Le Dévouement Chrétien

J.N.Darby [ajouts bibliquest entre crochets]

ME 1864 p.221


Table des matières :


1 - [Le vrai dévouement inséparable de la doctrine et de la puissance de l’Esprit]

2 - [Au sein de l’incrédulité, l’influence chrétienne peut produire un certain dévouement]

3 - [Christ le mobile de la vie pratique]

4 - [Être imitateurs de Dieu et marcher dans l’amour]

5 - [Dévouement par l’amour comme Christ]

6 - [La récompense n’est pas l’objectif]

7 - [La source du dévouement est l’amour de Christ manifesté dans la rédemption en dehors de tout mérite]

8 - [L’amour versé en nous est l’amour connu en Christ]

9 - [La finalité du dévouement, ce dont il s’occupe]

10 - [Le vrai dévouement n’est pas la bienveillance de l’homme naturel, mais l’activité de l’amour divin dans l’homme nouveau et par le Saint Esprit]

11 - [Un dévouement où la source n’est pas Christ ou l’amour divin : contraste avec le dévouement chrétien]

12 - [Objets et buts du service (quand la vie découle de Christ et de la puissance du Saint Esprit)]

13 - [L’amour trouve sa joie à servir, non pas à être servi. C’est ce que Christ fait et fera]

14 - [Le dévouement s’attend à Dieu dans la dépendance et l’obéissance]

15 - [Le dévouement d’un cœur non partagé s’attire de l’opposition]

16 - [Liberté et puissance dans le service dans la mesure où l’on réalise la mort avec Christ]

17 - [Motifs et caractères de la vie chrétienne : la CROIX où l’amour de Christ nous étreint + la GLOIRE qui fait courir vers le but pour gagner Christ et Lui être semblable]

18 - [Avoir la pensée de Christ dirige toute la vie, pas seulement le dévouement]

19 - [Le vrai dévouement est le dévouement total à Christ — Christ seul objet de la vie et des pensées, Christ crucifié et Christ dans la gloire]


1 - [Le vrai dévouement inséparable de la doctrine et de la puissance de l’Esprit]

S’il y a une chose qui soit importante aujourd’hui, c’est le dévouement chrétien : un dévouement qui est inséparable de la doctrine, comme de la présence et de la puissance de l’Esprit, un dévouement qui est fondé sur la vérité et qui est produit par la puissance de l’Esprit. Rien, je le répète, ne peut être plus important que ce dévouement, soit pour les saints eux-mêmes, soit pour le témoignage de Dieu.

Sans doute, nous ne pouvons attacher une trop grande importance à la doctrine, à une connaissance claire et vraie de la rédemption, à la présence et à la puissance vivante de l’Esprit envoyé du ciel, à la bienheureuse espérance de la venue de Christ, qui vient nous prendre auprès de Lui, afin que là où il est, nous y soyons aussi, le voyant tel qu’il est, et lui étant faits semblables. Sans doute aussi, nous sentons de quel prix il est pour nous de savoir que si nous venons à mourir, nous serons présents avec Christ, que, ressuscités, nous ne serons pas seulement bénis par Lui, mais bénis avec Lui, et que présentement nous sommes unis à lui par le Saint Esprit, car toutes ces choses et beaucoup d’autres vérités qui s’y rattachent, si elles sont gardées, si nous les tenons ferme par la puissance du Saint Esprit, nous séparent du monde, nous abritent des raisonnements trompeurs de l’incrédulité qui nous entoure, et deviennent une source vivante de joie et d’espérance pour toute notre vie chrétienne. Mais l’expression de la puissance de ces choses dans le cœur se manifestera dans le dévouement.


2 - [Au sein de l’incrédulité, l’influence chrétienne peut produire un certain dévouement]

Le christianisme a exercé une grande influence sur le monde, là où il est ouvertement rejeté, et là où on professe l’avoir reçu. La société reconnaît comme un devoir de venir en aide aux pauvres, et de suppléer à leurs besoins temporels ; et là où la vérité est inconnue et où le christianisme est corrompu, cette corruption est grandement propagée par la manière dont, sur le faux principe du mérite, on insiste sur ce devoir et on s’y applique diligemment ; là même où l’incrédulité prévaut, l’influence du christianisme demeure encore dans les habitudes, et l’homme devient l’objet de soins diligents, quoique souvent pervertis. — Le témoignage du vrai chrétien ne devrait certainement pas se trouver en défaut en un point, où le mensonge a imité les précieux effets de la vérité. Mais il y a des mobiles plus élevés que ceux qui gouvernent le monde appelé chrétien : et c’est de ces mobiles et du caractère du dévouement chrétien que je voudrais dire ici quelques mots.


3 - [Christ le mobile de la vie pratique]

J’admets, comme règle générale, que, à part le cas d’un appel spécial de la part de Dieu, les chrétiens doivent demeurer dans l’état dans lequel Dieu les a appelés. Mais cette position n’est que la sphère de leur vie pratique. Les mobiles et le caractère de celle-ci, il faut les chercher plus loin, — en Christ. « Pour moi, dit Paul, vivre c’est Christ » (Philippiens 1), car Christ est à la fois la vie et l’objet ou le mobile de la vie en nous, et Celui dont notre conduite tire son caractère.


4 - [Être imitateurs de Dieu et marcher dans l’amour]

Il y a dans la vie divine deux côtés infiniment précieux pour nous, tous les deux, et tous les deux accomplis par Christ et manifestés en Lui. L’un qui est Dieu lui-même ; l’autre, qui est l’activité et la manifestation de la nature divine, qui est amour, le témoignage divin de cette nature. Ces deux côtés de la vie divine, on peut les contempler en Christ : sa communion avec son Père était parfaite ; son désir de glorifier son Père était parfait également. Il pouvait dire de sa vie ici-bas qu’elle était : « à cause du Père » (διά τόν πατέρα) (Jean 6:57) ; mais il était en même temps, au prix du sacrifice de lui-même, la manifestation de l’amour divin envers les hommes : ces deux parties de la vie de Jésus sont inséparablement liées l’une avec l’autre. Son Père était sa joie et son objet, toujours ; l’exercice de son amour et la manifestation de son Père, de la nature divine, étaient chez lui également constants et parfaits. Mais c’était là son dévouement, un dévouement qui s’alliait à un autre principe directeur de sa vie, savoir à une obéissance absolue à la volonté de son Père, la volonté de Celui-ci étant le mobile constant de son activité. L’amour pour le Père et l’obéissance au Père donnaient à son amour pour nous, sa forme et son caractère. Il en est de même lorsqu’il s’agit de nous, avec cette différence seulement que Lui-même est devant nous comme l’objet plus immédiat, sans que ceci cependant soit, en aucune manière, un obstacle à la manifestation par nous de la nature divine en amour. « Soyez donc, dit l’Écriture, imitateurs de Dieu, comme de bien-aimés enfants, et marchez dans l’amour, comme le Christ nous a aimés et s’est livré lui-même pour nous comme offrande et sacrifice à Dieu en parfum de bonne odeur » (Éphésiens 5:1, 2). Quelle plénitude et quelle grandeur de motif et de caractère sont manifestées dans ces paroles ! Nous marchons sur les traces de Dieu, nous sommes des imitateurs de Dieu ! Nous marchons dans l’amour, comme Christ nous a aimés ! L’amour divin, tel qu’il a été manifesté en Christ, est en exercice en nous, sans limites, pleinement ! Il s’est donné Lui-même, Lui-même tout entier. « Il nous a aimés, et s’est livré Lui-même pour nous » (comparez Galates 2:20 ; Éphésiens 5:25) ; mais l’offrande était faite à Dieu ; Dieu était l’objet et le mobile qui constituaient sa perfection. « Christ s’est donné comme offrande et sacrifice à Dieu en parfum de bonne odeur ». C’est ainsi que nous sommes appelés à marcher (comparez 1Jean 2:6 ; Philippiens 2:5-8) : nous devons imiter Dieu, suivre Dieu en Celui en qui il s’est manifesté.


5 - [Dévouement par l’amour comme Christ]

S’il y a du bonheur à se réjouir en Dieu qui est amour, il y a du bonheur aussi à le suivre dans l’amour qu’il a exercé. Mais manifesté en Christ comme homme, cet amour a Dieu pour objet. Il en est de même lorsqu’il s’agit de nous : l’amour qui descend de Dieu opérant dans l’homme, remonte toujours vers Dieu comme vers son juste et nécessaire objet ; il ne peut jamais s’abaisser plus bas que la source d’où il procède, quel que soit d’ailleurs celui envers qui il s’exerce. Tout l’encens du gâteau était brûlé sur l’autel, quelque douce qu’en fût d’ailleurs l’odeur pour ceux qui étaient présents (Lévitique 2:2, 16). C’est là ce qui constitue le caractère essentiel et l’excellence de l’amour divin ; et son action en nous, en elle-même, ne reste pas au-dessous de son action en Christ : « Par ceci, nous avons connu l’amour, c’est que Lui a laissé sa vie pour nous, et nous devons laisser nos vies pour nos frères » (1 Jean 3:16). Pour nous, bien entendu, il n’est pas question d’une coupe de colère. Sur la croix, en tant que souffrant de la part de Dieu pour le péché, Christ a été seul ; mais dans le sacrifice de soi-même que nous contemplons en Lui, nous sommes appelés à le manifester, comme ayant sa vie en nous, comme l’ayant lui-même en nous (comparez Galates 2:20 ; 2 Corinthiens 4:10, 11 ; 1 Jean 5:11, 12, etc.).


6 - [La récompense n’est pas l’objectif]

Mais il vaut la peine de nous arrêter un moment sur ce point, avant d’en faire l’application pratique dans l’exhortation des frères.

Il va sans dire que toute idée de récompense, comme motif d’action ou comme mérite, détruit de fond en comble le vrai dévouement, parce qu’il n’y a pas d’amour dans cette idée, mais l’activité du moi, demandant comme Jacques et Jean une bonne place dans le royaume (Marc 10:35 et suivants). L’Écriture parle de récompense, mais elle en parle comme un encouragement pour nous au milieu des difficultés et des dangers, dans lesquels des mobiles plus élevés et plus vrais nous ont amenés. C’est ainsi qu’elle dit de Christ lui-même que, « à cause de la joie qui lui était proposée, il a souffert la croix, méprisant la honte » (Hébreux 12:2), alors que nous savons très bien que le mobile de Christ, c’était l’amour. Pareillement nous lisons de Moïse, que « il regardait à la rémunération », et qu’il « tint ferme, comme voyant celui qui est invisible » (Hébreux 11:26, 27), tandis que le mobile qui le portait en avant, c’était l’intérêt qu’il avait pour ses frères. La récompense est toujours présentée ainsi dans l’Écriture, et de cette manière, elle est une grande bénédiction ; et tout homme reçoit sa récompense selon son propre travail (comparez en particulier Galates 6:7-9, 5 ; et aussi Luc 19:12-27).


7 - [La source du dévouement est l’amour de Christ manifesté dans la rédemption en dehors de tout mérite]

La source de tout vrai dévouement, c’est l’amour divin remplissant le cœur et opérant en lui selon l’expression de l’apôtre : « L’amour du Christ nous étreint » (2 Corinthiens 5:14). La forme et le caractère qu’il prend, doivent se lire dans la vie de Christ, par conséquent, il faut avant tout que nous connaissions la grâce pour nous-mêmes, car c’est ainsi que nous apprenons à connaître l’amour. Nous apprenons ce qui est l’amour divin dans la rédemption divine, et cette rédemption nous place dans la justice divine devant Dieu. Toute prétention à quelque mérite ou à une justice propre est ainsi exclue, et la recherche de soi-même est détruite : « La grâce règne par la justice pour la vie éternelle par Jésus Christ » (Romains 5:21). L’amour parfait et infini de Dieu est intervenu ainsi en notre faveur, « lorsque nous étions encore pécheurs » (Romains 5:8) ; il s’est occupé de nos besoins, il nous a donné la vie éternelle, lorsque nous étions morts dans nos fautes et nos péchés ; il nous a donné le pardon et la justice divine, lorsque nous étions coupables ; il nous donne maintenant de jouir de l’amour divin, de jouir de Dieu par son Esprit qui habite en nous, et d’avoir assurance pour le jour du jugement, parce que comme Christ est, Lui le Juge, nous sommes, nous aussi, dans ce monde (1 Jean 4:17). Je parle de tout cela ici au point de vue de l’amour divin qui y est manifesté. Sans justice, il était impossible pour Dieu de répandre sur nous les eaux de la grâce, mais Christ a satisfait pour nous aux exigences de la gloire de Dieu, et par Lui nos cœurs sont libres de jouir de l’amour de Dieu qui n’est plus entravé par rien dans son exercice ; l’amour est manifesté à l’homme dans l’homme, car les anges même de Dieu apprennent quelles sont « les insondables richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous en Jésus Christ » (Éphésiens 2:7). Le cœur est ainsi lié à Christ ; nous sommes amenés à Dieu en Lui, et Dieu en Lui est amené à nous : rien ne nous sépare de son amour, et nos âmes élevées en haut sont sanctifiées de cette manière. Nous bénissons et nous adorons Dieu qui s’est ainsi révélé, et notre joie — joie d’adoration — est en Christ.


8 - [L’amour versé en nous est l’amour connu en Christ]

Nous sommes donc approchés et nous avons communion avec Lui, nous sommes non seulement unis à Christ, mais nous avons conscience de notre union avec Lui par le Saint Esprit, et l’amour divin se répand dans nos cœurs et par nos cœurs ; nous sommes animés par Lui de l’amour même dont nous jouissons. Selon l’expression de Jean : « Dieu » réellement « demeure en nous » ; et selon celle de Paul : « L’amour de Dieu est versé dans nos cœurs » (1 Jean 4:12 ; Romains 5:5). L’amour se répand ainsi comme il l’a fait en Christ ; ses objets et ses motifs sont les mêmes qu’il a eus Lui-même, sauf que Lui-même est toujours devant nous comme Celui qui est la révélation de l’amour, qui est ainsi, « l’amour de Dieu en Jésus Christ, notre Seigneur » (Romains 8:39), — Dieu, mais Dieu révélé en Christ en qui nous avons connu l’amour.


9 - [La finalité du dévouement, ce dont il s’occupe]

Tout vrai dévouement a donc Christ pour premier et grand objet ; ensuite les « siens qui sont dans le monde », et après « notre prochain » ; en premier lieu leurs âmes, ensuite leur corps et tous leurs besoins. La vie d’amour et de vérité du Sauveur gouverne et dirige notre vie, mais sa mort gouverne et dirige le cœur : « Par ceci nous avons connu l’amour, c’est que Lui a laissé sa vie pour nous ; — l’amour de Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu’il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui, pour eux, est mort et ressuscité » (1 Jean 3:16 ; 2 Corinthiens 5:14, 15).


10 - [Le vrai dévouement n’est pas la bienveillance de l’homme naturel, mais l’activité de l’amour divin dans l’homme nouveau et par le Saint Esprit]

Il est important de remarquer que, comme la rédemption et la justice divine sont ce par quoi la grâce règne et l’amour est connu, et qu’ainsi toute idée de mérite et de propre justice est exclue, ainsi c’est une nouvelle vie en nous, — qui jouit de l’amour de Dieu et à qui cet amour est précieux, — qui seule, parce qu’elle est de la même nature, moralement, est capable aussi de jouir de la bénédiction qui est en Lui, et en laquelle son amour divin opère envers les autres : ce n’est pas la bienveillance de l’homme naturel, mais l’activité de l’amour divin dans l’homme nouveau. La vérité de l’amour est ainsi mise à l’épreuve, parce que, pour cette nature, Christ a nécessairement la première place ; et l’amour opère selon cette appréciation du bien et du mal que l’homme nouveau seul possède et dont Christ est la mesure et le motif. « Car, dit Paul, selon leur pouvoir, et au delà de leur pouvoir, ils ont agi spontanément…, non seulement comme nous l’avions espéré (dans l’exercice pratique de l’amour), mais ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur et puis à vous par la volonté de Dieu » (2 Corinthiens 8:3-5).

Mais il n’y a pas seulement une nouvelle nature, mais nos corps sont « les temples du Saint Esprit » (1 Corinthiens 6:19), et l’amour de Dieu est versé dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné (Romains 5:5) ; et de même qu’il jaillit en nous comme une fontaine jusque dans la vie éternelle, des fleuves d’eaux vives découlent aussi de nous par le Saint Esprit que nous avons reçu (Jean 4:14 ; 7:37-39).

Tout vrai dévouement donc est le résultat de l’action de l’amour divin dans les rachetés, par le Saint Esprit qui leur a été donné.


11 - [Un dévouement où la source n’est pas Christ ou l’amour divin : contraste avec le dévouement chrétien]

On peut trouver dans le monde un zèle qui parcourt le ciel et la terre ; mais ce zèle sert des préjugés, ou il est l’œuvre de Satan. La bienveillance naturelle peut se revêtir d’un titre plus beau, tout en s’irritant lorsqu’elle n’est pas acceptée pour elle-même. Il peut y avoir chez d’autres un sentiment légal d’obligation, et une activité légale qui, par la grâce, peut mener plus loin, mais qui par elle-même est le résultat de la pression que ce sentiment légal exerce sur la conscience, et non pas l’activité de l’amour. L’activité de l’amour ne détruit pas le sentiment de ce devoir dans le chrétien, mais elle change le caractère tout entier de son œuvre. « Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Corinthiens 3:17). En Dieu, l’amour est actif mais souverain ; dans le chrétien, il est actif, mais un devoir, à cause de la grâce. Il faut que l’amour soit libre pour qu’il ait le caractère divin, pour qu’il soit amour ; mais nous le devons tout entier et plus que tout entier à Celui qui nous a aimés. L’Esprit qui habite en nous est un Esprit d’adoption, et par conséquent de liberté à l’égard de Dieu ; mais il attache le cœur à Dieu, selon cette expression de Paul : « L’amour de Christ nous étreint ». Tout sentiment juste dans une créature doit avoir un objet, et pour que le sentiment soit juste, il faut que cet objet soit Dieu, et Dieu révélé en Christ comme le « Père », car c’est de cette manière que Dieu possède nos âmes. C’est pourquoi Paul, en parlant de lui-même, dit : « Je suis crucifié avec Christ, et ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé, et qui s’est livré Lui-même pour moi » (Galates 2:20). La vie de Paul était une vie divine : « Christ vivait en lui », mais cette vie était une vie de foi, une vie vivant tout entière par un objet ; et cet objet était Christ, — Christ connu comme le Fils de Dieu qui aimait Paul et s’était livré lui-même pour lui. Tel est le caractère pratique du dévouement chrétien et le mobile qui le gouverne : le chrétien vit pour Christ. Nous vivons « à cause du Christ » (Jean 14:19 ; 6:57). Christ est l’objet et la raison d’être de notre vie (tout, en dehors de cela, est la sphère de la mort), mais dans la puissance du sentiment qu’il s’est livré Lui-même pour nous. « L’amour de Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci que si un est mort, tous sont donc morts, et qu’il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui, pour eux, est mort et a été ressuscité » (2 Corinthiens 5:14, 15). Telle est la vie du chrétien ; il peut trouver en Christ un motif à ses devoirs de toute sorte mais la raison d’être et le but de sa vie sont là. Nous ne sommes pas à nous-mêmes, car nous avons été rachetés à prix, et nous devons glorifier Dieu dans nos corps (1 Corinthiens 6:20).


12 - [Objets et buts du service (quand la vie découle de Christ et de la puissance du Saint Esprit)]

Au lieu d’être placé sous une loi combattant ou arrêtant une volonté qui cherche sa propre satisfaction, le chrétien, heureux et pénétré de reconnaissance, est rempli du sentiment qu’il se doit à l’amour du Fils de Dieu ; son cœur saisit cet amour et en connaît l’objet dans une vie qui découle de Christ et de la puissance du Saint Esprit. C’est une loi de liberté qui règne ainsi ; le cœur ne peut avoir d’autres objets de service que ceux que la vie de Dieu peut avoir, et que le Saint Esprit peut lui présenter ; et le service auquel il se dévoue, est le libre exercice d’un cœur heureux. La chair ne peut pas avoir la même pensée que le nouvel homme et le Saint Esprit ; ses objets sont autres, et elle cherche à entraver la vie de Dieu en nous. Mais la vie de Dieu se meut dans la sphère, dans laquelle Christ vit ; elle aime les frères, car Christ les aime ; elle aime tous les saints, car Christ fait ainsi ; elle cherche tous ceux pour lesquels Christ mourut, sachant bien que la grâce seule peut les amener ; elle « endure toutes choses pour l’amour des élus, afin qu’ils obtiennent le salut qui est dans le Christ Jésus, avec la gloire éternelle » (2 Timothée 2:10) ; elle cherche à « présenter tout homme parfait en Christ » (Colossiens 1:28) ; elle voudrait voir les saints croître jusqu’à Celui qui est le Chef sur toutes choses » et les voir marcher « d’une manière digne du Seigneur » (Éphésiens 4:11-16 ; Colossiens 1:9 et suivants) ; elle cherche à présenter l’assemblée comme une vierge chaste à Christ (2 Corinthiens 11:2) ; elle persévère dans son amour, lors même qu’aimant beaucoup plus, elle soit moins aimée ; elle est prête à endurer les souffrances comme un bon soldat en Jésus Christ (2 Corinthiens 12:15 ; 2 Timothée 2:3, 9, 10 ; Philippiens 2:17).


13 - [L’amour trouve sa joie à servir, non pas à être servi. C’est ce que Christ fait et fera]

La vie d’un homme est considérée par les motifs qui la gouvernent, et doit être jugée d’après ces motifs : l’homme de plaisir dissipe ses biens, l’homme ambitieux sacrifie tout à la position qu’il poursuit ; ils jugent de toutes choses, l’un et l’autre, d’après le plaisir ou la puissance qu’ils en retirent ; l’avare les taxe de folie, et mesure la valeur des choses d’après les richesses qu’elles peuvent lui donner. Le chrétien juge de tout par Christ : si quelque chose fait obstacle à sa gloire, en lui ou en un autre, il rejette cette chose et s’en sépare, non comme faisant un sacrifice, mais comme se débarrassant d’un obstacle ; il estime tout comme une perte, comme des ordures, à cause de l’excellence de la connaissance de Jésus Christ notre Seigneur ; et rejeter de telles choses devant une autre d’un si grand prix n’est pas un sacrifice bien pénible ! Le moi a disparu ; « ce qui m’était un gain » a fait place à de meilleures choses. Quelle délivrance pour nous ! une délivrance d’un prix infini pour nous et qui nous élève moralement. Christ s’est donné lui-même ; et nous, nous avons le privilège de nous oublier nous-mêmes et de vivre pour Christ. Notre service d’amour aura sa récompense, mais l’amour trouve sa propre joie à servir dans l’amour. Le moi aime à être servi ; l’amour trouve son bonheur à servir ; et Christ accomplit ainsi pour nous maintenant, pendant, que nous sommes sur la terre, le service de son amour ; et il fera ainsi encore pour nous quand nous serons dans la gloire (Jean 13:1-17 ; Éphésiens 5:26, 29 ; Hébreux 2:17, 18 ; 7:26 à 8:3 ; Luc 12:37). Et nous, si Dieu nous en accorde le privilège, n’imiterons-nous pas et ne servirons-nous pas Celui qui nous a ainsi aimés ? Ne nous donnerons-nous pas nous-mêmes à Lui ? Vivre pour Dieu, intérieurement, est le seul moyen de vivre pour Lui, extérieurement. Toute activité extérieure, qui a une autre source ou qui est gouvernée par un autre motif, est charnelle, et est même un danger pour l’âme, en ce qu’elle tend à nous amener à nous passer de Christ et en ce qu’elle donne une place au moi. Le dévouement chrétien est autre chose : il a Christ pour objet, et fait que nous recherchons d’être avec Lui. Une grande activité, sans beaucoup de communion, est dangereuse ; mais quand le cœur est près de Christ, il vit pour Lui.


14 - [Le dévouement s’attend à Dieu dans la dépendance et l’obéissance]

La forme du dévouement et de l’activité extérieure est gouvernée par la volonté de Dieu et la compétence à servir ; car le dévouement est humble, saint, faisant la volonté du Maître, mais l’esprit de dévouement sans partage à Christ, est le vrai partage de tout chrétien. Nous avons besoin de sagesse : Dieu la donne libéralement. Christ est notre vraie sagesse. Nous avons besoin de puissance : nous la trouvons dans la dépendance de Celui qui nous fortifie. La dépendance, aussi bien que l’humilité, caractérisent le dévouement, comme elles ont orné la vie de Christ. Le dévouement s’attend au Seigneur et compte sur Lui ; il a du courage et de la confiance dans le sentier de la volonté de Dieu, parce qu’il s’appuie sur la puissance divine en Christ. Lui peut toutes choses. C’est pourquoi le dévouement est aussi patient, et accomplit son service selon la volonté et la parole de Dieu, car, alors, Dieu peut intervenir et il fait tout ce qui est bon.


15 - [Le dévouement d’un cœur non partagé s’attire de l’opposition]

Il y a un autre côté de ce sujet, dont nous devons dire quelques mots. Le service dévoué d’un cœur non partagé est en lui-même joie et bénédiction sans mélange ; mais nous sommes placés dans un monde, où ce service trouvera de l’opposition et où il sera rejeté, et le cœur voudrait naturellement sauver le moi, comme nous le voyons en Pierre, quand le Seigneur le traita d’adversaire (Matthieu 16:21-26). La chair recule instinctivement devant le fait et devant l’effet du dévouement à Christ, parce que celui qui se dévoue, se renonce lui-même et attire sur lui le mépris, l’oubli et l’opposition. Il faut que nous chargions notre croix pour suivre Christ et que nous ne retournions pas en arrière pour prendre congé des nôtres qui sont restés à la maison, car tant que nous parlons de prendre congé de ceux qui sont dans notre maison (voyez Luc 9:61-67), cette maison est encore notre « chez nous » et nous ne serons tout au plus que des « Jean surnommés Marc » dans l’œuvre (voyez Actes des Apôtres 15:37-39). Celui qui dit à Jésus : « Permets-moi premièrement », ne donne pas à Christ la première place : son dévouement n’est pas sans partage, son œil n’est pas simple. Mais que le cœur a de peine à ne pas se rechercher lui-même, à ne pas s’épargner, à ne pas avoir d’indulgence pour lui-même ! Cependant tout cela n’est pas le dévouement à Christ, mais tout le contraire.


16 - [Liberté et puissance dans le service dans la mesure où l’on réalise la mort avec Christ]

C’est Pourquoi, si nous devons vivre pour Christ, nous devons nous tenir nous-mêmes pour morts, et pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus, notre Seigneur (Romains 6:1-14 ; 2 Corinthiens 4:10 ; 5:14-15 ; Colossiens 3:3 et suivants) ; mais si nous permettons à la chair d’agir, si nous tolérons son activité dans le sens pratique, elle sera de fait pour nous un obstacle continuel, et le mépris et l’opposition que nous rencontrerons, deviendront pour nous un fardeau, non une gloire. Il faut donc « que nous portions », comme Paul, « toujours partout, dans le corps, la mort de Jésus, afin que la vie, aussi de Jésus soit manifestée dans notre corps » (2 Corinthiens 4:10), et qu’ainsi « la sentence de mort » soit accomplie en nous (2 Corinthiens 1:9). Le Seigneur vient ici à notre secours, au milieu de nos difficultés et de nos épreuves, et « nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés (Romains 8:37, 38) : rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu en Jésus Christ, notre Seigneur. Mais quand il s’agit du gouvernement de notre propre cœur, nous ferons l’expérience que ce : « portant toujours partout dans le corps la mort de Jésus », est une chose très difficile et qui met à l’épreuve l’état intérieur de l’âme ; et cependant il n’y a de liberté et de puissance dans le service, que dans la mesure dans laquelle nous réalisons cette mort constante, la puissance se liant à la conscience de la grâce. C’est la puissance du sentiment que nous avons qu’il est mort et qu’il s’est livré pour nous, qui, par la grâce, nous amène à nous tenir nous-mêmes pour morts à tout, excepté à Lui. Le chemin peut être comparativement facile ; et tel est le service extérieur, quand l’opposition du moi et de la puissance de Satan ne pèse pas sur l’âme. Mais si la mort de Christ doit s’accomplir incessamment en nous, contre notre moi mis à découvert par la croix, il faut nécessairement que Christ soit tout dans nos affections. La vraie puissance et la vraie qualité de l’œuvre, les opérations de l’Esprit de Dieu par nous, trouvent là leur mesure.

Tel est le seul chemin de dévouement devant Dieu, la seule voie pour être rempli de la puissance de Dieu et de la pensée de Christ dans le service qui nous occupe. La vie n’est que là. Tout le reste dans notre vie, pour ne rien dire de la perdition et du jugement, périt quand nous exhalons le dernier soupir, comme appartenant au premier Adam et à la scène dans laquelle il se meut, et non pas au second homme, le dernier Adam. La vie que nous vivons par Christ, elle seule, restera comme vie.


17 - [Motifs et caractères de la vie chrétienne : la CROIX où l’amour de Christ nous étreint + la GLOIRE qui fait courir vers le but pour gagner Christ et Lui être semblable]

Les motifs gouvernants et le caractère de la vie chrétienne sont la croix, et Christ dans la gloire. L’amour de Christ nous étreint, dans la croix, pour que nous nous donnions tout entiers à Lui, qui nous a ainsi aimés, qui s’est livré Lui-même pour nous. Christ, dans la gloire, nous fait courir vers le but, afin que nous gagnions Christ et que nous lui soyons semblables, et devient la source et la puissance d’espérance pour notre sentier. Quelle puissance et quelle persuasion dans la croix, si nous l’avons jamais comprise ! Mais quel abaissement ! Combien petits nous nous trouvons devant un tel amour ! De quel sentiment de l’amour de Christ ne sommes-nous pas remplis ! L’amour de Christ prend possession de notre cœur ; il nous étreint. Nous désirons vivre pour Celui qui s’est livré Lui-même pour nous. La perfection de l’offrande, l’absolu et la perfection de l’acte, par lequel elle a été offerte, en même temps que l’amour envers nous dont elle est l’expression, tout cela a de la puissance sur nos âmes : « Par l’Esprit éternel, il s’est offert Lui-même sans tache à Dieu » (Hébreux 9:14). Le sentiment que nous ne sommes pas à nous-mêmes rend plus profonde en nous la conscience des droits que Christ a sur nous ; et toute pensée de mérite dans notre dévouement disparaît. Telles sont les voies sages et sanctifiantes de notre Dieu ! D’un autre côté, combien la pensée de « gagner Christ » fait de tout ce qui nous entoure, « une perte » et « des ordures », à cause de l’excellence de la connaissance de sa personne ! Lui plaire, le posséder, être avec Lui et semblable à Lui pour toujours, qu’y a-t-il de comparable à cela ? Tout ce que nous faisons, par le motif qui en est la source, est revêtu de la valeur de Christ. Le cœur s’élargit, car tous ceux que Christ aime, nous sont chers, et le cœur est gardé en même temps de tout relâchement, de tout ce qui ne serait que la licence des sentiments naturels, car nous sommes liés fermement à Christ. Ce qui n’est pas sa gloire est impossible. Le péché est pratiquement exclu du cœur par la puissance des affections divines, parce que Lui remplit le cœur ; il est l’objet de la nouvelle nature en nous, et elle ne vit pratiquement que les yeux fixés sur Lui.


18 - [Avoir la pensée de Christ dirige toute la vie, pas seulement le dévouement]

Ce que nous venons de dire s’applique à tout dans notre vie, parce que nous devons faire en toutes choses ce qui plaît à Christ. La toilette, les manières de faire du monde, la mondanité sous toutes ses formes disparaissent, car elles ne peuvent pas ressembler ou être agréables à Celui que le monde a rejeté, parce qu’il rendait témoignage que ses œuvres étaient mauvaises. Le courant et le caractère des pensées ne sont pas mondains et n’ont pas le monde en vue, si ce n’est pour lui faire du bien, s’il est possible. Le chrétien est appelé à être l’épître de Christ (2 Corinthiens 3). Quand Christ possède le cœur, les motifs, les pensées, les relations du monde n’y entrent pas ; mais Christ, animant et dirigeant tout au dedans, et le cœur rapportant tout à Christ, le caractère de Christ lui-même est ainsi reproduit devant le monde. Le chrétien est gardé du mal par la pratique du bien qui est en Christ, dans la pratique de l’amour de Dieu. Son cœur est lié à Dieu, et la plénitude de Dieu se répand dans la mesure, dans laquelle le vase la contient. L’amour de Dieu, versé ainsi dans le cœur, est actif. « Christ s’est purifié pour lui-même un peuple acquis, zélé pour les bonnes œuvres » (Tite 2:14). L’amour de Christ a été actif : il l’est en nous. Il est dirigé par la pensée de Christ. Il aime les frères comme Christ a fait, c’est-à-dire en ayant sa source en lui-même et non pas dans ses objets ; il sent toutes leurs douleurs et leurs infirmités, tout en restant au-dessus d’elles toutes pour les porter, les supporter, et trouver en elles l’occasion d’un saint exercice ; il est à la fois plein de tendresse, et ferme et conséquent dans le chemin de Dieu, car tel a été l’amour de Christ. Il est en même temps obéissant, quels que soient d’ailleurs son dévouement et son activité, car une créature ne peut pas avoir une volonté juste, car la justice dans une créature, c’est l’obéissance. Adam est tombé en ayant une volonté indépendante de Dieu. Christ vint pour faire la volonté de Celui qui l’avait envoyé ; et dans son plus glorieux dévouement, sa voie a toujours été celle de l’obéissance : « Le chef de ce monde vient, et il n’a rien en moi ; mais afin que le monde sache que j’aime le Père ; et comme le Père m’a dit, ainsi je fais » (Jean 14:30, 31). L’amour et l’obéissance guident ainsi le dévouement et nous gardent dans la paix et l’humilité.


19 - [Le vrai dévouement est le dévouement total à Christ — Christ seul objet de la vie et des pensées, Christ crucifié et Christ dans la gloire]

En résumé donc, le vrai dévouement, c’est le dévouement sans partage à Christ ; Christ est le seul objet de la vie et des pensées, quels que soient d’ailleurs les devoirs dans lesquels ce motif nous appelle à être fidèles ; cette vie ne se conforme pas au monde qui a rejeté Christ ; elle se développe dans une joyeuse et céleste espérance, qui se lie à Christ dans la gloire, à Christ qui viendra et nous prendra auprès de Lui, nous rendant semblables à Lui. Nous sommes comme des hommes qui attendent du ciel leur Seigneur ; son amour nous étreint et nous occupe de ce qui l’occupe et l’intéresse, Lui. Christ crucifié, et Christ dans la gloire, comme notre espérance, sont les deux centres autour desquels tourne notre vie tout entière.

Quelle différence il y a entre cette vie de dévouement et la bonté naturelle d’un homme ! « Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, en sorte qu’ils voient vos bonnes œuvres, et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Matthieu 5:16). Le Seigneur ne dit pas à ses disciples de faire luire leurs bonnes œuvres devant les hommes ; il dit expressément le contraire ailleurs ; mais il veut que le témoignage qu’ils lui rendront soit si clair et positif, que les hommes sachent à quoi attribuer leurs bonnes œuvres, et qu’ils glorifient leur Père qui est dans les cieux.

Puissions-nous donc, par la grâce, nous chrétiens, être dévoués, dévoués sans partage, dans toutes nos voies, de cœur et d’âme, à Celui qui nous a aimés, et qui s’est livré Lui-même pour nous !