3:29), et, durant les fêtes, se rappelant sa rencontre avec le lion, il leur proposa une énigme à deviner. Il convint avec eux que, s’ils devinaient l’énigme, il leur donnerait trente chemises et autant de vêtements de rechange ; mais s’ils ne devinaient pas, eux donneraient le même prix.
— Cela semble étrange de voir un homme béni de Dieu, un juge d’Israël, être ainsi mêlé à ceux qui opprimaient le peuple et en faire ses compagnons. Quelle énigme leur proposa-t-il ?
— En tout cela, Samson cherchait à mettre les Philistins dans leur tort pour avoir un sujet de les attaquer. L’énigme était celle-ci : « De celui qui mange est sorti le manger, et du fort est sortie la douceur » (Juges 14:14). Et ils ne purent la deviner. Irrités de voir qu’ils auraient à payer le prix convenu, ils menacèrent de mort la femme de Samson si elle n’obtenait pas de lui la solution de l’énigme pour la leur dire. À force d’instance et de pleurs, elle arracha à Samson ce qu’il avait caché même à ses parents. Elle expliqua l’énigme aux compagnons de Samson, et ceux-ci lui dirent : « Qu'y a-t-il de plus doux que le miel, et qu'y a-t-il de plus fort que le lion ? »
— Samson portait donc la peine de s’être allié avec une Philistine, et de lui avoir découvert son secret, n’est-ce pas ? Dut-il payer le prix convenu ?
— Sans doute, mais Israël ne pouvait pas être dépouillé dans la personne de son juge. L’Esprit de l’Éternel saisit Samson qui descendit à Askalon où il tua trente hommes philistins et, avec leurs dépouilles, il acquitta sa dette. Ensuite il rentra chez son père. Sa femme resta chez les Philistins et son père la donna en mariage à l’un des compagnons de Samson dont il avait fait un ami.
— Samson apprit-il cela ?
— Malgré l’expérience qu’il avait faite, Samson était retourné à Thimna pour voir sa femme et là, le père de sa femme lui dit ce qu’il avait fait. Samson vit bien qu’il ne pouvait avoir de relations avec les Philistins et qu’il ne pouvait les traiter qu’en ennemis. C’est ce qu’il fit d’une manière qui peut nous sembler étrange.
— Tout est bien étrange dans sa vie. On ne le voit pas comme les autres juges se mettre à la tête du peuple. Il agit toujours seul, et l’on ne comprend pas bien comment cela pouvait contribuer à délivrer Israël.
— Le peuple de Dieu était tombé dans un si triste état qu’il s’était habitué à la domination des Philistins et ne désirait même pas en être délivré. Mais les Philistins pouvaient voir qu’il y avait au milieu d’Israël une force divine à laquelle ils ne pouvaient résister. Et c’était une consolation pour le petit nombre qui s’attendait à l’Éternel. Ils voyaient que Dieu n’abandonnait pas entièrement son peuple.
— Qu’est-ce que Samson fit aux Philistins ?
— Il prit trois cents chacals, les tourna deux à deux queue contre queue, attacha entre les deux queues une torche allumée, puis les lâcha dans les blés des Philistins. C’était le moment de la moisson, les tiges des épis, soit sur pied soit en gerbes, étaient desséchées par l’ardent soleil et tout fut brûlé, même les plantations d’oliviers.
— Quel terrible désastre ! Les Philistins cherchèrent-ils à se venger ?
— Certainement, mais ce ne fut pas d’abord sur Samson. Il s’informèrent sur l’auteur de cette catastrophe, et ayant appris que c’était Samson irrité de ce que son beau-père avait donné sa femme à un autre, ils firent périr par le feu cet homme et sa fille.
— Ainsi cette femme qui avait trahi le secret de Samson pour ne pas être brûlée périt cependant de ce même supplice. Si elle avait été fidèle à son mari, il aurait bien su la défendre, n’est-ce pas ?
— C’est sûr, mais elle ne connaissait pas Samson et ainsi ne pouvait pas avoir confiance en lui. Celui qui appartient au monde ne peut pas connaître le secret de la force de celui qui appartient à Dieu. Tout faisait ressortir l’inimitié des Philistins contre le peuple de Dieu. Samson vit dans le supplice de la femme qu’il avait voulu prendre, un nouvel acte d’hostilité contre lui. Il tomba sur les Philistins dont il fit un grand carnage, puis se retira dans une caverne du rocher d’Étam, au sud de Bethléhem.
Les Philistins ne pouvaient oublier leurs désastres et celui qui les avait causés. Ils montèrent en armes et vinrent camper sur le territoire de la tribu de Juda, dans un endroit nommé Lékhi. Les hommes de Juda, étonnés de cette agression, en demandèrent le motif aux Philistins qui répondirent : « Nous sommes montés pour lier Samson, afin de lui faire comme il nous a fait » (Juges 15:10).
— Les hommes de Juda se montrèrent prêts à défendre Samson.
— Loin de là. Tel était l’abaissement où leur abandon de Dieu les avait faits tomber, qu’ils se firent les auxiliaires des Philistins contre Samson. Trois mille hommes de Juda allèrent vers lui et lui dirent : « Ne sais-tu pas que les Philistins dominent sur nous ? Et que nous as-tu fait ? » Le peuple de Dieu acceptait tranquillement cette domination des Philistins et étaient prêts à livrer celui que Dieu leur avait envoyé comme libérateur.
— Que voulaient à Samson les hommes de Juda ?
— Le lier afin de le livrer entre les mains des Philistins.
— Samson s’est-il laissé faire ?
— Sa force était entière, et personne n’aurait pu le lier à moins qu’il ne se livrât lui-même. Si les Philistins avaient essayé de le prendre, ils auraient senti encore une fois la puissance dont Dieu armait son bras. Mais le juge d’Israël ne pouvait user de sa force contre son peuple, si abaissé, si lâche et si coupable qu’il fût. Il se laisse donc lier après avoir fait jurer aux hommes de Juda de ne pas le tuer. Ils l’amenèrent lié de deux cordes neuves aux Philistins qui poussèrent des cris de joie en voyant leur ennemi entre leurs mains. Leur triomphe fut de courte durée. Que peuvent les cordes les plus solides contre la puissance de Dieu ? L’Esprit de l’Éternel saisit Samson ; les cordes qui enchaînaient ses bras devinrent comme de l’étoupe qui brûle au feu ; les liens qui serraient ses mains furent brisés : Samson était libre.
— Les Philistins durent avoir une grande frayeur.
— Ils étaient toute une armée contre lui seul, de sorte qu’ils crurent peut-être pouvoir aisément le vaincre. Ils ne connaissaient pas Celui dont la force animait Samson et qui détournait de lui les traits. Il n’était pas besoin non plus que Samson eût des armes de guerre contre eux. Une mâchoire d’âne encore fraîche se trouvait là. Il s’en saisit et s’en servant comme d’une massue, il tua mille de ses ennemis. À la vue de son triomphe, Samson s’écria : « Avec la mâchoire de l'âne, un monceau, deux monceaux ! Avec la mâchoire de l'âne j'ai frappé mille hommes ». Puis il jeta loin de lui son arme et nomma ce lieu Ramath-Lékhi, c'est-à-dire la colline de la mâchoire, en souvenir de sa victoire.
— Il semble que Samson s’attribuait quelque gloire et ne pensait pas à Dieu qui le fortifiait.
— Aussi Dieu le ramène-t-il bientôt au sentiment de sa faiblesse et de son impuissance naturelles et de sa dépendance de Lui. Samson, après son exploit, eut une très grande soif : il n’était qu’un homme. Mais dans ce lieu désert, il n’y avait aucune source, aucun puits avec de l’eau. Faudra-t-il qu’il meure de soif ? Il avait pu tuer mille hommes mais il est impuissant pour se procurer un verre d’eau. Alors il pense à Celui qui lui avait donné la force contre les Philistins et qui seul pouvait l’aider dans ce pressant besoin. Dieu nous humilie ainsi et nous fait sentir notre impuissance pour nous pousser vers Lui. Samson cria à l’Éternel et dit : « Tu as donné par la main de ton serviteur cette grande délivrance, et maintenant je mourrais de soif, et je tomberais entre les mains des incirconcis ! »
— Maintenant il ne parle plus de ce qu’il a fait, mais il dit à Dieu : « Tu as donné ».
— Et il confesse sa faiblesse et son impuissance. C’est la bonne position pour que Dieu bénisse. Nous voyons aussi en cela la foi de Samson, existant à travers toute sa vie si remplie de grandes fautes. L’Éternel entendit la voix de « son serviteur », comme Samson se nomme, et de même qu’autrefois il avait fait sortir des eaux du rocher en Horeb pour désaltérer son peuple, Exode 17, Il fendit le rocher creux qui était à Lékhi et il en sortit de l’eau. C’était toujours le Dieu d’Israël. Samson but et fut ranimé. En souvenir de cette délivrance, tout aussi merveilleuse que l’autre, cette source, qui continua à jaillir comme un gage que Dieu exauce les prières, fut nommée « En-Hakkoré » ou « la source de celui qui crie ».
— C’est un beau nom. Il est frappant de voir combien il y avait d’endroits en Canaan qui rappelaient aux Israélites les interventions de Dieu en leur faveur.
— C’est vrai. Ils ne pouvaient faire un pas sans trouver une trace de sa bonté. En continuant l’histoire de Samson, nous arrivons à une triste période de sa vie. Il était allé à Gaza, ville des Philistins, et avait encore fait connaissance d’une femme philistine. Les habitants de Gaza, ayant appris que Samson était chez eux, fermèrent la porte de la ville afin de le surprendre et de le tuer quand il voudrait sortir. Mais Samson se leva au milieu de la nuit et, arrachant les poteaux de la porte avec les barres, il les chargea avec les battants sur ses épaules, et porta le tout au sommet de la montagne qui est en face de Hébron parcourant ainsi une distance de plusieurs lieues. C’est un nouvel exemple de la force merveilleuse que Dieu avait communiquée et conservait à celui qui était encore nazaréen.
— Il est étonnant de voir Samson toujours retourner chez les ennemis de Dieu et d’Israël.
— Il y avait peut-être chez les Philistins des choses qui attiraient Samson et dont il aurait dû se garder. Nous voyons aussi, dans toute son histoire, qu’il avait confiance en lui-même et en sa force. Il se séduisait peut-être lui-même en pensant qu’en allant chez les Philistins, il trouverait une occasion contre eux. Évidemment, il ne se laissait pas gouverner par la pensée de ce qui plaisait à Dieu. C’est ainsi que souvent des jeunes chrétiens, ne connaissant pas leur propre cœur, et pour qui le monde a encore de l’attrait, s’y laissent entraîner. Ils se disent : il n’y a pas de mal en cela, il n’y a pas de danger que j’aille trop loin, et qui sait si je n’aurai pas l’occasion de faire du bien à tel ou tel de mes amis. C’est un raisonnement fatal qui ne peut venir que de l’ennemi. Ceux qui le tiennent feront, comme Samson le fit bientôt, l’amère expérience du danger qu’il y a de se mêler au monde ennemi de Dieu.
— Samson aurait pourtant dû être sur ses gardes.
— Sans doute, mais l’Éternel voulait lui faire connaître son propre cœur et lui apprendre que toute sa force ne dépendait que de Dieu. Samson s’attacha à une autre méchante femme nommée Delila qui demeurait au pays des Philistins, dans la vallée de Sorek, entre Askalon et Gaza. Les princes des Philistins, voyant que par la force ils ne pourraient venir à bout de Samson, résolurent d’essayer par la ruse et la séduction. C’est le grand moyen de Satan depuis le commencement. Ils promirent à Delila de lui donner chacun onze cents pièces d’argent si elle parvenait à tirer de Samson le secret de sa force, et elle y consentit.
— Samson fut-il assez insensé ou infidèle pour le lui dire ?
— Uns fois qu’on entre sur le terrain du monde, qu’on se laisse séduire par lui et qu’on s’associe à lui, on va toujours plus loin. On perd la communion avec Dieu et ainsi toute force contre le mal. Delila se mit à presser Samson de lui livrer son secret. Trois fois il se joua d’elle en lui indiquant de faux moyens de lui ôter sa force, et trois fois il se débarrassa des Philistins apostés pour le saisir.
— Ne voyait-il pas que Delila lui voulait du mal ? Pourquoi ne la laissait-il pas ?
— C’est bien ce qu’il aurait dû faire, mais il était aveuglé par l’amour qu’il avait pour elle. Il faut rester près de Dieu pour échapper au péché et au monde. Samson crut sans doute qu’il lasserait Delila en se moquant d’elle, mais ce fut le contraire, ce fut lui qui se lassa. Le monde est trop fort pour nous, Dieu seul peut nous en rendre vainqueurs. Delila n’aimait pas Samson, elle préférait l’argent et voulait la récompense promise. Elle continua donc à le tourmenter sans relâche jusqu’à ce que lui, l’homme puissant, fatigué de ses instances et à bout de forces, fut vaincu par une faible femme. Il lui découvrit tout. « Le rasoir n'a jamais passé sur ma tête », dit-il, « car je suis nazaréen de Dieu dès le ventre de ma mère. Si j'étais rasé, ma force s'en irait de moi, et je deviendrais faible, et je serais comme tous les hommes » (Juges 16:17). Le diable avait triomphé ; Samson avait trahi le secret de Dieu et perdu son nazaréat ; le juge d’Israël était vaincu.
— Quelle triste fin !
— Et quel sérieux avertissement pour que nous nous tenions à l’écart d’un monde trompeur. Aussi longtemps que l’on est fidèle à Dieu, sa force est notre force. Si nous l’abandonnons, nous devenons comme le reste des hommes. Samson dut l’éprouver. Pendant son sommeil, la perfide Delila lui fit raser les sept tresses de son abondante chevelure et sa force se retira de lui. Elle appela alors les Philistins cachés près de là pour le saisir. Samson, réveillé dans son sommeil, crut que rien n’était changé et dit : « Je m'en irai comme les autres fois, et je me dégagerai. Or il ne savait pas que l'Éternel s'était retiré de lui ». Quelle parole solennelle ! On se laisse enlacer par le péché et, quand on veut s’en tirer, on trouve que Dieu n’est plus là.
— Les Philistins le firent-ils mourir ?
— Non, le juge d’Israël ne pouvait mourir ainsi. Cela aurait été un trop grand triomphe pour les ennemis de l’Éternel. Mais Samson devait être châtié pour son péché ; la sainteté et la justice de Dieu le demandaient. Sa vie fut épargnée, mais les Philistins lui crevèrent les yeux et le fier vainqueur d’autrefois, lié de deux chaînes d’airain, dut tourner la meule dans la prison, comme un vil esclave.
— Quelle humiliation pour lui !
— Oui, mais ce temps d’esclavage et de solitude fut sans doute béni pour Samson. Il put rentrer en lui-même et repasser sa vie où, tant de fois, il s’était laissé conduire par son tempérament fougueux et indépendant, et laissé entraîner au mal. Et l’Éternel n’oubliait pas son pauvre serviteur humilié. À ses yeux, c’était toujours celui qu’il avait choisi dès sa naissance pour commencer à délivrer Israël de la main des Philistins. Il ne l’avait pas abandonné pour toujours. Les cheveux de Samson, signe de son nazaréat, Nom. 6, recommençaient à croître et, avec eux, revenait sa force. Les Philistins ignoraient cela. Ils étaient tout heureux d’être délivrés de cet homme qui, bien que seul, faisait leur terreur. Aussi leur princes résolurent d’offrir un grand sacrifice et de célébrer une fête à Dagon, leur Dieu, parce qu’il avait livré entre leur mains leur terrible ennemi. Le temple se remplit d’une foule nombreuse, hommes et femmes ; les princes des Philistins étaient là aussi, et trois mille spectateurs se trouvaient sur le toit en terrasse. « Notre dieu a livré entre nos mains notre ennemi, et le dévastateur de notre pays » (Juges 16:24). Comme dans toutes les fêtes païennes, un grand festin eut sans doute lieu. Et, lorsqu’ils furent excités par le vin, ils voulurent jouir de la vue de leur ennemi humilié et dirent : « Appelez Samson et qu’il nous amuse ».
— C’était bien cruel et il devait sentir douloureusement cette injure.
— En effet, mais le châtiment était proche. C’est toujours quand le monde dit « paix et sûreté » que le jugement est à la porte, comme nous le montrent le déluge, Sodome et Gomorrhe et la venue du Seigneur en jugement (Luc 17:26-30). Samson se fit conduire près des colonnes du milieu sur lesquelles reposait tout l’édifice, et il les saisit de sa main droite et de sa main gauche. Puis, ne se confiant pas en lui-même mais regardant à Dieu, il dit : « Seigneur Éternel ! Souviens-toi de moi, je te prie, et fortifie-moi, je te prie, seulement cette fois, ô Dieu ! » (Juges 16:28). Et se penchant avec toute la force que Dieu lui donnait en réponse à sa prière, et s’écriant : « Que mon âme meure avec les Philistins ! », il renversa les deux colonnes. Avec elles s’écroula le temple, faisant périr sous ses ruines les princes et la foule qui s’y trouvaient rassemblés. Le juge d’Israël avait donné sa vie pour aider à la délivrance de son peuple. « Et ses frères et toute la maison de son père descendirent, et l'emportèrent ; et ils le remontèrent, et l'enterrèrent entre Tsorha et Eshtaol dans le sépulcre de Manoah, son père. Et il avait jugé Israël vingt ans » (16:31).
— Est-ce qu’il n’y eut plus de juges après lui ?
— Il y en eut encore deux, mais leur histoire ne se trouve pas racontée dans le livre des Juges. C’est dans le premier livre de Samuel que Dieu nous parle d’eux. Samson n’avait pas délivré Israël, il n’avait fait que commencer l’œuvre qui ne s’acheva que par le roi David. Mais Dieu avait montré en lui qu’Il n’abandonnait pas son peuple, et qu’il y avait en Israël une force à laquelle nul ne pouvait résister.