Si un enfant négligeait habituellement son père, et ne se
mettait pas en peine de connaître sa pensée, ni sa volonté, il est facile de
prévoir que, quand une circonstance difficile se présenterait, cet enfant ne
serait pas dans le cas de comprendre ce qui peut faire plaisir à son père. — Il
y a de certaines choses que Dieu laisse dans les généralités,
afin que l’état d’âme de l’individu
soit éprouvé. Si, au lieu du cas que j’ai supposé d’un
enfant, il s’agissait de la femme envers son mari, il est probable que, si elle
a les sentiments et l’esprit d’une épouse, elle n’hésitera pas un instant sur
la question de savoir ce qui pourrait être agréable à celui-ci, et cela, quand
même il n’aurait exprimé là-dessus aucune volonté. Or vous ne pouvez échapper à
cette épreuve, et Dieu ne permettra pas non plus que ses enfants y échappent : —
« Si… ton oeil est simple, ton corps tout entier sera plein de lumière » (Matt.
6:22 ; comp. Col. 1:9).
Quant à un moyen commode et confortable de connaître la volonté de Dieu, comme on aurait une recette toute faite, il n’existe pas ; du moins pour la connaître sans égard à l’état de notre propre âme. — Encore une chose : souvent nous avons trop d’importance à nos propres yeux, et nous nous trompons en supposant qu’il y a une volonté de Dieu quelconque dans tel ou tel cas.
Dieu n’a peut-être rien à nous dire là-dessus ; le mal est
tout dans l’agitation que nous nous donnons nous-mêmes. La volonté de Dieu est
peut-être que nous prenions tranquillement une place insignifiante. — Et
encore, quelquefois nous cherchons la volonté de Dieu, désirant savoir comment
agir, dans des circonstances où ne pas
nous y trouver du tout
est sa seule volonté ; et où, si la conscience
était réellement en activité, son premier effet serait de nous les faire
quitter. C’est notre propre volonté qui nous place là, et nous voudrions jouir,
néanmoins, de la consolation d’être dirigés de Dieu dans une voie que nous
avons nous-mêmes choisie. C’est là un cas très ordinaire. Soyez assuré que, si
nous sommes assez près de Dieu, nous n’aurons pas de peine à connaître sa
volonté. — Dans une vie longue et active, il peut arriver que Dieu, dans son
amour, ne nous révèle pas toujours immédiatement sa volonté, afin de nous faire
sentir notre dépendance à agir selon sa propre volonté ; cependant, « si…
ton oeil est simple, ton corps tout entier sera plein de lumière », d’où il est
certain que, si tout le corps n’est pas rempli de lumière, l’oeil n’est pas
net. — Vous direz : C’est là une pauvre consolation. — Je réponds :
C’est une riche consolation pour ceux dont le seul désir est d’avoir l’oeil
simple, et de marcher avec Dieu
;
— non pas d’éviter, pour ainsi dire, cette peine en apprenant sa volonté d’une
manière objective, mais dont le désir est de
marcher avec Dieu
. « Si quelqu’un marche de jour, il ne bronche pas, car il
voit la lumière de ce monde ; mais si quelqu’un marche de nuit, il bronche
car la lumière n’est pas en lui ». C’est toujours le même principe. — « Celui qui
me suit ne marchera point dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la
vie ». Vous ne pouvez pas vous soustraire à cette loi morale du christianisme.
« C’est pourquoi depuis le jour où nous en avons ouï parler, nous ne cessons pas
de prier et de demander pour vous que vous soyez remplis de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et
intelligence spirituelle,
pour marcher d’une manière digne du Seigneur
pour lui plaire à tous égards, portant du fruit
en toute bonne oeuvre, et croissant par
la connaissance de Dieu ». —
La liaison de ces choses entre elles est d’une
immense importance pour l’âme : Il faut connaître le Seigneur intimement
pour pouvoir marcher d’une manière digne de lui ; et c’est ainsi que nous
croissons dans la connaissance de la volonté de Dieu. « Et je demande ceci dans
mes prières, que votre amour abonde… de plus en plus en connaissance et toute
intelligence, pour que vous discerniez les choses excellentes, afin que vous
soyez purs et que vous ne bronchiez pas jusqu’au jour de Christ ». — Finalement
il est écrit : « celui qui est spirituel discerne toutes choses
; mais lui n’est discerné par personne ». — C’est
donc la volonté de Dieu, et une volonté précieuse, que nous ne sachions
discerner sa volonté que selon notre propre état spirituel ; et en
général, quand nous pensons que nous jugeons des circonstances, c’est Dieu qui
nous juge, qui juge notre état ; notre affaire est de nous tenir près de
lui. Dieu ne serait pas bon envers nous, s’il nous permettait de découvrir sa
volonté sans cela. — Ce serait commode, comme d’avoir un directeur des
consciences, et nous serions ainsi quittes de la découverte et du châtiment de
notre état moral. Ainsi, si vous cherchez comment vous pouvez découvrir la
volonté de Dieu sans cela, vous cherchez
mal,
et c’est ce que nous voyons tous les jours.
Un chrétien est dans le doute, dans la perplexité. — Un autre,
plus spirituel, voit clair comme le jour ; il s’étonne de l’incertitude de
l’autre ; il ne voit point de difficulté, et finit par comprendre qu’elle
gît uniquement dans l’état d’âme du premier. « Celui en qui ces choses ne se
trouvent pas est aveugle, et ne voit pas loin ». Quant aux circonstances,
je crois qu’une personne peut être conduite par
elles. — L’Écriture a décidé de cela. C’est aussi ce qu’elle appelle « être
refréné avec un mors et une bride ». — « Je t’instruirai, et je t’enseignerai le
chemin où tu dois marcher ; je te conseillerai, ayant mon oeil sur toi ». —
Voilà la promesse et le privilège de celui qui a la foi. — Assez près de Dieu,
pour comprendre par un seul regard de sa part. Dieu, qui est fidèle, a fait la
promesse de le diriger ainsi. Il nous avertit de ne pas être comme le cheval et
le mulet, qui n’ont pas l’intelligence de la volonté, des pensées, des désirs
de leur maître. Il faut les mener avec un mors et une bride. Sans doute, même
cela vaut mieux que de broncher, de tomber et de se heurter contre celui qui
nous mène ; mais c’est un triste état — et c’est là être dirigé par les circonstances.
Sans doute encore, il est
miséricordieux de la part de Dieu de le faire, mais c’est bien triste de notre
part. — Ici, il faut cependant
distinguer entre juger ce qu’on a à faire
dans
de certaines circonstances, et être dirigé par
elles. — Celui qui se laisse diriger par elles,
agit toujours aveuglément, quant à la
connaissance de la volonté de Dieu. — Il n’y a absolument rien là de moral. —
C’est une force extérieure qui le contraint. Mais il est très possible que je
n’aie aucun jugement d’avance sur ce que je ferai ; je ne sais quelles
circonstances peuvent survenir et, par conséquent, je ne puis prendre aucun
parti. Mais dès l’instant où les circonstances sont là, je juge avec une
conviction entière et divine quel est le chemin de la volonté de Dieu, et de
l’intention et de la puissance de l’Esprit. Cela exige de la spiritualité, et
qu’on demeure dans la communion avec Dieu ; ceci n’est pas être dirigé par
les circonstances, mais c’est être
dirigé de Dieu dans
les
circonstances, étant assez près de Dieu pour pouvoir juger immédiatement ce que
l’on doit faire, aussitôt que les circonstances sont là.
Quant aux impressions, Dieu peut les suggérer, et il est certain qu’il suggère, en effet, une chose à l’esprit ; mais, dans ce cas, la convenance de cette chose et son caractère moral seront évidents comme le soleil en plein midi. Dans la prière, Dieu peut éloigner de notre coeur certaines influences charnelles qui, étant détruites, permettent à certaines autres influences spirituelles de prendre toute leur place dans l’âme ; ou il nous fait sentir l’importance de quelque devoir, entièrement obscurcie peut-être par la préoccupation causée par quelque objet désiré. — Cela peut avoir lieu, même entre deux individus.
Une personne peut ne pas avoir assez de discernement spirituel pour découvrir ce qui est bon, mais dès qu’une autre le lui fait voir, elle comprend que c’est la vérité. Tous ne sont pas ingénieurs, mais un simple charretier connaît un bon chemin une fois qu’il est fait. Ainsi les impressions qui viennent de Dieu ne restent pas toujours de simples impressions. Mais elles sont ordinairement claires, quand c’est Dieu qui les produit. Je ne doute pas, cependant, qu’il ne les fasse souvent sur nos esprits, lorsque nous marchons avec lui, et que nous écoutons sa voix.
Quand vous parlez des obstacles suscités par Satan, il n’est pas dit que Dieu lui-même n’ait pas permis ces obstacles à l’accomplissement de quelque bon désir, obstacles causés par une accumulation de mal dans les circonstances qui nous entourent.
Votre troisième question suppose qu’une personne agit sans avoir la connaissance de la volonté de Dieu, cas qui ne devrait pas exister du tout. La seule règle qu’on puisse donner, c’est de ne jamais agir, lorsque nous ignorons quelle est la volonté du Seigneur. La volonté de Dieu doit être le motif comme la règle de notre conduite ; et jusqu’à ce que sa volonté soit en activité, le vrai mobile manque pour la nôtre.
Si vous agissez dans l’ignorance à cet égard, vous êtes à la
merci des circonstances,
Dieu faisant
tout tourner, cependant, au bien de ses enfants ; car c’est toujours là le
cas supposé par votre question. Mais pourquoi agir quand nous ignorons quelle
est la volonté de Dieu ? La nécessité d’agir est-elle toujours si
extrêmement pressante ? Si je fais quelque chose avec la pleine certitude
que je fais la volonté de Dieu, alors il est clair qu’un obstacle n’est plus
qu’une épreuve de ma foi, et ne devrait pas m’arrêter.
Il nous arrête peut-être à cause de notre manque de foi, parce
que, si nous ne marchons pas assez près de Dieu dans le sentiment de notre
néant, nous manquerons toujours de foi pour accomplir
ce que nous avons assez de foi pour discerner.
Quand nous faisons notre propre volonté, ou que nous sommes
négligents dans notre marche, Dieu, dans sa miséricorde, peut nous avertir par
un obstacle qui nous arrête si nous y faisons attention ; tandis que
« l’insensé suit son chemin, et il est puni ». Dieu peut permettre, où il y a
beaucoup d’activité et de travail, que Satan suscite des obstacles, afin que
nous soyons tenus sous la dépendance du Seigneur, mais Dieu ne permet jamais à
Satan d’agir autrement que sur la chair. Si nous laissons la porte ouverte, si
nous nous éloignons de Dieu, Satan nous fait du mal ; mais autrement ses
efforts ne sont qu’une épreuve pour la foi, afin de nous avertir d’un danger ou
d’un piège, — ou de quelque chose qui aurait la tendance de nous élever à nos
propres yeux. C’est un instrument pour nous corriger. C’est-à-dire que Dieu
permet à Satan d’affliger l’esprit et de faire souffrir la chair
extérieurement, afin que l’homme intérieur soit gardé du mal. S’il s’agit
d’autre chose que de cela, alors ce sont probablement nos mais
et nos si
qui nous
arrêtent, ou bien les effets de notre négligence qui a ouvert une porte à
Satan, pour nous troubler par des doutes et des difficultés apparentes entre
Dieu et nous, parce que nous ne voyons plus clair. — Car celui qui est né de
Dieu se conserve lui-même, et le Méchant ne le touche point. En un mot, la
question est toute morale
. S’il
s’élève quelque question particulière, qu’au premier abord nous soyons
incapables de résoudre, nous trouverons que souvent cette question ne serait
pas là du tout, si notre position n’était pas fausse, si nous avions été
précédemment dans un bon état d’âme, si une vraie spiritualité nous avait
gardés, garantis. Alors tout ce que nous avons à faire, c’est de nous humilier
de toute l’affaire.
Examinons maintenant si l’Écriture ne nous offre pas quelque principe propre à nous diriger. — Ici, il est évident que la spiritualité est la chose essentielle, qu’elle est tout.
La règle qu’on vous donne de faire ce que Jésus aurait fait dans
telle ou telle circonstance est excellente, où
et quand elle peut s’appliquer.
Mais sommes-nous souvent dans les
circonstances où le Seigneur se serait trouvé ? Ensuite il est souvent
utile de me demander d’où
me vient
tel désir ou telle pensée de faire ceci ou cela. J’ai trouvé que cela seul
décide de plus de la moitié des cas embarrassants où les chrétiens peuvent se
rencontrer.
Les deux tiers de ceux qui restent sont le résultat de notre
précipitation et de nos péchés antérieurs. — Si une pensée vient de Dieu et non
de la chair, alors nous n’avons qu’à nous adresser à Dieu quant à la manière et
aux moyens de l’exécuter, et nous serons bientôt dirigés. Il y a des cas où
l’on a besoin d’être dirigé, non pas toujours sans des motifs : comme, je
suppose, quand j’hésite au sujet d’une visite à faire ou de tel autre cas. —
Une vie d’une charité plus ardente, ou la charité en exercice d’une manière
plus intelligente, ou mise en activité en s’approchant de Dieu rendra clairs
les motifs de la charité, d’un côté ou de l’autre, — et souvent nous verrons
peut-être que notre
côté dans cette
affaire n’était qu’égoïsme.
Vous direz : Mais s’il n’est question ni de charité ni
d’obéissance ? Alors je réponds que vous devez me montrer une raison pour agir.
Car s’il ne s’agit que de votre
propre volonté, vous ne pouvez faire plier la sagesse de Dieu à votre volonté.
— Voilà aussi la source d’une autre nombreuse classe de difficultés que Dieu ne
résoudra jamais.
Dans ces cas, il enseignera, par sa grâce, l’obéissance et il
nous fera voir combien nous avons perdu de temps dans notre activité propre.
Finalement, « il fera marcher les débonnaires
dans la droiture, et il enseignera sa voie aux humbles ».
Je vous ai communiqué à ce sujet tout ce que mon esprit peut vous fournir dans ce moment. — Au reste, rappelez-vous seulement que la sagesse de Dieu nous conduit dans la voie de la volonté de Dieu : si notre propre volonté est en activité, Dieu ne peut se plier à cela. — C’est là la chose essentielle à découvrir. — C’est le secret de la vie de Christ. — Je ne connais pas d’autre principe dont Dieu puisse se servir, quoiqu’il pardonne et fasse tout tourner à notre bien.
Mais vous me questionnez encore quant à sa direction. Il dirige le nouvel homme qui n’a d’autre volonté que Christ. Il mortifie et fait mourir le vieil homme, et de cette manière il nous purifie pour nous faire porter du fruit.
« Voici, je viens… pour faire, ô Dieu, ta volonté ». — J’ai pris plaisir à la faire.
C’est la place d’un portier d’attendre à la porte, — mais en faisant cela il fait la volonté de son maître.
Soyez assuré que Dieu fait plus en nous
que nous pour
lui ;
et ce que nous faisons n’est pour lui qu’autant que c’est
lui-même qui le produit en nous.
J’ajoute à l’égard d’un principe déjà exprimé, que nous sommes sanctifiés pour l’obéissance de Jésus Christ. Or il était venu pour faire la volonté de son Père, sans laquelle il ne faisait rien. Ainsi, dans la tentation au désert, Satan cherchait à le faire agir selon Sa volonté propre, en des choses où il n’y avait pas même une apparence de mal. Le Père venait de Le reconnaître pour son Fils. Satan le tente en disant : « Si tu es Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains » ; mais Jésus, comme serviteur, ne fait rien, parce qu’il n’y avait à cet égard aucune volonté de son Père. « L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Comme il n’y avait pas de parole de Dieu pour le cas actuel, Jésus ne fit rien. Satan ne pouvait rien faire non plus. Quoique toujours actif pour faire le bien, il ne bougea pas lorsque Marie et Marthe lui firent dire : « Celui que tu aimes est malade ». Son Père ne l’y avait pas envoyé. Lorsqu’il y va plus tard, la sagesse de Dieu est ainsi manifestée, en ce qu’un témoignage à la divine puissance de Jésus, comme Fils de Dieu, fut rendu par la résurrection de Lazare. Pour nous-mêmes, lorsque la volonté de Dieu n’est pas connue, notre sagesse consiste souvent à nous abstenir jusqu’à ce qu’elle soit manifestée. Dieu veut que, zélés pour les bonnes oeuvres, nous fassions toujours le bien, mais on ne peut devancer le moment, et l’oeuvre de Dieu est faite parfaitement quand c’est lui qui la fait.