J.N. Darby
Les divisions, titres et sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
Table des matières :
1.1 - L’obéissance précède la bénédiction
1.2 - Que faire quand la conscience condamne la position ecclésiastique où on est ?
1.3 - Ceux qui restent attachés à un système religieux par tradition condamnent l’obéissance
1.4 - Obéir sans réserve à une vérité connue
2 - Importance de l'obéissance
2.1 - C’est l’obligation normale de la créature
2.3 - L’obéissance du Seigneur Jésus
2.4 - Cas divers — Israël passé ou futur, Abraham, Saül
2.5 - L'obéissance est le but de la sanctification des croyants
3 - Faire sa volonté propre est du péché — Obéir à Dieu est un principe général
4 - L'obéissance doit précéder la bénédiction dans tous les cas
4.1 - Les commandements de Dieu ne changent pas
4.2 - L’obéissance à la vérité pour qu’Israël soit restauré — Deut. 30:11-14 ; Rom. 10:6-8
4.4 - L'illusion de vouloir retrouver la bénédiction passée dans la tradition ou par des ordonnances
5 - Preuves de ce que l'obéissance doit précéder la bénédiction
5.1 - L'esprit d'obéissance précède la connaissance de la volonté de Dieu (Jean 7:17)
5.3 - Satan modifie la simple obéissance à la Parole de Dieu
5.4 - L’obéissance en temps de ruine est l’obéissance de la foi
5.5 - Nécessité de la séparation du monde — Samson
5.6 - L'obéissance conditionne la jouissance de l’amour de Dieu
6.1 - Exemples de Jésus, Paul, Naaman
7 - L’obéissance caractérise la vraie marche par l'Esprit
7.1 - S’enquérir de ce que Dieu veut
7.3 - Différence entre avoir
et garder
les commandements
7.4 - Obéir implique de faire valoir « ses talents »
7.5 - L’obéissance e la foi se confie dans l’Esprit de Dieu
La volonté de Dieu à notre égard étant bien connue dans
certaines circonstances dans lesquelles nous pouvons nous trouver, obéir à
cette volonté implicitement
et sans
aucun calcul des conséquences, est-ce un devoir pour nous ? En d’autres
termes : l’obéissance, dans l’ordre moral, doit-elle précéder la
manifestation de la bénédiction divine, ou bien faut-il attendre, avant
d’obéir, la manifestation de cette bénédiction ? C’est là une question de
conscience, dont la solution est singulièrement liée avec les intérêts et la
condition de l’Église de Dieu dans le moment actuel. Plusieurs ont remarqué,
sans doute, au moins en partie, à quel point s’est répandu, au milieu des
chrétiens, le principe que la bénédiction doit précéder l’obéissance, et que,
faute de cela, on est dispensé d’obéir. Cette fâcheuse tendance se présente
ordinairement sous la forme suivante :
Dans l’endroit où l’on a ses habitudes, on a reçu quelque bien par la prédication plus ou moins fidèle de la parole de Dieu ; mais en même temps, la conscience, éclairée par cette Parole, est contrainte de condamner, à plusieurs égards peut-être, comme fausse et antiscripturaire, la position dans laquelle on se trouve. Mal à l’aise, on se demande : Que faire ? Quitter cette position pour en prendre une autre qui mette la conscience au large avec Dieu ? — Cela serait très désirable, sans doute ; mais hasarder ce pas-là, sans assurance préalable d’en retirer un profit évident et permanent, ce serait peut-être marcher à l’aventure, et s’exposer à mille difficultés ou conséquences fâcheuses. De là résulte pour ceux qui cèdent à ces craintes et demeurent ainsi dans un ordre de choses qu’ils voient clairement être mauvais, un triste état d’incertitude et de perplexité, et cette position a pour effet inévitable d’endurcir la conscience en contristant l’Esprit de Dieu, et d’affaiblir l’énergie morale du chrétien qui persiste à y rester et qui se prive ainsi de la bénédiction promise dans cette parole : « À chacun qui a, il sera donné, et il sera dans l’abondance ». Le coeur est loin de se douter de quelle triste source découle cette manière d’agir, à laquelle fournissent d’ailleurs d’abondants aliments tous ces sentiments de timidité et d’incrédulité si naturels à l’homme, et qui sont décorés des noms de prudence et de réflexion : il ne nous vient pas à l’esprit que tout ceci n’est qu’un résultat de cette disposition naturelle que nous avons d’acquiescer au mal, plutôt que d’agir à tout prix contre le mal.
Chez les personnes attachées à des systèmes reçus par tradition ou basés sur une autorité traditionnelle, le travers que nous venons de signaler revêt des apparences diverses : tantôt ce sera celle de l’humilité ou d’autres saintes affections ; tantôt celle de la fermeté de caractère, et d’une disposition à ne pas se laisser séduire par toutes les nouveautés que met en avant l’esprit remuant de l’époque actuelle, sans qu’elles reposent sur aucun principe fixe, propre à diriger ceux qui s’y laissent prendre. — C’est ainsi que, quoique de côtés bien opposés l’un à l’autre (sauf lorsqu’il s’agit de combattre la vérité), on fait un mauvais usage de principes, beaux en eux-mêmes, en les tournant contre ceux qui, par conscience, refusent de donner les mains à ce qu’ils trouvent mauvais autour d’eux, et s’en retirent (Prov. 24:16). Et l’on voit ici comment, en partant de principes de conduite qui ne sauraient s’accorder entre eux, on se rencontre dans le résultat, qui est de condamner l’obéissance d’autrui et de rester soi-même là où les circonstances nous ont placés ; c’est ce qu’en pareil cas l’on peut toujours attendre de l’incrédulité et de l’égoïsme.
Le principe de l’obéissance sans réserve (*) est le
seul qui puisse résister à l’influence de vues, en apparence si sages et si
opposées à ce qui est mal : rien de si humble ni de si ferme que cette
espèce d’obéissance, rien qui indique mieux la présence du Saint Esprit dans le
coeur, rien qui soit si contraire à l’insubordination et qui impose plus
fortement silence aux impies raisonnements de la chair. À la vue des principes
si contradictoires, si diamétralement opposés l’un à l’autre, qui ont cours
pourtant et qui amènent à une même conclusion, l’on ne peut s’empêcher de
croire que cette conclusion ne découle réellement ni des uns ni des autres,
mais de quelque mobile entièrement différent ; et que tout le rôle que
jouent dans cette affaire les principes qu’on invoque, est de neutraliser
l’action d’un autre principe qui, étant reçu, persuaderait l’âme d’embrasser
une voie différente, tandis que, étant neutralisé, il la laisse dans la voie à
laquelle elle est habituée, sans aucun égard pour la légitimité ou
l’illégitimité de sa position. Le vrai secret de l’énigme, c’est qu’il y a
quelque chose de caché dans le coeur, un principe secrètement adopté, dont on
ne se rend même pas compte (peut-être quelque plan arrêté d’avance, quelque
vieille tradition, ou telle autre chose qui agit du plus au moins sur
l’intelligence) ; et qui quelque différent qu’il puisse être amène
toutefois à un même résultat, celui dont nous avons parlé plus haut. Mais quoi
qu’il en soit, dans tous les cas
,
quand Dieu a révélé sa volonté
, quand
il nous a montré un mal dans certaines institutions sanctionnées par un long
usage, ou plutôt un long abus, et auxquelles nous avons participé jusqu’ici, on
ne peut que qualifier de désobéissance
,
de chose mauvaise et qui contriste l’Esprit du Seigneur, tout parti pris de
demeurer où l’on est, même en le couvrant des raisonnements les plus
plausibles. Et, en opposition à cela, je pose en principe que l’obéissance
est la seule voie que, dans
tous les cas, un chrétien ait à embrasser : je parle de l’obéissance à une
vérité connue
et non pas à des plans
que nous nous sommes proposés, quelque excellents qu’ils nous paraissent. Oui,
j’affirme que l’âme humble et simple dont l’oeil
est net
regardera comme sa plus sûre et sa meilleure portion, d’imiter
l’exemple d’Abraham qui partit, à la voix de Dieu, ne sachant où il allait
(Héb. 11:8) ; et que toujours obéir
, obéir au Seigneur
, sans en calculer les
conséquences possibles ou probables, est le seul vrai sentier du chrétien et le
plus sûr moyen de voir s’ajouter de nouvelles bénédictions à celles dont nous
jouissons déjà.
(*) Un bel exemple de cette obéissance est celui d’Abraham, à qui Dieu dit : « Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes ! » Quel ordre ! — Et Abraham, se levant de bon matin, bâta son âne et partit sans dire mot.
Le but des pages suivantes est donc de prouver que l’obéissance au Seigneur est un principe essentiel, même profondément essentiel, qu’il est aussi le préliminaire des bénédictions, et qu’enfin il est l’expression de l’ordre établi de Dieu pour la dispensation de ses grâces (*), ou du moyen par lequel nous venons à jouir de ces dernières. Ce plan aura l’avantage de nous faire envisager le principe en question sous toutes ses faces, savoir dans sa nature, ses preuves, et son application.
(*) Il va bien sans dire que ce traité étant destiné aux enfants
de Dieu, on entend y parler des grâces qui viennent ensuite de la foi, et non
pas d’une obéissance rendue à Dieu par un non-croyant en vue de se rendre
recommandable par sa propre justice. Nous dirons une fois pour toutes, que,
dans ces pages, quand nous emploierons les termes de grâce
, de bénédiction,
etc.,
ce sera toujours dans le sens que nous venons d’indiquer.
Or, ce qui démontre toute l’importance de l’obéissance, c’est que Dieu cesserait d’être suprême, d’être Dieu, si l’obéissance n’était pas la position normale de la créature. Sans doute Dieu peut démontrer l’impuissance de la créature, en faisant découler le bien du mal que la créature avait pensé très volontairement contre Lui (Gen. 50:19, 20), tout comme il a souvent démontré l’excellence de son pouvoir, en contraignant ses adversaires à devenir, à leur insu, des instruments de bénédiction. Mais, quoi qu’il en soit, obéir est une obligation naturelle, la seule naturelle, la seule juste, pour la créature : hors de là, l’ordre de la création est renversé ou troublé, comme aussi le fondement de la distinction qui existe entre le péché et la justice. La définition que le Saint Esprit donne du péché est l’acte d’un homme sans loi, d’un homme qui n’obéit qu’à lui-même (*) ; et il est écrit, d’un autre côté, que « celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement » (1 Jean 3:4 ; 2:17). Ces deux définitions nous sont présentées en action dans les deux Adam, qui sont à la fois types et exemples de la ruine et de la bénédiction : « Par la désobéissance d’un seul homme plusieurs ont été constitués pécheurs, ainsi aussi par l’obéissance d’un seul, plusieurs seront constitués justes » (Rom. 5:19).
(*) C’est la version exacte de 1 Jean 3:4. Il est bien à
regretter que nous n’ayons pas en français d’expression correspondante à celle
de l’original. Le vrai sens du mot anomia
est exactement : l’acte d’un anomos
,
ou d’un homme sans loi quant à Dieu
(1 Cor. 9:21), d’un homme qui ne veut point de loi. C’est le cas de toutes les
oeuvres, même les plus belles en apparence, de l’homme inconverti. Anomos
est le titre donné à l’Antichrist
(2 Thess. 2:8).
Le premier Adam fit sa propre volonté, et tomba sous la
condamnation. Il fut placé sous une épreuve d’obéissance : c’était de son
obéissance à cet ordre : Tu n’en
mangeras point
! que dépendait la position future et la bénédiction
d’Adam sur la terre. Mais il mangea
,
et ce fut là sa perte : la mort, les
gages du péché
, entra dans le monde par l’acte de l’homme, cet acte étant
contraire à la volonté de Dieu. Dieu lui-même, ici, détermine et trace les
caractères et les résultats de l’insubordination envers Lui, et découvre le
secret des destinées de l’homme et de la libre entrée du péché dans le monde.
Ajoutez néanmoins, pour la consolation de nos âmes, en présence de faits si
affligeants, qu’avant l’exécution de la sentence, la bonté de Dieu introduisit
aussi la miséricorde, afin que l’homme puisse vivre d’elle dans le désert où il
fut chassé par la justice du Seigneur.
Notre bienheureux et parfait Sauveur nous offre, dans sa
conduite, un contraste frappant avec la conduite du premier Adam. Sous quel
caractère et avec quel langage s’annonce-t-il en entrant dans le monde ?
C’est sous celui de la plus profonde, mais de la plus sainte et parfaite
humilité : « Voici, je viens ; il est écrit de moi dans le rouleau du
livre » (C’est-à-dire dans le caractère que j’ai revêtu selon les conseils
éternels de Dieu). « C’est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon
plaisir, et ta loi est au-dedans de mes entrailles » (Ps. 40:7, 8). Tel était
son caractère constant et uniforme, et sa perfection comme homme. Aussi,
pendant sa carrière terrestre, l’entendons-nous dire : « Ma viande est de
faire la volonté de celui qui m’a envoyé, et d’accomplir son oeuvre » (Jean
4:34). Tous les actes de sa vie, sans exception, sont empreints du caractère d’obéissance
. Il a pris « la forme
d’esclave, étant fait à la ressemblance des hommes » (Phil. 2:7, 8) ; il
faisait toujours les choses qui plaisaient au Père, ne cherchant point sa
propre volonté, mais la volonté du Père qui l’avait envoyé (Jean 6:38 ;
8:29) ; et il n’a mis d’autre limite à son obéissance que la perfection
même ; car, ayant aimé les siens jusqu’à la fin, il a poussé cette
obéissance jusqu’à la mort, à la mort
même de la croix,
parce que, bien qu’il agit volontairement, il en avait reçu le commandement de son Père
(Jean 10:18). Le Seigneur l’Éternel lui
avait ouvert l’oreille
, et il ne fut
point rebelle, ni ne se détourna en arrière
du chemin étroit ; mais il donna son dos à ceux qui le frappaient,
et ses joues à ceux qui arrachaient le poil
(És. 50:5, 6). Qu’il eût le
sentiment de sa force, ou qu’il ne sentît que sa faiblesse, (car quoique vivant par la puissance de Dieu, il a été
crucifié en infirmité
) (2 Cor. 13:4), jamais on ne le vit reculer dans
l’obéissance qui lui était enjointe et qu’il avait acceptée avec joie. Dans la
force il servait le Père en accomplissant des oeuvres de puissance et
d’amour ; et sa faiblesse était une soumission complète à la volonté de
Celui qui l’avait envoyé. Même obéissance encore dans la tentation : « Il
est écrit », est sa réponse à chaque suggestion du tentateur, dont le but était
précisément de lui faire faire sa volonté. « Si tu es Fils de Dieu, dis que ces
pierres… » Mais le Seigneur ne voulait pas manger sans la volonté de
Dieu : il est écrit : « L’homme vivra… de toute parole qui sort de
la bouche de Dieu » ; et lorsque le diable cite frauduleusement une
promesse écrite
: « Il donnera
des ordres à ses anges à ton sujet, etc. », Jésus lui oppose encore un Il est écrit
, réponse qui déclarait le
principe de l’obéissance implicite, en opposition à ce caractère prompt à
saisir intempestivement un privilège même légitime : vérité singulièrement
importante ! Mais nous y reviendrons bientôt.
En voilà plus qu’il n’en faut pour le sujet, car cette seule
sentence : « Voici, je viens… pour faire, ô Dieu, ta volonté ! »
suffit au croyant pour fixer le caractère et démontrer le principe actif de la
vie de Jésus, du saint Fils de Dieu, type parfait de la soumission à la volonté
divine : « Quoiqu’il fût Fils, [il] a appris l’obéissance par les choses
qu’il a souffertes » (Héb. 5:8). Comme parfait contraste de Jésus, la Parole
nous montre l’Antichrist, ce Roi qui agira selon
sa propre volonté
(Dan. 11:36). Le trait caractéristique de cet Inique
(2 Thess. 2:8), de cet homme de la terre
(Ps. 10:18), est de ne
se soucier de personne, pas même de Dieu, et d’agir au gré de ses désirs.
Mais examinons encore d’autres passages relatifs à l’obéissance
(Ex. 19:4, 5). Le Seigneur s’adresse ainsi par Moïse aux Israélites :
« Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Égypte, et comment je vous ai portés sur des
ailes d’aigle, et vous ai amenés à moi. Et maintenant, si vous écoutez attentivement
ma voix… Et tout le peuple ensemble
répondit et dit : Tout ce que l’Éternel a dit, nous le ferons ». Je ne cite
pas ce passage dans le but de montrer l’empressement ou la compétence du peuple
à remplir les ordres du Seigneur, mais afin de faire voir que l’obéissance
devait être le principe de l’association ou des relations de Dieu avec Israël,
seul principe en effet en vertu duquel Dieu puisse avoir raisonnablement des
rapports avec l’homme, et l’homme marcher avec Dieu.
De même, dans Genèse 22, le Seigneur termine la bénédiction prononcée sur Abraham, par ces paroles : « Parce que tu as écouté ma voix ». Et Jérémie, le prophète, faisant allusion au discours de Dieu à Israël (Ex. 29), parle ainsi au peuple de la part du Seigneur : « Car je n’ai point parlé avec vos pères, et je ne leur ai point commandé touchant des holocaustes et des sacrifices, au jour que je les fis sortir du pays d’Égypte. Mais je leur ai commandé ceci, disant : Écoutez ma voix, et je serai votre Dieu, et vous serez mon peuple ; et marchez dans toute la voie que je vous commande, afin que vous vous trouviez bien » (Jér. 7:22, 23).
Telle était aussi la teneur de cette alliance à l’observation de laquelle était liée la conservation des bénédictions terrestres (détaillées en Deut. 28), et traitée avec le peuple après la violation de celle qui avait été enfreinte au pied du Sinaï. Nous retrouverons encore le même principe dans l’alliance selon laquelle Dieu ramènera et restaurera Israël : « Tu reviendras », dit Moïse à ce peuple (30:8), « et tu écouteras la voix de l’Éternel, et tu pratiqueras tous ses commandements que je te commande aujourd’hui ».
Dans l’apostasie de Saül (rapportée en 1 Sam. 15), la cause du jugement prononcé contre ce prince est ainsi exprimée : « Pourquoi n’as-tu pas écouté la voix de l’Éternel ?… Écouter est meilleur que sacrifice ! »
Si nous pouvons suivre le principe de l’obéissance et sa
parfaite réalisation, dans la conduite du Seigneur Jésus, nous trouvons dans l’obéissance
encore le caractère de la sanctification des croyants, qui sont en effet sanctifiés pour l’obéissance et pour
l’aspersion du sang de Jésus Christ
(1 Pierre 1:2). Oui, c’est pour cela
que le croyant est sanctifié, ou séparé par le Seigneur ; c’est là le
dessein, l’objet de la sanctification ; et ce qui caractérise un état de
non-sanctification est suffisamment retracé dans ces paroles d’Éphésiens 2:2.-
« Vous avez marché autrefois… selon le chef de l’autorité de l’air, de
l’esprit qui opère maintenant dans les fils de la désobéissance
».
Rien ne peut détruire le caractère de ce principe fondamental
que nous soutenons : le péché seul pourrait essayer de le contester ou de le
pervertir. Faire notre volonté propre est toujours désobéissance, c’est
l’activité du vieil homme qui ne se soumet point à Dieu (dont, s’il en était
autrement, il ferait la volonté au lieu de faire la sienne propre), un fruit,
en un mot, de cette nature corrompue, qui n’accepte pas Dieu, mais qui agit
toujours par elle-même et pour elle-même. On peut quelquefois mettre en
question les droits de certains hommes à revendiquer l’autorité, et quelquefois
même résister à ceux qui se l’attribuent ; mais, dans tous les cas, il y a
du péché à vouloir faire sa volonté à soi. Ainsi Pierre, devant le Conseil des
Juifs (Actes 5:29), quand on l’accuse de s’être révolté contre les défenses des
gouverneurs, ne répond point qu’il a le droit d’agir comme bon lui semble ;
c’eût été usurper un droit qu’il n’avait pas. Envers Dieu, ce langage n’aurait
exprimé non plus, dans la bouche de l’apôtre, que l’amour de sa propre volonté,
au grand déshonneur du Souverain des cieux et de la terre. Mais quelle est la
réponse de Pierre ? il vaut mieux
obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes.
Obéir au Conseil eût été désobéissance
envers le Seigneur : autant qu’il dépendait de lui, l’apôtre aurait
acquiescé et hautement contribué à l’opposition des juifs contre l’évangile.
L’exemple de l’apôtre nous montre comment, dans ces
circonstances difficiles où l’on est obligé de résister aux puissances de la
terre, on doit toujours maintenir le principe de l’obéissance à Dieu. On ne
peut s’en écarter dans aucun cas, sans se mettre en quelque sorte en dehors de
ce qui entretient ou indique une relation entre Dieu et l’homme : l’obéissance
et la louange
sont les deux grands exercices de la vie divine en nous.
Mais on a singulièrement perdu de vue ce principe sacré, ou l’on
en a étrangement abusé au milieu des partis qui divisent la chrétienté. Les uns
parlent d’obéissance, mais à l’autorité de la multitude ou des docteurs ;
les autres réclament la liberté : la réponse de Pierre fait, ce me semble,
la leçon aux uns et aux autres. Les dissidents insistent sur la liberté, les
droits, les titres qu’ils ont, quant aux hommes, d’agir en matière de culte
comme ils l’entendent ; les partisans du clergé et du culte national
parlent d’obéissance, et même en parlent souvent ; mais c’est une
obéissance aux hommes et non pas à Dieu qu’ils réclament. « Il faut obéir à Dieu »,
est la réponse chrétienne à faire aux deux
partis. « Il nous faut obéir »
dirai-je
à celui qui fait valoir si hautement ses droits
en matière de conscience. Il nous faut « obéir
à Dieu »,
dirai-je aussi aux amis du clergé ; ou plutôt : Ne
couvrez pas des principes dont vous vous réclamez, votre indifférence pour les
désordres qui n’existent qu’en vertu des oeuvres et de l’autorité de
l’homme : car il faut obéir à Dieu
plutôt qu’aux hommes.
Avec quelle admirable sagacité le Saint Esprit a
révélé et jugé d’avance les voies tortueuses de l’homme et fixé les traces de
ce chemin étroit qu’une sagesse divine pouvait seule découvrir !
En résumé, faire notre volonté n’est jamais bien : obéir à l’homme est souvent un péché, une désobéissance à Dieu ; obéir à Dieu est notre plus sacré devoir.
Je vais plus loin encore, et je dis que, dans tous les cas,
l’obéissance doit
précéder la
bénédiction, tellement que, sans avoir préalablement obéi, l’on ne peut point
s’assurer qu’on sera béni : c’est le second principe à établir. Or la
preuve en repose sur cette grande vérité morale, que les commandements de Dieu
ne perdent jamais leur force obligatoire,
malgré la cessation de certaines circonstances extraordinaires dans les
bénédictions promises à leur observation : car, sauf certains cas de
détail, ces commandements sont toujours moraux
dans leur caractère, c’est-à-dire qu’étant observés, ils tendent, par la
nature des choses qu’ils prescrivent, à manifester en nous et à exprimer le
caractère moral de ce Dieu avec lequel ils sont un moyen de relation, de sorte
que nous en avons notre fruit en sanctification (Rom. 6). Or c’est là ce qui
rend les commandements de Dieu constamment et invariablement obligatoires, et
ce qui les distingue en même temps des ordonnances
proprement dites, ou de ces choses qui peuvent être réformées, sans que
Dieu se déclare par là moins parfait qu’il ne l’est.
Moïse, en Deutéronome 30:11-14, cité par l’apôtre Paul (Rom.
10:6-8), présente le commandement
de
Dieu sous le même aspect : « Il n’est pas », dit-il, « dans les cieux, pour
que tu dises : Qui montera pour nous dans les cieux ? … Car la
parole est très près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur, pour la
pratiquer ». Un peu d’attention à la place qu’occupe ce passage dans le
Deutéronome, nous montrera que c’est avec une intention et un à-propos très
précis que le Saint Esprit, dans l’épître aux Romains, se cite ainsi lui-même,
et que cette citation n’est pas une accommodation
(expression inventée par ceux qui n’ont pu pénétrer dans la pensée de
Dieu), mais la pensée même de Dieu dans cet endroit-là. Ce que Moïse dit ici à
Israël n’est point la teneur de cette alliance par laquelle, en vertu d’une
obéissance littérale, le peuple devait posséder le pays, car Paul aurait eu
bien tort de l’appeler la justice de la foi qui parle ainsi ; mais ce dont
il est ici question, c’est de cette alliance que Dieu traita avec le peuple, outre l’alliance qui avait été traitée en
Horeb
(voyez Deut. 28:69) ; et Moïse parle dans la prévision de la
perte entière que le peuple ferait des bénédictions temporelles,
promises à une obéissance rendue à la loi, selon la lettre,
dans la terre de
Canaan. Ayant donc annoncé cette perte, et la désobéissance du peuple, au
chapitre 29, Moïse continue en disant : « Et lorsque toutes ces choses…
seront venues sur toi, la bénédiction et la malédiction, et lorsque tu les
auras rappelées dans ton coeur, parmi toutes les nations où l’Éternel, ton
Dieu, t’aura chassé, et que tu seras retourné à l’Éternel, ton Dieu, et que tu
auras écouté sa voix, etc. ». Cette prophétie du retour d’Israël à Dieu, au milieu des nations,
c’est-à-dire dans
une position qui était une preuve de leur infraction à la loi, et qui les
mettait dans l’impossibilité d’observer littéralement
cette dernière (car, encore une fois, Canaan était le lieu de l’obéissance
d’Israël, et Jérusalem le centre de leur culte ; et ils en étaient chassés
dans ce moment-là) ; cette prophétie, dis-je, a quelque chose de bien
remarquable. Le peuple pouvait revenir à son Dieu, même au milieu des nations,
et cela par une obéissance indépendante de celle qui était selon la lettre, par
une obéissance dont la règle était près de lui, une obéissance pour
l’accomplissement de laquelle il n’avait pas besoin de passer la mer ou de
monter aux cieux, et dont la substance était renfermée dans la loi, mais la loi
comprise par la foi. Or c’est précisément là ce que, dans le chapitre 10 de
l’épître aux Romains, Paul prêche aux juifs, qui, depuis la captivité, étaient
toujours Lo-Ammi
(Osée 1:9) : Christ était la fin de la loi pour justice à
tout croyant ;
et pour croire ou obéir à la foi, il n’y avait pas
besoin de passer la mer ou de monter aux cieux, puisque le but de la loi se
trouvait dans le Christ. Paul appelle donc les juifs incrédules à se soumettre
à la justice de la foi, ou à confesser le nom du Messie promis, dont le nom
avait toujours été l’objet chéri de ceux qui comprenaient la loi, et leur seule
espérance, leur seule consolation, spécialement dans leur état de dégradation
et de souffrance présent. Rien que cette obéissance à la vérité ne pouvait leur
profiter dans leur position actuelle ; comme, au reste, rien d’autre ne
peut profiter à des pécheurs ou à des transgresseurs de la loi de Dieu.
L’obéissance à la vérité était la seule ressource des juifs, qui
étaient mis par là sur le même pied que les Gentils, auxquels l’obéissance de
la foi était aussi prêchée. Et cette obéissance de la foi est le principe qui
doit diriger la conduite de tout fidèle, dans quelque position de chute que
l’Église puisse se trouver. Retourner à la lettre des ordonnances apostoliques,
peut être chose parfaitement impossible ; et il en était, et en est encore
ainsi pour les juifs, quant aux ordonnances mosaïques. Toutefois les temps de
chute nous offrent quelquefois les exemples les plus frappants d’une fidèle
obéissance, comme on le voit dans l’exemple de Daniel et d’autres juifs à
Babylone. Obéir selon la lettre qui a
vieilli,
n’est pas, au reste, un des caractères de cette dispensation
chrétienne qui demande l’obéissance de la foi : le chemin de celle-ci est
toujours ouvert ; et elle s’accomplit chez les enfants de Dieu selon la
mesure de spiritualité, et par conséquent de discernement spirituel, de ceux
qui s’y attachent ; et c’est à cela que Dieu a égard. Nul doute qu’une
conformité exacte à la pensée de Dieu n’ait été accompagnée, dans les premiers
temps du christianisme, de témoignages directs et immédiats de bénédiction tels
que nous n’en pouvons recevoir aujourd’hui, quels que soient d’ailleurs les
droits de la miséricorde divine à l’égard de tout homme individuellement, parce
que ce serait sanctionner le mal ou en accepter l’existence. Quand le témoin
moral de Dieu, dans le monde
(Jean 15:27), conservait son caractère — en d’autres termes, quand l’Église
marchait selon l’Esprit, il était bien naturel que Dieu avoue publiquement pour
sien ce qui rendait son nom glorieux ; aujourd’hui, il en est tout
autrement. Mais c’est précisément ici le cas, pour les chrétiens, d’agir dans
l’obéissance de la foi, ou selon le principe de cette foi suivie de sa
récompense, proposée au peuple d’Israël, dans le Deutéronome ; non pas,
remarquons-le bien, le cas de faire des efforts pour copier servilement ou à la
lettre les ordonnances du temps passé, mais celui d’agir fidèlement par la foi
en la puissance de Dieu, dans ce que le Saint Esprit nous a fait connaître de
sa volonté.
Rien n’est donc plus important que le principe posé et la conduite tracée dans les enseignements prophétiques de Deutéronome 30. Privé des privilèges attachés à la dispensation légale, Israël ne peut plus servir Dieu selon les préceptes de Moïse : l’arche, les urims et les thummims sont perdus ; le temple, seul lieu où les ordonnances lévitiques pouvaient s’accomplir, est une maison désolée et brûlée par le feu ; le peuple est dispersé çà et là parmi les nations. Quel remède à tant de maux ? comment Israël sera-t-il relevé ? Moïse répond : « La parole est très près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur, pour la pratiquer » ; et Paul explique la pensée de Moïse en disant : « C’est-à-dire la parole de la foi, laquelle nous prêchons, savoir que, si tu confesses, etc ». Voilà donc le principe qui replace dans la faveur de Dieu (nous parlons du peuple de Dieu déchu, et non pas du monde ; du gouvernement de Dieu, et non du salut de l’âme) ; voilà le seul principe qui, au milieu des ténèbres, peut nous faire marcher d’une manière agréable au Seigneur.
En revenir, comme on dit, aux traditions apostoliques, ou à une
imitation minutieuse des formes de l’Église primitive, n’est ni reconnaître, ni
corriger le mal qui existe dans l’Église d’aujourd’hui. Ceux qui donnent dans
ce faux système ne reconnaissent pas ce fâcheux état des choses ; ils
supposent l’état littéral des choses, mais ne l’accomplissent pas. Ils ne
veulent ou ne savent point comprendre que l’Église est tombée dans un état de
ruine et de dégradation, et que l’ennemi a fait son oeuvre dans le royaume des
cieux, comme le Seigneur le dit (Matt. 13:28). Ils ne voient de sauvegarde pour
l’Église que dans une scrupuleuse exactitude à accomplir littéralement les ordonnances
du Seigneur et de ses
apôtres, ne prenant point garde que la
gloire s’en est allée
(1 Samuel 4:21, 22), depuis que celle qui devait être
comme une étrangère dans le monde, a voulu régner, et s’est confondue avec le
monde. « Imitons les apôtres, et tout ira bien ! » disent-ils et
répètent-ils sans cesse, comme si les formes primitives n’avaient pas, hélas !
perdu leur puissance, parce que l’Église a souillé son nazaréat, et s’est
éloignée de ses rapports avec Dieu. Nous ne disons pas ceci pour affaiblir les
motifs à l’obéissance ; car si les choses ont dû aller ainsi, pour que
finalement Dieu en tire de la gloire, cela ne saurait diminuer notre
responsabilité ou notre obligation d’obéir au Seigneur. En revenir à la lettre
des ordonnances apostoliques et à la tradition, ne remédiera pas non plus au
mal existant ; bien plus, c’est placer l’Église sur un mauvais terrain :
car si elle est dans un état de chute, c’est la foi pour obéir, l’esprit de
soumission à la volonté de Dieu, qu’il lui faut. Si nous étions parfaitement
instruits des formes primitives du culte, de la discipline, de l’organisation,
etc., des églises, et parvenus à persuader tous les chrétiens de s’y soumettre,
nous ne reconstruirions pas l’Église du Dieu vivant. Au reste on n’imite pas la
puissance ; et le royaume de Dieu est en puissance. Ce n’est pas là ce qui
caractérise la vraie Église, ou ce qui convient à son humiliation dans l’état
de renversement, de dispersion et de déchéance où elle se trouve. Captive en
Babylone, ce ne sont pas des choses que sa position lui rend impraticables
qu’il faut lui apporter pour qu’elle relève le nom de ce Dieu qu’elle a
déshonoré, mais l’esprit d’humble obéissance — la parole est près de toi !
Que les chrétiens obéissent humblement par l’Esprit à la Parole qui est près
d’eux, dans leur bouche et dans leur coeur, voilà ce qui caractérise l’esprit
de foi et la confession du nom de Dieu, non pas d’agir avec précipitation.
« Souviens-toi… d’où tu es déchu, et repens-toi » (Apoc. 2:5), est une parole
qui renferme en soi notre unique ressource pour recevoir davantage. Charger
l’Église d’ordonnances dans l’état de chute où elle se trouve, même
d’ordonnances conformes aux traditions bibliques, n’est, en vérité, qu’une
dérision : c’est substituer un joug pesant et mortel, à la puissance
vivante de la présence divine ou à l’obéissance de la foi, seule base sur
laquelle on puisse s’appuyer, lorsque, comme Israël, on a perdu la gloire
manifestée de cette présence.
Mais, abordant les autres parties du sujet, je vais maintenant prouver que l’obéissance doit précéder toute espérance de bénédiction. Multiplier les preuves, après ce qui a été dit, serait chose superflue ; en voici cependant quelques-unes :
Jésus dit : Si quelqu’un veut faire la volonté de Dieu, « il
connaîtra de la doctrine si elle est de Dieu, ou si moi je parle de par
moi-même » (Jean 7:17). Le principe est assez clair : il faut que, pour
connaître une vérité, l’homme soit moralement préparé ; et cette
préparation c’est l’esprit d’obéissance : Si quelqu’un veut
. Il n’est pas question ici d’un acte extérieur,
mais de l’intention
préalablement
produite dans l’âme, intention qui se manifestera nécessairement dans des actes
extérieurs, quand l’âme se trouvera placée devant la volonté de Dieu. Jésus
dit : Si quelqu’un veut faire Sa
volonté
, alors il connaîtra ; la promesse de connaître étant fondée
sur l’esprit d’obéissance : car à quoi bon conférer un don de connaissance
sans avoir préalablement amené l’âme à vouloir
obéir, ne serait-ce pas en Dieu une contradiction réelle avec lui-même ?
ne travaillerait-il pas à ternir sa propre gloire ?
Me bornant à indiquer, sans m’y arrêter, Luc 4:4-9 ; Matthieu 3:15 ; Jean 13:16, 17 ; 12:26, je m’arrêterai sur Jean 14:21-23, où l’amour pour Jésus est clairement ainsi caractérisé, et en même temps présenté comme le préliminaire nécessaire de la bénédiction : « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime, sera aimé de mon Père ; et moi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui ». Rien de plus positivement et de plus explicitement enseigné dans la parole de Dieu, que la souveraineté de la grâce envers le pécheur par l’obéissance de Christ ; et la sûreté pour le fidèle d’être béni de Dieu dans le sentier de l’obéissance à la parole de Dieu. Je ne parle pas ici des châtiments de l’amour immuable du Père, pour amener cette bénédiction. Mais la parole du Seigneur est expresse sur ce point, que l’attachement à l’obéissance de Christ, est le canal de tout don spécial, comme ce qui tient le don en exercice. Sans aucun doute, la souveraineté de Dieu agira extraordinairement, comme dans le cas d’un Balaam, d’un Caïphe, d’un Judas, ou de tel autre, qui prophétisent sans que leur coeur obéisse à Dieu ; mais ce n’est pas là le terrain sur lequel l’Église est appelée à marcher. Ce ne sont pas des exemples à suivre qui nous sont présentés là, mais des cas affreux dont il faut se garder, à moins qu’on ne veuille s’associer à la plus odieuse révolte. Placés comme des fanaux sur les écueils dangereux des rives de destruction, ces hommes, qui jettent une lumière sans amour, peuvent être utiles à l’Église en éclairant autour d’eux ; mais ce ne sont pas des feux destinés à attirer le navigateur et à le diriger vers le lieu où ils sont placés, bien que nous puissions bénir la main qui les a donnés pour être des signaux de terreur pour les disciples qui voguent durant la nuit, et des avertissements à se tenir bien loin. Malheureux personnages ! ils ne vivent que pour être témoins de la ruine qui les entoure.
On devrait penser que les chrétiens discerneraient intuitivement
que l’obéissance est le sentier préparé pour eux ; mais l’Ennemi n’est pas
surmonté par la simplicité de la vérité, parce que nos âmes ne sont pas
simples, et qu’en une manière ou une autre ils sont attachés à des choses qui
ne sont pas de l’Esprit et sous l’influence desquelles la simplicité de la
vérité a perdu sa puissance en eux devant la subtilité de l’Ennemi. On
repousserait de rejeter ouvertement la Parole, c’est pourquoi Satan ne se
présente pas en proposant la désobéissance, mais il modifie l’obéissance par
des préliminaires et en introduisant quelque chose à la place de la parole de
Dieu. Aussi n’est-ce point avec de simples et grossiers mensonges que le
tentateur séduit les chrétiens ; il manquerait son but, et procède par
conséquent en général différemment. Quand il dit à Ève : « Vous serez comme
Dieu », il y avait du vrai dans cette parole, car un plus grand que Satan dit
plus tard : « Voici, l’homme est devenu comme l’un de nous, pour connaître
le bien et le mal » (Gen. 3:5, 22). Mais quel déluge de maux, quelle ruine
effrayante n’a pas attirés sur le monde la désobéissance qui fut le résultat de
cette vérité présentée par le tentateur, présentée intempestivement et à part
des conséquences funestes qu’elle devait avoir, l’acte qu’elle était destinée à
produire étant une fois consommé ! Le meilleur moyen de repousser Satan
est donc la simple vérité, les paroles qui sont sorties de la bouche de Dieu,
cette vérité dans laquelle notre bonheur est renfermé. Et si notre faiblesse,
le peu d’accord qui se trouve entre chrétiens, donnent accès à l’adversaire,
prenons pour nous défendre l’épée de l’Esprit, la sagesse de la Parole dans ce
qu’elle nous présente d’analogue avec nos circonstances ; et usons de
cette vérité écrite, dont une bonté illimitée, instruite d’avance de la
faiblesse de ses enfants et de la subtilité de leur puissant adversaire, les a
dotés dans la prévision des avantages que l’Ennemi chercherait à tirer de leur
position. Satan a cherché à persuader le Sauveur de suivre sa volonté en des
choses qui n’étaient pas mauvaises en elles-mêmes, lui suggérant d’user de ses
privilèges de Fils. — Quelle subtilité chez le prince de ce monde ! Il
cite à Jésus une promesse inconditionnelle, renfermant un privilège qui
appartenait légitimement au Fils de Dieu, au Messie d’Israël : « Si tu es
Fils de Dieu », lui dit-il, « jette-toi en bas, car il est écrit : Il
donnera, etc… » Car il est écrit
!
Ô raffinement de ruse et de malice ! Satan dirait-il la vérité, lui qui
est menteur ? Non, mais si Satan lui-même alléguait une promesse du Dieu
de vérité, ce Dieu de vérité se devait de faire honneur à sa promesse !
Que Jésus y croie donc, s’il est le Fils de Dieu ; qu’il en réclame
l’accomplissement, afin de manifester la puissance et la gloire de la nouvelle
économie ! Rien de plus plausible au premier abord. Se précipiter de si
haut impunément en se reposant sur une simple parole de Dieu, quelle gloire
pour Jésus ! quel sceau cela imprimerait à sa mission ! quel
témoignage à la fois éclatant et digne rendu à sa personne ! quelle
énergie ajoutée à son ministère ! Pourquoi donc hésiter ? Y aurait-il
autre chose que les subterfuges de l’incrédulité dans les raisons alléguées
pour s’abstenir ? Dieu ne tiendrait-il pas des promesses, et des promesses
faites à son Fils
? Dieu se montrerait-il
menteur ? Ne s’agissait-il pas de ce qui était l’honneur et la place du
Messie, de ce à quoi les esprits
administrateurs
de l’économie qui allait s’ouvrir s’empresseraient de
prêter leur ministère, le servant Lui, leur chef : n’était-ce pas là chose
urgente et tout à fait de saison ? Mais c’était une proposition de
Satan ; aussi n’obtint-elle qu’un refus absolu du Seigneur : car,
quoique Fils
, il s’était constitué
serviteur. Il n’avait pas d’ordre
pour agir, autrement dix mille temples entassés ne l’auraient pas empêché de se
jeter en bas, même s’ils avaient été aussi grands et aussi élevés que celui de
Jérusalem. Un autre principe se découvre ici : au fond, ce que Satan
suggérait, aurait été de la méfiance de la part de Jésus, un essai pour voir si
Dieu accomplirait ses promesses. C’est le sens des mots tenter Dieu
. Israël tentait Dieu en disant : « l’Éternel est-il
vraiment au milieu de nous ». Il faut de la confiance en Dieu pour obéir, et
c’est dans l’obéissance seule que cette confiance se trouve.
Il est à remarquer que, dans ce combat avec Satan, c’est à ce
même livre du Deutéronome, qui nous a déjà fourni matière à quelques
observations, que Jésus emprunte toutes ses réponses. Comme le nom de Lo-Ammi
(Osée 1:9) n’avait point été,
depuis la captivité, effacé de dessus le front du peuple juif, qui le portait
encore, Jésus répond au tentateur par des textes applicables précisément à leur
état actuel. Il les met comme un signe sur ses mains, comme des fronteaux entre
ses yeux (Deut. 11:18) ; aussi Satan ne peut-il pas l’atteindre dans cette
occasion.
Un autre principe important, lié au précédent, se trouve aussi établi par là même. À l’égard d’Israël, les promesses de Dieu étaient sûres, ses dons et sa vocation irrévocables (et c’est le sens direct du passage cité par Satan, Psaume 91:11, 12) ; mais rien de tout cela n’était pour Israël en désobéissance. Satan aurait bien voulu qu’on use des promesses de Dieu sans avoir égard à l’état de choses présent ; mais l’obéissance consistait à saisir la pensée de Dieu dans ce cas. Aussi le Seigneur (qui, comme Messie, était le représentant d’Israël) n’applique-t-il pas à un peuple en état de chute ce qui est destiné à ce peuple hors de cet état. C’est précisément l’esprit contraire que l’on trouvait chez les juifs. Ils se prévalaient des promesses, sans reconnaître leur déchéance complète, montrant par là qu’ils n’avaient pas l’Esprit de Dieu ; et c’est ainsi qu’ils sont tombés sous la puissance et la conduite de Satan. Le Seigneur refusa de les imiter, et ainsi il trompa les efforts du tentateur. Choisissant et tenant le sentier de l’obéissance en simplicité, il rejeta la tradition ; même il repoussa des promesses, oui, de vraies promesses, mais saisies ou présentées mal à propos en faisant abstraction de l’obéissance et de l’intention de la Parole divine ; aussi, força-t-il Satan de se retirer d’avec lui.
La première chose qui se voie, le premier point que l’Esprit
Saint enseigne, c’est l’état de ruine lui-même dans lequel l’Église est
tombée ; là est, pour ceux qui agissent dans l’Église et que l’Esprit a
enseignés, la clef de la conduite qu’ils ont à tenir, le principe dont il faut
partir, et ne jamais dévier. C’est, comme nous l’avons vu en méditant Deutéronome
30, l’obéissance de la foi,
et non
celle qui est selon la lettre,
que
Dieu a établie en principe pour les cas où cette dernière devient impossible.
Il ne rejettera ni n’abandonnera jamais son peuple, quel que soit d’ailleurs le
malheur des temps. Immuable et fidèle, il nous fera trouver, même dans les
positions les plus fâcheuses, ce qui nous est nécessaire ; dans les temps
fâcheux, Lui et les Écritures, peuvent nous « rendre sages à salut par la foi
qui est dans le Christ Jésus » et sont utiles « pour enseigner… afin que
l’homme de Dieu soit accompli et parfaitement accompli pour toute
bonne oeuvre » (2 Tim.
3:15-17 ; comp. Actes 20:32). Quelle précieuse parole ! quel coup
porté à ces prêcheurs de la tradition, et à tous ceux qui prétendent à une plus
excellente lumière que celle qui peut rendre l’homme de Dieu accompli,
que celle de la Parole de
sagesse, de force et de consolation, donnée par le Seigneur lui-même !
Qu’il plaise à Dieu que nous nous réjouissions, comme David, dans le chemin de
ses témoignages !
Abordons maintenant la dernière partie de notre sujet, qui était de prouver directement que l’obéissance précède la jouissance d’une grâce ou d’un don particulier. Le chapitre 15 de l’évangile de Jean nous fournira des instructions claires et précises sur ce point. Déjà le nazaréen Samson nous offre un exemple frappant, qui appuie le principe en sens direct et inverse. Séparé pour le service de Dieu, sanctifié à l’Éternel, et placé en conséquence dans une position spéciale d’obéissance, le nazaréen ne devait point passer de rasoir sur sa tête ; et de l’observation de ce précepte péremptoire dépendait la durée de sa force. Il aurait été difficile de découvrir quelque rapport entre les deux choses ; mais Dieu l’avait ainsi ordonné, et celui qui obéit et honore Dieu a pour lui la force de Dieu. Le privilège, cette force extraordinaire, était attaché, quant à sa conservation, à l’obéissance, c’est-à-dire à une manière d’agir en accord avec le voeu de nazaréat. Ce secret, livré au monde, trahissait à celui-ci l’influence corruptrice qui avait enlacé le coeur de l’abusé Samson : les boucles de ses cheveux tombèrent sous les ciseaux d’une misérable, en apparence amie et associée du nazaréen de Dieu, mais en réalité l’alliée des Philistins et l’instrument choisi du pouvoir de Satan. Une fois privé de sa force, et dans les mains des Philistins, on crève les yeux à Samson ; et ce qu’il peut regagner ensuite de sa vigueur passée, il l’emploie, comme un aveugle qu’il est, à se détruire avec ses ennemis ! Je rappelle ce trait dans le but spécial de montrer que ce qui est la marque de la séparation d’avec le monde pour obéir, est le vrai moyen et le secret de la possession de la force pour obéir, la présence ou l’absence de cette force dépendant absolument de la présence ou de l’absence de l’obéissance. Samson n’avait pas conscience de la puissance qu’il donnait à ses ennemis, par la perte du signe de ce nazaréat qui le consacrait spécialement au service du Seigneur ; il apprit à ses dépens et pour son malheur, que l’on ne s’écarte pas de la ligne prescrite par le Seigneur, sans se mettre en dehors de la force du Seigneur. Triste, mais instructive histoire, pour des volontés à la fois faibles et opiniâtres comme les nôtres !
Mais j’ai parlé du chapitre 15 de Jean comme d’une source
d’instruction positive et explicite sur notre sujet, et j’y arrive. Dans le
chapitre 14, le Seigneur avait, ainsi qu’il a été remarqué plus haut, posé ce
principe général, que la manifestation de sa présence spirituelle serait
accordée aux disciples ou à ceux qui obéissent, et non pas au monde :
« Celui qui a mes commandements (*), et qui les garde, c’est celui-là qui
m’aime ; et celui qui m’aime, sera aimé de mon Père ; et moi je
l’aimerai, et je me manifesterai à lui ». Dans ce principe général, nous
relèverons ce point important : « Celui qui a mes commandements ». — Au
chapitre 15, le Seigneur nous dit : « Demeurez en moi, et moi en vous.
Comme le sarment ne peut pas porter de fruit de lui-même, à moins qu’il ne
demeure dans le cep, de même vous non plus vous ne le pouvez pas, à moins que
vous ne demeuriez en moi ». Il s’agit ici de l’acte pratique de demeurer, sans
quoi ce ne serait pas un commandement que celui de demeurer en Christ comme
dans le vrai cep, et non en quelque autre chose : car, quant à la vigne de la terre
(Apoc. 14), ses
raisins doivent être foulés au pressoir de la colère de Dieu. Plus loin, verset
7, le Sauveur ajoute : « Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent
en vous, vous
demanderez ce que vous voudrez, et il vous sera fait » ; et encore au
verset 10 : « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon
amour » (dans cet amour d’où découlent toute grâce excellente et tout don
parfait), « comme moi j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure
dans son amour ». L’Église oserait-elle bien s’arroger une plus haute
prérogative de sûreté de l’amour du Père, que le Sauveur lui-même, qui, pour ce
qui concerne sa continuité, a dit : « Comme moi j’ai gardé les
commandements de mon Père, et je demeure dans son amour » ? N’est-ce pas là
dire assez clairement que le fondement de la jouissance actuelle de l’amour de
Dieu, que ce qui assure la durée de cette jouissance et de la bénédiction, est
la persévérance dans les paroles de Christ, celles qu’il a laissées à son
Église ? La déclaration n’est pas moins claire que le fondement qui est
posé pour la jouissance de la bénédiction et qui est le saint commandement du
Seigneur, sans l’observation duquel, en effet, la puissance de Dieu et sa
gloire ne serviraient qu’à sanctionner la désobéissance. Le même principe se
retrouve encore au verset 14 : « Vous êtes mes amis » (et pourquoi ?
nous le voyons au verset 15), « si vous faites tout ce que je vous commande ».
Obéissance de notre part, et communication de la part de Jésus des choses qu’il
a ouïes du Père, voilà la grande règle ; et c’est la troisième preuve que
ce chapitre nous fournit en faveur de notre thèse.
(*) Les commandements du Seigneur sont toujours moraux
, et ne sont pas de simples
ordonnances. Les ordonnances que le Seigneur a établies, qui séparent l’Église
du monde, le baptême et la cène, quoiqu’elles soient instituées par Lui, ne
sont pas des commandements pour l’obéissance personnelle. À l’égard du baptême,
cela est parfaitement clair par l’absence de commandement et à cause de Actes
8:36 et 10:47. À l’égard de la cène on pourrait penser qu’il en est autrement,
mais : « Faites ceci en mémoire de moi », n’est pas un commandement de faire
la chose (comp. 1 Cor. 11:25). Les ordonnances sont toujours séparatives. Si je
suis marqué, en quelque sorte, par l’accomplissement d’un certain acte
prescrit, cet acte me distingue et m’associe à tous ceux qui ont part à cette
institution, comme corps, en contraste avec ceux qui n’y ont point de part.
Ainsi toutes les ordonnances établies de Dieu sont destinées à séparer comme
corps, d’avec le monde, ceux qui sont à Dieu. Je lis dans la Bible : Nous n’avons pas une telle coutume
, pour
le cas où il s’agissait de combattre l’introduction d’un mal dans
l’Église ; mais jamais à l’égard d’aucune circonstance : Nous avons
telle ou telle ordonnance,
langage cependant assez commun. je ne crois pas que les apôtres eux-mêmes aient
eu la puissance d’établir quelque forme que ce soit qui ne tende pas
directement au bien moral de l’Église. J’en
ordonne ainsi dans toutes les assemblées
, disait Paul ; mais c’était à
propos de quelque chose qui se rapportait à la gloire de Dieu.
Ainsi l’ordre établi de Dieu pour
ses enfants
n’est pas d’attendre une bénédiction quelconque avant d’obéir,
mais d’obéir sur-le-champ à son commandement, afin que la bénédiction
s’ensuive. Et c’est là marcher par la foi
.
Il n’y aurait pas de foi si la bénédiction venait la première et si on n’avait
d’autres motifs pour agir que celui-ci : Dieu le veut
; ou bien si on attendait que les difficultés se
soient aplanies. Christ est la porte des
brebis
; il ne s’agit pas de savoir où la porte nous mène : ce
qui nous importe, c’est que Christ soit cette porte, et d’entrer ou de sortir
par elle ; le reste est l’affaire de Christ, et non pas la nôtre. À cet
égard, et en tant qu’homme, Christ nous est un admirable exemple, car il a, lui
aussi, obéi avant d’avoir la récompense. Nous-mêmes nous sommes justifiés par
l’obéissance à la parole de Dieu, et à notre obéissance sont liées les grâces
qui suivent, selon qu’il est dit : « À chacun qui a
, il sera donné et il sera dans l’abondance ». Chercher quelle est
la volonté du Seigneur, en posséder une intelligence instinctive par la crainte
du Seigneur, telle est l’occupation et le privilège de la spiritualité. « Ne
saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? » répondait
l’enfant Jésus à Joseph et à Marie. « Si quelqu’un est spirituel », dit Paul,
« qu’il reconnaisse que les choses que je vous écris sont le commandement du
Seigneur ». Et si nous le reconnaissons, que faire ? Y obéir
, autant que nous avons de force et de lumière. C’est cette
obéissance qui est l’âme de la vie chrétienne, et le seul moyen de prospérer,
spirituellement. Comment les différents dons de Dieu nous sont-ils communiqués
ou augmentés ? Quand, dans l’esprit d’obéissance, on use de ce qu’on a
déjà reçu. L’Église a été sanctifiée pour l’obéissance. Élue pour cela dans
l’éternité, Dieu la sanctifie encore pour cela dans le temps. Le Seigneur, par
sa puissante et secrète énergie, l’amène à l’obéissance de la foi, il la
convertit et lui fait faire abnégation de sa volonté propre. Tombé en terre,
l’homme s’écrie : « Seigneur, que veux-tu que je fasse ? » Et il reçoit
grâce et il marche dans l’obéissance de l’amour ; et tant qu’il y marche,
il continue à être béni et heureux. Mais vient-il à s’en écarter, il est châtié
et jugé, quoique la patience du Seigneur puisse user de patience envers lui
avant que de réprimer sa rébellion.
Serviteur obéissant, le Seigneur, à cause de cela, a été élevé
au lieu du pouvoir, au rang de Donateur des dons de Dieu (Phil. 2:9 ; Éph.
4:8, 9) ; il prit la forme d’esclave et devint obéissant jusqu’à la mort,
à la mort de la croix ; c’est pourquoi Dieu l’a haut élevé. Ainsi, tandis
que la rédemption de l’Église est par là un fait accompli : car « par
l’obéissance d’un seul, plusieurs seront constitués justes », le principe
demeure que, dans l’oeuvre qui se fait dans
l’Église, l’obéissance vient avant la manifestation de quelque bénédiction que
ce soit. Ainsi, lorsque Saul est renversé sur le chemin de Damas, le Seigneur
lui dit : « Lève-toi, et entre dans la ville ; et il te sera dit ce
que tu dois faire » ; et Saul obéissant reçoit à Damas consolation, force
et bénédiction, par le moyen d’Ananias qui lui est envoyé ; mais la
première chose, c’est que Saul obéit. Ainsi encore ce pauvre aveugle (Jean 9:1,
etc)., qui, aux jours de Jésus, fut, dans la chair, un beau type de ce qui
arrive dans le sens spirituel, reçut l’ordre : « Va et lave-toi au
réservoir de Siloé (ce qui est interprété Envoyé). Il s’en alla donc, et se
lava, et revint voyant ». Ayant été fidèle à obéir, il est à même d’enseigner
ses maîtres ; et, chassé de la synagogue à cause de cela, il reçoit une
nouvelle grâce, le Fils de Dieu, qui avait appris le traitement qu’on lui avait
fait souffrir, le trouvant et se manifestant à lui. — « Va, et lave-toi sept
fois dans le Jourdain », dit encore Élisée à Naaman (2 Rois 5). Cet ordre était
humiliant. « Voici », s’écrie Naaman dans sa colère, « je me disais (expression naïve
de l’opposition qui existe entre les pensées de l’homme et l’esprit
d’obéissance) : il sortira… il promènera sa main sur la place malade,
etc. ». Mais plus tard, ayant obéi, il montra qu’il avait cru le témoignage de
Dieu, qui parlait par la bouche du prophète : il reconnut le Saint Esprit,
qui parlait par le prophète, dans l’obéissance de la foi, et la guérison se fit
incontinent.
Ce fait est instructif ; il nous montre qu’une soumission
implicite et sans réserve à la parole qui est la voix de l’Esprit, est la
reconnaissance de l’autorité de l’Esprit et la reconnaissance que Dieu, quand
nous donnons ainsi gloire à Sa vérité, glorifie sa vérité en nous bénissant. —
Une bénédiction, quelle qu’elle soit, qui n’est pas le fruit de l’obéissance,
n’est pas telle dans ses effets subséquents ; témoin les cailles du
désert. Toute notre affaire est donc de nous enquérir de ce que Dieu veut
, et puis de marcher selon
cette lumière. Dès les premiers pas, nous pourrons nous assurer que la
bénédiction nous accompagne, car c’est le témoignage de l’Esprit que nous
suivons, et c’est honorer l’Esprit que de ne chercher la bénédiction que dans
cette voie. C’est pour cela que même recevoir le Seigneur Jésus est une affaire
d’obéissance, aussi bien que le don de Dieu : Car « c’est ici son
commandement, que nous croyions au nom de son Fils Jésus Christ » ;
et : « C’est ici l’oeuvre de Dieu, que vous croyiez en celui qu’il a envoyé »
(1 Jean 3:23 ; Jean 6:29). C’est pour cela encore que le Seigneur Jésus,
qui demeurait dans l’amour du Père, dit néanmoins en donnant sa vie :
« J’ai reçu ce commandement de mon Père » (Jean 10:18). C’est pour cela enfin que
l’évangile, comme aussi le mystère de Dieu, « a été donné à connaître à toutes
les nations… pour l’obéissance de la foi » (Rom. 1:1-5 ; 16:26).
L’opération du Saint Esprit est de nous rendre obéissants ;
et, si nous ne le sommes pas, nous désavouons son autorité, tandis que notre
obéissance est la preuve réelle que nous croyons au Saint Esprit et que nous
sommes conduits par Lui, seule chose que Dieu approuve, que le monde en juge ou
non comme Lui. Aussi j’estime que les personnes les plus avancées dans la vie
spirituelle ne sont pas celles qui montrent extérieurement le plus d’activité
et d’énergie, mais celles qui sont toujours plus convaincues que tout est
renfermé dans la sphère de l’obéissance, et que hors de cette sphère notre
travail est sans fruit et sans succès, parce que c’est là l’ordre établi de
Dieu, et que tout ce qui vient de nous
est nécessairement mauvais. Serait-il possible que l’esprit du mal et notre
volonté nous poussent à obéir ? Certainement non ! « À la loi et au témoignage
», est notre
seule ressource ; et, en y revenant, nous reconnaissons la Parole, et
l’opération de l’Esprit, la puissance et la lumière de cet Esprit, qui a pour
charge de soumettre nos coeurs et celui des autres.
avoiret
garderles commandements
Avoir les commandements de
Dieu
est déjà le signe d’une âme obéissante et enseignée de Dieu, d’une âme
qui, en communion spirituelle avec Lui, a acquis le discernement par lequel la
pensée de Dieu, dans la Parole, est saisie et comprise. Garder les commandements de Dieu
est alors la preuve d’une volonté,
patiente et soumise, de persévérer à marcher sous la conduite et dans la force
du Seigneur, malgré l’Ennemi et ses assauts, Dieu opérant en nous « et le
vouloir et le faire, selon son bon plaisir » (Phil. 2:13).
Au contraire, s’attacher à des traditions, à des choses établies
par l’homme, prouve manifestement que l’on
n’a pas
les commandements du Seigneur ; et quand la route de
l’obéissance est bien frayée devant nous, refuser, pour une raison ou pour une
autre, d’y marcher fidèlement, est une marque que nous ne voulons pas les garder
: double témoignage rendu
contre nous-mêmes, que nous n’aimons pas Celui qui a donné ces commandements.
La dernière disposition en particulier, celle qui nous laisse à l’entrée du
chemin tracé sans que nous y avancions, bien qu’elle puisse se parer du titre
d’humilité, n’est au fond, et quelles que soient les raisons mises en avant
pour la justifier, qu’une accusation de dureté ou de sévérité lancée contre Dieu.
Quoi ! vous avez reçu de Dieu une lumière, une lumière qu’il nous donne
comme gage de sa protection future, et vous ne sauriez vous fier assez à sa
bonté pour obéir simplement, et sans calcul, et recevoir plus de cette
lumière ? Dieu vous témoigne de la confiance en mettant à votre
disposition un commandement à observer, un talent pour en trafiquer, et vous ne
voulez lui en témoigner aucune en agissant d’après ses intentions
connues ? Oh ! n’est-ce pas imiter ce méchant et paresseux serviteur
de la parabole qui, après avoir caché son talent, se présente en disant :
Je t’ai craint, parce que tu es un homme sévère ?
En disant aux chrétiens de faire valoir leur talent par le moyen
de l’obéissance, je suis bien loin de leur prêcher l’imitation de ce qui
constituait la justice de la loi, ou l’obéissance des temps passés : c’est
à la seule obéissance de la foi
que
je les supplie de se soumettre. Notre seule confiance doit être en l’Esprit de
Dieu, parce que nous n’avons en nous-mêmes ni force, ni lumière. De sa présence
au milieu de nous (présence qui doit être le grand et continuel objet de nos
prières), dépendent tout ordre, toute bénédiction, toute vraie
obéissance ; par lui seul nous reconnaissons ce que le Père et le Fils
sont pour nous dans les conseils divins, nous le reconnaissons comme chose
présente et actuelle. Le Saint Esprit est le grand agent immédiat de toutes les
opérations de Dieu, soit en créant, soit dans la créature, comme il l’est de tous
les actes selon Dieu accomplis par l’homme. Mais on ne peut connaître, dans ce
dernier, la mesure de l’Esprit que par l’obéissance de la foi, d’une foi
éclairée, à ce que ce même Esprit nous enseigne par la Parole. Quel que soit
son pouvoir, nous chercherons toujours l’accroissement de celui-ci quant à son
exercice dans l’obéissance à Dieu. Nous avancerons ainsi toujours plus dans le
sentier de l’obéissance, en même temps que Dieu sanctionnera les pas que nous
aurons faits précédemment dans ce chemin : car, quoique nous sachions peu
ce que c’est que cette puissance de l’Esprit, c’est bien elle qui nous a
conduits jusque là où nous sommes.
Que le Seigneur nous accorde la grâce, que nous nous confiions assez en sa fidèle bonté, pour avoir le courage de faire sa volonté partout où nous la verrons, sachant que nous serons aidés, soutenus et bénis dans cette voie.