LES FILS DE CORÉ

André Gibert


Table des matières :

1 - Des objets et des témoins de la grâce

2 - Des générations au service de la maison de Dieu

3 - Les psaumes des fils de Coré


ME 1965 p. 225, 253

1 - Des objets et des témoins de la grâce

« Les fils de Coré ne moururent pas » alors que « la terre ouvrit sa bouche et engloutit » leur père, ainsi que Dathan et Abiram, et que « le feu dévora » l’assemblée qu’ils avaient soulevée « contre l’Éternel » (Nomb. 26:9-11).

Coré, non satisfait d’être Lévite, et de la famille des Kéhathites dont la charge à l’égard du sanctuaire était particulièrement précieuse, avait jalousé Aaron. Dans son orgueil il avait aspiré à la sacrificature, « honneur que nul ne s’arroge, mais seulement s’il est appelé de Dieu » (Héb. 5:4). Il avait entraîné des chefs de Ruben, c’est-à-dire de la tribu qui selon la chair pouvait se prévaloir du droit d’aînesse, à s’élever contre Moïse et réclamer une part de la conduite du peuple. Cette « contradiction de Coré » (Jude 11) , révolte contre ceux que l’Éternel avait établis, est la révolte même du coeur humain contre Dieu et contre son Christ ; elle est de tous les temps. L’apostasie qui se prépare sous nos yeux la portera à son apogée, quand l’Antichrist « s’assiéra dans le temple de Dieu », s’élevant « contre tout ce qui est appelé Dieu ou qui est un objet de vénération », usurpera la sacrificature et la royauté de Christ et « se présentera lui-même comme étant Dieu » (voir 2 Thess. 2:3, 4). Le châtiment tombé jadis sur Coré et les siens est une figure, déjà effrayante, de celui qui atteindra l’Antichrist et ceux qui l’auront suivi. « Ils furent pour signe », et le demeurent.

Les fils de Coré n’avaient-ils pas approuvé leur père ? S’étaient-ils tenus à l’écart de sa rébellion ? Se sont-ils retirés avec d’autres au dernier moment (Nomb. 16:27) ? Furent-ils épargnés par pure miséricorde ? Cela ne nous est pas dit. Le fait certain est qu’ils ont été les objets de la grâce du même Dieu dont la justice frappait leur père. Celui qui avait dit à Moïse qu’il visitait l’iniquité des pères sur les fils, et sur les fils des fils, jusqu’à la quatrième génération, montrait qu’Il est aussi le Dieu miséricordieux et faisant grâce (Ex. 34:6, 7) . Dans les actes les plus terrifiants de son gouvernement judiciaire, lesquels n’interviennent du reste qu’après les avertissements qu’Il donne dans sa patience, des réchappés témoignent de cette miséricorde qui se glorifie vis-à-vis du jugement. Ainsi dès la chute, ainsi lors du déluge, ainsi à Sodome, ainsi dans tout le cours des voies de Dieu envers son peuple. Il lui a toujours laissé un Résidu (Esaïe 1:9) . Il y en a un présentement selon l’élection de la grâce (Rom. 11:5) . Le Résidu futur sera le noyau de la bénédiction milléniale. Et que sont les chrétiens, par rapport à un monde coupable qui va être jugé ? Qu’est le témoignage d’une Philadelphie au sein de la chrétienté apostasiante ? Ainsi se retrouve toujours, à la gloire de Dieu, le résidu épargné par sa grâce. Nous savons qu’il ne peut en être de la sorte que parce que la justice de Dieu a été satisfaite par l’oeuvre de Christ : c’est à la croix que la miséricorde de Dieu s’élève de la plus merveilleuse manière par rapport au jugement.

La descendance de Coré devait se souvenir que, vouée à la colère, elle y avait échappé par grâce. Pareillement les enfants de colère que nous étions ont besoin de ne pas oublier qu’ils sont des « vases de miséricordes » (Rom. 9:23), et de ne pas perdre de vue que nous portons toujours en nous les germes de la rébellion, dus au premier Adam.

Ce que l’Écriture rapporte de ces descendants de Coré montre les fruits de la grâce dans des générations successives, tout en faisant apparaître aussi des inconséquences inévitables. Quelques bribes de leur histoire subsistent, jusqu’après la captivité de Babylone. Elle se trouvent dans deux ou trois passages du premier livre des Chroniques, outre les psaumes expressément attribués aux « fils de Coré ».


2 - Des générations au service de la maison de Dieu

Les fils de Coré sont restés de vrais Lévites, attachés au sanctuaire. Ils n’ont pas repris les ambitions impies de leur ancêtre. Ils ont été bénis selon qu’ils ont apprécié la place, généralement humble, qui leur était donnée par grâce. Quelques-uns ont acquis le « bon degré » des serviteurs fidèles et ont été promus à des emplois signalés.

1° La fin du v. 19 et le v. 20 de 1 Chron. 9 nous apprennent que, dès la première génération, à la fin du voyage dans le désert et, sans doute, dans les premiers temps d’Israël en Canaan, des fils de Coré « avaient été préposés sur le camp de l’Éternel, gardant l’entrée », et que Phinées, fils d’Éléazar, avait été établi comme « prince sur eux ». Ce service d’apparence humble avait en réalité la plus haute importance ; c’était une mission de confiance que d’avoir à garder les issues du camp des Lévites autour du tabernacle (cf. Nomb. 1:53) . Leur soumission à Phinées, le sacrificateur, petit-fils de cet Aaron que leur père avait voulu supplanter, est soulignée : elle témoignait de leur soumission à l’Éternel lui-même, des droits duquel Phinées s’était montré le zélé défenseur, de sorte que « l’Éternel était avec lui ».

2° Environ trois siècles plus tard, le peuple établi en Canaan étant tombé dans la confusion du temps des Juges et la sacrificature se montrant fautive et impuissante, l’Éternel se suscite un serviteur exceptionnel dans un descendant de Coré, savoir Samuel, fils d’Elkana, fils de Jerokham (comp. 1 Sam. 1:1 et 1 Chron. 6:22-27, 34-38) . Sa pieuse mère l’avait voué au service de la maison de l’Éternel à Silo, « afin, dit-elle, qu’il paraisse devant l’Éternel et qu’il habite là pour toujours » (1 Sam. 1:22-28). L’Écriture relève entre autres que le jeune mais vrai Corite ouvrait les portes de cette maison, au matin (3:15) . Nous n’avons pas le dessein de considérer ici en détail son appel ni son ministère comme prophète et comme juge ; il suffit de rappeler que la Parole met en relief son intégrité personnelle et lui assigne une place d’honneur « parmi ceux qui invoquent le nom de l’Éternel » (Ps. 99:6 ; cf. Jér. 15:1, et Héb. 11:32).

Cette brillante page de l’histoire des fils de Coré semblait, hélas, devoir être sans lendemain. Les fils de Samuel s’écartaient des traces de leur père, et celui-ci, sans être aussi coupable qu’Héli le sacrificateur, manquait en les établissant comme juges : la nature ne peut que montrer son incapacité totale quand elle prétend transmettre elle-même un ministère, ou investir quelqu’un d’une autorité. Les parents chrétiens peuvent bien désirer et demander à Dieu que leurs enfants aient le privilège de services dans l’assemblée, mais il ne leur appartient pas de leur en assigner un.

Heureusement, la nature mise de côté, la grâce reprend ses droits. L’on voit, lors de la royauté, la descendance de Coré ressaisir le service modeste mais essentiel de la « garde de l’entrée », et être chargée d’autres activités, avec même une place particulière pour des petits-fils de Samuel. Mais avant d’en parler relevons que l’Esprit de Dieu se plaît à rappeler, longtemps plus tard, après la captivité de Babylone, que ces Corites avaient été « établis dans leur charge » par « David et Samuel, le voyant » (1 Chron. 9:22). La pensée divine avait conduit ces « hommes de Dieu » (*) à assurer la réorganisation du culte lévitique, cette famille de serviteurs y ayant sa place : et cela déjà du temps de Samuel le voyant, quand l’arche était encore à Kiriath-Jéarim, le tabernacle et l’autel étant à Gabaon (1 Chron. 21:29 ; 2 Chron. 1:3) ; ensuite, l’arche transportée à Jérusalem, le roi-prophète prépare tout pour que, dans le temple que Salomon va construire, le culte soit célébré dignement (ch. 23 à 29) .

(*) 1 Samuel 9:6 ; 2 Chron. 8:14 ; Néh. 12:24, 36.

3° Deux charges principales sont mises en relation avec les Corites de cette grande époque de la « majesté royale » (1 Chron. 29:25), celle où David, vieux, « rassasié de jours, de richesses et de gloire » (v. 28), établit roi son fils Salomon, qui « s’assit sur le trône de l’Éternel » (v. 23-25).

D’abord, et par-dessus tout, la charge de portiers. Le détail du service tel que l’ordonne David est rapporté en 1 Chron. 26. Des Merarites, des Guershonites, et parmi eux la famille d’Obed-Edom, sont associés aux fils de Coré. C’est le temps de l’ordre, de la régularité, de la sécurité, le temps des hommes vaillants et forts (v. 6, 7, 8) , aussi bien que du zèle. Comment ne pas penser à ce propos aux premiers temps de l’Assemblée, quand l’énergie de l’Esprit revêtait les apôtres et que la grande grâce qui était sur tous s’accompagnait du maintien vigilant de la sainteté, dans la crainte et dans la séparation du mal ?

L’autre charge était celle de chantres. À la garde de la maison répond la louange dans la maison. Comment le culte aurait-il été rendu si la maison n’avait été gardée avec soin, « afin qu’il n’y entrât aucune personne impure en quoi que ce fût « ? (2 Chron. 23:19) . Les Corites forment une des corporations de Lévites établis par David pour le chant (1 Chron. 15 ;16 ; 25), qu’on retrouve avec Salomon (2 Chron. 5:12) et dont il est fait mention avec Ezéchias (29:12-14) et avec Josias (35:15) . Ils chantaient devant le peuple. Avec eux il y avait des Guershonites, sous Asaph, des Merarites sous Ethan (probablement le même personnage que Jeduthun). Les Corites, eux, étaient sous Héman, « le chantre », entre tous qualifié et fervent. Il est intéressant de noter que ce Héman était un fils de Joël, fils de Samuel (1 Sam. 8:2 ; 1 Chron. 6:33 ; 15:17) ; il est appelé « voyant du roi pour les paroles de Dieu, pour exalter sa puissance », et il était de ceux qui « louaient incessamment », lui, ses quatorze fils et ses trois filles (25:4, 5 ; rapprocher Psaume 84:4) . II est peu probable que ce soit le même que le « sage » Héman de 1 Rois 4:31, l’auteur du Psaume 88 ; mais nous nous abstenons de conjectures sur l’identité de ce dernier. Rappelons d’ailleurs ici quelle grande prudence est à observer quand il s’agit de tirer quelques conclusions de ces généalogies du premier livre des Chroniques, que Dieu n’a pas données sans raison partielles et mêlées. Du moins, au sein de la confusion extrême amenée par l’incurie des hommes, se plaît-il à faire luire ces reflets en apparence épars de sa grâce, et prouve par là qu’elle est immuable.

4° Il le montre de façon particulièrement remarquable en ceci que, comme nous y avons déjà fait allusion, les charges conférées antérieurement aux Corites sont énumérées au retour de la captivité : en effet, comme l’indique le premier verset, le chapitre 9 du premier livre des Chroniques, au moins jusqu’au v. 34, se rapporte au peuple revenu de la captivité de Babylone (cf. Esdras 2 et Néh. 11). La maison de Dieu se reconstruit, sans rien de l’éclat du temple de Salomon, mais avec l’autel établi sur son emplacement ; un résidu ramené d’exil et réuni aux pauvres du pays est là, assujetti aux nations, faible et pauvre, mais encouragé par ce Dieu fidèle. Les charges des Lévites, et spécialement des fils de Coré, sont présentées dans leur multiplicité, comme si tout était encore dans l’ordre initial, et leur valeur est rehaussée, peut-on dire, par la tristesse même du temps dans lequel ils en font l’acquit. Tout cela est plein d’instruction et d’encouragement pour nous. Dans un temps de ruine, comme nous appelons souvent le nôtre à juste titre, le Seigneur reconnaît un témoignage sur la base de ce qu’Il a lui-même établi, et Il le maintiendra jusqu’à son retour. À chacun d’avoir à coeur d’en faire partie et de s’y tenir à la place qui lui est assignée, en vrai fils de Coré, objet de grâce.

La fidélité de Dieu avait conservé les familles, l’ordre est celui du commencement, de David et de Samuel, et chacun oeuvre selon sa mission propre. Voilà ce que nous rapporte 1 Chron. 9:17-34.

Vient toujours en premier lieu la charge de portiers. Quatre « principaux portiers », dont Shallum est le chef (v. 17, 18) se répartissaient le soin des portes « vers les quatre vents » (v. 24). Ils avaient sous eux deux cent douze « portiers des seuils », vivant dans leurs villages mais se relayant « de sept jours en sept jours, d’un terme à l’autre » (v. 25). « Ils étaient établis aux portes de la maison de l’Éternel, de la maison de la tente, pour y faire la garde » (v. 23). Les quatre principaux « se tenaient la nuit autour de la maison de Dieu, car la garde leur en appartenait, et ils en avaient la clé, pour ouvrir, chaque matin » (v. 27) . Nous ne porterons jamais assez d’attention à ce sujet de la garde aux portes de la maison de Dieu, et de jour et de nuit. Que de désordre et de souillure y ont été apportés par les gens et les choses que notre négligence et notre assoupissement ont laissés entrer indûment ! Et, à l’inverse, combien ont été laissés dehors, que pourtant le Seigneur avait reçus !

Ces Corites, responsables de ce qui s’introduisait dans la maison de Dieu, l’étaient aussi de la conservation et du bon usage de ce qu’elle renfermait. Les chambres abritaient des trésors sur lesquels ils étaient préposés (v. 26), et certains d’entre eux l’étaient « sur les ustensiles du service ; car ils les rentraient en les comptant, et ils les sortaient en les comptant ». Il y en avait de commis sur les vases, sur tous les ustensiles du lieu saint, d’autres sur les denrées sacrées, fleur de farine, vin, huile, sur les drogues saintes, les aromates, l’encens. Ils ne composaient pas les parfums, avec ces aromates, c’était là la fonction des sacrificateurs ; eux se tenaient à leur rôle de serviteurs, mais combien ils étaient utiles à leur place ! Toutes ces choses précieuses et saintes nous parlent, ce sont autant de figures de Christ, des beautés et des gloires de sa personne, de l’infinie valeur de son oeuvre. Sentons-nous comme nous le devrions combien il est sérieux, autant que précieux, d’avoir à veiller sur la gloire du nom qui est invoqué sur nous, et sur la sainteté de tout ce qui s’y lie ici-bas ?

L’un de ces fils de Coré est spécialement nommé : Mattithia, premier-né de Shallum (v. 31). Il avait la charge des gâteaux cuits sur la plaque. Être occupé, en vue du culte et de la nourriture spirituelle des enfants de Dieu, de Christ s’offrant dans la perfection de son humanité sainte, quelle précieuse fonction ! D’autres, « d’entre leurs frères, étaient chargés des pains à placer en rangées pour les apprêter après chaque sabbat » (v. 32). Enfin, ces Lévites ayant des fonctions dans les chambres de la maison exerçaient aussi celles de chantres, et étaient pour cela exempts d’autres tâches, « parce que jour et nuit ils étaient à l’oeuvre ».

Cet ensemble varié d’activités demandait l’obéissance, l’ordre, la fidélité de chacun à son poste, du coeur pour la maison de Dieu et pour le culte qui s’y rendait.

La famille des Corites avait ce coeur. Il a trouvé son expression, dès les jours de David et sans doute par la suite, dans ces « psaumes des fils de Coré » où jaillissent en accents inspirés les sentiments éveillés en eux par l’Esprit prophétique. Non seulement ils ont été appelés à chanter ce que David, Asaph ou d’autres avaient composé, mais leur nom signe des psaumes soit composés spécialement pour eux, soit, comme il nous semble naturel de le penser, écrits par eux, et qui ont pris place dans l’« Écriture inspirée de Dieu ». En vérité, la grâce ne pouvait se glorifier davantage.


3 - Les psaumes des fils de Coré

Les onze psaumes des fils de Coré se répartissent entre le deuxième livre des Psaumes, dont ils forment la première partie (42 à 49) , et le troisième livre (84, 85, 87, le 88 étant « pour les fils de Coré » ) . Ces deux livres expriment les exercices de coeur de fidèles qui après les afflictions de l’exil connaissent la joie de délivrances glorieuses accompagnant leur retour. Chez les fils de Coré ces exercices gravitent autour d’une pensée tournée invariablement, comme l’aiguille d’une boussole, vers un seul point, la maison de Dieu à Jérusalem.

Dans le deuxième livre, les fils de Coré représentent prophétiquement le Résidu de Juda de l’avenir, passant de la détresse à l’exultation quand triomphe son Messie. Les psaumes 42, 43, 44 montrent ce Résidu souffrant lors de la grande tribulation. Il aura dû s’enfuir de Jérusalem, quitter la Judée, quand l’Antichrist aura instauré l’idolâtrie. La haine de ses compatriotes apostats le poursuit, celle des nations l’environne dans son exil, mais la peine la plus profonde lui vient du souvenir de la « maison de Dieu », où il montait avec la multitude en fête, bruyante de louanges. Ce temple est loin, l’ennemi l’a profané, le méchant domine en Sion. Les adversaires proches outragent le fidèle, brisent son coeur : « … Où est ton Dieu ? » Privé de tout support visible du culte de l’Éternel et de tout signe de son alliance, il ne soupire pas seulement après les bénédictions perdues, mais après Dieu lui-même. « Mon âme a soif de Dieu… Mon Dieu… Attends-toi à Dieu. » Ainsi parlait l’Esprit de Christ par les fils de Coré au psaume 42. Au psaume 43 le fidèle marche dans le deuil, sous l’oppression et la contradiction, mais la foi relève son âme abattue : la lumière et la vérité de Dieu le conduiront, pour l’amener à sa montagne sainte et à ses demeures. « Je viendrai à l’autel de Dieu… et je te célébrerai sur la harpe, ô Dieu, mon Dieu ! » (43:4) . Quand l’affliction redouble, et que la persécution s’abat sur ces opprimés, l’espérance les soutient. Mis à mort tous les jours « à cause de toi », estimés comme des brebis de tuerie, leur douleur est encore aggravée par le sentiment que, alors qu’eux-mêmes sont fidèles à l’alliance, ils souffrent, selon le gouvernement de Dieu, à cause de l’état de la nation. Mais leur confiance repose en Dieu, connu d’autant mieux que, privés de toute bénédiction extérieure, ils sont rejetés sur Lui dans leur coeur (44) .

Mais voici la délivrance : Christ, manifesté en gloire, va rétablir le peuple devant Dieu, dans une relation nouvelle avec l’Éternel (45) . Le Bien-aimé paraît, exalté comme Roi au-dessus de « ses compagnons, le Résidu fidèle ; l’épouse, la Jérusalem milléniale, sera amenée ; dans les palais d’ivoire les instruments à corde résonneront, les choeurs vont retentir ; les peuples célébreront à toujours et à perpétuité Celui que Dieu a béni à toujours. Les psaumes 46, 47 et 48 disent l’établissement définitif de son règne, et le palais, le temple, Sion, sont le sujet de chants de reconnaissance envers le Très-haut. Alors même que les derniers et plus terribles tonnerres des jugements contre les nations ébranleraient la terre jusqu’à la transporter de sa place, qu’elle se fondrait (comment les fils de Coré n’évoqueraient-ils pas en cet instant l’engloutissement de leur ancêtre rebelle ?), les vivantes images du saint lieu, des demeures du Très-haut et du fleuve qui réjouit la ville de Dieu emplissent leur coeur qui s’affermit en Dieu, leur refuge et leur force, un secours dans les détresses, toujours facile à trouver. Dieu secourra, au matin, la ville sainte. « L’Éternel des armée est avec nous » (46:11). Les dévastations sont pour les ennemis. Comme un nouveau-né faisant jaillir le cri de la vie après les ultimes douleurs de l’enfantement, le « peuple du Dieu d’Abraham » exulte et invite les autres à chanter avec lui le Roi de toute la terre s’asseyant sur son trône (47). Les fidèles contemplent avec ravissement la ville aimée, la ville admirable, le temple au milieu d’elle, où prennent place les vrais et fidèles Lévites et ces Corites s’exhortent à tout bien considérer, le coeur plein de la bonté de l’Éternel, « au milieu de son temple » (48) . Ils peuvent enfin, enseignés au travers d’expériences profondes, parler avec solennité du gouvernement de Dieu, avertir les hommes, les inviter à réfléchir, car c’est quand les jugements de Dieu sont sur la terre que les hommes apprennent la sagesse (49).

Au troisième livre, les chants des fils de Coré se placent entre les psaumes d’Asaph (73 à 83) et ceux d’Héman et d’Ethan (88 et 89), de sorte que, à l’exception du psaume 86, tout ce livre est attribué aux chantres et portiers de la maison de Dieu.

Asaph retrace les voies de Dieu envers Israël, en les voyant, par grâce, du sanctuaire même, dont il parle maintes fois (*). Elles sont reprises dans le saisissant diptyque des psaumes 88 et 89 : d’une part les souffrances sous le gouvernement de Dieu, d’autre part la grâce de Jéhovah fidèle à ses promesses, qui sont accomplies dans et par le Oui et l’Amen, l’homme puissant, l’élu, le vrai David.

(*) 73:17 ; 74:4, 7 ; 76:2 ; 77:13 ; 78:69 ; 79:1 ; 83:12.

Les psaumes des Corites, entre ces deux séries, traduisent à l’avance les sentiments profonds, non plus seulement du Résidu de Juda mais de tout l’Israël futur, ramené de loin pour être restauré comme nation nouvelle dans le lieu où la méchanceté aura triomphé si longtemps. Nous avons vu au livre II ces fils de Coré exprimant la douleur de ceux qui, chassés de Sion et du temple, pleuraient ce qu’ils avaient perdu ; maintenant ils disent la joie d’y revenir, ils en jouissent à l’avance, et tous ceux que l’Eternel rassemble de loin peuvent s’associer à eux. Le psaume 84 dit ce qu’est Dieu, source de force, de bénédiction et de félicité pour tant de pèlerins qui, si loin qu’ils puissent se trouver encore, et quelque vallée des pleurs qu’ils aient encore à traverser, sont en route vers la maison, les demeures aimables… « tes autels, ô Éternel des armées ! » À l’intérieur du temple où Dieu donnera la grâce et la gloire, les bienheureux Corites loueront incessamment, et ils monteront la garde dans ses parvis où un jour vaut mieux que mille ailleurs. Se tenir sur le seuil de la maison de Dieu, pour ces « gardiens des seuils », est le plus insigne privilège, même si d’autres peuvent tenir une telle place pour trop humble. Les captifs seront rétablis, le pardon sera complet, l’oeuvre sera achevée ; ce sera, après le temps des supplications, celui de la bonté et de la vérité qui se rencontreront, de la justice et de la paix qui s’entre-baiseront (85) . Et Sion, la cité de Dieu, aux portes aimées de l’Éternel, prospérera, inébranlable sur la fondation posée par la grâce dans les montagnes de sainteté.

Oui, bienheureux fils de Coré ! Ils sont de ceux qui peuvent dire avec David : « Éternel, j’ai aimé l’habitation de ta maison, et le lieu de la demeure de ta gloire ».

Soyons de ceux-là, qui aiment ainsi la maison de Dieu, telle qu’elle est aujourd’hui proposée à la foi, — « l’Assemblée de Dieu, laquelle Il a acquise par le sang de son propre fils ».