La Parole était Dieu… Et la Parole devint chair (Jean 1:1, 14)
par AJAL (principalement Adrien Ladrierre)
1892
Note Bibliquest : les sous-titres sont de Bibliquest
Table des matières :
2 - Disciples d’un homme ou du Fils de Dieu (homme-Dieu) ?
3 - Doctrines niant la divinité de Christ
3.2 - Un Christ historique ? Les évangiles synoptiques diffèrent-ils de Paul et Jean ?
3.3 - Une question de science ou de foi ?
5 - « en forme de Dieu » — Phil. 2:6-11
6 - « à la ressemblance des hommes » — Phil. 2:7
7 - Jean, chapitres 5, 8, 10, 12
9 - Union du Père et du Fils en Jean 14 à 17
11 - 1 Jean chapitres 1, 3 et 5
15 - Divinité éternelle de Jésus-Christ à la base des autres vérités (Paul et Jean)
17 - Naissance de Jésus Christ (évangiles synoptiques)
18 - Attributs divins manifestés en Christ dans les évangiles synoptiques
Mon cher ami,
Dans une lettre précédente, j’ai cherché à établir les preuves de l’entière inspiration des Écritures. C’est pour l’âme un grand soulagement et un profond, repos, de savoir qu’elle possède dans la Bible la parole de Dieu, toute sa parole, et rien que sa parole. Elle y trouve une autorité infaillible, un rocher inébranlable pour appuyer sa foi.
Or il y a, dans ces Écritures de vérité, un Objet qui domine et remplit tout, c’est la Personne de Christ, le Fils de Dieu. Il est le centre des pensées, des affections et des mystères de Dieu ; sur Lui repose l’accomplissement de tous ses desseins. Tout, dans la parole de Dieu, converge vers Lui. Sans Lui, elle est un livre scellé dont on ne peut pénétrer le sens ; avec Lui, toutes les pages de l’Écriture deviennent. brillantes de clarté. Le connaître est pour l’âme, non seulement le salut, mais une source intarissable de délices, car lui seul répond aux besoins profonds d’un coeur créé pour Dieu. En même temps, le connaître est une sauvegarde contre les séductions du monde, les égarements du coeur naturel, et les erreurs où l’esprit risque de se laisser entraîner. Son amour et ses compassions nous donnent le repos, et nous attirent après Lui dans les sentiers de la sainteté. En Lui, nous avons la vie éternelle, et une espérance bienheureuse et assurée pour l’avenir, au delà du temps, dans l’éternité.
Mais ce qui est la source et la garantie de toutes les bénédictions que nous avons en Christ, c’est la divinité de sa Personne, la gloire divine qu’il possède de toute éternité. Or c’est là ce qui est attaqué et battu en brèche de nos jours, et, — chose bien propre à remplir à la fois d’étonnement et de douleur — par des hommes qui se disent chrétiens. Quantité d’âmes simples sont ainsi ébranlées par des affirmations — ou plutôt des négations — apportées au nom de la raison ou de la science contre cette vérité vitale ; bien des coeurs sont troublés, parce qu’on veut leur ravir leur Seigneur. Chose triste à constater aussi : parmi ceux qui ne sont pas des adversaires, il se rencontre des hommes qui semblent regarder la question comme étant de peu d’importance, et disent : « Paix, paix », là où il ne peut y avoir de paix. C’est donc un devoir d’élever la voix et de montrer, par la parole de Dieu qui ne peut mentir, que Christ, le Rocher des siècles, le même hier et aujourd’hui éternellement, est vrai Dieu de toute éternité. Sur cette vérité repose tout le christianisme. Elle en est la vie. C’est d’elle, mon cher ami, que je désire m’entretenir avec vous aujourd’hui.
Jésus demandait un jour à ses disciples : « Qui disent les hommes que je suis, moi, le fils de l’homme ? » (Matth. 16:13-17). Après avoir entendu leur réponse témoignant des incertitudes et des idées flottantes de l’intelligence humaine, incapable par elle-même de comprendre et d’apprécier sa Personne, Jésus leur dit : « Et nous, qui dites-vous que je suis ? » Question capitale pour eux, car de la réponse dépendait leur position comme disciples. L’étaient-ils d’un homme, fût-ce du plus excellent, du plus saint et du plus sage des hommes, semblable ou même supérieur au plus éminent des hommes de Dieu ou des prophètes : à un Abraham ou à un Moïse ? Ou bien l’étaient-ils du Fils de Dieu, dans le sens suprême et unique où les Juifs eux-même entendaient ce titre ? (voir Jean 5:18 ; 10:33 ; Matth. 26:63-65). La réponse de Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant », nous dit quelle était sa foi et celle de ses compagnons, foi formée et fondée en eux, non par des raisonnements, mais par la révélation de Dieu même, de Celui que Jésus ici, comme en tant d’autres occasions, appelle son Père.
La question adressée aux disciples se pose, aussi de nos jours, et s’impose impérieusement là chacun. Il s’agit de savoir ce que cous pensons du Christ. On sait les opinions diverses qui ont cours à son sujet parmi ceux qui n’acceptent pas le christianisme. Mais nous tous qui nous réclamons du nom de Christ, et qui nous disons ses disciples, quelle sera notre réponse ? Qu’est-il pour nous ? Sommes-nous les disciples d’un homme, ou bien les disciples de Celui qui, bien qu’un homme ici-bas, — le fils de l’homme, — était et est « sur toutes choses Dieu béni éternellement ? » (Rom. 9:5). Il est de toute importance d’être au clair sur ce point. Le christianisme tout entier en dépend. Mais qui décidera ? Comme Jésus le disait à Pierre, ce n’est pas « la chair et le sang », la science, la raison ou la conscience de l’homme, mais Dieu seul, et Dieu dans sa parole.
Vous savez, mon cher ami, quelles sont les doctrines soutenues par une certaine école à l’égard de la Personne de Christ, doctrines renversant ce qu’ont toujours cru ceux qui se sont attachés simplement aux Écritures.
On nie que Christ ait eu une existence antérieure à son
apparition sur la terre, qu’il ait préexisté
comme l’on dit. En d’autres
termes c’est nier qu’ Il soit vrai Dieu de toute
éternité ; c’est affirmer qu’il n’est qu’un homme. En effet, sa divinité,
dit-on, ne réside pas dans sa préexistence, mais en ce qu’il a montré les
attributs moraux de Dieu, son amour, sa miséricorde, sa justice et sa sainteté (*). Sa préexistence, dit-on encore, consiste en ce
qu’il était l’élu prédestiné avant la fondation du monde à accomplir l’oeuvre
du salut (**). Il est le fils de Dieu, parce
qu’en vertu de sa sainteté, il a complètement révélé son Père (remarquons, en
passant, que c’est l’inverse de ce que dit l’Écriture : Jean 1:18). Il
n’est qu’un homme, car, affirme-t-on, la différence entre lui et nous est de rang
,
non d’essence. Comme Dieu a donné Abraham et Moïse, il a donné Jésus-Christ (***).
(*) « Pour comprendre les textes qui parlent de sa préexistence, il faut se souvenir que les Juifs, ennemis des idées abstraites, remplaçaient la notion d’excellence, de supériorité, par celle d’antériorité…
En quoi donc consiste la divinité du Christ ? Non dans le
fait de la préexistence, mais dans un autre fait… Il a montré Dieu… Ce
qu’il nous a montré, ce n’est, sans doute, pas la toute science, la toute
puissance de Dieu, mais ses attributs moraux, ceux que Dieu réclame de ses
adorateurs : son amour, sa miséricorde, sa justice, sa sainteté » (Évangile
et Liberté
, 26 juin 1891).
(**) Il rejette la préexistence du Christ et ne voit dans les
textes qui en parlent que ceci : « Notre Seigneur et Sauveur, fils de Dieu
et fils de l’homme, est l’élu prédestiné, dès avant la fondation du monde, à
accomplir l’oeuvre du salut » (Doumergue : L’autorité en matière de foi
,
page 217 ; citation d’une réponse de M. Chapuis
au Journal religieux
).
(***) « Jésus-Christ est le Fils de Dieu, parce qu’en vertu de sa sainteté il a complètement révélé son Père.
La sainteté du Christ est la chose qui fait de lui à nos yeux le Fils unique et bien-aimé du Père.
La différence entre lui et nous est de rang, non d’essence.
Dira-t-on qu’avec une telle conception de la divinité de Jésus-Christ, le
passage : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils… » perd
beaucoup de sa force ? Mais Jésus ne reste-t-il pas le don de Dieu ?
Dieu a donné Abraham, Moïse, Jésus-Christ » (Évangile et Liberté
, 26 juin
1891. Doumergue, L’autorité
, etc., page 218, citation de la même
réponse).
Il est vrai que, d’un autre côté, on exalte sa personne. Il est
plus qu’un simple homme, dit-on ; il est, au contraire, une apparition
unique dans l’histoire, et son nom est au-dessus de tout autre nom. « Un simple
homme ! Vraiment ? Cet homme qui ressuscita le troisième jour, qui
est vivant aux siècles des siècles, qui « à la droite de Dieu, dirige l’Église
dont il est le chef » (*). C’est bien, mais en
même temps on nie qu’il ait préexisté, on nie sa divinité éternelle. Il n’est
qu’un homme. Il. est parvenu par sa sainteté à la gloire divine qu’il n’avait
pas eue auparavant ; nous n’avons donc à voir en Lui que l’apothéose d’un
homme — un homme devenu Dieu, et non pas Dieu qui se fait homme pour opérer le
salut. Voilà sans doute aussi pourquoi on nous parle de la personne humano-divine
de Jésus-Christ (**).
(*) Doumergue : L’autorité en matière de foi
, page
218, citation de la même réponse.
(**) Thèses de M. le professeur Astié.
Or que nous disent les Écritures ? Est-ce vraiment ainsi qu’elles nous présentent Christ ? Avant de répondre, reconnaissons la portion de vérité que renferment les assertions précédentes.
Il est évident que Christ ne préexistait pas comme homme, et qu’en Lui, avant son incarnation, il n’y avait rien de ce qui caractérise l’homme. Qu’il fût l’Homme des conseils de Dieu, le second Homme qui devait venir, le dernier Adam, cela est vrai également. Qu’il ait été véritablement homme, un homme parfait, juste et saint, manifestant l’amour, la grâce et la miséricorde de Dieu, et révélant le Père, nous l’admettons pleinement, mais ce n’est pas ce qui constitue sa divinité. Nous reconnaissons aussi qu’après son abaissement, ses souffrances et sa mort, il est ressuscité, et que Dieu l’a souverainement exalté et l’a fait asseoir à sa droite. Mais il rentrait alors comme homme dans la gloire divine qui Lui avait toujours appartenu.
Aurait-il pu révéler Dieu dans sa Personne, s’il n’était Dieu
Lui même ? S’il ne l’était pas, aurait-il pu montrer en Lui et d’une
manière parfaite les caractères et les attributs de la Divinité ? Dieu ne
cède pas sa gloire à un autre. Si les croyants, les vrais adorateurs, ont à
manifester les caractères moraux de Dieu, amour, sainteté et justice, c’est,
n’est-il pas vrai, parce que Christ habite en eux et vit en eux. Cela peut-il
se dire d’un homme ? Un homme peut-il vivre dans un autre homme ;
devenir sa vie ? De plus, s’il n’est qu’un homme, fût-ce un nouvel Adam,
une nouvelle création, comme on dit, il reste un homme, une créature —
différent de nous en rang
, non en essence. Comment, dans ce cas,
revendiquer le droit de l’adorer et de Lui dire : « Mon Seigneur et mon
Dieu ? » N’est-ce pas s’abuser étrangement ? Pouvons-nous lui donner
le titre de Dieu, s’il ne l’est pas ? Ce serait un blasphème. Pouvons-nous
le prier et l’adorer, s’il n’est qu’un homme ? Ne serait-ce pas une
idolâtrie analogue à celle qui fait de Marie, mère de Jésus, un objet de
culte ? Ce serait, comme je vous l’ai fait remarquer, la déification de
l’homme. Si l’homme Christ Jésus (1 Tim. 2:5) a été
élevé au rang suprême, si nous lui disons « mon Dieu », si nous le prions et
l’adorons, c’est qu’avant de devenir un homme, il était Dieu, et qu’en même
temps qu’il était un homme sur la terre, il était aussi Dieu — Emmanuel, Dieu
avec nous, comme il le sera à jamais. Il est le même hier, et aujourd’hui, et
éternellement. L’Écriture le démontre abondamment.
On prétend, par cet enseignement relatif à la Personne de Christ, nous faire revenir « à la simplicité évangélique », au christianisme primitif (*), celui des disciples qui suivaient Jésus. Il est certain que les disciples qui les premiers s’attachèrent à Jésus, virent d’abord en Lui essentiellement le Messie promis et attendu pour la délivrance d’Israël. Mais par ce fait même, ils reconnaissaient qu’il était plus qu’un homme. La confession de Pierre le prouve suffisamment ; d’autres passages l’attestent (Jean 1:50 ; 11:27), et les propres Écritures des Juifs l’enseignent (Michée 5:2 ; Ésaïe 9:6). Et si durant un certain temps, dans l’Église, la question de la divinité éternelle de Christ ne préoccupait pas les esprits en général, c’est qu’elle ne souffrait pas de doute. Les martyrs ne mouraient pas pour un homme, mais pour Celui qui, étant Dieu, s’était, dans son amour, abaissé jusqu’à nous, avait souffert et était mort pour nous sauver. C’est quand les hérésies touchant la Personne de Christ eurent surgi, qu’en faisant appel aux Écritures, on a été conduit à établir ce qu’elles enseignent à cet égard.
(*) Évangile et Liberté
, 3 juillet 1891. — Thèses présentées à la
Société vaudoise de théologie. « Les chrétiens primitifs, dont nous nous
réclamons ». « Nous sommes des chrétiens avant
la lettre
».
On veut aussi, dit-on, « ramener le public intelligent au Christ historique » (*). Si je comprends bien l’expression, c’est le Christ tel qu’il apparaît dans l’histoire, le Christ comme homme ici-bas, mais en mettant de côté sa divinité éternelle que, cependant, il manifesta aussi sur la terre. On ne veut pas du vrai Christ, du Christ complet, tel que nous le présente l’ensemble des Écritures du Nouveau Testament. À sa place on nous offre, si j’ose dire ainsi, un Christ fictif qui ne blesse ni la raison, ni les sentiments ; qui s’accorde avec les expériences personnelles et la conscience religieuse — celle-ci étant placée, comme juge, avant les Écritures et au-dessus d’elles.
(*) Thèses présentées, etc.
On trace la figure de ce Christ, que l’on professe cependant entourer de respect, en extrayant des documents évangéliques, comme on les appelle, les traits qui doivent le caractériser. Pour cela, on critique, on juge et l’on trie les textes, élaguant ce que l’on estime ne pas répondre à la conscience religieuse. Les documents évangéliques, pour ceux qui veulent ramener à ce Christ historique, sont surtout, vous le savez, les évangiles synoptiques qui semblent plus favorables à la thèse qu’ils soutiennent. Paul et Jean ne sont-ils pas, à leur sens, entachés de rabbinisme et de mysticisme ? Il est bon ici de nous rappeler ce que le Seigneur Lui-même disait du public « intelligent » de son temps : « Tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et tu les as révélées aux petits enfants » (Matth. 11:25). Être un petit enfant, simple et dépendant de Dieu et de sa parole, est ce que le Seigneur réclame.
Nous voulons certes aussi le Christ historique, l’Homme Christ Jésus qui a marché ici-bas, au milieu des hommes, mais en même temps nous voulons Christ tel que nous le font connaître les quatre évangiles, les épures, tous les écrits du Nouveau Testament ; comme le placent devant nous « les témoins oculaires et ministres de la parole » (Luc 1:2), qui « ont entendu, vu de leurs yeux et contemplé, touché de leurs mains » Celui qui est la vie éternelle, et que Paul a vu dans la gloire (1 Jean 1:1, 2 ; 1 Cor. 9:1 ; 15:8). Ce n’est pas seulement parce qu’il correspond et en tant qu’il correspond à la conscience humaine, que nous reconnaissons la dignité et l’excellence de sa Personne, mais parce que Dieu nous le fait connaître dans sa Parole. Sans doute, Christ répond à tous les besoins de l’âme humaine, mais ni la raison, ni la conscience d’un être pécheur ne peuvent juger de ce qu’il doit être. Il faut accepter le témoignage de ces « ministres de la parole », des apôtres et de leurs compagnons. Or, d’après eux, Christ n’est pas seulement un homme, le plus saint, le plus parfait des hommes, Il est Dieu, dans le sens absolu du mot. On ne peut trop le répéter, sur cette vérité repose tout le christianisme. En rejetant la préexistence de Christ, c’est-à-dire sa divinité éternelle, car les deux ne se séparent point, on introduit de fait un nouveau christianisme qui n’en est plus un, comme Paul le disait aux Galates, en parlant du faux évangile des docteurs judaïsants (Gal. 1). Il est vrai que l’on prétend que c’est l’ancien, puisque l’on se réclame des chrétiens primitifs, et que l’on affirme que la doctrine de la préexistence n’est pas conforme à ce que l’on nomme les documents apostoliques (*). Est-ce exact ? Pour nous, nous estimons que le vrai christianisme primitif est celui des apôtres, celui de Pierre, de Paul, de Jean, « ce qui était dès le commencement » (1 Jean 1:1 ; 2:24), et dans lequel nous sommes exhortés à demeurer ; or ce christianisme-là confesse le Père et le Fils. La doctrine qui nie le Fils — le Fils éternel, la Parole qui était Dieu — nie en même temps le Père (1 Jean 2:22, 23). Ce n’est plus le christianisme.
(*) « La doctrine… qui fait de Christ un Dieu, devenant à un
moment donné un simple homme pour redevenir un Dieu, n’est pas conforme aux
documents apostoliques… Quant à nous, nous partons, non d’une conception
métaphysique, mais des faits évangéliques » (Évangile
et Liberté
, 26 juin 1891).
On veut encore que la question qui nous occupe soit du domaine
de la science et non de la foi. Les divergences à l’égard de la préexistence et
de la divinité de Christ sont d’ordre scientifique, dit-on : on, n’a pas
lieu de s’en alarmer. Cela ne touche point aux choses de la foi et de la vie
chrétienne (*). Eh quoi ! L’existence
éternelle de Christ, la gloire divine du Fils, serait simplement un objet de
spéculation pour l’esprit humain, une chose sur laquelle il serait loisible à
chacun de se faire l’opinion qu’il voudrait ! Telle n’était certes pas la
pensée de Christ, lorsqu’il s’adresse à Pierre après la confession de celui-ci
(Matth. 16:13-17). Et cela n’importerait pas à la
foi ! Qu’est donc la foi, sinon la réception dans le coeur du témoignage
que Dieu rend dans sa Parole ? Et l’objet de la foi n’est-il pas Christ et
toutes les déclarations de cette Parole qui concernent Christ ? À moins,
peut-être, qu’on ne veuille pour objet de la foi que les choses que la
conscience religieuse de chacun a sanctionnées [=
approuvées ; note Bibliquest]
, mettant ainsi cette conscience
au-dessus de l’Écriture (**). Pour nous, si
l’Écriture proclame la préexistence de Christ, sa divinité éternelle, elle
devient un objet de foi ; la science n’y a rien à voir, nous n’avons qu’à
recevoir le témoignage de Dieu et à adorer. Peut-on penser aussi qu’il soit
indifférent à la vie chrétienne que Christ soit Dieu, la Parole éternelle
devenue chair, ou simplement un homme ? Il est la source de la vie
spirituelle, c’est Lui qui vit dans le croyant, c’est à Lui que le croyant est
uni ; pourrait-il être tout cela s’il n’était Dieu, en même temps qu’homme
parfait ? S’il n’est qu’un homme, tout ce qu’il peut être, c’est un
modèle, mais sans la puissance de vie qui fait marcher sur ses traces.
(*) « Il ne s’agit point des choses de la foi, mais des
formules de la foi … Nous pouvons rassurer, car entre les deux écoles, il
n’y a pas divergence dans les choses de la foi et de la vie chrétienne :
il n’y a entre elles que des diversités d’ordre scientifique, des manières
différentes d’interpréter les faits et les idées de la foi ». (Évangile et
Liberté
, 3
juillet 1891).
(**) « La troisième tendance sent comme premier devoir la
nécessité d’établir la valeur toute spéciale de la Bible. Elle s’adresse pour
cela à la conscience morale … La Bible présente, soit chez les précurseurs de
Jésus, soit chez Jésus lui-même, soit chez ses disciples, des expériences
religieuses, se formulant en vérités… Il faut croire tout ce que l’expérience
personnelle de l’action de Jésus sur vous-même vous enseigne, tout ce qu’elle
vous oblige à retenir de la pensée des auteurs bibliques… Il importe que la
hiérarchie soit toujours nettement indiquée d’abord, au premier rang, Jésus
lui-même, son action personnelle ; ensuite, au second rang, le témoignage
biblique… L’influence de Christ fait le chrétien et lui permet de juger de ce
qui répond à sa foi dans les livres sacrés » (La crise théologique actuelle
dans l’Église réformée de France
, par G. Fulliquet.
Pages 11, 16).
Au fond, ceux qui remanient ainsi le christianisme, en usent fort librement avec l’Écriture. Si elle était pour eux l’autorité dernière, devant laquelle s’inclinent la science, la raison et la conscience, si « il est écrit » terminait pour eux tout débat, il leur serait difficile de ne pas reconnaître que toutes les Écritures du Nouveau Testament affirment la vérité dont nous parlons : « Christ, sur toutes choses Dieu béni éternellement », « le Fils unique dans le sein du Père », dans l’éternité passée, comme il l’est à jamais ; vérité sur laquelle reposent le salut, l’Église, nos espérances éternelles.
Laissant donc maintenant de côté « les discours spécieux » et « l’enseignement des hommes », qui tendent à obscurcir la gloire du Fils de Dieu, et prenant en mains l’infaillible parole de Dieu, examinons ensemble, mon cher ami, ce qu’elle nous enseigne touchant la préexistence et la divinité de Christ. Il sera précieux et rafraîchissant, pour vous comme pour moi, d’arrêter nos regards sur sa Personne glorieuse.
Il est d’abord trois passages principaux que je rapprocherai
l’un de l’autre pour les passer en revue avec vous. Ce sont Jean 1:1-18 ;
Col. 1:13-20, et Héb. 1. L’Esprit Saint, par la plume
de Jean et de Paul, fait ressortir, dans ces passages, la gloire divine de
Christ à des points de vue différents, en rapport avec le but et la portée de
l’évangile et des épîtres où ils se trouvent. Ainsi, le premier nous montre en
Christ, Dieu lumière et vie, le second le présente comme un Être divin au-dessus
de toutes les vaines conceptions de l’esprit humain, et le dernier affirme sa
divinité en contraste avec la position et la nature des anges. Mais dans tous
les trois, nous voyons sa personnalité distincte et son existence comme Dieu
avant les temps. Sa relation éternelle avec Dieu est établie dans nos trois
passages. Dans Jean, il est « le Fils unique qui est
dans le sein du
Père ». Y eût-il dans l’éternité un moment où le sein du Père ne possédait pas
un Fils, objet de son amour ? Il est, dit Paul aux Colossiens, « le Fils de
son amour ». « Dieu est amour » (1 Jean 4:8), c’est son essence éternelle.
Pouvons-nous concevoir l’amour éternel sans une personne à aimer ?
Non ; aussi le Fils éternel était-il là, Lui, la sagesse incréée, « ses
délices de tous les jours » (Prov. 8:30). Le passage de l’épître aux Hébreux le
présente simplement comme le Fils, mais c’est une relation qui le place
infiniment au-dessus des anges.
Il est vrai que, dans quelques endroits, Christ est nommé Fils de Dieu en vertu de sa naissance miraculeuse dans ce monde (Luc 1:35). Mais, même alors, ce titre ne saurait s’appliquer à une créature, à quelqu’un qui ne serait qu’un homme (voy. Héb. 1:5). « Dieu a envoyé son Fils, né de femme », dit l’apôtre (Gal. 4:4). Celui qui naissait de femme, était déjà le Fils de Dieu. On voudrait que la relation indiquée pour Christ, par l’expression fils, ne différât point de celle dans laquelle nous pouvons entrer par la foi. Mais nos trois passages montrent clairement qu’il s’agit d’une filiation tout autre, d’une relation unique et éternelle, qui emporte avec elle l’égalité de nature et d’essence avec Dieu. C’est bien ainsi, comme je vous l’ai fait remarquer, que l’entendaient les Juifs, et Jésus ne leur dit pas qu’ils se trompent. Remarquez, de plus, qu’en aucun de ces passages, Jésus-Christ n’est déclaré Fils de Dieu en vertu de sa sainteté. Il est Fils de Dieu par nature.
Les passages dont nous nous occupons placent, en effet, devant nous, la gloire divine que possède le Fils en lui-même.
Il est DIEU. « La Parole (ou le Verbe) était Dieu
». — « Toute la
plénitude de la Déité s’est plu à habiter en lui » (comp.
Col. 2:9). — « Ton trône, ô Dieu
,
demeure aux siècles des siècles » [Héb. 1:8].
Son existence est éternelle
, non seulement dans l’avenir, mais
dans le passé ; elle a précédé les siècles. « Au commencement était
la Parole », dit Jean. Quel
commencement ? Avant que rien n’existât, elle était, et elle était une
personne distincte dans l’essence divine, car il ajoute : « La Parole était
auprès de
Dieu ». « Par Lui, Dieu a fait
les mondes » (Hébr. 1:2). Il existait donc avant les mondes. « Il est », dit Paul,
« le premier-né de toute création », c’est-à-dire avant et au-dessus de toutes
les choses créées. En effet, l’apôtre continue : « Car en
lui ont
été créées toutes choses… et lui est avant toutes choses ». Et aux Hébreux, il
écrit, en citant un Psaume qu’il applique à Christ : « Toi, dans les
commencements, Seigneur, tu as fondé la terre, et les cieux sont l’ouvrage de
tes mains » [Héb. 1:10]. Il préexiste donc à tout
comme Dieu et Créateur
de tout.
« Toutes choses furent faites par elle » (la Parole). « Toutes
choses furent créées par
lui et pour lui ». Notez la différence entre le
début du vers. 16 [Col. 1], « en
lui (en autw) ont été créées toutes choses », et la fin du vers. 16, « par
lui (di autou) », le premier indiquant que la
puissance créatrice réside en Lui-même ; par
lui montre plutôt son
action créatrice. Ne trouvez-vous pas remarquable l’insistance des écrivains
sacrés sur ce fait de la création de toutes choses par Christ ? L’Esprit
Saint, par avance, répondait aux négations de la science moderne, touchant la
préexistence et la divinité de Christ.
Mais poursuivons. Jean, après avoir affirmé que la Parole est
une Personne distincte, divine et éternelle, ajoute : « En elle était
la vie », et non pas est
la vie, bien
que ce dernier soit vrai. Mais Jean parle de son existence antérieure. Or,
avoir la vie en soi, n’est-ce pas un attribut divin ? Toute créature vit
par un acte divin, mais Lui, Christ, a la vie en lui-même ; il en est la
source éternelle ; il est le vivant » (Apoc.
1:18), titre qui n’est donné qu’à Dieu. Cette « vie était la lumière des
hommes », et « la vraie lumière qui, venant dans le monde, éclaire tout homme »,
c’est Lui. Voilà encore sa préexistence nettement affirmée. Elle l’est d’une
manière non moins positive par ces paroles : « La Parole devint
chair ». Elle devint ce qu’elle
n’était pas — un homme — mais avant cela elle existait d’une existence divine,
personnelle et éternelle.
Les passages que nous étudions nous montrent en Christ d’autres
attributs divins. « Toutes choses subsistent par lui
», ou plutôt « en
lui
» ; « il soutient toutes choses par la parole de sa
puissance » ; voilà sa toute puissance
. Depuis quand toutes choses
subsistent-elles en Lui et les soutient-il par sa parole ? Est-ce
seulement depuis qu’il a été ressuscité et qu’il est entré dans la gloire
divine ? Et que signifient encore ces paroles : « Eux (les cieux et la
terre), ils périront, mais toi, tu demeures ;… ils seront changés, mais
toi, tu es le même
» ? N’est-ce pas son immutabilité
en contraste avec la création
changeante sortie de ses mains ? C’est encore le Dieu éternel. Aussi,
quand Dieu l’introduit dans le monde comme le Premier-né, (vous voyez encore là
sa préexistence), il dit : « Que tous les anges de Dieu lui rendent
hommage ». Quel est Celui devant qui les anges mêmes doivent se prosterner et
adorer ? Serait-ce une créature ?
Vous remarquerez encore un autre trait de sa gloire divine. Il révèle Dieu,
non comme un prophète qui
apporte des communications divines qu’il a reçues, mais comme étant Lui-même
l’expression de tout ce qu’est Dieu. Or, comment cela pourrait-il avoir lieu
s’il n’était pas Dieu lui-même ? « Personne ne vit jamais Dieu », dit Jean,
« le Fils unique, qui est
dans le sein
du Père, lui, l’a fait co
nnaître
». Voir Dieu, c’est le contempler
dans son essence. Or cela n’est donné à aucun homme, à aucune créature. C’est
« la lumière inaccessible », où il habite, Lui que personne n’a vu, ni ne peut
voir (1 Tim. 6:16). Mais c’est là où le Fils se
trouve de toute éternité ; pour Lui, c’est le sein du Père. Comment être
là, dans cette lumière, s’il n’est pas Dieu ? Et c’est parce que là est sa
demeure, où il jouit de l’amour du Père, dans une union ineffable avec Lui,
participant de son essence et de ses attributs, que Lui, le Fils unique, a pu
le faire connaître. Il rend témoignage de ce qu’il a vu
(Jean 3:11).
Ce passage est tout à fait parallèle à celui de l’épître aux Colossiens. « Le Fils de son amour », est « l’image du Dieu invisible ». Dieu ne peut être connu et contemplé en Lui-même, dans son essence — c’est là ce que veut dire invisible. Christ est la manifestation parfaite de ce Dieu que l’homme ne peut voir ; mais il l’est parce qu’il a en Lui la plénitude de l’essence et des perfections divines. C’est ainsi qu’il est son image, le reproduisant, si j’ose dire ainsi, d’une manière parfaite et, en même temps, accessible à l’homme. Or c’est là ce qui ne peut appartenir à une créature, mais à Celui-là seul qui est de nature et d’essence divines. Qui connaît Jésus, connaît le Père ; qui l’a vu, a vu le Père (Jean 8:19 ; 14:7, 9). Et ce ne peut être uniquement dans le sens moral que l’apôtre nomme Christ l’image du Dieu invisible, car aussitôt après il le montre revêtu des attributs divins en puissance créatrice.
Le passage de l’épître aux Hébreux exprime en d’autres termes la même vérité. Le Fils est « le resplendissement de la gloire de Dieu et l’empreinte de sa substance ». Comme les rayons du soleil révèlent le soleil et ne peuvent être séparés de lui, ainsi Christ révèle Dieu, parce qu’il est Dieu. « Nous vîmes sa gloire », dit Jean, « une gloire comme d’un Fils unique de la part du Père » (Jean 1:14). La gloire de Dieu, c’est toutes ses perfections, tous ses attributs, tout ce qu’il est, tout-puissant, omniscient, immuable, amour, vie et lumière, et tout cela est manifesté et resplendit en Christ. Il est « l’empreinte de sa substance », ou de son Être, de ce qu’Il est en lui-même. Comme l’empreinte d’un sceau reproduit tous les traits du sceau même, ainsi Christ, dans sa Personne éternelle, présente tous les traits incommunicables de la nature divine. Or cela pourrait-il appartenir à un homme ? Cela peut-il être sans une similarité d’essence ? Non ; car Dieu ne donnera pas sa gloire à un autre (Ésaïe 42:8). Pour être le resplendissement de cette gloire, il faut la posséder, il faut être Dieu.
Ces trois portions de l’Écriture ne sont-elles pas la démonstration victorieuse de l’existence éternelle de Christ comme Personne divine, de même nature et de même essence que le Père ? Il me semble que, pour le nier, il faut fermer les yeux à l’évidence, ou plutôt on ne le peut qu’en niant la parole de Dieu.
Homme, Christ l’est devenu, mais pour le devenir
, il fallait
qu’il existât auparavant. Outre les paroles de Jean : « Et la Parole devint
chair », d’autres passages enseignent d’une manière positive cette existence
antérieure de Christ, ainsi que son égalité de nature avec Dieu. Le plus
remarquable et le plus clair se trouve dans le second chapitre de l’épître aux
Philippiens (vers. 6 à 11). Il est d’autant plus frappant que cette épître
n’est point du tout doctrinale, et qu’ici Christ nous est présenté comme modèle
à imiter. Ne voyons-nous pas par là que l’existence éternelle de Christ comme
Dieu, un avec le Père, égal à Lui en essence, était un fait qui pénétrait tout
l’enseignement apostolique, doctrinal et pratique, et en était le
fondement ? On pourrait en trouver bien d’autres exemples. Mais
arrêtons-nous un instant sur ce que l’apôtre dit aux Philippiens. Christ « étant
(ou existant) en forme de Dieu
», c’est-à-dire possédant en Lui-même
tout ce qui fait que Dieu est Dieu, l’essence et les perfections divines ;
« il n’a pas regardé comme un objet à ravir (ou une usurpation), d’être égal à
Dieu, mais s’est anéanti ». Adam, en forme d’homme, voulait être comme
Dieu ; mais Christ, « en forme de Dieu », en possession de la Majesté et de
la gloire divines, n’a pas fait comme Adam : « Il s’est anéanti ». Ces
dernières paroles, comme celles qui suivent, montrent bien qu’il est question
de son existence antérieure au moment où il a paru sur la terre. « Mais il s’est
anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave, étant fait (ou devenu) à la
ressemblance des hommes ». Il devient ainsi ce qu’il n’était pas
auparavant ; le contraste est complet de toute manière et fait ressortir
sa préexistence comme Dieu. Il existait « en forme de Dieu » ; de cette
gloire divine, il s’abaisse volontairement, s’anéantit et prend « la forme
d’esclave », tout ce qui appartient à la condition d’homme et de serviteur,
obéissant même jusqu’à la mort de la croix. En « forme de Dieu » est ce qu’il
était ; « en forme d’esclave » est ce qu’il devient. N’oublions pas
toutefois que, dans cet abaissement où il était descendu en devenant un homme,
il n’avait pas abdiqué sa divinité, il ne cessa jamais d’être Dieu. Je dis
cela, mon cher ami, parce que l’on a prétendu que la doctrine que nous
défendons, consiste en ce que Christ était « un Dieu devenant à un moment donné
un simple homme pour redevenir un Dieu ». Il est devenu un homme, un homme
parfait, « tenté en toutes choses comme nous, à part le péché » (Hébr. 4:15),
mais sans cesser d’être ce qu’il était, est, et sera, Dieu béni éternellement.
Cela n’est pas être un simple homme. De cet abaissement profond où il s’était
placé, « Dieu l’a haut élevé ». Il lui a donné comme Homme
la place suprême d’honneur et de gloire
(Hébr. 2:9). Christ n’est pas redevenu Dieu, mais, revêtu de l’humanité qu’il
avait prise et qu’il garde à jamais, le Fils rentre, avec une gloire nouvelle,
dans la gloire divine qui n’avait jamais cessé d’être sienne (Jean 17:5).
Bien d’autres témoignages à la réelle
et éternelle divinité de Christ, sont rendus dans l’évangile de Jean, les
épîtres et l’Apocalypse. Elle y éclate partout. Supprimez-la, et tout, dans le
christianisme, doctrine et morale, perd sa force. Le culte rendu au Sauveur
devient une idolâtrie, et ce que la plume a peine à écrire, une idolâtrie
sanctionnée [= approuvée]
par Christ lui-même qui,
n’étant qu’un homme, se serait fait Dieu, comme les Juifs le Lui reprochent
(Jean 10:33). Sans doute, Christ, dans l’Écriture, apparaît comme vrai homme,
nous ne saurions trop insister sur cette vérité. C’est comme homme qu’il a été
manifesté (Hébr. 9:26), mais cet homme est Dieu. Il l’est, non pas dans le sens
que Dieu l’animait d’une manière spéciale par son Esprit et Lui communiquait
quelque chose de divin ; non, Il était Dieu dans le sens absolu du
mot : « Dieu manifesté en chair » (1 Tim. 3:16).
Même dans ce passage de Philippiens 2, où sa vraie et parfaite
humanité est établie en termes si clairs, remarquez, mon cher ami, avec quel
soin l’apôtre le distingue des autres hommes pour bien réserver sa nature
divine. « Fait à la ressemblance
des
hommes » ; « en figure
comme
un homme » ; pourquoi ces expressions ? C’est que l’homme Jésus ne
diffère pas seulement de nous en rang,
comme
on l’a voulu dire, mais en essence,
c’est-à-dire
en ce qu’il était né du Saint-Esprit, et était en même temps vrai Dieu.
Au risque d’allonger, je voudrais rappeler encore d’autres témoignages de l’Écriture, démontrant la préexistence et la divinité éternelle du Sauveur. Lorsqu’il s’agit d’un sujet aussi important et qui touche à sa gloire, pourrions-nous trop insister ? Jésus disait aux Juifs : « Mon Père travaille jusqu’à maintenant, et moi je travaille » (Jean 5:17, 18). C’est son union avec le Père — son Père — qu’il affirme ainsi, union qui provient de ce que le Père et Lui sont de même nature. Comment, sans cela, se mettre sur le même rang ? Ce n’est pas une imitation du Père, ou le résultat d’un ordre du Père, mais une nécessité de sa nature divine. Et cela est tellement vrai que le Seigneur ajoute : « Le Fils ne peut rien faire de lui-même, à moins qu’il ne voie faire une chose au Père, car quelque chose que celui-ci fasse, le Fils aussi de même le fait » (vers. 19).
Les Juifs ne se trompent pas sur la portée de la première
déclaration de Christ. Ils veulent le faire mourir, parce qu’en disant que Dieu
était son propre Père, c’est-à-dire son Père dans un sens exclusif et qui
n’appartient qu’à Lui, il se faisait égal à Dieu, et se plaçait ainsi sur la
même ligne en travaillant comme le Père. Jésus détrompe-t-il les Juifs ? Leur
dit-il qu’ils interprètent mal sa pensée, comme il aurait dû le faire, s’il
n’avait pas accepté que c’était la vérité ? Non,
il l’affirme encore plus fortement dans les versets suivants, où il déclare
qu’en union intime de volonté et d’amour avec le Père, il possède et accomplit
lui-même et par lui-même tout ce qui caractérise exclusivement Dieu, comme de
donner la vie et d’exercer le jugement, « afin », ajoute le Seigneur, « que tous honorent
le Fils comme
ils honorent
le Père. Celui qui n’honore
pas le Fils, n’honore pas le Père qui l’a envoyé
». Honorent-ils le Fils comme
le Père, ceux qui privent le Fils de sa préexistence éternelle, affirmée
encore ici, et le font descendre au rang d’une créature ?
Lisez au chap. 8, vers. 58, cette déclaration solennelle et d’un
sens si profond : « En vérité, en vérité, je vous dis : Avant
qu’Abraham fût (ou devint), JE SUIS ». Vous avez là encore sa préexistence, mais
bien plus : l’affirmation qu’il possède en lui-même l’être absolu,
éternel, appartenant à Dieu seul. « JE SUIS », est la parole adressée à Moïse par
Jéhovah, du sein du buisson ardent (Ex. 3:14) ; c’est le nom essentiel et
incommunicable de Dieu. Abraham fut ou devint ; c’est ce qui caractérise
toute créature ; Lui, Christ, dit : « JE SUIS ». Qui donc ose après
cela le mettre sur le même rang qu’Abraham ? Les Juifs ont bien compris.
Pour eux, c’est un blasphème, et ils veulent lapider Jésus. J’ajouterai qu’aux
versets 24 et 28 du même chapitre, Jésus fait une déclaration analogue :
« Si vous ne croyez pas que c’est moi
— ou littéralement « que je suis », —
vous mourrez dans vos péchés ».
Prenez au chap. 10, les vers. 31 à 37. Le Seigneur vient de
parler aux Juifs de son unité d’action avec le Père, dans le soin qu’il prend
de ses brebis auxquelles il donne la vie éternelle. Donner la vie
éternelle ! Cela appartient-il à un homme, faites-le aussi excellent que
vous voudrez ? Nul, si ce n’est Celui « en qui est la vie », qui est
Lui-même la vie éternelle, ne peut la communiquer. De plus, ces paroles :
« Personne ne les ravira de ma main », expriment que Jésus a la puissance divine,
la même que celle du Père. « Personne », dit-il, « ne peut les ravir de la main de
mon Père ». Aussi termine-t-il en disant « Moi et le Père, nous sommes
un
». Un homme, une créature pourrait-elle s’exprimer ainsi sans
blasphème ? En disant : « nous », Jésus se place positivement sur le
même rang que le Père ; et « nous sommes un », ou une même chose, ne
signifie pas seulement avoir un même sentiment, une même pensée, ou agir de
concert. Cela va plus loin et exprime l’unité de nature et d’essence.
Cette fois encore les Juifs ont parfaitement compris Jésus. Ils
veulent le lapider, « parce que toi, étant Homme », lui disent-ils, « tu te fais
Dieu ». Pour eux c’était un blasphème, et pour nous c’en est un aussi, si Christ
n’est pas Dieu réellement, mais un homme, même un homme au-dessus des autres
par sa naissance et sa sainteté. Jésus ne détrompe pas les Juifs ; il ne
rectifie pas leur pensée, comme il l’eût fait si elle n’avait pas été exacte.
Au contraire, il la confirme : « Dites-vous à celui que le Père a sanctifié
et qu’il a envoyé
dans le monde : Tu blasphèmes, parce que j’ai
dit : Je suis le Fils de Dieu ?
» Vous avez de nouveau ici sa
préexistence et sa déité. Jésus en appelle ensuite aux oeuvres qu’il fait et
termine en disant : « Croyez les oeuvres, afin que vous connaissiez et que
vous croyiez que le Père
est en
moi, et moi en Lui
» ; paroles qui, à coup sûr, indiquent une union qui
ne peut être celle d’un homme avec Dieu, mais d’une Personne divine avec une
Personne divine.
Voyez encore ce que dit l’évangéliste, au chap. 12, vers. 37
à 43. Le Jéhovah, l’Éternel des armées
qu’Ésaïe vit siégeant dans le temple, sur son trône
haut et élevé, entouré des séraphins qui adorent, n’est autre que l’humble
Jésus de Nazareth, que Jean a entendu, vu et touché, la Parole faite chair.
« Ésaïe dit ces choses quand il vit sa
gloire
et qu’il parla de Lui
» (vers. 41). C’est ainsi que « JE
SUIS » qui parlait avec Moïse, était Celui qui disait aux Juifs : « Avant
qu’Abraham fût, JE SUIS ».
Que de témoignages pour attester avec puissance l’existence éternelle, personnelle, divine et glorieuse de Christ ! Combien l’âme du croyant est heureuse de les lire et de savoir avec une certitude toujours plus grande, que son Sauveur, Celui sur lequel elle s’appuie pour le temps et l’éternité, est le Rocher des siècles. Les vagues de l’incrédulité et des spéculations humaines peuvent le battre, mais non l’ébranler. En contemplant des yeux de la foi cette Personne divine, le fidèle s’écrie avec l’évangéliste : « Nous vîmes sa gloire, une gloire comme d’un Fils unique de la part du Père », et il adore. Si Christ n’est qu’un homme, un homme miraculeux même dans sa naissance et sa vie, une personne humano-divine, comme l’on a dit, mais qui n’a commencé d’exister comme nous, qu’à sa naissance ici-bas, tous ces témoignages de l’Écriture sont mensongers et nous induisent en erreur quant à la vraie nature de Celui qui se nomme le Fils de Dieu.
Mais ils sont vrais, et beaucoup d’autres s’y ajoutent.
« Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi » dit Jésus : (Jean 14:1). Qui est celui qui se place ainsi sur un pied d’égalité avec Dieu, et réclame de ses disciples, pour Lui-même, la même foi, la même confiance qu’ils ont en Dieu ? Peut-il n’être qu’un homme ? Moïse, le plus excellent des prophètes, Paul ou Jean, ou quelqu’un des apôtres, eussent-ils prononcé une telle parole (*) ?
(*) Luther dit à propos de ce passage : « Ici tu vois que Christ parle de Lui-même comme étant égal au Dieu tout-puissant, puisqu’il veut que nous croyions en Lui, ainsi que nous croyons en Dieu. S’il n’était pas vrai Dieu avec le Père, cette foi serait une erreur et une idolâtrie, car le coeur de l’homme ne doit placer sa foi et sa confiance qu’en Dieu seul ».
Le Seigneur dit plus loin : « Si vous m’aviez connu, vous
auriez aussi connu mon Père ; et dès maintenant vous le connaissez et
vous, l’avez vu
… Celui qui
m’a vu
, a vu
le Père » (vers. 7-9). Pouvait-il exprimer d’une
manière plus claire et plus positive son union avec le Père comme Personne
divine ; le fait que Lui-même a énoncé, en disant : Moi et le Père
nous sommes un
? La suite de ses paroles le confirme : « Ne
crois-tu pas que je suis dans
le
Père, et que le Père est en moi ? Les paroles que je vous dis, je ne les
dis pas de moi-même ; mais le Père qui demeure
en moi,
est celui qui fait les oeuvres » (vers. 10).
Remarquez que, dans la suite de ces derniers discours du
Sauveur, cette union de Jésus avec le Père, union qui suppose sa nature divine
est clairement indiquée par un autre grand fait : l’envoi du Saint-Esprit.
C’est le Père qui l’envoie mais c’est aussi Jésus (chap. 14:16, 25, 26 ;
15:26 ; 16:7) ; et quand le Père l’envoie, c’est au nom
de
Jésus. Cette grande vérité ressort encore de passages tels que ceux-ci :
« Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous
viendrons à lui, et nous
ferons notre demeure chez lui » (14:23). « Tout
ce que le Père a est à moi
» (16:15). « C’est ici la vie éternelle, qu’ils
te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ » (17:3).
Je vous le demande, ces paroles ne seraient-elles pas blasphématoires dans la
bouche d’une créature ? Elle se mettrait ainsi sur le même rang que Dieu.
La préexistence de Christ n’est pas moins clairement exprimée
que sa nature divine. « Jésus, sachant … qu’il était venu de
Dieu, et s’en allait
à
Dieu » (13:3). « Je suis sorti d’auprès
du Père, et je suis venu
dans le monde ; et de nouveau je
laisse le monde, et je m’en vais au Père » (16:28). « Glorifie-moi, toi, Père,
auprès de toi-même, de la gloire que j’avais auprès
de loi avant que le monde fût
»
(17:5).
Tout cet évangile rend donc témoignage à la gloire divine de
Christ. Il en est imprégné ; elle brille dans toutes les lignes, pour
ainsi dire. Il ne nous montre pas Jésus devenant Fils de Dieu en suite de son
obéissance et de sa sainteté, mais Fils unique de Dieu de toute éternité. Dieu,
dans sa grâce, nous a donné ce précieux écrit pour fonder la gloire de son Fils
bien-aimé, devant le monde et dans les âmes des saints ; aussi est-ce
celui des évangiles qui a été en butte aux plus ardentes attaques de
l’incrédulité et du rationalisme. Il indique d’ailleurs lui-même clairement son
but : « Ces choses sont écrites afin que vous croyiez
que Jésus est le
Christ, le Fils de Dieu
, et qu’en
croyant vous avez la vie en son nom » (Jean 20:31). Oui, il est le Fils unique
et éternel, la Parole incréée et créatrice, Dieu lui-même. Jean, ou plutôt le
Saint Esprit par sa plume, répond ainsi aux hérésies qui déjà alors se
donnaient carrière à l’égard de la Personne de Christ, et que de nos jours on
ne fait que rééditer.
Jetons maintenant un coup d’oeil sur les autres écrits du même apôtre, les épîtres et l’Apocalypse. On ne peut qu’être frappé, en lisant le début de la première épître, de retrouver ce qui caractérise le commencement de l’évangile. On y voit Celui qui est la Parole, la vie, la vie éternelle, préexistant auprès du Père (1 Jean 1:1-3). Les termes même dont Jean se sert affirment sa déité, car on ne peut dire d’un homme qu’il est la vie, la vie éternelle ; ils affirment en même temps son union avec le Père.
Remarquez comment plus d’une fois, dans le courant de l’épître,
l’apôtre se sert du pronom « il » ou « lui », pour désigner indifféremment Dieu et
Christ. Prenez, par exemple, la fin du chapitre second. « Il
sera
manifesté » ; Il, c’est-à-dire Christ. « Il est juste », c’est encore Lui.
Mais ensuite, nous trouvons, « est né de lui
», et au chap. 3, « nous
sommes enfants de Dieu
». Puis de nouveau, « quand il
sera manifesté », et « se purifie comme Lui
est pur », c’est de Christ
qu’il s’agit. Comparez encore les vers. 5 à 7 du même chapitre avec les vers.
21 à 24. C’est de Christ que parlent les premiers, et les autres parlent de
Dieu. Mais on « demeure en lui
» (vers. 6), Christ, de même que l’on
« demeure en lui
» (vers. 24), Dieu. Si nous examinons les vers. 18 à 20
du chap. 5, nous y verrons ressortir le même fait. On est né de Dieu, par Lui
on a la vie, il est le Véritable ; mais ce Dieu véritable, c’est Christ,
Lui, le Fils de Dieu qui est venu nous le faire connaître, et qui est la vie
éternelle, Celui en qui nous la possédons.
Voyez maintenant l’importance que l’apôtre attache à la doctrine
du Christ, c’est-à-dire du Fils unique. Les croyants ont à demeurer dans ce
qu’ils ont entendu dès le commencement, et alors ils demeureront dans le Fils et dans le Père.
De nouveau
le Fils est associé au Père, de manière à montrer leur union intime excluant la
pensée que le Fils puisse ne pas posséder la même nature divine que le Père,
puisse être une créature, car il est mis sur le même rang. Nier le Fils, c’est
n’avoir pas non plus le Père, et c’est là l’antichristianisme.
Nier le Fils, c’est Lui refuser ce que la doctrine de Jean expose :
son union éternelle et ineffable avec le Père, sa déité non moins que son
humanité. Le Fils est Celui dont l’évangile nous parle dans les chap. 1:14, 18,
et 3:16, car nous lisons : « En ceci a été manifesté l’amour de Dieu
pour nous, c’est que Dieu a envoyé son Fils unique
dans le monde, afin que nous vivions par
lui » (1 Jean 4:9). Ici encore, de même qu’aux vers. 10 et 14, nous avons la
preuve de la préexistence de Christ : « Dieu a envoyé son Fils
», Celui qui était la vie éternelle
auprès du Père (1:2). Le témoignage que Dieu a rendu, c’est qu’il nous a donné la vie éternelle,
« et cette vie est dans
son Fils » (5:11). Ici encore, n’avons-nous pas une preuve frappante de la
divinité absolue de Christ ? La vie éternelle est
en Lui, le Fils de Dieu. Pourrait-elle être dans une
créature ? N’est-ce pas un attribut essentiel de Dieu d’avoir en soi la
vie ? Une créature a besoin de recevoir la vie pour la posséder, elle ne
saurait en être la source. « Celui qui a
le Fils
», qui le possède
par la foi, « a la v
ie,
celui
qui n’a pas le Fils de Dieu, n’a pas la vie » (vers. 12). La vie et le Fils, le
Fils de Dieu, Christ, sont ici identifiés. Il est la vie. Je le répète :
pourrait-il l’être sans être Dieu ?
J’ai parlé de l’importance que l’apôtre attache à la doctrine du
Christ, telle qu’il l’expose dans ses écrits, c’est-à-dire sa divinité
éternelle et sa réelle humanité. Écoutons, à cet égard, ce qu’il dit à la dame
élue : « Quiconque vous mène en avant (en dehors de la doctrine du Christ,
par les spéculations de la science humaine) et ne demeure pas dans la doctrine
du Christ, n’a pas Dieu.
Celui qui
demeure dans la doctrine, celui-là a le
Père et le Fils.
Si quelqu’un vient à vous et n’apporte pas cette doctrine,
ne le recevez pas dans votre maison et ne le saluez pas, car celui qui le salue
participe à ses mauvaises œuvres » (2 Jean 9-11). Quelle étroitesse
d’esprit ! quelle intolérance ! s’écrierait-on, si quelqu’un, de nos jours, se permettait de
telles paroles. À entendre ce qui se dit aujourd’hui, la doctrine du Christ, ce
qui concerne la nature du Fils de Dieu, est affaire d’opinion ; cela
relève de la science et non de la foi. Qui sait si, en affirmant sa déité, ce
n’est pas moi qui me trompe, tandis que ceux qui la nient seraient dans le vrai
(*) ? Voilà où nous en sommes réduits
avec les docteurs de ce siècle. Où est la vérité ? Où est la
certitude ? Mais Jean, ou plutôt l’Esprit Saint par sa plume, dit : « Nous
savons
», ce n’est pas une opinion ; c’est une certitude ; « nous
savons
que le Fils de Dieu est venu ; et il nous a donné une
intelligence afin que nous connaissions le Véritable ; et nous sommes dans
le Véritable,
savoir dans son Fils Jésus-Christ
: lui est le Dieu véritable et la vie
éternelle » (1 Jean 5:20). Et l’apôtre nous trace le chemin à suivre à l’égard
de ceux qui n’apportent pas cette doctrine et rabaissent la gloire du Fils de
Dieu. Si c’est être intolérant, soyons-le avec Jean, plutôt qu’être indifférent
à l’erreur ou de pactiser avec elle.
(*) Les hérétiques dans l’Église libre, 4° lettre
Si nous passons à l’Apocalypse, nous n’y verrons pas moins ressortir d’une manière frappante la gloire de la déité de notre adorable Sauveur. Quelque difficulté que puisse offrir l’interprétation de ce livre, duquel cependant il est écrit : « Bienheureux celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de la prophétie » (Apoc. 1:3), ce qu’il dit de Christ est aussi clair et positif que possible. Christ y est présenté comme homme, sans doute, car il y est question de Lui comme chef de l’Église et comme établissant son règne dans le monde (chap. 1:12, 13 ; 11:15) ; mais cet homme est revêtu de tous les caractères et de tous les attributs qui n’appartiennent qu’à Dieu ; il est vu constamment associé à Dieu comme une créature ne peut l’être, et il est l’objet de l’adoration de tous les êtres créés.
Considérez d’abord la salutation : « Grâce et paix à vous,
de la part de celui qui est, et qui était, et qui vient, et de la part des sept
Esprits qui sont devant son trône, et de la part de Jésus-Christ ». Voilà Christ
associé à Dieu dans son Être immuable et à l’Esprit Saint, mis sur le même rang
comme source de grâce et de paix. Comparez les vers. 7, 8 et 17 de ce même
chapitre, avec les vers. 12 et 13 du chap. 22. Il en ressort que Christ, celui
qui vient, qui est l’Alpha et l’Oméga, le premier et le dernier, le
commencement et la fin, est aussi le Seigneur Dieu, le Tout-puissant, Celui qui
est, qui était et qui vient. Tous ces titres sont ceux attribués à Dieu dans
l’Ancien Testament. Son double caractère d’homme — témoin fidèle et premier-né
des morts — et de Dieu éternel, tout-puissant et immuable, est ainsi affirmé de
la manière la plus distincte. Nous le voyons encore aux vers. 13 et 16 du même
chapitre. Le Fils de l’homme y apparaît revêtu du caractère distinctif de
l’Ancien des jours, dans Daniel 7:9. Je ferai la même remarque sur les vers. 17
et 18 : « Moi », dit Jésus, « je suis le premier
et le dernier,
et le vivant
». Le voilà dans sa déité
absolue ; Il est le premier, Celui de qui tout tire son être, qui est
avant toutes choses ; et Il est aussi le dernier, Celui qui est la fin de
tout, à qui tout vient aboutir. Ces paroles d’ailleurs sont le titre que prend
Jéhovah lui-même, dans Ésaïe : « Ainsi dit l’Éternel, le roi d’Israël, et
son rédempteur, l’Éternel des armées : Je suis le premier, et je suis le
dernier ; et hors moi il n’y a pas de Dieu » (Ésaïe 44:6). Jésus, en se les
attribuant, ne proclame-t-il pas de la manière la plus formelle sa déité ?
Il se nomme ensuite « le vivant
» ;
comme homme, il a été mort, mais, ressuscité, il est vivant aux siècles
des siècles. « Le vivant
» exprime
autre
chose : c’est Celui en qui réside la vie, Dieu même, et c’est encore un
des titres de l’Éternel : « L’Éternel Dieu est vérité ; lui est le
Dieu vivant » (Jér. 10:10). Écoutons encore l’effusion
du coeur de l’apôtre et de l’Église, quand Christ, le fidèle témoin, lui est
présenté : « À celui qui nous aime … à lui la
gloire et la force aux siècles des siècles » (1:6). Cette doxologie
pourrait-elle, sans une idolâtrie flagrante, être adressée à Christ, s’il n’est
pas réellement Dieu ? (comparez Psaume
29:1 ; 96:7).
Contemplons maintenant les scènes célestes décrites aux chap. 4 et 5. Dans le premier, nous avons le Dieu créateur (vers. 11). Sa gloire comme l’Être tout-puissant, saint et immuable, est proclamée par les quatre animaux qui portent les caractères à la fois des séraphins d’Ésaïe 6, et des chérubins d’Ézéchiel 1 : « Saint, saint, saint, Seigneur, Dieu, Tout-puissant, celui qui était, et qui est, et qui vient », disent-ils, de même que les séraphins d’Ésaïe. Les saints glorifiés, représentés par les vingt-quatre anciens, se prosternent et adorent Celui qui vit aux siècles des siècles. N’est-il pas frappant de voir là le Jéhovah des armées d’Ésaïe 6, le même qui en Jean 12, est identifié avec Jésus ?
Mais passons au chap. 5. L’Agneau, qui a été immolé, Celui qui a
vaincu, le Lion de la tribu de Juda, Christ, l’homme qui a souffert, est vu au
milieu du trône de la Majesté divine. Il est revêtu des symboles de la
puissance parfaite et de la toute-connaissance — sept cornes et sept yeux. Les
saints glorifiés et les anges l’entourent, et ils adorent l’Agneau rédempteur,
comme ils ont adoré le Jéhovah créateur. Puis la création tout entière unit,
dans un même acte d’adoration, Celui qui est assis sur le trône et l’Agneau. Le
culte du ciel place sur une même ligne Celui qu’on veut nous faire regarder
comme un homme et le Dieu suprême, Jéhovah, Élohim, le Tout-puissant !
Encore une fois, Dieu ne donne pas sa gloire à un autre (Ésaïe 42, 8). Si
Christ sur la terre et dans le ciel est présenté à l’adoration des saints,
c’est qu’il y a droit, c’est qu’il est véritablement Dieu. Sans cela, se
prosterner devant Lui n’est qu’un acte d’idolâtrie. S’il n’est qu’une créature,
c’est une offense faite à Dieu que de Lui donner son nom ; Thomas a eu
tort de Lui dire : « Mon Seigneur et mon
Dieu !
».
Remarquons encore l’association intime du Dieu Tout-puissant et de l’Agneau dans tout ce livre. La colère de l’Agneau est la colère de Dieu (6:16, 17 ; 11:18) ; le salut vient de Dieu et de l’Agneau (7:10) ; quand le royaume du monde de notre Seigneur et de son Christ est venu, c’est le règne du Tout-puissant (11:15, 17) ; le Seigneur, Dieu, le Tout-Puissant, et l’Agneau, sont le temple de la sainte cité, et le trône de Dieu est aussi celui de l’Agneau (21:22 ; 22:1). Partout, c’est l’exaltation de l’Agneau ; partout, il est associé à Dieu dans la gloire divine comme la possédant lui-même, et que serait-ce, je le répète, sinon la déification de l’homme et une idolâtrie, s’il n’est pas Dieu essentiellement ? Le jour vient où un homme s’assiéra comme Dieu dans le temple de Dieu, se présentant lui-même comme Dieu (2 Thess. 2:4). Mais celui-là c’est l’Inique, l’homme de péché, l’Antichrist. Hélas ! ceux qui privent Christ de sa déité, de sa gloire divine et éternelle, ne frayent-ils pas la voie à ce fils de perdition ? Car qui est l’antichrist, sinon « celui qui nie le Père et le Fils ? » « Quiconque nie le Fils », quiconque ne le reconnaît et ne le confesse pas pour ce qu’il est dans l’essence divine, celui-là « n’a pas non plus le Père », ne saurait être en communion avec le Père qui revendique pour son Fils le même honneur que pour Lui-même (1 Jean 2:22, 23 ; Jean 5:23). Combien ces paroles sont solennelles !
J’ai rappelé, les trois grands témoignages donnés par Paul en
Col. 1, Hébreux 1, et Phil. 2. Il en est d’autres du même apôtre que nous
trouvons dans les épîtres et les Actes. Nous trouvons dans ce dernier livre, un
fait digne de remarque. Jésus avait été condamné par le sanhédrin comme
blasphémateur, pour avoir confessé qu’il était Fils de Dieu. Pour les Juifs,
nous l’avons vu, se donner ce titre c’était poser son égalité avec Dieu, se
faire Dieu. Paul, avant sa conversion, adoptait sans doute les vues du
sanhédrin. « J’étais », dit-il, « un blasphémateur » (1 Tim.
1:13). Mais dès qu’il eut vu Jésus dans la gloire et qu’il eut cru en Lui,
« aussitôt il prêcha dans les synagogues que Jésus est le Fils de Dieu » (Actes
9:20). Quelle était la portée de sa prédication sur un tel texte. Par là il
reconnaissait l’injustice de la sentence du sanhédrin et confessait que Jésus
est Dieu. Lorsqu’il le niait, il était un « blasphémateur ». Si Christ n’eût été
qu’un homme, Paul aurait pu être un « outrageux », et un « persécuteur », mais non
un blasphémateur. Ne pas confesser Christ comme Dieu est un blasphème. Ainsi
répudier la condamnation de Jésus par le sanhédrin, non seulement parce qu’elle
est injuste, mais blasphématoire ; reconnaître ainsi que Jésus est Dieu,
voilà la grande vérité qui est à la base de la conversion de Saul de Tarse.
Aussi la voyons-nous proclamée dans ses lettres, comme elle l’était dans ses
prédications. « Issu des pères selon la chair, Christ est sur toutes choses Dieu
béni éternellement », écrit-il aux Romains (Rom. 9:5). À Timothée, en parlant du
grand mystère de la piété, il dit : « Dieu a été manifesté en chair » (1 Tim. 3:16). Je sais qu’il existe une variante, selon
laquelle il faudrait traduire : « Celui
qui a été manifesté en chair ».
Mais quoiqu’il en soit, c’est de Christ qu’il s’agit : Lui seul a été
manifesté ou est apparu en chair — nous, nous naissons de la chair (Jean 3:6).
Dès lors, nous avons le fait qu’avant d’être manifesté ou d’apparaître en
chair, il existait. Sa préexistence ou sa divinité éternelle sont donc affirmés
dans l’un ou l’autre cas. Écrivant à Tite, l’apôtre dit : « En attendant la
bienheureuse espérance et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et
Sauveur Jésus-Christ » (Tite 2:13). Lors même que l’on traduirait « de notre
grand Dieu et de notre Seigneur Jésus-Christ », comme plusieurs le font, ce
passage ne fournit pas moins une preuve de la divinité de Christ, puisque la gloire du grand Dieu
est sa gloire.
D’ailleurs, il n’est jamais
parlé dans l’Écriture de l’apparition de Dieu le Père, venant pour accomplir
ses desseins, mais toujours de l’apparition de Jésus-Christ. C’est donc bien
« la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ ».
Dans les adresses en tête des épîtres, Jésus-Christ notre Seigneur est constamment associé à Dieu le Père. Cela n’indique-t-il pas égalité de nature divine, tout en rappelant l’humanité de Jésus ? Pourrions-nous supposer que celui qui ne serait qu’un homme, une créature, fût ainsi placé sur le même rang que Dieu, pour donner grâce, paix et miséricorde ? Je pourrais m’étendre sur ce sujet ; mais je me borne à relever encore quelques points. Ainsi, nous voyons que le royaume de Dieu est le royaume de Christ : « Aucun cupide (qui est un idolâtre) n’a d’héritage dans le royaume du Christ et de Dieu » — ou « de celui qui est Christ et Dieu » (Éph. 5:5). La grâce de Dieu est la grâce du Seigneur Jésus-Christ (2 Thess. 1:12) ; les appelés de Jésus-Christ sont les appelés de Dieu (Rom. 1:6 ; 8:28, 30) ; l’amour de Dieu et l’amour du Christ sont identifiés (Rom. 8:35, 39).
En résumé, nous pouvons affirmer que tout, dans les écrits des apôtres, mais surtout ceux de Paul et de Jean, enseigne ou suppose cette grande vérité, la divinité éternelle de Christ. Elle est à la base de tout leur enseignement. Les vérités capitales de la justification par la foi chez Paul, et de toute la rédemption comme il l’expose, ne peuvent subsister si Christ n’est pas Dieu. Et, dans Jean, c’est parce qu’il est Dieu, qu’il est vie et lumière pour les hommes plongés dans les ténèbres et dans la mort.
Vous avez remarqué, mon cher ami, que je n’ai point parlé des témoignages que les évangiles synoptiques rendent à la déité de Christ. Je l’ai fait à dessein. Comme ils présentent essentiellement le côté humain de sa Personne, et parlent plutôt de sa gloire à venir, c’est chez eux que l’on cherche de préférence les caractères de celui que l’on appelle le Christ historique. Il convenait donc, pour terminer la démonstration de la grande vérité qui nous occupe, de faire voir que leur enseignement sur ce point est parfaitement d’accord avec celui des autres Écritures. Il est vrai que la préexistence de Christ n’y est pas aussi directement établie que dans d’autres parties du Nouveau Testament, mais toute âme simple qui les lit, sans idées préconçues, sans système formé à l’avance, ne peut qu’y voir, manifestés en Jésus, les caractères et les traits qui ne conviennent qu’à Dieu.
Je n’entends point par là simplement que, dans sa vie sans tache ici-bas, il a montré, comme on l’a dit, les attributs moraux de Dieu, son amour, sa sainteté, sa justice ; cela est vrai, sans doute. Mais il y a plus. Il était Dieu venu sur la terre — Emmanuel, Dieu avec nous — et il manifestait les attributs incommunicables de la Déité. Les évangiles synoptiques le montrent clairement. Partout Christ y apparaît comme étant plus qu’un être purement humain, plus qu’un prophète qui, suscité par Dieu, enseigne la voie du salut. Le salut est attaché à sa Personne même (Luc 19:9). Cela prouve qu’il est Dieu, car le salut ne saurait être dans un homme. Mais examinons quelques-uns des passages des évangiles synoptiques d’où ressort cette vérité.
J’ai déjà fait allusion à la question de toute importance que
pose Jésus à ses disciples : « Qui disent les hommes que je suis, moi, le
fils de l’homme ? … et vous
; qui dites-vous que je
suis ? » Il fait une distinction entre les opinions diverses et flottantes
des hommes, et ce que doit connaître avec certitude celui qui se dit son
disciple. De plus, en disant « moi, le fils de l’homme », il fait pressentir que,
sous son humanité, derrière son voile d’humiliation, il faut que la foi
discerne une gloire plus qu’humaine et que l’esprit de l’homme ne saurait
découvrir. La réponse spontanée et positive de Pierre est : « Tu es le
Christ, le Fils du Dieu vivant ». Jésus l’accepte, cette réponse ; il ne
reprend pas Pierre, comme il le fait quand celui-ci veut le détourner de l’accomplissement
de son oeuvre (Matth. 16:13-16, 22, 23). Il approuve
les paroles de son disciple comme exprimant un fait qui lui est révélé par le
Père céleste qui se plaît à glorifier son Fils dans son humiliation. « La
chair
et le sang
ne t’ont point révélé cela », dit Jésus,
« mais mon
Père qui est dans les cieux ». L’homme, avec ses facultés
naturelles, peut voir en Jésus un être excellent, un sage, un prophète ;
il faut une révélation de Dieu lui-même pour découvrir à l’âme la relation
divine qui existe entre Lui et Dieu. « Mon
Père » dit Jésus. Il exprime
ainsi qu’il est son Fils, d’une manière toute spéciale. Il l’est par
nature ; nous ne sommes enfants de Dieu que par grâce, en vertu de
l’adoption. Ce titre de fils de Dieu, absolument et exclusivement appliqué à
Jésus, se retrouve en maints autres endroits de ces évangiles, et toujours,
ainsi que dans la confession de Pierre, comme désignant plus qu’un homme. Marc
commence son évangile en lui donnant ce titre : « Commencement de
l’évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu » (Marc 1:1), et les versets qui
suivent font voir avec évidence que ce Fils de Dieu n’est autre que le
Seigneur, Jéhovah, dont Jean, dans le désert, annonce la venue. Témoins de sa
puissance qui commande aux éléments, ceux qui sont avec Lui dans la barque se prosternent
en disant : « Véritablement tu es le Fils de Dieu » (Matth.
14:33), et il ne repousse pas leur hommage, comme il aurait dû le faire s’il
n’eût été qu’un homme ou une créature (voyez Actes 10:25, 26 et Apoc. 22:8, 9 (*)). Les
démons mêmes sont forcés de le reconnaître comme étant revêtu de cette dignité
et se prosternent devant Lui (Luc 4:41 ; Matth.
8:29). À son baptême, quand il va commencer son ministère public, la voix du
Père déclare qu’il est son Fils bien aimé (Matth.
3:17 ; Marc 1:11 ; Luc 3:22), et lorsqu’à la transfiguration, sur la
sainte montagne, il déploie devant ses trois disciples la gloire du royaume à
venir, de nouveau Dieu le Père, du sein de la gloire magnifique, fait entendre
ces paroles : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon
plaisir » (Matth. 17:5 ; Marc 9:7 ; Luc
9:35 ; comp. 2 Pierre 1:17). Cela ne
rappelle-t-il pas ce qu’écrit Paul aux Colossiens : « Il nous a transportés
dans le royaume du Fils de son amour » ? (Col. 1:13). Ce que nous
enseignent les évangiles synoptiques, ne diffère pas de la doctrine de Paul.
(*) Dans ce passage, les paroles de l’ange font bien ressortir que l’hommage ou l’adoration appartient à Dieu seul.
On pourrait objecter que Dieu déclare que Jésus est son Fils à
cause de son excellence au-dessus des autres hommes, et qu’il le met ainsi à
part. Mais nous ne saurions trop nous rappeler que l’expression « Fils de Dieu »
avait pour les Juif, une portée tout autre. Pour nous en convaincre, voyons
Jésus devant le sanhédrin. Le souverain sacrificateur l’adjure de dire s’il est
le Fils du Béni, du Dieu digne de toute adoration (Marc 14:61-64 ; Matth. 26:63-65). « Je le suis
», répond Jésus, et
aussitôt le souverain sacrificateur s’écrie : « Il a blasphémé ! »
Pourquoi cette exclamation, si la confession de Jésus avait simplement
signifié : Je suis un homme aimé de Dieu, le Christ ? C’est, que,
pour le souverain sacrificateur et pour les membres du sanhédrin, comme pour
les Juifs dans l’évangile de Jean, ce titre de Fils de Dieu comportait l’égalité
avec Dieu — le prendre, c’était se faire Dieu, usurper la gloire due à Jéhovah
seul. De là l’accusation de blasphème, qui n’aurait sans cela aucun sens, et de
là aussi la sentence unanimement prononcée : « Il mérite la mort ».
Et remarquez, mon cher ami, que, dans ce moment critique, où
toutes les autres accusations portées contre Jésus avaient été reconnues
fausses, et où cette confession était sa sentence de mort, Jésus ne dit pas à
ceux qui le condamnaient : « Mais non ; vous me comprenez mal. Je n’entends
point par là ce que vous voulez dire. Je ne suis Fils de Dieu que moralement,
comme vous aussi vous pouvez l’être ». Non ; il affirme de plus la gloire
dont Il sera revêtu comme fils de l’homme, mais en laissant subsister ce qu’il
a dit comme étant Fils de Dieu : « Je le sui
s
». Que dirons-nous
à cela ? Christ a-t-il accepté ce titre, sachant ce qu’il signifiait pour
ses juges, tout en ayant la conscience que ce n’était pas vrai de Lui ?
S’est-il laissé condamner à mort pour soutenir un mensonge ? A-t-il ainsi
laissé volontairement l’erreur dans l’esprit de ses ennemis, ou bien s’est-il
abusé Lui-même jusqu’à croire être ce qu’il n’était pas ? Toutes ces
suppositions révoltent le sentiment chrétien, et cependant c’est à l’une
d’elles que sont réduits ceux qui n’admettent pas que la déité de Christ brille
autant dans les évangiles synoptiques que dans les autres portions du Nouveau
Testament.
Dans l’enseignement de Jésus, sa relation et son identité de nature avec le Père sont aussi affirmées. Prenez la parabole des vignerons (Marc 12:6). Il est dit que le maître de la vigne, « ayant donc encore un unique fils bien-aimé, il le leur envoya ». Nous voyons clairement ici la distinction de nature entre les cultivateurs et les serviteurs, et le fils unique bien-aimé. Ce passage ne vous rappelle-t-il pas d’une manière frappante celui de Jean 3:16 ? Lisez encore la question adressée par Jésus aux pharisiens, et la conclusion qu’il en tire : « Que vous semble-t-il du Christ ? de qui est-il fils ? Ils lui disent : De David. Il leur dit : Comment donc David, par l’Esprit, l’appelle-t-il Seigneur » ? (Matth. 22:41-46). Il est fils de David comme Messie, mais il est bien plus ; il est le Seigneur de David, assis à la droite de la Majesté.
Mais prenons un autre ordre de faits. Voici la naissance de
Jésus-Christ, son entrée dans ce monde. On veut que, d’après la généalogie
donnée par Luc et remontant à Adam, duquel l’évangéliste dit : « De Dieu »,
pour marquer de qui Adam tenait la vie, Jésus soit homme et fils de Dieu au
même titre que nous, et rien de plus — différence de rang, non d’essence. Mais
au début de cette généalogie, n’est-il pas dit : « Étant, comme on l’estimait,
fils de
Joseph ? » Certes, il était un homme parfait, fils de Marie, la semence de
la femme, mais en vertu de sa naissance ici-bas, conçu du Saint-Esprit, il est
nommé Fils du Très-haut, ce qui n’appartient à aucun homme. Il y a là plus
qu’une différence de rang. Voyez aussi le soin avec lequel, à la fin de la
généalogie de Joseph, l’idée de la paternité de celui-ci est écartée : « Le
mari de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ » (Matth. 1:16). Et quand Marie a enfanté, le saint enfant qui
est né, n’est-il pas « Emmanuel
, Dieu avec nous ? » N’est-ce pas Dieu
lui-même, Jéhovah, qui se trouve là, venu au milieu de son peuple, comme
l’indique son nom de Jésus, c’est-à-dire Jéhovah le Sauveur ? Et
l’explication donnée par l’ange à Joseph, rend d’autant plus certain que
c’était Dieu lui-même qui venait sous cette forme d’homme (Matthieu 1:20, 21).
Du reste, nous voyons la même vérité briller dans le chapitre second de
l’évangile de Luc. Le petit enfant qui vient de naître à Bethléhem, qui est
couché dans la crèche, parce qu’il n’y avait pas de place dans l’hôtellerie,
est, selon les paroles de l’ange du Seigneur, « le Sauveur, le Christ, le Seigneur
», et les armées célestes célèbrent sa venue sur la terre (Luc
2:11). Le Seigneur, c’est-à-dire Jéhovah, l’Éternel, le Dieu d’Israël, venu
pour sauver son peuple, pour être aussi le Sauveur du monde. Ainsi sa gloire
divine, gloire qu’il possédait en entrant dans le monde, est constatée et
proclamée dès qu’il y apparaît. Les bergers comme les mages l’adorent.
On prétend que ce que Jésus a montré de Dieu, ce sont ses
attributs moraux, ce qui peut être aussi vu en nous, ce que Dieu demande de ses
adorateurs, et non la toute-science, la toute-puissance et les autres attributs
divins incommunicables. Les faits rapportés dans les synoptiques et les effets
qu’ils produisent, détruisent complètement cette affirmation. Les miracles
accomplis par Christ démontrent non seulement une puissance divine agissant par
Lui, mais une puissance qui lui appartient en propre. Comparez la
multiplication des pains par Élisée (2 Rois 4:42-44), avec celles opérées par
Jésus. Le prophète dit : « Ainsi a dit l’Éternel », mais Jésus agit par
lui-même (Matth. 14:19 ; 15:36). Élie et Élisée
ressuscitent des morts (1 Rois 17:20, 21 ; 2 Rois 4:33) ; mais pour
cela ils crient à l’Éternel, ils le supplient de leur accorder la grâce de
rendre la vie aux enfants. Jésus, Lui, parle en Maître souverain, comme Celui
en qui réside la vie, qui a la puissance de faire mourir et vivre (1 Sam. 2:6).
À la fille de Jaïrus, il dit : « Jeune fille, JE
te dis, lève-toi » ; au jeune homme de Naïn que
l’on portait en terre, il adresse les mêmes paroles, et l’une et l’autre sont aussitôt
rappelés à la vie (Marc 5:41 ; Luc 7:14). Il parle avec autorité, on voit
que c’est sa propre puissance divine qui agit. Et remarquez-le, l’effet suit
immédiatement la parole. Cela ne vous rappelle-t-il pas le « que la lumière
soit, et la lumière fut », et ce que dit le psalmiste : « Il a parlé, et la
chose a été » ? (Ps. 33:9).
Christ commande aux créatures et aux éléments comme Celui qui, les ayant faits, en est le Maître (Luc 5:5-7 ; Matth. 17:27 ; 8:26 ; Marc 4:39). Il guérit, et c’est toujours comme ayant la puissance en Lui-même. Au lépreux, dont la guérison ne pouvait s’opérer que par l’intervention de l’Éternel même, il dit : « JE VEUX, sois net » (Marc 1:41). « Croyez-vous que JE puisse faire ceci ? » dit-il aux aveugles qui implorent sa pitié (Matth. 9:27, 28). C’est toujours Lui qui agit, c’est la foi en Lui qu’il demande. Aurait-il pu la réclamer sans blasphème, s’il n’eût été qu’un homme ? On ne peut qu’être frappé de cette manière de parler et d’agir, qui le distingue des prophètes et des apôtres accomplissant des actes de puissance. Et non seulement il exerce la puissance divine comme la possédant en lui-même, mais comme Dieu envoya autrefois des prophètes, Jésus envoie de son chef des hommes qu’il revêt de pouvoirs miraculeux (Matth. 10 ; Luc 10). En tout, il agit en Dieu.
Au cinquième chapitre de l’évangile de Matthieu, il passe en revue plusieurs des préceptes que l’Éternel donna à Israël, par le moyen de Moïse. Il en étend la signification aux sentiments et aux mouvements du coeur, ou même les abroge par ces simples mots « Mais MOI, je vous dis ». Quel autre que le Législateur lui-même pourrait parler ainsi ? Quelle audace à qui ne serait qu’un homme de dire : DIEU a dit, mais MOI, je vous dis !
Jésus s’attribue le pouvoir divin de pardonner les péchés. Et
quand les scribes, à bon droit, disent : « Qui peut pardonner les péchés que
Dieu seul
? » que fait-il ? Il montre, par un acte de
puissance, qu’en effet c’est bien Dieu
qu’ils ont devant eux. Il affirme
ainsi clairement ce qu’il est. Celui qui, revêtu de sa propre autorité, disait
au paralytique : « JE te dis, lève-toi », était la Personne divine qui
pouvait pardonner les péchés. L’accuser de blasphème, ne pas le reconnaître
pour ce qu’il était, c’était « penser du mal dans son cœur » (Matth.
9:4-6 ; Marc 2:5-11). Autre part, il se borne à insister et répète, en
dépit des raisonnements des scribes et des pharisiens : « Tes péchés sont
pardonnés, ta foi (en moi) t’a sauvé » (Luc 7:47-50). Partout on voit, sous
l’humble apparence de Jésus de Nazareth, percer les rayons de la gloire du Fils de Dieu.
Il s’attribue la toute-science. Il connaît ce qu’il y a de plus
caché — les pensées des coeurs. Il se montre comme le Dieu qui sonde « les
coeurs et les reins » (Matth. 9:3, 4 ;
12:25 ; Luc 6:8 ; 9:47 ; Marc 2:8). Il s’attribue la
toute-présence. Où que soient rassemblés deux ou trois en son nom
, il
est là au milieu d’eux (Matth. 18:20). Remarquez ce
rassemblement en son
nom. En Israël, on s’assemblait là où l’Éternel
mettait son
nom, où il manifestait sa présence (Ex. 20:24 ; Deut. 12:11 ; 16:2, 6, 11, 15, 16 ; 26:2), et
maintenant que l’on rend culte en esprit et en vérité, c’est là où se trouve
Jésus, en quelque lieu que ce soit. C’est son nom, sa Personne qui rassemble.
Il se substitue à Jéhovah ; c’est Lui qui le remplace pour les chrétiens.
Encore une fois, s’il n’est pas Dieu, le Dieu béni éternellement, pourrait-il
parler ainsi ? Ne serait-ce pas blasphème et idolâtrie que de s’assembler
au nom d’un homme qui prétendrait être présent partout ? Les dernières
paroles du Seigneur à ses disciples dans l’évangile de Matthieu, le montrent
assumant le même attribut divin : « JE suis avec vous tous les jours,
jusqu’à la consommation du siècle » (Matth. 28:20).
Cela ne nous rappelle-t-il pas les paroles du psalmiste à Israël :
« L’Éternel est ton ombre… L’Éternel gardera ta sortie et ton entrée, dès maintenant
et à toujours » ? (Ps. 121)
Considérons encore l’ordre de baptiser au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. Le Fils est mis sur le même rang que le Père. Serait-il donc possible que le Fils ne fût qu’un homme, une créature, qui aurait commencé d’exister dans le temps ? Ne serait-ce pas une prétention blasphématoire de sa part de se mettre à côté du Père dans cet acte du baptême ? Peut-il y avoir une affirmation plus forte de la divinité éternelle de Christ, de son unité de nature avec Dieu ?
D’autres considérations viennent encore à l’appui de la vérité que nous affirmons. Remarquez ce que Christ exige de ses disciples dans les évangiles synoptiques, comme dans le reste du Nouveau Testament.
L’homme le plus excellent, le plus saint, le plus rempli
d’amour, peut-il, si en même temps il n’est pas Dieu, demander à ses disciples,
avec une autorité absolue, ce que Jésus réclame des siens ? Moïse l’a-t-il
fait ? Les prophètes, et celui qui est le plus grand des prophètes, Jean
le baptiseur, l’ont-ils fait ? Non ; tous s’effacent eux-mêmes et
dirigent leurs regards et le regard de ceux qui les écoutent, vers Celui qui
est plus grand qu’eux tous. Que demande donc Christ de ses disciples ? Ce
que Dieu seul est en droit d’exiger. C’est le dévouement le plus entier à sa
Personne : on ne peut être son disciple, si l’on n’est prêt à sacrifier
pour Lui sa vie et ses relations les plus sacrées, établies par Dieu même. Il
est objet de la foi ; le confesser est la vie, le renier, c’est la
condamnation et la perdition. L’amour pour Lui est le motif suprême de ce que
l’on fait — il faut donc l’aimer de tout son coeur, de toute sa force et de toute
sa pensée, comme l’Éternel le réclamait de son peuple. Recevoir en son nom,
c’est le recevoir, et avec Lui,
Dieu
lui même ; faire du bien ou ne pas le faire à un de ses frères, c’est
avoir ainsi agi à son égard, et c’est la cause du salut ou de la condamnation,
de la bénédiction ou de la malédiction éternelles (Matth.
10:37-39 ; Luc 9:23-26 ; 14:26, 27, 33 ; Marc 10:21, 29,
30 ; Luc 12:8, 9 ; Matt. 25:34, etc).
Qu’est-ce que Dieu pourrait demander de plus ?
Faites aussi bien attention à ce fait que c’est Lui
qui
réclame pour Lui-même
, ce dévouement, cette abnégation,
cet amour, cette foi. Ce n’est pas sur l’ordre de Dieu, comme c’était l’ordre
de l’Éternel d’écouter Moïse et Josué. Il prend cette place et réclame ces
choses, comme Lui appartenant de plein droit. S’il n’est qu’un homme, n’est-ce
pas inviter à l’idolâtrie, que de revendiquer ce qui n’appartient qu’à Dieu
seul, qui ne donne point sa gloire à un autre ? (Ésaïe 48:11). D’ailleurs,
il souffre qu’on l’adore (Matth. 14:33 ; 28:9,
17). Il ne repousse pas cet hommage, comme un ange l’eût fait (Apoc. 22:8, 9). Pardonnez-moi, mon cher ami, si je me
répète, mais dans un sujet d’une importance aussi capitale, on ne saurait trop
insister sur ce qui relève la gloire du Fils bien-aimé de Dieu.
Selon les évangiles synoptiques, aussi bien que selon les écrits
de Jean et de Paul, Jésus sera le juge du monde, des vivants et des morts, et à
ce moment il enverra ses
anges (Matth. 13:41 ; 25:31, etc. ; 16:27 ; Luc
9:26), ceux que Paul appelle « les anges de sa puissance » (2 Thess.
1:7). Pour exercer ce jugement, ne faut-il pas avoir la toute-science et
l’autorité divine que Jean attribue aussi au Fils ? (Jean 5:22, 27).
Remarquez dans le passage cité en Luc 9, la triple gloire dans laquelle
apparaît Jésus en ce jour solennel de jugement : « Dans sa gloire et dans
celle du Père et des saints anges ». Sa gloire, comme Fils de l’homme, celle du
Père, comme son Fils unique et bien-aimé, le resplendissement de sa gloire, de
toutes ses perfections (comp. Jean 17:5), et celle
des saints anges, ses créatures, ses serviteurs, les exécuteurs de ses
jugements. Tout cela appartient-il à un homme ? Comparez avec l’Ancien
Testament où partout c’est Jéhovah qui juge.
Ainsi les synoptiques, tout en présentant plus particulièrement la Personne de Christ sous son côté humain, laissent percer, dans tout ce qu’ils nous montrent de Lui, sa divinité éternelle. C’est bien le même Christ que celui que nous font connaître Jean et Paul.
Les vers. 25 à 30 du chap. 11 de l’évangile de Matthieu,
prouvent à l’évidence la conclusion que je viens de tirer. Toutes ces paroles,
si simples, si touchantes et si profondes à la fois, brillent de l’éclat de la
divinité absolue de Christ. Que l’on pèse les expressions de cette invocation
où le Christ, rejeté par les sages et les intelligents de son temps, tourne ses
regards en haut et loue Dieu qui a ouvert les trésors de la connaissance divine
aux petits enfants. Comme dans Jean 17, il s’adresse au Père, à son
Père. Toutes choses ont été livrées entre ses mains ; comparez avec cela
Jean 3:35 : « Le Père aime le Fils, et a mis toutes choses entre ses
mains », et Jean 13:3 : « Jésus, sachant que le Père lui avait mis toutes
choses entre les mains », et encore Jean 17:2 : « Tu lui as donné autorité
sur toute chair ». N’est-ce pas bien là le même Christ, possédant, en union avec
le Père, la puissance et l’autorité divines sur toutes choses ? Il se
désigne lui-même comme le Fils, le Fils par excellence, le Fils unique ;
et cette glorieuse Personne est telle, que le Père seul peut la connaître dans
les profondeurs de son être : « Personne ne connaît le Fils, si ce n’est le
Père ». Quel est cet Être insondable à tout autre que Dieu ? Peut-il n’être
qu’une créature ? Non ; — c’est Celui qui est un avec le Père — unité
de nature et d’essence, et qui en même temps — mystère ineffable — unit dans sa
Personne la divinité et l’humanité. Comme quelqu’un l’a dit : « Celui qui
avait été de toute éternité un avec le Père, et qui était devenu homme,
dépassait, dans la profondeur du mystère de son être, toute connaissance, sauf
celle qui est dans le Père lui-même. L’impossibilité de connaître Celui qui s’était anéanti pour être homme, soutenait devant
l’esprit incrédule de l’homme, la certitude, la réalité de la divinité
que cet anéantissement aurait pu cacher aux yeux de son incrédulité.
L’incompréhensibilité d’un être, fini en forme, décelait l’infini qui était en
Lui : sa divinité était garantie pour la foi contre l’effet de son
humanité sur l’esprit de l’homme ».
Et enfin, comme dans Jean, Celui que le Père seul connaît, est aussi le seul qui connaisse le Père — qui le connaisse pleinement en vertu de cette unité de nature. Comme tel, il est le révélateur du Père. De même que le Père révèle son Fils, non point le mystère de sa Personne, chose insondable, mais révèle que Jésus est son Fils (Matth. 16:17), ainsi le Fils fait connaître le Père à qui il veut. « Personne ne vit jamais Dieu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, Lui, l’a fait connaître », dit Jean. Et voici les paroles identiques de Matthieu : « Personne ne connaît le Père que le Fils, et celui à qui le Fils voudra le révéler ». Pouvons-nous lire cette déclaration solennelle de Jésus, quant à ses rapports avec le Père et à la puissance dont il est revêtu, sans y voir l’affirmation formelle de sa déité, et ainsi l’accord complet de Matthieu et de Luc (Luc 10:21, 22) avec la doctrine de Jean. Combien il est précieux pour l’âme, d’entendre ensuite cette Personne adorable, Christ, s’adresser à nous, et dire : « Venez à moi, et moi je vous donnerai du repos ! » Il n’appartient qu’à Celui qui est vraiment Dieu, d’appeler à Lui ; Celui seul aussi qui est Dieu peut donner du repos, un repos complet et permanent à l’âme agitée et troublée. Pourrais-je mettre ma confiance, une confiance absolue en quelqu’un qui ne serait qu’un homme ? Ce n’est pas l’enseignement de l’Écriture qui déclare « béni l’homme qui se confie en l’Éternel » (Jér. 17:7). Un homme, oui, certes Christ l’est véritablement ; il l’est avec un coeur sympathique et tendre. Mais c’est l’amour divin, Dieu même, venu dans un homme, et qui m’invite à venir à Lui, à me jeter dans ses bras. C’est parce qu’il est Dieu que je puis le faire sans réserve et m’abandonner à Lui.
L’amour pourra-t-il m’être vraiment révélé, si Celui qui me le révèle n’est pas l’amour même, c’est-à-dire Dieu ? Dieu seul révèle Dieu. On a osé dire à propos du texte le plus touchant de l’évangile : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jean 3:16), qu’il ne perd point de sa valeur quand même on ne verrait en Jésus qu’un homme, que Dieu nous a donné Abraham, Moïse et Jésus-Christ ! Ah ! quand Pierre, sur le mont de la transfiguration, veut, dans son ignorance, mettre Moïse et Élie sur le même rang que Christ, tout en conservant peut-être pour Celui-ci la première place, la voix du Père revendique aussitôt l’honneur dû à son Fils, ce qu’il est pour Lui : « son Fils bien-aimé ». Mais aujourd’hui on le place à côté de Moïse et d’Abraham, Lui qui a dit : « Avant qu’Abraham fût, je suis ! » Laissons les enseignements des hommes, et prêtons plutôt l’oreille à la voix du Père qui dit de son Fils : « Écoutez-le ». Devant cette déclaration, Moïse et Élie disparaissent, Jésus reste seul, Lui, le Fils. Les ombres fuient, le Soleil de justice, l’Éternel lui-même, le Seigneur a paru (Mal. 4:2).
Dieu, dans son amour infini pour un monde coupable, a donné
son Fils ; il l’a livré pour
nous, et ne l’a pas épargné (Rom. 8:32). Il n’a nullement donné ainsi ni
Abraham, ni Moïse. C’est une profanation de mettre Christ sur le même rang.
Pour tout coeur chrétien, il y a entre Christ et les plus excellents des hommes
une distance infinie. La différence n’est pas de rang, mais d’essence. Toutes
les Écritures le démontrent. Que signifierait ce don du Fils unique — « ce don
ineffable », comme dit Paul — si Christ n’avait pas été auparavant
personnellement et éternellement dans le sein du Père ?
Je ne puis que le répéter. Si Jésus n’est pas Dieu — non pas simplement un homme rempli de l’Esprit divin (bien qu’il l’ait été), et manifestant les caractères moraux de Dieu, un homme qui a atteint la gloire divine par sa sainteté — mais Dieu même ; s’il n’était pas Dieu avant de paraître comme homme sur la terre, si, par conséquent, il n’est qu’une créature, ceux qui prétendent pouvoir l’adorer et lui dire : « Mon Dieu » commettent un acte d’idolâtrie. Le christianisme tout entier s’écroule, car il repose sur Christ — Dieu et homme — mystère de la piété. Sans cette vérité, la rédemption, telle que l’enseigne l’Écriture et non les docteurs humains, n’a pas de fondement. Nous n’avons plus de Sauveur. La position de Christ comme souverain sacrificateur dans le ciel, n’a non plus de valeur que vu sa dignité divine — parce qu’il est Fils. Il ne peut être en réalité notre Modèle que si nous contemplons en Lui, Celui qui, étant Dieu, s’est anéanti et est devenu l’homme obéissant jusqu’à la mort. Et pour l’imiter, nous avons besoin d’une vie et d’une puissance qui ne peuvent découler de Lui, s’il n’est pas le Dieu qui vivifie. Toutes les vérités du salut sont ainsi mortellement atteintes, si Christ n’est pas Dieu, le Dieu béni éternellement.
Mais il l’est, et tant que les Écritures subsisteront — or le ciel et là terre passeront, « mais la parole du Seigneur demeure éternellement, l’Écriture ne peut être anéantie » (1 Pierre 1:25 ; Jean 10:35), — nous n’avons pas à craindre que cela devienne « un devoir de ne plus parler de la déité du Sauveur » (*). Au contraire, c’est et ce sera toujours notre devoir, notre joie et notre gloire, d’affirmer hautement que Celui qui fut un homme sur la terre, était la Parole éternelle, le Fils unique dans le sein du Père, Dieu béni éternellement. Quand cette vérité aura disparu dans l’église professante, l’apostasie sera venue, car ce sera la négation du Père et du Fils, l’antichristianisme.
(*) « Si la sincérité théologique nous faisait un devoir de ne
plus parler de la déité
du Sauveur » (Évangile et Liberté
, 5 août
1892).
Veuille le Dieu de toute grâce nous préserver de cet esprit d’erreur et nous affermir dans la foi au Fils de Dieu, Lui qui est le Dieu véritable et la vie éternelle. Puissent tous ceux qui se réclament du nom de Jésus-Christ, fermer l’oreille à la voix de ceux qui n’apportent pas la doctrine du Christ. « Pour vous, que ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous : si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père » (1 Jean 2:24).
Croyez-moi toujours, mon cher ami, votre affectionné en Christ.