Le LIVRE du PROPHÈTE MICHÉE

par Henri Rossier (1916)


Table des matières :

1 - PRÉFACE

2 - CHAPITRES 1 et 2 : Jugement du peuple par l’Assyrien historique. État moral et restauration finale d’Israël

2.1 - Chapitre 1 : Jugement de Samarie et de Juda par l’Assyrien

2.2 - Chapitre 2 : État moral du peuple. Restauration finale du vrai Israël

3 - CHAPITRES 3 à 4: 8 : La ruine actuelle et le dessein de Dieu quant au Royaume futur

3.1 - Chapitre 3 : Ruine morale de toutes les classes dirigeantes du peuple. Jugement des prophètes. Destruction de Jérusalem

3.2 - Chapitre 4: 1-8 : Restauration glorieuse de Jérusalem

4 - CHAPITRES 4:9 à ch. 5 : Babylone et l’Assyrien. Double jugement, actuel et futur, sur Jérusalem, et restauration finale du peuple

4.1 - Chapitre 4: 9-13 : Babylone et les nations

4.2 - Chapitre 5 : L’Assyrien et la victoire du Résidu d’Israël

5 - CHAPITRES 6 et 7 : Le plaidoyer

5.1 - Chapitre 6

5.2 - Chapitre 7


1 - PRÉFACE

La prophétie, comme du reste toutes les Écritures, ne s’ouvre pour le chrétien que si le Saint Esprit lui en a fourni la clef. Sans cette dernière, l’homme le plus savant n’entrera jamais dans les pensées de Dieu et ne fera preuve que d’ignorance en cherchant à les expliquer. La clef, c’est Christ. Si l’on ne rattache toute prophétie à Sa personne, à ses souffrances et à ses gloires, à Sa puissance et à Sa venue, comme Fils de l’homme, dans son royaume (1 Pierre 1: 11 ; 2 Pierre 1: 16 ; Matt. 16: 28 ; Marc 9: 1), elle restera un livre aussi scellé pour le savant que pour l’illettré (Ésaïe 29: 11, 12), et c’est ainsi que s’expliquent tant de désaccords, même entre chrétiens, sur l’interprétation du saint Livre.

Donc la prophétie nous parle de Christ. Les premiers prophètes, au nombre desquels nous rangeons Osée, Ésaïe et Michée, nous présentent sa personne d’une manière beaucoup plus frappante et circonstanciée que les prophètes subséquents, tels que Jérémie, Ézéchiel et même Daniel. Seuls les derniers des prophètes, Zacharie et Malachie, à mesure qu’ils se rapprochent du moment où le Christ sera révélé, le voient surgir devant leurs yeux dans toute la puissante réalité, non pas tant, comme en Ésaïe et Michée, de son abaissement et de ses douleurs, que de sa venue en puissance. Enfin la pleine lumière éclate, lorsque le dernier et le plus grand des prophètes, Jean le Baptiseur, voit Jésus venir à lui comme Agneau de Dieu, Fils de Dieu et Roi d’Israël (*).

(*) Il y a loin de là à l’idée de la théologie moderne que la « notion messianique » s’est développée graduellement chez les prophètes à la suite « d’une ébauche primitive vague et indéterminée ». Cette idée est le digne pendant de celle qui voit dans « le don prophétique, une faculté innée de l’humanité ».

Cependant, si le point central de la prophétie est « la Révélation de Jésus Christ », elle nous présente encore d’autres sujets dont le plus important est le gouvernement de Dieu dans ce monde. Sans les écrits prophétiques de l’Ancien Testament, dont les livres historiques ne doivent pas être séparés, nous serions très incomplètement renseignés sur ce point. Tous nous révèlent ce que sont les voies de Dieu en gouvernement dans le passé et le présent, à l’égard de son peuple terrestre et des nations. Dieu fait entendre à chaque occasion qu’il est un Dieu saint qui ne peut supporter l’iniquité : il doit la juger, mais il appelle les hommes à la repentance. La prophétie d’Amos présente cette vérité d’une manière remarquable, quoique, du reste, elle se retrouve dans tous les prophètes. Mais la prophétie ne s’en tient pas au passé et au présent ; elle dévoile l’avenir, car il est de toute importance de montrer aux hommes que les voies de Dieu restent immuables et que son gouvernement ne change jamais de caractère. À mesure que le mal va grandissant dans le monde, les jugements de Dieu s’accentuent toujours plus et atteindront enfin leur apogée dans le jugement de l’Antichrist (le faux Messie), dans le jugement de son peuple (les juifs apostats), et de toutes les nations, coalisées contre le vrai Israël et son vrai Roi.

Toutefois le gouvernement de Dieu ne se borne pas à détruire les obstacles que Satan lui suscite dans le monde. L’Éternel discipline, reprend, châtie son peuple, car Il ne poursuit pas seulement le jugement du mal, mais le triomphe du bien dans le coeur de ceux qui le connaissent et se soumettent à Lui. Aussi tous les prophètes nous enseignent que la discipline, reçue et acceptée, produira au temps de la fin une vraie Restauration qui rangera le Résidu futur d’Israël et les fidèles d’entre les nations sous le sceptre glorieux de Christ, quand il prendra possession de son héritage terrestre.

* * *

À un point de vue général, nous rencontrons deux catégories de prophètes. Les uns sont suscités quand les relations de l’Éternel avec son peuple subsistent encore, les autres, quand elles sont définitivement rompues et que la sentence de Lo-Ammi (pas mon peuple), prédite par Osée, est passée à l’état de fait.

Dans la première catégorie, l’Éternel dit encore « mon peuple », comme en Osée, Ésaïe, Michée et d’autres. Cependant, lorsque ces relations n’étant pas encore rompues, il est dit : « Tu as abandonné ton peuple » (voyez, par exemple, Ésaïe 2: 6), il ne faut pas en conclure que le Lo-Ammi est prononcé, quoiqu’il soit alors bien près de s’accomplir à l’égard des dix tribus. Cet abandon est pareil à celui dont Gédéon parle à l’Ange de l’Éternel : « L’Éternel nous a abandonnés » (Juges 6: 13). Cela devait avoir lieu chaque fois qu’Israël, placé par la loi sous une alliance bilatérale avec Dieu, avait abandonné l’Éternel, mais cela n’impliquait pas encore la rupture définitive des relations entre Dieu et son peuple. Tout le livre des Juges, toute l’histoire des Rois, Ésaïe, Michée, même Jérémie qui prophétisait à la veille de la captivité, le prouvent. Le gouvernement n’avait pas encore été transféré aux Gentils ; il ne le fut que sous Nébucadnestar, la « tête d’or » des quatre empires universels. Même la déportation des dix tribus ne mit pas fin à l’existence du peuple de Dieu, représenté à ses yeux par la royauté de Juda et le temple de Jérusalem, et encore reconnu de Lui.

Avec la captivité de Juda commence la seconde catégorie de prophètes. Le « Lo-Ammi » est prononcé. Cela ne signifie point que Dieu ne veuille reprendre plus tard ses relations avec Israël sur le pied d’une nouvelle alliance, unilatérale cette fois ; seulement, quand Lo-Ammi est définitivement prononcé, l’Éternel ne dit plus « mon peuple ». Il ne prononcera de nouveau ces mots que lorsqu’il mentionnera la reprise de ses relations futures avec Israël, relations que la foi des fidèles, basée sur les promesses de Dieu, réalisera en vue de l’avenir. C’est ce que l’on trouve en Ézéchiel, Daniel, et d’autres prophètes de la captivité (Ézéch. 36: 28; 37: 23, 27; 38: 14, 16; 39: 7; 46: 18; Dan. 9: 15, 16; Zach. 8: 8; 13: 9).

* * *

Une autre remarque importante se rattache à l’existence ou à la rupture des relations de Dieu avec son peuple. Aussi longtemps que ces relations existent, même au plus faible degré, et que l’Éternel peut dire : « mon peuple », l’Assyrien historique est le grand ennemi d’Israël (voyez 2 Rois, Ésaïe, Michée). Du reste, cet Assyrien historique, que ce soit Pul, Tiglath-Piléser, Shalmanéser, Shankérib ou Assurbanipal, est toujours présenté par le prophète, comme un type de l’Assyrien futur, ou prophétique de la fin. Ce dernier n’est pour ainsi dire que la continuation du premier, car la prophétie, qu’il s’agisse de personnages ou d’événements historiques, nous reporte invariablement à la fin des temps. Les événements présents ont donc toujours une similitude frappante avec les événements à venir. Cela n’atténue en rien leur immense importance comme jugements présents, car ils servent d’avertissement à la conscience du peuple et l’engagent à retourner à l’Éternel pendant qu’il en est temps encore (*).

(*) Les termes que nous employons : l’Assyrien historique et l’Assyrien prophétique ne signifient pas que ce soient deux puissances différentes. L’Assyrien prophétique est la même puissance que l’autre, seulement avec des limites territoriales qui, dans le cours des siècles, se sont considérablement étendues et constituent aujourd’hui l’immense domaine de la puissance russe avec ce qu’il pourrait encore s’annexer de la Turquie.

Il peut être utile de répéter ici ce que nous avons dit autre part sur l’Assyrien prophétique, sujet souvent peu familier à ceux qui étudient la prophétie.

Les trois grands ennemis de la fin sont :

L’empire romain, ou quatrième empire universel, quatrième Bête de Daniel (7: 7), première Bête de l’Apocalypse dont la plaie mortelle a été guérie (13: 1-4). Cet empire ressuscitera sous la forme d’une confédération latine de dix rois avec son Chef, un empereur dont Rome sera la capitale. Ce personnage possédera toute la puissance, accordée jadis par Dieu à Nébucadnetsar, roi de Babylone, et aux empires qui lui ont succédé, mais sera suscité à la fin des temps par Satan comme antagoniste de Christ et de son règne (*). Il est important de remarquer que Babylone, qui ne sera jamais relevée comme empire, est considérée dans l’Apocalypse, non pas comme exemple d’une résurrection nationale semblable à celle de l’empire romain, mais comme l’apostasie finale de la Chrétienté, sous sa forme religieuse, politique et commerciale, en rapport avec l’empire romain (Apoc. 17, 18).

(*) Voyez l’Appendice à la fin de ce volume.

L’Antichrist. Celui-ci se met à la tête de l’ancien peuple de Dieu, devenu apostat du Judaïsme comme la Chrétienté le sera du Christianisme, et il s’élève comme faux Roi et faux Messie jusqu’au trône de Dieu, après s’être emparé, pour le livrer à Satan, de « l’héritage de l’Éternel ». Quelque petit que soit le territoire de la Palestine, il a plus d’importance aux yeux de Dieu que tous les pays des nations, car c’est de lui que l’Éternel a jadis fait choix, ainsi que de Jérusalem dont il veut faire la capitale glorieuse de son royaume terrestre. C’est là qu’il établira son trône ; de là partiront tous les décrets du seul royaume universel infaillible, appelé « le royaume éternel du Fils de Dieu ». La prétention d’usurper cette puissance attirera sur la tête de l’Antichrist les coups terribles de la colère de Dieu ; ce faux Christ sera détruit impitoyablement avec tous ses adhérents quand le vrai Messie apparaîtra.

L’Assyrien. Son rôle est capital, mais non exclusif, chez les prophètes Ésaïe et Michée. Bien qu’aux jours des prophètes subséquents la domination de l’Assyrien historique eût pris fin, son rôle prophétique était encore intact et tout entier à venir. L’Assyrien avait paru avant que le peuple fût décidément Lo-Ammi ; il reparaîtra au moment où les relations de l’Éternel avec Israël se seront renouées par la formation d’un Résidu croyant, et où Dieu dira de nouveau « mon peuple » (*). C’est à l’apparition de l’Assyrien que se rattachera le grand conflit de la fin qui mettra aux prises autour de Jérusalem le quatrième empire universel ou empire romain, réédifié par Satan, et l’Assyrien, vaincu autrefois par Babylone, mais qui surgira de nouveau, pour disputer la suprématie mondiale à Rome. Cet Assyrien prophétique reparaît sous une forme différente de celle d’autrefois, mais, à l’encontre de la puissance babylonienne qui a été définitivement anéantie, il est encore représenté aujourd’hui par la Russie avec sa formidable puissance asiatique. Seulement dans les temps prophétiques, le caractère politique de cet empire aura subi des changements importants. Il ne sera plus question du roi d’Assyrie, mais de Gog, prince de Rosh, de Méshec et de Tubal, qui domine sur le pays de Magog, c’est-à-dire d’une confédération assyrienne qui cherche à faire contrepoids à la confédération latine. Le roi du Nord est, semble-t-il, le chef des armées assyriennes. Ce roi occupe l’Asie mineure, territoire jadis conquis par le roi d’Assyrie et qui devint, après la chute de l’empire d’Alexandre, le royaume des Séleucides et des Antiochus. L’Asie mineure est toujours appelée le Nord en rapport avec la Palestine (voyez Dan. 11). La confédération assyrienne, représentée par le roi du Nord, se pose donc en adversaire de la Bête romaine, de l’Antichrist en Palestine, mais aussi du roi du Midi en Égypte. La question d’Orient renaît alors dans toute son acuité. Le choc ne peut avoir lieu qu’en Palestine et ce pays est le dernier enjeu par lequel Satan espère gagner la partie. Il a été vaincu une première fois à la croix et cette victoire a introduit le royaume céleste de l’Agneau. Il sera vaincu une seconde fois lorsque l’Assemblée, l’Épouse céleste, ayant été ravie vers son Époux, lui, le diable, sera précipité sur la terre avec ses anges. S’il est vaincu une troisième fois, c’en est fait de son domaine. Il faut, pour qu’il subsiste, que Jérusalem, siège du pouvoir terrestre, enlevée au vrai Roi, reste à l’Antichrist et à la Bête romaine, son alliée, avec lesquels le diable a formé une alliance meurtrière. L’Assyrien, poussé par son orgueil, son ambition et sa cupidité, traversera tout ce plan de Satan, car il voudra agir indépendamment de lui. Son action aura pour résultat la coalition judéo-latine contre l’Assyrien et ses armées.

(*) Lors donc que vous trouvez dans les prophètes : « Mon peuple », ou bien l’Assyrien historique existe encore, ou bien l’Assyrien prophétique est entré en scène, comme Dieu vient de reprendre ses relations avec le vrai Israël, c’est-à-dire le Résidu.

D’autre part, et cela ressortira en partie pour nous de l’étude du prophète Michée, l’Assyrien est la dernière verge levée par l’Éternel contre le peuple juif devenu apostat et sujet de l’Antichrist. La cause de ce châtiment doit être cherchée dans son rejet du Messie. Dieu se sert en outre de cette attaque de l’Assyrien pour compléter la restauration du Résidu de Juda par la repentance (voyez Joël 2). Sous Ézéchias, l’Assyrien historique n’avait pu conquérir Jérusalem, tout en étendant ses déprédations à tout le territoire de Juda. Mais la rétribution finale n’était pas encore venue, et quoique Dieu ait livré Jérusalem aux nations pour être foulée aux pieds jusqu’à aujourd’hui, il n’a pas permis à l’Assyrien d’y toucher d’une manière permanente. Le moment arrive néanmoins où Dieu lève une dernière fois la verge de sa colère contre le peuple incrédule, contre cette Jérusalem dans laquelle sera trouvé le sang de tous les prophètes, et avant tout celui du « Juge d’Israël ». Cet envahissement futur de la Palestine et de la Judée par le roi du Nord sera général. Jérusalem sera assiégée et conquise par les peuples alliés de l’Assyrien ; la moitié de sa population sera emmenée en captivité. L’Assyrien se jettera ensuite sur l’Égypte, mais, à son retour, assiégeant de nouveau Jérusalem, après que la Bête et l’Antichrist ont été anéantis avec leurs armées par l’apparition de Jésus, sortant du ciel avec tous ses saints, l’Assyrien sera lui-même détruit sur les montagnes d’Israël et jeté dans le feu éternel avec ses multitudes. Voyez pour les détails de sa destruction « à la fin des jours » les chapitres 38 et 39 d’Ézéchiel au sujet de Gog, car Gog est l’Assyrien dont Dieu avait « parlé dans les jours d’autrefois par ses serviteurs les prophètes d’Israël » (Ézéch. 38: 17).

* * *

Si Ésaïe et Michée, qui nous occupent ici nous parlent principalement de l’Assyrien historique et prophétique, cela ne veut pas dire que ces prophètes ne mentionnent pas les empires des nations dont le premier est Babylone ; mais ces empires n’y occupent pas l’avant-scène (voyez Ésaïe 13: 1; 39: 6; Michée 4: 10). Lorsque, par contre, toute relation de l’Éternel avec Israël est définitivement rompue par le péché du peuple, ces mêmes empires, Babylone, les Mèdes et les Perses, Alexandre, l’Empire romain, passent au premier plan. Voyez, par exemple, Ézéchiel, Daniel, Zacharie. Jérémie ne mentionne pas même l’Assyrien, parce que ce prophète a pour sujet l’empire confié aux nations, dans leur Tête, Babylone, après que la domination a été retirée au peuple d’Israël. Jérémie nous parle du jugement de Babylone et il semble, dans ce prophète, que tout soit terminé avec sa chute. C’est que, pour Jérémie, tous les empires universels qui ont succédé à Babylone tombent virtuellement avec elle. Daniel nous fournit le détail de leur destruction. Dans tous les prophètes susnommés, l’Assyrien historique a complètement disparu (son rôle étant proprement terminé par la ruine de Ninive et l’avènement de Babylone) pour faire place à l’Assyrien prophétique, dernier ennemi qui sera anéanti par la présence personnelle du Seigneur ici-bas. Jérémie seul ne parle, comme nous l’avons dit, ni de l’un, ni de l’autre.

Comme l’Assyrien historique était entré en scène avant que les relations de l’Éternel avec son peuple fussent rompues, il reparaît au moment même où ces relations sont renouées. Le Résidu, le vrai Israël, est venu à la repentance et la gloire de Christ est près d’apparaître, quand l’Assyrien s’élève contre Son peuple après avoir servi au jugement d’Israël apostat, peuple de l’Antichrist. Nous disons que l’Assyrien est le dernier ennemi des temps de la fin. Les chapitres 38 et 39 d’Ézéchiel le prouvent. Ils terminent de fait la prophétie d’Ézéchiel, tous les derniers chapitres (40-48) étant consacrés à la restauration du temple et au partage du pays. Or, de quoi ces deux chapitres nous parlent-ils ? De l’Assyrien prophétique, dernier ennemi qui sera anéanti. Même remarque pour le livre de Daniel : L’Assyrien prophétique y est aussi le dernier ennemi qui envahit le pays de l’Éternel, pour être détruit, quand déjà la montagne de sainte beauté est établie au milieu d’Israël (Dan. 11: 45). De même en Joël, prophétie sans date, mais traitant tout entière des derniers jours, il n’est question que de l’Assyrien prophétique et du rassemblement de toutes les nations en Palestine pour être jugées, après que la repentance est entrée dans le coeur du Résidu, et que le Seigneur s’est manifesté à lui. Alors l’Éternel peut dire de nouveau : « Mon peuple » (Joël 2: 26, 27).

Quelque terrible que soit l’Assyrien, il n’est pas, historiquement, l’instrument de la dispersion finale du peuple. Au contraire, comme nous l’avons vu, il est, dans le passé, la verge contre le peuple encore reconnu de Dieu, et dans l’avenir la verge pour détruire le peuple apostat, mais sa présence provoque la repentance du Résidu. Ce n’est pas à l’Assyrien que la domination universelle fut jamais confiée. Elle aurait pu être la part d’Israël fidèle ; elle lui a été enlevée, à cause de sa désobéissance, pour être mise aux mains de Babylone et des empires universels qui lui ont succédé. Elle sera rendue au vrai Israël, au peuple de Dieu restauré, sous le sceptre du Messie. Nonobstant une durée de règne de près de neuf siècles (tandis que l’empire de Babylone n’a pas duré plus de 80 ans) jamais l’empire universel n’a été confié à l’Assyrie. Avec la prise de Ninive, l’Assyrien disparaît comme verge actuelle de Dieu contre Israël et les nations, mais sa première apparition, soit par ses principes, soit par son orgueil, soit par la terreur qu’il inspire n’est que le prélude de son apparition à la fin des temps. Quand il reparaîtra, ce sera pour être livré, lui et ses armées, à une destruction complète, après avoir suscité contre lui-même la confédération de l’empire romain et de ses dix rois et avoir servi de verge contre le peuple de l’Antichrist (*). Pour comprendre son rôle dans la prophétie, il faut se souvenir de cette réapparition. L’Assyrien historique n’est qu’une faible image de ce que sera l’Assyrien prophétique, mais ils ont tous deux le même caractère. Leurs principes ne leur sont du reste pas exclusifs. Dans le conflit actuel des nations, certains peuples présentent les mêmes traits caractéristiques : l’orgueil et l’ambition sans limite, la haine, la barbarie, le règne de la terreur, les exécutions sommaires, les cruautés, la déportation en masse de populations inoffensives. Seulement, n’oublions pas que ce qui anime l’Assyrien historique aussi bien que prophétique, c’est la haine contre l’ancien peuple de Dieu. Il en est ainsi, déjà aujourd’hui, quant à la manière dont la Russie, noyau de la future confédération assyrienne, traite les Juifs dispersés au milieu d’elle. À l’égard des chrétiens, il en est de même de la Turquie qui possède une grande partie du territoire de l’ancienne Assyrie. Les épouvantables massacres des Arméniens ne le proclament que trop.

(*) Comme royaume soumis à la domination du Christ, l’Assyrie sera restaurée (Ésaïe 19: 23-25).

Il nous reste encore à dire quelques mots du Résidu, l’un des sujets qui remplissent le livre de Michée et sans l’intelligence duquel les événements prophétiques resteraient une énigme indéchiffrable. Il est impossible d’exagérer le rôle immense du Résidu dans l’avenir prophétique. Le lecteur nous dispensera de le lui prouver par des citations, car tous les prophètes, tous les Psaumes et une bonne partie des entretiens du Seigneur avec ses disciples (parmi lesquels le sermon sur la montagne et la prophétie de Matt. 24), en font foi.

C’est du Résidu que se compose en entier le futur Israël dont il est dit : « Tout Israël sera sauvé » (Rom. 11: 26).

Le Résidu sera formé des croyants de Juda et de ceux des dix tribus.

Le Résidu de Juda est tout particulièrement en vue dans les prophètes et dans les Psaumes, car cette partie du peuple d’Israël a été seule coupable du meurtre de son Messie, et devra porter, dans la grande tribulation le poids de la colère de Dieu dans le gouvernement de son ancien peuple. La détresse que ces croyants devront traverser produira chez eux une repentance complète, et ils regarderont, pour être délivrés, vers « Celui qu’ils ont percé » (Zach. 12: 10).

Le Résidu de Juda commencera à se former lors de la rentrée en Palestine du peuple juif incrédule, et refusera de se soumettre à l’Antichrist que ce peuple acclamera comme son Roi. Son activité commencera à Jérusalem. Il sera composé d’abord des « sages du peuple qui enseigneront la multitude » (Dan. 11: 33, 35; 12: 3, 10). Ces sages auront le même caractère que les disciples qui, avant l’ère de l’Église, entouraient Jésus ici-bas. Ils seront intègres et justes selon la loi (voyez Ps. 119), mais reconnaîtront en même temps leur Messie en Jésus autrefois crucifié, le péché de leur peuple contre lui, leur culpabilité à eux, comme faisant partie de ce peuple, enfin la justice des voies de Dieu à leur égard, dans la « détresse » qu’ils auront à traverser. Ils regarderont à l’Éternel seul, s’en remettant à Lui pour l’heure de la délivrance.

Ce réveil de conscience est accompagné de la prédication de l’Évangile du royaume dans toutes les villes d’Israël, par les fidèles du Résidu. Ils continuent ainsi la mission des soixante-dix (Luc 10: 1) ; et cette prédication ne prendra fin que lors de l’apparition du Fils de l’homme (Matt. 10: 23).

L’Antichrist, que leur témoignage gêne et irrite au suprême degré, les persécutera au moment où il remplacera le culte de l’Éternel, d’abord octroyé au peuple, par l’idolâtrie établie dans le temple de Jérusalem. Ils s’enfuiront selon l’ordre du Sauveur (Matt. 24: 16-21), et seront mis providentiellement à l’abri parmi les nations qui leur viendront en aide (Apoc. 12: 15, 16). Ils seront parmi elles, comme ils l’ont été pour les villes d’Israël, les évangélistes du Royaume et les instruments de la conversion d’une immense multitude. Plusieurs d’entre eux, restés à Jérusalem, y subiront le martyre.

Le Résidu fugitif rentrera en Palestine pour assister à la défaite de ses ennemis, pour voir l’apparition glorieuse de son Roi et de son Sauveur, et prendre part à son triomphe. Il sera le témoin de la destruction de la Bête romaine, de l’Antichrist, de l’Assyrien et d’Édom, enfin de l’anéantissement du peuple apostat, de « la vengeance » dont il est parlé dans les prophètes.

Les fidèles formeront avec le Résidu croyant des dix tribus, rentré après eux en Palestine, le peuple d’Israël dans le royaume millénaire. La nouvelle alliance sera conclue avec eux, la loi sera écrite dans leurs coeurs ; ils observeront les cérémonies et les fêtes, liées au nouveau temple de l’Éternel ; un prince de la maison de David, vice-roi du Messie glorieux, sera établi sur eux. Toutes les nations seront groupées autour de Jésus, Éternel et Roi, et de son peuple, centre visible des bénédictions de cet âge futur.

Ce court exposé, bien incomplet pour un sujet aussi vaste, suffira, nous l’espérons, pour faire comprendre la place immense du Résidu dans les événements de la fin, dans la reconstitution d’Israël, et dans l’établissement du royaume universel de Christ.

* * *

En terminant nous désirons expliquer pourquoi nous avons adopté, dans cette étude, le procédé de la paraphrase, forme souvent monotone pour le lecteur, et à laquelle, pour d’autres motifs, l’étude du prophète Osée nous avait contraints. La grande variété des interlocuteurs nous imposait cette forme. Tantôt, et souvent dans le même verset, nous entendons parler l’Éternel, seul ou par la bouche de son prophète ; tantôt le prophète parle pour lui-même. Constamment le Résidu prend la parole et répond à l’Éternel ou à son prophète ; parfois nous entendons parler l’ensemble du peuple, parfois encore les prophètes infidèles. Si l’on ne distingue pas ces divers interlocuteurs, le texte, d’ordinaire clair et limpide, paraît souvent obscur dans les passages les plus importants. Nous noterons ces alternances à mesure qu’elles se présenteront ; il suffirait, pour en démontrer l’importance, de citer tout le commencement du chapitre 5.

2 - CHAPITRES 1 et 2 : Jugement du peuple par l’Assyrien historique. État moral et restauration finale d’Israël

2.1 - Chapitre 1 : Jugement de Samarie et de Juda par l’Assyrien

Ce chapitre est un chapitre historique qui nous décrit à grands traits le péché de Samarie. L’attaque de l’Assyrien Sankhérib en est la conséquence. Cette invasion s’étend jusqu’aux portes de Jérusalem où elle est arrêtée par l’intervention divine, en réponse à la foi d’Ézéchias.

« La parole de l’Éternel qui vint à Michée, le Morashtite, aux jours de Jotham, d’Achaz, d’Ézéchias, rois de Juda, laquelle il vit au sujet de Samarie et de Jérusalem » (v. 1).

Le prophète Michée avait laissé un vivant souvenir à Jérusalem, car ses paroles revinrent en mémoire lorsque Jérémie prophétisa contre cette ville, près d’un siècle après Michée, au commencement du règne de Jéhoïakim, vingt ans environ avant la prise de Jérusalem et la destruction du temple (Jér. 26: 18). Les sacrificateurs et les prophètes — car c’est toujours de la classe sacerdotale que part la persécution des vrais serviteurs de Dieu — ces hommes s’étaient saisis de Jérémie et voulaient le mettre à mort, mais Dieu veillait sur son prophète. Les princes, le peuple même, soulevé d’abord contre Jérémie, prirent sa défense et dirent : « Cet homme ne mérite pas la mort, car il nous a parlé au nom de l’Éternel, notre Dieu. » Alors quelques anciens du pays prirent son parti, disant : « Michée, le Morashtite, prophétisait dans les jours d’Ézéchias, roi de Juda, et a parlé à tout le peuple de Juda, disant : Ainsi dit l’Éternel des armées : Sion sera labourée comme un champ, et Jérusalem sera des monceaux de pierres, et la montagne de la maison, les lieux hauts d’une forêt (Michée 3: 12). Ézéchias, le roi de Juda, avec tout Juda, le fit-il donc mourir ? Ne craignit-il pas l’Éternel, et n’implora-t-il pas l’Éternel, de sorte que l’Éternel se repentit du mal qu’il avait prononcé contre eux ? Et nous ferions un grand mal contre nos âmes » (v. 18, 19). Ce fut ainsi, grâce à la parole du prophète Michée, reçue par le pieux Ézéchias, que l’Éternel sauva le prophète Jérémie. Le souvenir de Michée était donc encore vivant à Jérusalem, plus d’un siècle après lui. Condamner Jérémie, c’était condamner Ézéchias, le roi le plus fidèle dans la série des rois de Juda ; qui aurait donc osé s’inscrire en faux contre la décision qu’il avait prise ? L’authenticité du livre de Michée nous est ainsi affirmée.

On voit encore par ce passage qu’une partie importante de la prophétie de Michée, appartenant à trois règnes, fut prononcée sous celui d’Ézéchias. Jotham était un roi selon le coeur de Dieu, mais les caractères d’Achaz et d’Ézéchias jouent le rôle prépondérant dans le livre que nous étudions. Le premier, Achaz, nous présente la dégradation et la ruine de Juda. Sous ce règne, tout est corruption, transgression, abandon de l’Éternel. Achaz, sectateur du culte abominable de Moloch, fait passer son fils par le feu (2 Rois 16: 3). Il refuse l’aide miséricordieuse que Dieu lui offre, par le ministère d’Ésaïe (Ésaïe 7: 10-13), contre Retsin, roi de Syrie, et Pékakh, roi d’Israël, prétextant ne pas vouloir « tenter l’Éternel », alors qu’il a décidé de faire appel au roi d’Assyrie, dans lequel il a plus de confiance qu’en Dieu. Il dépouille le temple pour envoyer un présent à cet allié, met de côté l’autel d’airain et la cuve pour adopter le culte idolâtre de Damas, méprise le type de l’expiation et de la sacrificature de Christ, pour établir un autel païen, se soumet en un mot au joug et à l’influence de Tiglath-Piléser, l’Assyrien. Ézéchias, au contraire, donne le signal d’une vraie réforme à Jérusalem. Il secoue la domination de Sankhérib, l’Assyrien, lui résiste au nom de l’Éternel et devient l’instrument de la délivrance de Jérusalem (Ésaïe 36-39). L’un est l’image de l’apostasie affreuse du peuple juif aux temps de la fin, l’autre celle du Résidu fidèle dont il exprime si admirablement les sentiments dans son cantique (Ésaïe 38), et qui tient tête à l’Ennemi par la simple confiance en l’Éternel quand tout semble perdu. On pourrait dire de ces trois rois, que le premier, Jotham, représente les bénédictions passées d’Israël, que le second est l’image de son apostasie future, et le troisième celle de sa restauration finale. On voit déjà, par l’histoire des deux derniers rois, quel sera l’ennemi présenté par Michée, cet Assyrien sur le rôle futur duquel notre Préface s’est expliquée.

Ces trois rois résument donc en figure tout le contenu du livre de Michée, seulement les jugements dont il parle tombent sur Juda et Israël, car les dix tribus y sont comprises. Aussi le premier verset nous dit-il que Michée vit cette parole « au sujet de Samarie et de Jérusalem ». Ce jugement eut lieu historiquement par l’Assyrien sur les dix tribus et leur capitale, ainsi que sur le territoire de Juda dont la capitale fut épargnée, mais, aux derniers jours, Jérusalem ne le sera pas plus que Samarie. En effet, si l’Assyrien historique ne réussit pas à dévaster Jérusalem, elle le sera une première fois sous l’Assyrien prophétique (Zach. 14: 2; Ps. 83), puis, lors de la dernière invasion, elle sera protégée par l’apparition du Seigneur. Comme au temps d’Ézéchias, toute la puissance de ce formidable ennemi viendra échouer devant les murailles de Jérusalem. Il y a donc analogie frappante entre la prophétie de Michée et l’époque où elle fut donnée. Cette analogie ne ressort pas avec le même relief en Ésaïe dont le sujet est beaucoup plus vaste que celui de Michée, son contemporain. En effet, Ésaïe embrasse le champ tout entier de la prophétie et aucune de ses parties ne lui est étrangère. Cependant, comme en Michée, l’Assyrien de la fin y joue le rôle prépondérant. Michée se concentre beaucoup plus et sa courte prophétie est d’une grande utilité pour nous faire envisager en elles-mêmes, plutôt que dans leur relation avec l’ensemble, certaines parties restreintes du vaste champ prophétique.

S’il est ici nettement spécifié que Michée prophétise « au sujet de Samarie et de Jérusalem », notons toutefois que Samarie et les dix tribus occupent une place moins importante dans ce livre que Jérusalem, dont le péché et la délivrance sont placés au premier rang.

* *

« Écoutez, vous, tous les peuples ; sois attentive, terre, et tout ce qui est en toi ; et que le Seigneur, l’Éternel, soit témoin contre vous, le Seigneur, du palais de sa sainteté ! Car voici, l’Éternel sort de son lieu, et descendra, et marchera sur les lieux hauts de la terre ; et les montagnes se fondront sous lui, et les vallées s’entrouvriront, comme la cire devant le feu, comme des eaux versées sur une pente » (v. 2-4). Ces versets montrent que si le jugement est le résultat de l’indignation de l’Éternel contre son peuple, et s’il emploie les nations comme verge de sa colère, contre Israël, elles subiront aussi le jugement à leur tour. Tous les peuples sont appelés à écouter, toute la terre et ce qui est en elle doit être attentive. Le Seigneur est témoin contre toutes les nations, son témoignage part du palais de sa sainteté, du temple où il a fait habiter son nom et que son trône n’a pas encore abandonné, comme dans le prophète Ézéchiel. Le v. 2 de notre chapitre rappelle le commencement d’Ésaïe (1: 2) ; seulement, dans ce dernier, l’auditoire est beaucoup plus étendu. Les cieux et la terre y sont pris à témoin, parce qu’il s’agit là de l’iniquité d’Israël, d’un peuple privilégié entre tous, auquel Dieu s’était révélé et qu’il appelait son peuple. Aussi ne lui est-il laissé qu’un « bien petit Résidu ». La grandeur du privilège appelle la grandeur du jugement. En Michée, Dieu fait pressentir qu’il jugera et son peuple et les nations, bien qu’à la base de ce jugement se trouve la transgression de Jacob. Il explique tout d’abord la nécessité de ce châtiment que j’appelle historique, sur son peuple. De là vient dans ce passage la mention du temple. Au v. 3 le jugement prend des proportions beaucoup plus étendues. En Ésaïe, le ciel était témoin contre Israël ; ici, le ciel s’ouvre pour en laisser descendre le Juge suprême. Jugement terrible ! Les montagnes, toutes les puissances établies en la terre, s’abaissent et se fondent devant Lui. Le jugement de Dieu n’est pas seulement le résultat de ses voies en gouvernement ; mais l’image employée ici décrit un jugement futur, universel, dont ne seront exempts ni le peuple juif, ni les nations, ni les habitants de la terre. Cependant, chose rassurante, si l’Éternel « marche sur les lieux hauts de la terre », non seulement son peuple céleste, mais le Résidu croyant d’Israël sera épargné et pourra dire : « L’Éternel, le Seigneur, est ma force ; il rendra mes pieds pareils à ceux des biches, et il me fera marcher sur mes lieux élevés » (Hab. 3: 19). Dès le début des jugements, les élus de l’Éternel auront le privilège de marcher avec Lui. Il ne faudra pour cela que la foi, cette simple foi qui aurait fait marcher Pierre sur les eaux si, au lieu de regarder les vagues, il avait fixé les yeux sur Jésus seul.

« Tout cela à cause de la transgression de Jacob et à cause des péchés de la maison d’Israël » (v. 5). Que la colère de l’Éternel ait pour point de départ le péché de son peuple et qu’il le juge par le moyen des nations, à leur tour ces dernières attirent, comme nous l’avons vu, Sa colère par la manière dont elles exécutent ses jugements.

« De qui est la transgression de Jacob ? N’est-ce pas de Samarie ? Et de qui les hauts lieux de Juda ? N’est-ce pas de Jérusalem ? » (v. 5).

Jacob me semble être ici, comme ailleurs, l’ensemble de la nation ayant Juda pour chef ; sa transgression a commencé à Samarie, capitale de la maison d’Israël, c’est-à-dire des dix tribus, où l’idolâtrie fut premièrement introduite. Alors même qu’elle commença là, après la division du royaume, sous Jéroboam, fils de Nebath, Dieu rend responsable de ce péché l’ensemble du peuple, car, s’il fait des distinctions quant au jugement des royaumes d’Israël et de Juda, ils ne peuvent pas, à ses yeux, dégager leur responsabilité l’un de l’autre. N’en est-il pas de même aujourd’hui ? Tout le peuple de Dieu est solidaire du péché et de la ruine de l’Église. Aucune de ses parties ne pourra se séparer de l’autre et échapper au jugement en prétendant n’être pas responsable de ce qui est arrivé, ou en croyant pouvoir rebâtir ce que tous ont ruiné. Cependant, au milieu des ruines, il reste, comme témoignage, un Résidu humilié qui gémit et soupire (Ézéch. 9: 4), et c’est sur lui, comme Michée et tous les prophètes nous l’enseignent, que les yeux de Dieu reposent.

Quant aux « hauts lieux de Juda », Jérusalem seule est responsable. La ville privilégiée, siège du gouvernement de Dieu, où il avait son temple et son trône, était particulièrement coupable et ne pouvait rejeter la faute de son idolâtrie sur les dix tribus qui ne jouissaient pas des mêmes bénédictions. L’Éternel commence par Samarie, car son jugement est à la porte et, dès lors, Michée en parlera beaucoup moins au cours de sa prophétie, qui roulera désormais presque exclusivement sur l’iniquité de Jérusalem.

« Et je ferai de Samarie un monceau dans les champs, des plantations de vigne ; et je ferai rouler ses pierres dans la vallée, et je découvrirai ses fondements. Et toutes ses images taillées seront mises en pièces ; et tous ses présents de prostitution seront brûlés au feu ; et je mettrai en désolation toutes ses idoles ; car c’est avec un présent de prostituée qu’elle les a rassemblées, et elles redeviendront un présent de prostituée » (v. 6, 7). Plus tard (3: 12), le même sort atteindra Jérusalem, dans le passage, cité en Jér. 26: 18, par les défenseurs du prophète. Le jugement prochain de Samarie avait déjà été annoncé en peu de mots par le prophète Amos (3: 11), avec cette différence toutefois qu’il attribue ce jugement à la violence, à l’oppression et à la rapine des nobles, tandis que Michée ne mentionne d’abord que l’idolâtrie (v. 8-16). Dans les premiers versets de notre chapitre, le prophète était la voix de l’Éternel aux hommes ; dans ce passage il est la voix du peuple : « il hurle, se lamente, se frappe la poitrine, et pousse des cris de deuil ». La nation ne sent pas la douleur, le fidèle la sent pour elle. N’en est-il pas toujours ainsi ? Dans les circonstances qui agitent aujourd’hui les peuples, lesquels d’entre eux se rendent compte que « la plaie est incurable », que Dieu doit juger, qu’il juge, que tout ce qui leur arrive n’est que le fruit de leurs iniquités ? Nous, chrétiens, comme Michée, nous sommes appelés à le sentir. Si nous avons à pleurer sur nous-mêmes et si nous sommes conduits à une repentance salutaire, nous sentons aussi que le mal moral du monde est bien près d’atteindre son apogée et que les jugements de Dieu sont justes. Il se pourrait que Dieu, dans sa longue patience, retirât sa main pour un moment, mais la plaie est incurable et les événements actuels ne sont que le prélude d’événements futurs, plus terribles encore.

« Car sa plaie est incurable ; car elle est venue jusqu’à Juda, elle atteint jusqu’à la porte de mon peuple, jusqu’à Jérusalem » (v. 9). La plaie s’arrête à la porte. C’est ce qui arriva historiquement sous Ézéchias (Ésaïe 36-38). L’invasion de Sankhérib, décrite ici, dans les versets 10-16, est la même que celle dont parle Ésaïe 10: 24-34, mais en diffère sensiblement, en ce qu’Ésaïe énumère les relais successifs de l’invasion directe de l’Assyrien pour s’emparer de Jérusalem, et Michée les causes du jugement qui atteint les diverses cités de Juda dans le cours de l’invasion. Cette comparaison entre Ésaïe et Michée 1 nous amène à la conclusion suivante : La grande attaque de Sankhérib contre Jérusalem (Ésaïe 10) eut lieu par le territoire de Benjamin. L’ennemi victorieux s’empara de toutes les villes et villages de cette tribu et arriva enfin à Nob, ville sacerdotale, ancien théâtre du massacre des sacrificateurs par Saül, dernière étape d’où l’on avait la vue sur Jérusalem. Il entreprit le siège de cette cité, mais l’Éternel y était et secourut Ézéchias, dont la foi comptait sur son intervention.

De là, l’ennemi, tenant toujours Jérusalem assiégée, s’étendit dans tout le pays plat de Juda, à l’occident de Jérusalem (*), dans cette plaine de Séphéla qui confine à la Philistie et à la mer Méditerranée, et dont les villes principales Gath, Lakis, Marésha, Adullam, avaient été jadis fortifiées par Roboam contre les incursions des Philistins (2 Chron. 11: 9). Tandis que le siège de Jérusalem se poursuit, Sankhérib investit Lakis. Il paraît douteux qu’il s’en soit emparé (2 Chron. 32: 1 ; 2 Rois 18: 13, 14 ; 19: 8) ; il assiège ensuite Libna. C’est de là qu’il envoie, pour la seconde fois, ses menaces à Ézéchias. C’est là aussi qu’il apprend l’expédition dirigée contre lui par Tirhaka, roi d’Éthiopie, alors Pharaon d’Égypte (2 Rois 19: 8, 9). Son armée est frappée par l’Éternel ; il lève le siège de Jérusalem et retourne à Ninive où il est assassiné par ses fils (2 Rois 19: 35-37).

(*) À moins que ce ne fussent deux attaques simultanées : l’une par le nord, l’autre par l’ouest de Jérusalem.

Plus tard Nébucadnetsar s’empara d’abord de Lakis et d’Azeka « qui restaient encore » (Jér. 34: 7), et enfin de Jérusalem, sous le roi Sédécias, infidèle au serment qu’il avait prêté.

Au retour de la captivité, les hommes de Benjamin réoccupèrent une partie de leurs villes, prises jadis par l’Assyrien, lors de l’attaque de Jérusalem par le nord (Aiath, Micmash, Guéba, Rama, Anatoth, Nob) (Néh. 11: 31-36), tandis que les hommes de Juda réoccupèrent Lakis et Adullam (Néh. 11: 30).

Telle est l’histoire succincte de l’invasion assyrienne, soit du territoire de Benjamin, soit de celui de Juda. Michée ne rapporte que l’invasion de Juda. Beaucoup de villes citées dans notre passage n’ont pu être identifiées, mais les recherches amènent à la conclusion qu’elles sont toutes situées dans la région occidentale de Juda, dans le pays plat de cette tribu. Quelques-unes, comme Gath, occupaient la lisière montagneuse de ce territoire.

Ces détails nous ramènent aux v. 8 à 16 de notre chapitre :

Au v. 8, les mots « à cause de cela » indiquent le deuil du prophète sur la ruine de Samarie. Cette plaie incurable a débordé sur Juda et est venue jusqu’à Jérusalem. « Ne le racontez pas dans Gath, ne versez point de pleurs » (v. 10). Ces mots : « Ne le racontez pas dans Gath » étaient, je n’en doute pas, passés en proverbe depuis le « Chant de l’Arc », complainte de David sur Jonathan (2 Sam. 1: 20). C’était dire à Samarie : Ne découvrez pas votre défaite, ni surtout celle d’Osée, votre roi, aux Philistins qui vous haïssent. Ce proverbe rapproche donc la chute de Saül et la victoire que les Philistins remportèrent sur lui, de la chute de la royauté en Israël. Gath, dont les recherches des explorateurs n’ont pu établir la situation, était l’une des cinq villes principales des Philistins (Josué 13: 3; 1 Sam. 6: 17), s’élevant, comme nous l’avons dit, à la limite de la contrée montagneuse de Juda. Elle était une menace continuelle pour Jérusalem (2 Rois 12: 17). Renommée dans l’histoire de David (1 Sam. 17: 4; 21: 10; 27: 3), elle avait été prise par ce roi avec les villes de son ressort (1 Chron. 18: 1). Plus tard, Ozias avait abattu sa muraille, ainsi que celle de Jabné et d’Asdod (2 Chron. 26: 6), villes fortifiées et danger perpétuel pour Juda ; il avait en outre bâti des villes sur le territoire des Philistins. Il semblerait cependant, d’après Amos 6: 2, que, depuis Ozias, Gath avait été reconquise par l’ennemi. Tout au début de son règne, Ézéchias, après avoir secoué le joug du roi d’Assyrie, frappa les Philistins jusqu’à Gaza, sans toutefois qu’il soit fait mention de Gath (2 Rois 18: 7, 8). La quatrième année de son règne et la neuvième d’Osée, roi d’Israël, Shalmanéser assiégea Samarie, la prit, et mit fin au royaume d’Israël. Michée avait annoncé la ruine de Samarie quand déjà la défaite des Philistins par Ézéchias était près de s’accomplir, aussi quelle joie haineuse et triomphante ce peuple ne devait-il pas éprouver, lui qui venait d’être battu et humilié par Juda, en apprenant la défaite d’Israël et de son roi, qui leur rappelait leur victoire d’autrefois. Il ne fallait pas « verser de pleurs devant eux » (*).

(*) Et non, comme le voudrait une traduction insoutenable, « pleurer dans Acco ».

Cette prophétie de Michée, au sujet de faits historiques très prochains, confirme la pensée, émise plus d’une fois au cours de ces études, que dans les prophètes les événements historiques sont ordinairement l’image et les avant-coureurs de ceux qui auront lieu dans les derniers jours. Ce sera dans la région de Juda, dont ce passage nous parle, que l’Assyrien de la fin trouvera sa rétribution (Ézéch. 39: 11; Dan. 11: 45). Seulement, au lieu de se retirer, comme fit Sankhérib devant l’attaque du Pharaon, il investira l’Égypte et ne subira son sort qu’au retour de cette expédition.

Dans ces versets les jeux de mots au sujet du nom des villes me paraissent indiquer que leurs habitants attribuaient, comme on l’a fait de tout temps, une signification soit flatteuse, soit caractéristique, au nom de leur cité. Le prophète retourne ces jeux de mots contre eux en les appliquant à leur ruine (*). Voici ce que signifiaient aux yeux de Dieu les noms dont ils se glorifiaient. Beth-Leaphra (v. 10), la maison de poussière, se roulera dans la poussière. Shaphir, la belle, sera violée. Tsaanan « qui est sortie » n’a pu sortir, étant assiégée elle-même, pour secourir Beth-Haëtsel, « sa voisine », qui se lamente, car il (l’Assyrien) ôte à celle-ci l’abri sur lequel elle comptait.

(*) C’est ainsi que l’on dit dans notre pays au sujet de la ville de Grandson : « petite cloche, grand son ». Oui, dirait le prophète : Grand son de la calamité qui va fondre sur toi !

Il en est de même pour Maroth, « amertume », sur laquelle le mal descend par l’investissement de Jérusalem. Lakis doit se préparer à la fuite bien plus qu’à la résistance. C’est par elle qu’a commencé l’idolâtrie de Jérusalem et les transgressions des dix tribus ont été trouvées en elle. Ce fait n’est pas, que je sache, mentionné autre part. Il faudra, dit le prophète, que tu renonces à la possession de Moreshet-Gath (peut-être la ville d’origine de Michée) que tu t’étais fiancée. Les maisons d’Aczib, « mensonge », tromperont les rois d’Israël. Il est possible qu’il y eût là des résidences royales, des palais d’été. Un autre possesseur, l’Assyrien, héritera de Marésha, « possession ». Adullam, dont la caverne avait abrité David fugitif (1 Sam. 22: 1 ; 2 Sam. 23: 13 ; 1 Chron. 11: 15), deviendra le dernier refuge de la gloire d’Israël, c’est-à-dire de ses grands, de ses nobles, poursuivis par l’ennemi. « Rends-toi chauve et coupe tes cheveux », dit enfin le prophète à Israël, « pour les fils de tes délices », pour ces nobles qui faisaient ta joie et ta gloire ; « élargis ta tonsure comme le vautour », en signe du deuil abject et de la plus grande affliction (Job 1: 20; Ésaïe 15: 2), « car ils » (les fils des délices d’Israël) « sont allés en captivité loin de toi ».

Dans tout ce premier chapitre, le prophète est la bouche de l’Éternel ou parle personnellement. Comme nous l’avons noté précédemment, il n’en est pas toujours ainsi dans le cours de cette prophétie où nous entendons tour à tour l’Éternel, le Résidu, la nation, les faux prophètes, prendre la parole.

2.2 - Chapitre 2 : État moral du peuple. Restauration finale du vrai Israël

Le chap. 1 prophétisait ce qui allait arriver à Samarie et à Jérusalem, avec cette exception toutefois, que, pour le moment, la calamité n’atteindrait qu’aux portes de cette dernière. Le chap. 2 décrit l’état moral du peuple qui nécessite un jugement si sévère. Cet état moral est celui des deux royaumes. « Malheur à ceux qui méditent la vanité et qui préparent le mal sur leurs lits ! À la lumière du matin ils l’exécutent, parce que c’est au pouvoir de leur main. Et ils convoitent des champs et les ravissent, et des maisons, et ils s’en emparent ; et ils oppriment l’homme et sa maison, l’homme et son héritage » (v. 1, 2).

Comme en Amos, on trouve deux « malheur » dans Michée. Le premier inaugure notre chapitre ; nous trouvons le second au v. 1 du chap. 7. Le premier Malheur s’adresse à l’état moral du peuple, considéré ici sous un angle restreint. Il médite et exécute le mal quand il a le pouvoir de le faire ; il convoite la fortune du prochain et s’en empare ; il opprime les hommes paisibles, leur vole leurs biens et n’épargne pas les faibles et les petits.

Au chap. 7: 1, le prophète prononce un second Malheur sur lui-même. Ces « Malheur » constituent une des nombreuses analogies de Michée avec Ésaïe, sauf que ce dernier est toujours beaucoup plus explicite que notre prophète. Il prononce, au chap. 5, six « Malheur » correspondant au premier, et, au chap. 6, un septième correspondant au second de Michée.

Les « Malheur » en Ésaïe stigmatisent

1° L’égoïsme qui ne pense qu’à s’agrandir et à tout garder pour soi (5: 8) ;

2° La recherche du vin et des plaisirs du monde (v. 11, 12) ;

3° Ils signalent ceux qui font le mal sciemment, sans souci de Dieu et du jugement (v. 18, 19) ;

4° Qui appellent le mal bien et le bien mal (v. 20) ;

5° Qui ont une haute opinion d’eux-mêmes (v. 21) ;

6° Qui emploient leur énergie à se dégrader, à justifier le méchant qui leur est utile, à noircir le juste dont ils n’attendent rien.

Mais Ésaïe, comme notre prophète, prononce le septième « Malheur » sur lui-même, car on trouve chez Ésaïe à la fois une plénitude de malédiction et une plénitude de bénédiction (11: 2) qui n’appartiennent pas à Michée. Nous reviendrons sur ce dernier point au chap. 7.

« C’est pourquoi, ainsi dit l’Éternel : Voici, je médite contre cette famille un mal dont vous ne pourrez pas retirer vos cous ; et vous ne marcherez pas la tête haute, car c’est un temps mauvais » (V. 3).

S’ils « méditent la vanité et préparent le mal », l’Éternel aussi médite le mal contre eux, et il les atteindra à coup sûr. Combien les hommes, tout remplis des mauvais desseins de leurs coeurs, pensent peu à ce qu’un Dieu juste et saint leur prépare dans le silence ! Il sait attendre patiemment, mais quand la convoitise, ayant conçu, a enfanté le péché, et que celui-ci a été consommé, le jugement final arrive (Jacq. 1: 15). Amos, qui prophétisait sous Ozias et Jéroboam, assez longtemps avant Michée, avait montré le rôle du sage dans les temps calamiteux de la fin, dont la description, comme celle de Michée, a tant d’analogie avec les temps où nous vivons. Il avait dit : « C’est pourquoi, en ce temps-ci, le sage gardera le silence, car c’est un temps mauvais » (Amos 5: 13). Était-ce le cas d’élever la voix et de protester, quand Dieu lui-même méditait dans le silence ? Le sage devait conserver la même attitude que son Dieu et s’en remettre entièrement à lui, sans chercher à intervenir dans les affaires de ce monde. Michée nous montre maintenant quelle sera l’attitude du monde, quand il plaira à Dieu d’intervenir : « Vous ne pourrez pas retirer vos cous de dessous le joug, vous ne marcherez pas la tête haute, car c’est un temps mauvais ». Le fait est qu’alors, comme aujourd’hui, leur orgueil n’avait pas été abaissé devant toutes les calamités qui les atteignaient. Maintenant, le temps mauvais qu’ils avaient imposé à d’autres fond sur eux de la part de l’Éternel, et leur orgueil est écrasé sous le joug de l’esclavage.

« En ce jour-là, on vous prendra pour proverbe, et on se lamentera dans une douloureuse lamentation ; on dira : Nous sommes entièrement détruits ; il a changé la portion de mon peuple : comme il me l’a ôtée ! À celui qui se détourne de l’Éternel, il a partagé nos champs » (v. 4). Devant ce jugement ils passent en proverbe, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent. Il faudra qu’ils reconnaissent leur entière destruction. Tout cela est-il très différent de ce que nous voyons aujourd’hui ? On parle de ses droits acquis, de son peuple et de sa nation, quand on ravit les champs et les maisons des autres, attentats médités et préparés depuis longtemps dans le silence, alors que tous « passent en sécurité ». Mais le moment est arrivé où Dieu intervient. Une subite destruction vient sur eux. Ils sont obligés de s’écrier : Il a changé la portion de mon peuple ; eux qui avaient changé la portion des autres ! Même ce qu’ils détenaient comme possession légitime leur est ôté. Leurs bornes sont déplacées. Dieu donne leurs champs, non pas à de plus justes qu’eux, mais à celui qui se détourne de l’Éternel ! L’Assyrien, cet ennemi de Dieu, possède leur héritage. Quelle honte ! Quelle humiliation ! Dieu se sert contre eux de l’ennemi de Dieu lui-même, tandis qu’eux, s’appuyant sur leur prétention d’être le peuple de Dieu, se vantaient qu’Il les protégerait contre leurs ennemis. « Il a partagé nos champs », n’étaient-ce pas les champs de leurs frères (v. 2) dont, contre tout droit, ils s’étaient emparés ?

« C’est pourquoi tu n’auras personne qui étende le cordeau pour faire un lot dans la congrégation de l’Éternel » (v. 5). Maintenant le prophète s’adresse à eux. Il envisage un temps futur où la congrégation sera rassemblée, non pas le retour de la captivité, mais la restauration finale du peuple dont ils seront exclus. Ils n’y auront point de part. La sentence prononcée sur eux pour un avenir prochain, où les temps mauvais de la captivité vont peser comme un joug sur leurs cous, ne sera pas le dernier mot de leur jugement. Le prophète nous conduit jusqu’à l’exclusion future et définitive du peuple apostat de la fin, de tout ce qui ne sera pas le vrai Israël, constitué par le Résidu fidèle (Ps. 16: 6).

« Ne prophétisez point, prophétisent-ils » (v. 6). Ce passage, qui a beaucoup exercé les commentateurs, n’offre aucune difficulté si l’on distingue les interlocuteurs si fréquents dans Michée. « Les prophètes qui font errer le peuple » (3: 5) prennent ici la parole. Ils ordonnent aux vrais prophètes, leurs contemporains, Ésaïe et Michée, de ne pas prophétiser. Michée leur répond : « S’ils ne prophétisent pas à ceux-ci, l’ignominie ne s’éloignera pas » (v. 6). Quel est le but d’un vrai prophète ? C’est d’amener le peuple à la repentance en lui représentant l’ignominie de ses voies et les jugements qui en sont la conséquence. La prophétie a toujours un but de miséricorde car, en révélant le jugement, elle indique comment on peut y échapper, et par quel moyen Dieu amènera la délivrance. S’il n’y avait plus de prophètes de l’Éternel, il serait impossible que le jugement pût être évité, et c’est ce qui rend si infiniment coupable l’intervention de prophètes sans conscience, pour anéantir l’action des vrais. Si Dieu les laissait faire, ce seraient eux qui, en fin de compte, porteraient la responsabilité d’avoir rendu les arrêts de la justice irrévocables et l’état du peuple irrémédiable.

« Toi qui es appelée la maison de Jacob : L’Éternel est-il impatient ? Sont-ce là ses actes ? Mes paroles ne font-elles pas du bien à celui qui marche avec droiture ? Naguère encore mon peuple s’est levé comme un ennemi : vous enlevez le manteau avec la tunique à ceux qui passent en sécurité, qui se détournent de la guerre ; vous avez chassé les femmes de mon peuple des maisons de leurs délices ; de dessus leurs enfants, vous avez ôté ma magnificence pour toujours » (v. 7-9).

L’Éternel prend maintenant la parole pour les confondre, par la bouche de son propre prophète. La maison de Jacob, Israël tout entier représenté par Juda, peut-elle accuser Dieu de manquer de patience ? N’a-t-il pas averti Israël par tous ses prophètes, alors même que sa voix retentissait dans le désert ? Ne voulait-il pas amener son peuple à la repentance ? A-t-il frappé un seul coup prématurément et sans raison ? Sont-ce là ses actes ? N’a-t-il pas récompensé les hommes droits et montré une infinie patience envers les violents et les fourbes ? « Mon peuple » (Remarquez ce « mon ». À la veille du jugement définitif, l’Éternel se retient encore de prononcer Lo-Ammi) a joué le rôle d’ennemi envers des gens paisibles en tombant sur eux à l’improviste et en les dépouillant. Ceux qu’ils ont attaqués les avaient-ils provoqués ? Et les femmes sans défense chassées de leurs maisons ? Et les enfants, dépouillés pour toujours des biens que l’Éternel leur avait assurés ?

« Levez-vous et allez-vous-en ! Car ce n’est pas ici un lieu de repos, à cause de la souillure qui amène la ruine : la ruine est terrible ! » (v. 10). L’indignation de l’Éternel, longtemps contenue, se donne enfin carrière. Qu’ils se lèvent ! qu’ils partent ! Qu’ils s’en aillent loin de sa face ! Qu’ils soient errants loin de leur pays, d’un pays souillé qui ne peut plus être un lieu de repos et dont la ruine est imminente, une ruine terrible ! Voilà ce que la bouche de l’Éternel annonce par le vrai prophète. Le Seigneur a dit : Allez-vous-en ! et ne reviendra pas sur cette parole.

Mais qu’elle est sérieuse pour nous ! Le monde est un lieu souillé sur lequel le jugement est suspendu. Pourrions-nous y trouver du repos ? Nous qui cherchons la paix, qui nous détournons de la guerre, n’insistons pas sur nos droits. Laissons le monde nous ravir ce qui nous appartient. Nous avons un trésor, les paroles de l’Éternel, qui supplée à tout ce que le monde pourrait nous enlever ! Elles ont la puissance de nous garder et de nous introduire à la fin dans notre héritage (Actes 20: 32), et le monde n’y aura pas « son lot » (Col. 1: 12).

« S’il y a un homme qui marche selon le vent et le mensonge, qui mente, disant : Je te prophétiserai au sujet du vin et de la boisson forte ! il sera le prophète de ce peuple » (v. 11). Nous trouvons ici le contraste entre les prophètes prévaricateurs et le prophète de l’Éternel. Eux mentent, flattent les passions de ceux auxquels ils s’adressent, atténuent le mal quand il s’agit des convoitises des hommes, caressent leurs penchants au lieu de s’y opposer. N’est-ce pas, en tout temps, le résultat du ministère selon la chair auquel l’action de l’Esprit de Dieu est étrangère ?

« Je te rassemblerai certainement, Jacob, toi, tout entier ; je réunirai certainement le Résidu d’Israël ; je les mettrai ensemble comme le menu bétail de Botsra, comme un troupeau au milieu de son pâturage. Ils bruiront à cause de la multitude des hommes » (v. 12).

En contraste avec le v. 10, où l’Éternel chasse ignomigneusement de sa présence le peuple souillé, il s’adresse maintenant à Jacob tout entier, au Résidu d’Israël qui, dans l’avenir, formera le peuple nouveau de l’Éternel. Dieu a en vue ce peuple futur quand il dit : « Tout Israël sera sauvé ». Pensée précieuse aussi pour les fidèles au milieu des ruines actuelles de la Chrétienté ! Dieu a en vue un Résidu caché parmi ce qui a la vaine profession du nom de Christ. Ce Résidu, comme jadis celui d’Israël, à peine le reconnaît-on aujourd’hui, et cependant il existe. Quelques-uns, peut-être deux ou trois, se groupent autour du Seigneur, mais combien de brebis errantes qui ignorent ce rassemblement et soupirent dans cet isolement ! En un clin d’oeil le Seigneur, quand il viendra, les réunira en un immense troupeau céleste qui « bruira à cause de la multitude », comme il réunira le Résidu d’Israël pour son royaume terrestre millénaire. Si nos yeux sont éblouis devant la gloire terrestre d’Israël restauré, que devrait être pour nous la vision de la gloire céleste des rachetés, réunis autour du grand Pasteur des brebis, et célébrant ses louanges dont les échos se répercuteront à l’infini dans les espaces de la cité céleste ! Et de qui découleront ces bénédictions futures ? Le prophète nous le dit, de Christ seul :

« Celui qui fait la brèche est monté devant eux ; ils ont fait la brèche et ont passé par la porte, et sont sortis par elle, et leur roi est passé devant eux, et l’Éternel est à leur tête » (v. 13).

Il semble actuellement que le rassemblement de l’ancien peuple de Dieu soit aussi impossible que celui de l’Église. Attendons que l’Éternel, le roi d’Israël, se mette à leur tête. Il est Celui qui « fait la brèche », qui renverse tous les obstacles. De même aujourd’hui, malgré notre ardent désir de voir le rassemblement du peuple de Dieu, il nous est impossible de renverser les obstacles. Mais Lui rassemblera son peuple et se mettra à sa tête.

Dans le cas d’Israël il fait la brèche pour les faire sortir. Christ se mettra à la tête de ce pauvre Résidu opprimé, de ses brebis, passera devant elles, fera tomber tous les obstacles, tout l’effort de Satan pour les détruire et empêcher leur rassemblement, les conduira dehors, les séparera de ce peuple rebelle. Elles le suivront, « passeront par la porte » et sortiront par elle.

Ce passage devient clair quand on voit qu’il a pour sujet le Résidu décrit comme le menu bétail de Botsra, comme un troupeau au milieu de son pâturage. Au v. 13, le Saint Esprit nous montre de quelle manière et par quelle merveilleuse délivrance son peuple est amené à jouir de cette bénédiction. « Ils ont passé par la porte », dit le prophète. Cette porte est Christ, leur Berger et leur Roi. Tout le passage de Jean 10: 1-15 semble être un commentaire de ce verset de Michée. Le troupeau d’Israël (le Résidu) sera rassemblé ; le Seigneur se mettra à leur tête ; il sera reconnu par eux comme leur souverain pasteur et leur Roi, comme la seule porte de sortie du milieu d’un peuple apostat, comme la seule porte d’entrée dans les bénédictions millénaires. Il sera pour eux Celui qui fait la brèche, c’est-à-dire qui détruit les obstacles accumulés contre eux par Satan. Il leur communiquera la force nécessaire, le courage et la vertu pour remporter la victoire. On pourra alors dire d’eux : « Ils ont fait la brèche ».

Ce passage contient encore une parole remarquable : « Celui qui fait la brèche est monté devant eux ». La chose a déjà eu lieu pour l’Église. Toute la puissance de Satan a été réduite à néant par la résurrection de Christ qui a renversé l’obstacle et a fait la brèche. C’est aussi, en vertu de sa résurrection que rien, dans l’avenir, n’empêchera son peuple Israël de passer. Par le fait qu’il est monté devant eux, ils seront mis en pleine liberté, car ils sortiront sous la conduite du Berger, non pas pour être mis à l’abri, mais pour s’étendre, troupeau innombrable de l’Éternel, bruissant comme une ruche d’abeilles, et pour paître dans les pâturages de Canaan. « Leur roi est passé devant eux ». Il est celui qui est entré par la porte en accomplissant toute la volonté de Dieu (Jean 10: 2) et qui, de ce fait, a seul le droit d’être notre Sauveur, comme il sera le Sauveur d’Israël. Ce Roi, ce Sauveur, ce Berger, c’est l’Éternel lui-même : « L’Éternel est à leur tête ».

Que de pensées bénies dans ce verset qui, tout en s’appliquant si merveilleusement à la délivrance et au rassemblement futur du peuple de Dieu, s’applique à bien plus forte raison à notre délivrance actuelle. Jésus nous a fait sortir et nous conduit : il nous fait entrer en toute liberté dans la maison du Père ; nous y entrons pour jouir de la communion avec le Père et le Fils, et en sortons pour le servir. Il nous a donné la vie, bien plus qu’il ne l’a donnée ou ne la donnera jamais à ses brebis juives, car elle est appelée « la vie en abondance », la vie éternelle qui nous donne part et jouissance avec le Père et avec le Fils (Jean 10: 9, 10). Toutes ces choses appartiennent à notre bénédiction actuelle ; celle d’Israël, quelque merveilleuse qu’elle soit, dans les temps futurs millénaires, n’en approche pas. À bien plus forte raison lui sera-t-elle inférieure, quand le troupeau chrétien, l’Assemblée du bon Berger, aura été introduit dans la gloire, dans Sa propre gloire !

La première division de notre prophète s’arrête ici. Le Saint Esprit se complaît, après une vision de péché et de jugement, à considérer la Restauration future du Résidu tout entier, conduit par son Roi, le Messie, l’Éternel !

3 - CHAPITRES 3 à 4: 8 : La ruine actuelle et le dessein de Dieu quant au Royaume futur

3.1 - Chapitre 3 : Ruine morale de toutes les classes dirigeantes du peuple. Jugement des prophètes. Destruction de Jérusalem

« Et je dis : Écoutez, je vous prie, chefs de Jacob, et vous, princes de la maison d’Israël : N’est-ce pas à vous de connaître ce qui est juste ? Vous qui haïssez le bien et qui aimez le mal, qui arrachez leur peau de dessus eux, et leur chair de dessus leurs os, qui mangez la chair de mon peuple et ôtez leur peau de dessus eux, et qui brisez leurs os et les mettez en morceaux comme dans une chaudière, et comme de la chair au milieu d’une marmite » (v. 1-3).

Nous trouvons ici une de ces transitions, si fréquentes dans le prophète Michée, d’un interlocuteur à l’autre. Après que l’Éternel a parlé (2: 7-13), le prophète prend la parole, d’abord comme prophète (v. 1-4), puis comme étant la bouche de l’Éternel pour accuser les prophètes prévaricateurs.

Ces paroles s’adressent aux chefs et aux princes qui représentent l’ensemble du peuple, c’est-à-dire Juda et Israël. Ils haïssent le bien et aiment le mal, exactement le contraire d’une vraie repentance, comme il est dit en Ésaïe : « Ôtez de devant mes yeux le mal de vos actions ; cessez de mal faire, apprenez à bien faire ; recherchez le juste jugement ; rendez heureux l’opprimé » (1: 16, 17). Ces juges et ces nobles traitent le troupeau d’Israël, objet de tous les soins du bon Berger (Michée 2: 12, 13), comme leur proie. Ils arrachent la peau pour manger la chair, acte violent, suivi d’un plan plus réfléchi : « Ils ôtent leur peau de dessus eux », ayant trouvé le moyen de l’utiliser ; puis ils placent la chair et les os des brebis dans la chaudière pour les manger en détail et ne rien perdre de ce dont ils tirent profit, au détriment des brebis qu’ils oppriment.

« Alors ils crieront à l’Éternel, et il ne leur répondra pas, et il leur cachera sa face en ce temps-là, selon qu’ils ont agi méchamment » (v. 4).

Le jour de la rétribution arrivera ; ils crieront mais sans que Dieu réponde. Peut-il y avoir un jugement plus terrible ? Toujours le cri de l’âme vers l’Éternel a été entendu (Ps. 22: 5) ; un seul juste n’a pas reçu de réponse, et cela, pour que nous puissions être sauvés (v. 2), mais, quand le temps de la grâce sera terminé, ce seront les méchants qui n’auront point de réponse. Nous figurons-nous l’horreur d’une telle situation ? Le ciel vide ! En effet, il sera vide pour eux ; l’Éternel leur cachera sa face en ce jour-là. Il l’avait cachée à son Bien-aimé pour pouvoir nous sauver (Ps. 69: 17) ; il la cachera au Résidu fidèle, mais pour un moment, afin d’avoir « compassion de lui avec une bonté éternelle » (Ésaïe 54: 8) ; mais, aux méchants, il la cachera à toujours. De quels jours les mots : « En ce temps-là » nous parlent-ils ? Nous voyons, au chap. 4, qu’il s’agit des jours glorieux et bénis du règne de Christ.

« Ainsi dit l’Éternel, touchant les prophètes qui font errer mon peuple ; qui mordent avec leurs dents, et crient : Paix ! et si quelqu’un ne met rien dans leur bouche, ils préparent la guerre contre lui. C’est pourquoi vous aurez la nuit sans vision, et vous aurez les ténèbres sans divination, et le soleil se couchera sur les prophètes, et le jour s’obscurcira sur eux. Et les voyants seront honteux, et les devins seront confondus, et ils se couvriront tous la barbe, parce qu’il n’y a pas de réponse de Dieu » (v. 5-7).

Après les princes, les prophètes. C’est maintenant l’Éternel lui-même qui parle contre eux par la bouche de Michée. Remarquez que ce ne sont pas de faux prophètes, mais des prophètes qui emploient leur don pour induire le peuple en erreur. Comme des chiens, ils s’élèvent contre les prophètes de Dieu pour les mordre (voyez pour la figure Hab. 2: 7). Ceux-ci annoncent la guerre et les jugements, eux la paix, comme au temps de Jérémie. Ils endorment le peuple dans une confiance trompeuse. Ils seront honteux, parce que Dieu ne se servira point d’eux et ne leur confiera aucune révélation. Ils seront plongés dans les ténèbres et ne verront ni le jour de la visitation, ni le jour de la lumière, lorsque le soleil de justice se lèvera. Ils seront pour l’Éternel des lépreux selon Lév. 13: 45, ou mèneront deuil inutilement, selon Ézéch. 24: 17, car Dieu les aura abandonnés et rejetés. Ils n’auront aucune place parmi son peuple.

Ne peut-on pas dire les mêmes choses aujourd’hui ? L’ignorance des pensées de Dieu est un jugement sur ceux qui, ayant reçu un don de Dieu, s’en servent pour leur propre profit. Le don est stérile ; il ne s’y trouve ni puissance, ni édification. Ces hommes ignorent la sentence prononcée par Dieu sur l’homme ; les vérités les plus évidentes révélées par Dieu dans sa Parole leur sont cachées ; ils prophétisent de paix et de progrès quand déjà le jugement est suspendu sur les peuples et sur leur propre tête. Ils ne voient pas que « la fin des jours » (4: 1) n’arrivera qu’après leur propre jugement.

« Mais moi, je suis plein de puissance par l’Esprit de l’Éternel, et de jugement et de force, pour déclarer à Jacob sa transgression et à Israël son péché » (v. 8).

Ici le prophète prend la parole et parle de lui-même, en contraste avec ces mauvais serviteurs. Le vrai envoyé de Dieu est sous la conduite de l’Esprit de Dieu qui est un Esprit de puissance, de jugement (ou de conseil), et de force. Cela rappelle 2 Tim. 1: 7, seulement, si « l’Esprit d’amour » n’est pas mentionné ici, ce n’en est pas moins l’amour de Dieu qui annonce le jugement par ses prophètes, afin de ramener, si possible, le peuple à Lui. Cacher aux pécheurs leur état en leur criant : « paix » quand le courroux de Dieu se prépare, n’est jamais de l’amour. Le vrai prophète « déclare à Jacob sa transgression et à Israël son péché ».

La puissance de l’homme de Dieu est toujours accompagnée d’un sentiment profond de faiblesse. Jérémie disait : « Ah Seigneur, Éternel ! voici, je ne sais pas parler car je suis un enfant » (1: 6) ; mais le Seigneur lui dit : « Je te ferai être, à l’égard de ce peuple, une muraille d’airain bien forte ; ils combattront contre toi, mais ils ne prévaudront pas sur toi » (15: 20). Gédéon dit : « Je suis le plus petit dans la maison de mon père » ; l’Éternel répond : « Mois, je serai avec toi » ; « va avec cette force que tu as » (Juges 6: 14-16). Daniel dit : « Aucune force ne subsiste en moi » ; Dieu répond : « Ne crains pas… sois fort, oui, sois fort ! » (Dan. 10: 17-19). Paul dit : « Quand je suis faible, alors je suis fort » (2 Cor. 12: 10). Que ce soit pour prophétiser, pour remporter la victoire dans les combats, pour avoir l’intelligence des pensées de Dieu, pour annoncer l’Évangile, la force ne peut sortir que du sein de la faiblesse, profondément réalisée dans l’âme devant Dieu ; tandis que, partout où le croyant se confie en sa force et dit comme Samson : « Je m’en irai comme les autres fois », le Seigneur s’est déjà « retiré de lui » (Juges 16: 20).

« Écoutez ceci, je vous prie, chefs de la maison de Jacob, et vous, princes de la maison d’Israël, qui abhorrez le jugement et pervertissez toute droiture, bâtissant Sion avec du sang, et Jérusalem avec l’iniquité. Ses chefs jugent pour des présents, et ses sacrificateurs enseignent pour un salaire, et ses prophètes devinent pour de l’argent et s’appuient sur l’Éternel, disant : L’Éternel n’est-il pas au milieu de nous ? Il ne viendra point de mal sur nous ! » (v. 9-11).

Après avoir montré le caractère du prophète selon les pensées de Dieu, Michée reprend la parole pour accuser l’ensemble des chefs et des princes de Juda, ainsi que les dix tribus, et prend Jérusalem à partie, de même qu’il l’avait fait au commencement à l’égard de Samarie. Toutes les classes de conducteurs défilent devant lui : chefs, Princes, sacrificateurs et prophètes, le pouvoir civil et le pouvoir religieux selon l’homme. À la liste, précédemment énumérée, le prophète ajoute les sacrificateurs, en leur qualité de docteurs qui enseignent le peuple. L’argent joue partout le rôle principal, les intérêts matériels dominent. Peut-on, revêtu de telles dignités, les rabaisser ainsi ? Mais voit-on autre chose aujourd’hui ? Sans doute les circonstances diffèrent, les dignités ont changé de caractère, mais les principes qui dirigent les diverses classes des hommes, politiques ou religieuses, sont les mêmes, parce que l’égoïsme de l’homme déchu est à la base de tous les motifs de son coeur. Chose affreuse ! Tout cela se fait au nom de l’Éternel, et tous cherchent à se rassurer quand le mal les menace, en disant : « L’Éternel n’est-il pas au milieu de nous ? » Dans le désert le péché d’Israël consistait à mettre en doute si Dieu était réellement au milieu de son peuple. Il est dit d’eux « qu’ils avaient tenté l’Éternel, en disant : L’Éternel est-il au milieu de nous ou n’y est-il pas ? » (Ex. 17: 7). Ils doutaient de sa présence au moment où, les ayant rachetés d’Égypte, il manifestait ouvertement qu’il était leur Dieu. Ici nous trouvons précisément le contraire. Au moment où Dieu prononçait le « Malheur » sur eux et les abandonnait entre les mains de l’ennemi, n’épargnant plus que la seule ville de Jérusalem, et à la veille du jour où les solennels Lo-Ammi et Lo-Rukhama allaient retentir, ils osaient dire : « L’Éternel n’est-il pas au milieu de nous ? » Le péché peut varier suivant les temps. La défiance de Dieu, en un temps de grâce, est un grand péché. L’affirmation que l’on a Dieu avec soi et pour soi en un temps de jugement et de ruine est un péché plus grand encore. Aujourd’hui comme jadis, on entend dire ces choses ; et les plus coupables, souverains et princes, docteurs, pasteurs et prophètes qui conduisent les nations aux abîmes, sont ceux qui crient le plus haut : « L’Éternel n’est-il pas au milieu de nous ? » C’est là un effort positif de Satan pour égarer les hommes. Il voudrait leur persuader que le Seigneur peut être le protecteur et le soutien d’un état de choses parfaitement mauvais. Il cache ainsi le mal et le péché aux yeux de l’homme en lui faisant croire que Dieu peut s’y associer. Dieu est avec nous, crient-ils ; ils ne viendra pas de mal sur nous ! Et à la veille d’une défaite, on affirme encore la certitude de la victoire !

Remarquez que, plus la connaissance des pensées de Dieu, renfermées dans la loi, plus la proximité de l’Éternel, étaient grandes, plus la responsabilité était effrayante, et le jugement sévère. Que les nations, ne connaissant pas Dieu, marchassent « chacune au nom de son dieu » (4: 5), cela avait-il rien d’étonnant ? Mais que le peuple de Dieu, tombé dans la désobéissance et dans l’ingratitude la plus noire envers l’Éternel, osât, dans son état d’infidélité, s’appuyer sur Son nom pour se rassurer, c’était là le comble de l’iniquité.

En Ésaïe 51: 2 et en Ézéch. 33: 24 nous rencontrons le même contraste. Dans le premier de ces passages, Dieu dit : « Regardez à Abraham, votre père, et à Sara qui vous a enfantés ; car je l’ai appelé seul, et je l’ai béni, et je l’ai multiplié ». Ceux qui cherchent l’Éternel sont encouragés et exhortés ici à regarder à Abraham que Dieu a béni et multiplié, quand même il était tout seul. Si les fidèles sont en petit nombre, ils peuvent compter sur la même grâce pour les multiplier et faire d’eux un grand peuple, dans l’avenir. Le second passage (Ézéch. 33: 24) nous montre les quelques misérables qui étaient restés dans les lieux désolés de la Palestine pendant la captivité de Babylone, s’appuyant sur cette même parole qu’« Abraham était un seul et qu’il avait hérité du pays », pour proclamer qu’ils en hériteraient de même. Hériter du pays quand les transgressions, les idoles, la violence, une corruption honteuse, les caractérisaient ? Non, le jugement allait les atteindre eux-mêmes dans la terre qu’ils prétendaient occuper. On n’hérite que par la foi du pays de la promesse. Il en est de même de la chrétienté professante. Tout est ruiné ; elle le constate, mais au lieu de s’humilier de sa propre ruine, elle prétend hériter des bénédictions promises. Elle n’héritera que du jugement, tandis qu’au milieu de tout ce désordre un Résidu selon Dieu deviendra, par la foi, l’héritier des promesses.

« C’est pourquoi, à cause de vous, Sion sera labourée comme un champ, et Jérusalem sera des monceaux de pierres, et la montagne de la maison, les lieux hauts d’une forêt » (v. 12).

C’est à quoi aboutiront toutes ces vanteries. La preuve que l’Éternel n’est pas au milieu d’eux leur sera livrée. Le mal viendra sur eux. La montagne de Sion, où la grâce de Dieu avait établi la royauté, sera labourée comme un champ, la ville du grand Roi sera des monceaux de pierres ; le siège même et l’habitation de l’Éternel, le temple, dont Dieu s’est retiré, sera détruit.

Il en sera de même, au moral, de l’Église responsable et de tout ce qui se rattache à une profession sans vie. Elle sera vomie de la bouche du Seigneur, puis livrée à une complète destruction et même, quant à sa prospérité extérieure, devenue la grande Babylone, elle sera brûlée au feu et engloutie dans la mer.

Cet important passage de la prophétie de Michée contre Jérusalem fut invoqué, nous l’avons vu plus haut, par les anciens aux jours de Jérémie pour le sauver en montrant qu’Ézéchias avait accepté cet arrêt et n’en avait pas voulu au prophète. Ésaïe, de son côté, avait annoncé, dans le même temps, les mêmes choses que Michée. Il avait prédit la ruine totale de Jérusalem, y ajoutant la promesse d’une restauration future quand « l’Esprit serait répandu d’en haut sur le peuple » (Ésaïe 32: 12 -15). Nous allons voir ces mêmes promesses au chap 4 de Michée, dont les v. 1-8 se relient intimement au chap. 3.

3.2 - Chapitre 4: 1-8 : Restauration glorieuse de Jérusalem

« Et il arrivera, à la fin des jours, que la montagne de la maison de l’Éternel sera établie sur le sommet des montagnes, et sera élevée au-dessus des collines, et les peuples y afflueront » (v. 1).

Ce verset fait suite au dernier verset du chapitre précédent (3: 12) qui parle de la maison détruite. Nous voyons ici la maison reconstruite. Tout ce passage est, en outre, la contrepartie du chap. 3 dont il ne peut être séparé. Comme en tant d’autres passages nous y voyons que les voies du gouvernement de Dieu ne se terminent pas au jugement, mais aboutissent à un temps futur de restauration et de gloire. Alors enfin le gouvernement sera confié à des mains qui en seront dignes. Ce n’est pas la vengeance sur ses ennemis qui glorifie Christ et son oeuvre, mais c’est la réconciliation, le retour de toutes choses à Dieu. Cette réconciliation est basée sur le sang de la croix, comme nous le voyons en Col. 1: 20-22. N’oublions jamais, quand la prophétie déploie devant nous la scène glorieuse du règne futur de Christ sur la terre, que cette scène a la croix pour point de départ. C’est là qu’eut lieu le premier acte de la victoire de Christ sur Satan, et que celui qui avait le pouvoir de la mort a été rendu impuissant, sans être encore brisé. Il ne peut plus réussir dans ses desseins, mais cherche jusqu’au bout à arracher les élus des mains de Christ. Le second acte de la victoire de Christ sur lui sera de le précipiter, lui et ses anges, sur la terre quand l’Épouse de l’Agneau, l’Église glorieuse, sera introduite dans le ciel (Apoc 12: 7-9). Le troisième acte de cette victoire se produira quand, à la suite de la défaite des nations (Apoc. 19: 11-16), Satan, lié et enfermé dans l’abîme pour mille ans, sera dans l’impossibilité de séduire les hommes (Apoc. 20: 1-3). Alors sera inauguré le règne de justice de paix, conséquence des victoires successives remportées sur l’Adversaire. Enfin, dernier acte du triomphe de l’Agneau, Satan sera brisé sous nos pieds et jeté dans l’étang de feu et de soufre (Apoc. 20: 10).

Considérons maintenant la description merveilleuse de ces temps de bénédiction. À la fin du chap. 2, v. 12 et 13, le prophète avait annoncé le rassemblement futur du peuple de Dieu. Notre passage décrit le centre glorieux du gouvernement de ce peuple. Ce sera la montagne de Sion, où le Roi de grâce, le vrai David, sera établi ; puis Jérusalem, capitale du Roi de gloire, du vrai Salomon ; enfin le temple, la maison où l’Éternel fera habiter son nom à jamais et qui, établie sur sa montagne (« la montagne de la maison »), formera, comme nous le voyons en Ézéchiel (40 à 47), le centre d’une divine monarchie universelle où l’Éternel lui-même, Christ le Messie, régnera sur toute la terre. Israël sera le peuple le plus rapproché de ce centre terrestre, comme l’Église sera l’associée la plus intime du trône céleste.

« Et beaucoup de nations iront et diront : Venez, et montons à la montagne de l’Éternel, et à la maison du Dieu de Jacob, et il nous instruira de ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers. Car de Sion sortira la loi, et de Jérusalem, la parole de l’Éternel » (v. 2).

Toutes les nations afflueront à Jérusalem et seront de franche volonté pour se laisser instruire par le Dieu d’Israël et pour lui obéir docilement. Elles reconnaîtront sa loi et seront soumises à sa Parole. C’est de Jérusalem que cette Parole sortira pendant le millénium (Ésaïe 2: 3). Aujourd’hui l’Église en est la dépositaire, la colonne et l’appui, mais quand l’Assemblée aura été enlevée dans la gloire, la cité et le temple terrestres reprendront leur place et leurs privilèges ici-bas.

« Et il jugera au milieu de beaucoup de peuples, et prononcera le droit à de fortes nations jusqu’au loin ; et de leurs épées ils forgeront des socs, et de leurs lances, des serpes : une nation ne lèvera pas l’épée contre une autre nation, et on n’apprendra plus la guerre » (v. 3).

Ce sera le règne de la justice et du droit. Les hommes changeront leurs armes de guerre en instruments aratoires (Ésaïe 2: 4). Le dernier effort des nations, réunies avant l’établissement du royaume dans la vallée de Josaphat, poursuivra un but exactement opposé : « Qu’ils montent, tous les hommes de guerre ! De vos socs forgez des épées, et de vos serpes, des javelines » (Joël 3: 9, 10). Ils monteront pour faire la guerre au Christ et à ses saints, et Joël nous décrit leur jugement. Dans le temps où nous vivons, un soupir de la création tout entière monte incessamment, souhaitant le jour où « on n’apprendra plus la guerre » ! Le règne de paix sera aussi celui du repos et de la liberté introduite par la gloire des enfants de Dieu (Rom. 8: 19-22).

« Ils s’assiéront chacun sous sa vigne et sous son figuier, et il n’y aura personne qui les effraye : car la bouche de l’Éternel des armées a parlé » (v. 4). Le règne de Salomon était un faible avant-goût de celui-ci : « Juda et Israël habitaient alors en sécurité, chacun sous sa vigne et sous son figuier » (1 Rois 4: 25), mais quand « l’homme dont le nom est Germe… s’assiéra et dominera sur son trône », « chacun conviera son prochain sous la vigne et sous le figuier » (Zach. 6: 12, 13; 3: 8-10).

« Car tous les peuples marcheront, chacun au nom de son dieu ; et nous, nous marcherons au nom de l’Éternel, notre Dieu, à toujours et à perpétuité » (v. 5). Ici le Résidu reprend la parole. Comme le prophète avait annoncé que, sous l’instruction du Dieu de Jacob, les nations « marcheraient dans ses sentiers » (v. 2), le Résidu annonce que lui-même marchera à toujours et à perpétuité au nom de l’Éternel, son Dieu. Il ne se laissera pas distancer par les nations ; il mettra tout empressement à proclamer ce qu’est pour son peuple ce Dieu qui s’était jadis révélé à lui au milieu des nations idolâtres. Elles ne connaîtront Dieu que de fraîche date, mais Israël l’a connu dès que l’Éternel l’eut enfanté.

Ce verset 5 est une comparaison ; il ne signifie pas qu’en un temps futur les peuples marcheront chacun au nom de son dieu, car alors le nom de l’Éternel sera reconnu dans toute la terre (Ésaïe 2: 18-21; Soph. 3: 9) ; mais il indique que, comme les peuples marchent chacun invariablement au nom de son dieu, Israël aura dans l’avenir et pour toujours le nom de l’Éternel pour enseigne. Il en aura fini avec les dieux étrangers qui ont causé sa ruine, pour n’appartenir désormais qu’au seul Éternel, invariablement son Dieu.

Par la bouche du prophète, au v. 6, l’Éternel reprend son discours, interrompu par l’heureuse exclamation du Résidu fidèle qui, ayant rejeté pour toujours ses idoles (5: 12-15), est devenu le vrai peuple de Dieu. « En ce jour-là, dit l’Éternel, je rassemblerai celle qui boitait, et je recueillerai celle qui était chassée et celle sur laquelle j’avais fait venir du mal. Et je ferai de celle qui boitait, un reste, et de celle qui avait été repoussée au loin, une nation forte ; et l’Éternel régnera sur eux, en la montagne de Sion, dès lors et à toujours » (v. 6, 7).

« En ce jour-là. » Il parle de « la fin des jours » (4: 1), et y reviendra au chap. 5: 10. Ici (v. 6, 7) l’Éternel annonce, comme au chap. 2: 12, 13, le rassemblement futur du troupeau d’Israël, mais il n’est pas en marche vers le repos, ayant son roi à sa tête ; le repos est atteint, le règne est déclaré, le royaume établi : « L’Éternel régnera sur eux, en la montagne de Sion, dès lors et à toujours ». Deux interlocuteurs chantent à l’unisson et s’entre-répondent dans ces versets : d’un côté le Résidu, de l’autre le prophète qui est la bouche de l’Éternel, et leurs strophes triomphantes se terminent par cette merveilleuse parole : « À toujours ! »

Mais les gloires du royaume ne sont pas seules proclamées : la miséricorde et la tendresse, toutes les compassions du souverain Pasteur pour ses brebis boiteuses, repoussées, chassées, objets jadis d’un juste châtiment, sont maintenant découvertes. Si l’Éternel avait fait venir du mal sur ses brebis, était-ce qu’il y prît plaisir ? Le résultat final montre ce qu’il y avait dans son coeur à leur égard.

Quelle merveilleuse chose que ce tableau de la fin des jours ! (v. 1-8). L’ordre divin est établi sur la terre. Sion, Jérusalem, le temple, en sont le centre, la loi et la parole de l’Éternel, la règle. La paix est fermement fondée ; un repos délicieux est goûté sous la vigne et sous le figuier ; la nation nouvelle marche dans sa force au nom de l’Éternel seul, à toujours ; — Lui-même règne sur elle à toujours !

« Et toi, tour du troupeau, colline élevée de la fille de Sion, à toi arrivera et viendra la domination première, — le royaume, à la fille de Jérusalem » (v. 8). Désormais le troupeau de l’Éternel sera mis à l’abri au pied de la tour qui le protège. Cette « tour du troupeau », Migdal-Eder, est mentionnée comme située près de Béthel, en Gen. 35: 21; mais il n’est nul besoin d’en faire une localité particulière. C’est une image de Jérusalem, lieu de protection autour duquel se réunit le troupeau d’Israël (2 Chron, 26: 9, 10) ; lieu élevé qui domine le pays (Zach. 14: 10, 11). La « domination première », le royaume d’autrefois, celui du fils d’Isaï, reviendra à la fille de Jérusalem, au Résidu, faible et boiteux jadis, mais reconnu maintenant comme la nation forte, sous le sceptre du vrai David, auquel le royaume appartiendra ; mais son épouse juive partagera le règne avec Lui, tandis que la nouvelle Jérusalem, son épouse céleste, aura une part bien plus étendue qu’Israël, et sera associée à la fois au règne céleste et terrestre de son Époux.

4 - CHAPITRES 4:9 à ch. 5 : Babylone et l’Assyrien. Double jugement, actuel et futur, sur Jérusalem, et restauration finale du peuple

4.1 - Chapitre 4: 9-13 : Babylone et les nations

Après la description de la glorieuse bénédiction future (v. 6-8), le prophète, reprenant la parole, s’adresse à Jérusalem. Il montre ce qui a complètement entravé les conseils de grâce de Dieu envers son peuple, mais aussi que Dieu saura tirer Israël de cet état misérable pour le restaurer. Deux grands instruments de son jugement sont mentionnés ici, Babylone (chap. 4: 9-13) et l’Assyrien (chap. 5: 1-6). La ruine morale de la royauté (4: 9) et le rejet du Messie, sont les deux causes de ces fléaux déchaînés contre le peuple (5: 1). L’absence de roi et de conseiller caractérise la fin de l’histoire de Juda. C’est alors que Dieu prononce le Lo-Ammi, détourne sa face d’Israël, le rejette complètement, et confie le gouvernement à Babylone « tête d’or » du premier empire universel des Gentils. Le rejet du Messie caractérise la fraction de Juda, que Dieu avait fait remonter de la captivité pour attendre dans son pays la venue de son Roi. Comme conséquence de ce crime, Jérusalem est foulée aux pieds des nations ; cet état dure encore et n’a jamais cessé. Mais il arrivera un moment où l’Éternel reprendra ses relations avec le Résidu fidèle, qu’il appellera son peuple. C’est alors que le dernier ennemi, l’Assyrien, réapparaîtra pour être définitivement détruit.

Entrons dans quelques détails sur ce passage : « Maintenant, pourquoi pousses-tu des cris ? N’y a-t-il point de roi au milieu de toi ? Ton conseiller a-t-il péri ? car l’angoisse t’a saisie, comme une femme qui enfante. Sois dans l’angoisse et gémis, fille de Sion, comme une femme qui enfante ; car maintenant tu sortiras de la ville, et tu habiteras aux champs, et tu viendras jusqu’à Babylone ; là, tu seras délivrée ; là, l’Éternel te rachètera de la main de tes ennemis » (v. 9, 10). Le mot « maintenant » est à remarquer dans tout ce passage. Nous le trouvons aux v. 9, 10, 11 et au chap. 5:1, 4. Il a pour point de départ les événements actuels et se prolonge en apparence sans interruption et sans transition dans les événements futurs (comp. v. 9 avec v. 11, puis 5: 1 avec v. 4). Le prophète Michée, comme du reste presque toute la prophétie, voit dans les choses à venir une reproduction de choses passées qui n’en sont que les faibles avant-coureurs. La fille de Sion est dans l’angoisse et pousse des cris comme une femme qui enfante. Qu’enfantera-t-elle ? Que sortira-t-il de ses douleurs ? La royauté coupable va être détruite ; le peuple, chassé hors de la ville, habitera aux champs, sans défense, et viendra jusqu’à Babylone. Nous trouvons ici la captivité de Jérusalem et de Juda sous Nébucadnetsar à Babylone. Elle sera délivrée et rachetée de la main de ses ennemis. C’est l’annonce du retour des Juifs en Palestine, sous le règne de Cyrus.

Mais là ne se termine pas leur histoire. Le « maintenant » se continue dans un jour futur : « Et maintenant sont rassemblées contre toi beaucoup de nations qui disent : Qu’elle soit profanée, que notre oeil voie Sion ! » (v. 11). C’est de cette attaque que l’Éternel délivrera Jérusalem. Actuellement elle n’est pas délivrée et ne l’avait été que momentanément sous Ézéchias. Depuis Nébucadnetsar elle continue, encore aujourd’hui, à être foulée aux pieds par les nations. Dans un jour futur elle ne le sera plus ; tout au contraire, c’est elle qui les foulera aux pieds. « Elles ne connaissent pas les pensées de l’Éternel et ne comprennent pas son conseil ; car il les a amassées comme la gerbe sur l’aire. Lève-toi et foule, fille de Sion, car je ferai ta corne de fer, et je ferai tes sabots d’airain, et tu broieras beaucoup de peuples » (v. 12, 13).

Nous arrivons donc à une seconde phase de l’histoire de Jérusalem qui suit, non pas seulement sa prise par Babylone, mais sa délivrance et son rétablissement sous Cyrus. « Beaucoup de nations » sont maintenant rassemblées contre elle. La prophétie nous annonce continuellement cet événement futur (voyez, par exemple, Ésaïe 17: 12-14 ; Joël 3: 9-12 ; Abd. 15, 16 ; Zach. 12: 1-5; Ps, 83: 4-8). Au temps de la fin, toutes les nations se rassembleront contre Jérusalem pour la profaner, mais elles « ne comprennent pas le conseil de l’Éternel ». Jérusalem deviendra une coupe d’étourdissement pour toutes les nations qui monteront contre elle, ayant pour but de la détruire et qui seront elles-mêmes détruites (Zach. 12: 2, 9). Elles ne voient pas que Dieu, dans ses conseils, les voue à une ruine irrémédiable. « Il les a amassées comme la gerbe sur l’aire » (v. 12). La fille de Sion qui, par la grâce de Dieu, aura retrouvé ses relations avec Lui, vrai Israël dont l’Éternel « a fait un reste » (4: 7), Jérusalem se lèvera avec la force que son Dieu lui donnera pour fouler et broyer beaucoup de peuples, elle sera un cheval de bataille, ayant une corne de fer au front et dont les sabots sont d’airain. Nous avons vu dans Abdias que, d’un côté le peuple de Dieu, de l’autre, le Seigneur lui-même, prennent part à ce combat.

« Et je consacrerai leur butin à l’Éternel, et leurs biens au Seigneur de toute la terre » (v. 13).

Ici le Résidu reprend la parole, touchante communion de pensée et d’affection entre le peuple et son Dieu. Comme jadis sous Josué, ou comme plus tard, sous David, tout l’interdit sera consacré à l’Éternel qui a conduit son peuple à la victoire.


Le chap. 5 va nous parler de la seconde puissance qui prendra part au conflit de la fin, de cet Assyrien prophétique qui, nous l’avons vu, est l’ennemi principal dans le livre de Michée.

4.2 - Chapitre 5 : L’Assyrien et la victoire du Résidu d’Israël

A la fin du chap. 4, il est moins question du siège de Jérusalem elle-même que du combat porté hors de ses murs, par l’Éternel et son peuple, contre les nations assemblées, bien que Jérusalem reste le centre que vise tout leur effort. D’autres passages (Abdias, Ésaïe 63) nous apprennent que le choc final et la défaite des nations auront lieu en Édom.

Cependant un dernier ennemi surgit. Ce n’est pas l’empire universel confié aux nations, dont Babylone est la tête, puis anéanti, à la fin du chap. 4, dans sa dernière incarnation satanique, l’Empire romain ressuscité. Non, c’est l’Assyrien, l’ennemi du dernier jour, qui, comme nous l’avons dit, joue le rôle prépondérant dans Michée, soit comme Assyrien historique avant que l’Éternel abandonne son peuple, soit comme Assyrien prophétique au moment où Dieu reprend ses relations avec Israël. Nous le voyons entrer en scène dans notre chapitre.

« Maintenant, attroupe-toi, fille de troupes » (v. 1). Cette « fille de troupes » est mise en contraste avec la « fille de Sion » (4: 10, 13). Elle est appelée par l’Éternel à s’attrouper. Elle ne connaît pas davantage « les pensées et le conseil de Dieu » que les autres nations amassées par l’Éternel (4: 12). Cette fille de troupes est, comme le v. 5 nous l’apprend, l’Assyrien poussé par son aveuglement à mettre le siège contre Jérusalem. On voit ainsi réapparaître l’Assyrien prophétique, avec les caractères de l’Assyrien historique, comme en témoignent aussi les prophètes Ésaïe, Joël, Nahum et d’autres.

La raison de cette invasion nous est donnée par Michée. C’est un jugement sur Israël à cause de la manière dont il a traité son Juge, son Messie et son Roi. « Ils frappent le juge d’Israël avec une verge sur la joue » (v. 1). Le mépris et la haine du peuple incrédule de jadis contre le Christ, telle est la cause de ce jugement du dernier jour, mais le but de ce jugement est de produire dans le coeur et la conscience du Résidu une complète repentance, comme on le voit en Zach. 12: 8-14.

Notons les interlocuteurs dans ce v. 1. D’abord la voix de l’Éternel après avoir rassemblé les nations au chap. 4: 11, appelle maintenant l’Assyrien à s’attrouper. Après cela le Résidu prend la parole : « Il a mis le siège contre nous ». Il reconnaît que ce jugement vient de l’Éternel. Puis le prophète explique la cause de ce jugement : « Ils frappent le juge d’Israël avec une verge sur la joue ». Ésaïe aussi nous présente les causes du jugement de Dieu sur Israël. D’abord l’idolâtrie (40-48), puis comme ici, le rejet du Messie (49-57).

Au v. 2 l’Éternel parle, dans une parenthèse (*) délicieuse et pleine de grâce, de ce qu’il avait voulu faire à l’égard d’Israël en lui donnant un Roi selon son propre coeur : « (Et toi, Bethléhem Éphrata, bien que tu sois petite entre les milliers de Juda, de toi sortira pour moi Celui qui doit dominer en Israël, et duquel les origines ont été d’ancienneté, dès les jours d’éternité) ».

(*) La traduction très répandue qui commence le cinquième chapitre au verset 2 nous semble indiquer un manque réel d’intelligence de tout ce passage.

Les principaux sacrificateurs et les scribes avaient cité cette parole à Hérode qui s’enquérait d’eux où le Christ devait naître (Matt. 2: 3-6). Mais pourquoi Bethléhem Éphrata au lieu de « Bethléhem, terre de Juda », selon la citation de Matthieu ? Je pense que l’Esprit de Dieu reporte ici notre pensée à la naissance de Benjamin et à la mort de Rachel (Gen. 35: 16-19 ; 48: 7). Benjamin est le « fils de la droite » du père (Gen. 35: 18), comme il est le Bien-aimé de l’Éternel (Deut. 33: 12). Bethléhem est « petite entre les milliers de Juda ». Il a plu à Dieu de choisir cette bourgade humble et sans apparence pour en faire sortir le dominateur. Dieu enlevait ainsi à l’homme toute prétention de se glorifier ; d’autre part, c’était la cité de David (Luc 2: 4) ; il fallait donc que le vrai David y naquît. Mais Dieu a encore une autre raison pour nommer ce lieu Bethléhem Éphrata. C’est là que la mort atteint l’épouse du choix de Jacob ; c’est donc en figure quand tout espoir de vivre est perdu pour Israël que surgit le Christ. « De toi sortira pour moi celui qui doit dominer sur Israël » « Pour moi » ; Dieu parle ici. Ses conseils sont accomplis dans cet homme qui n’apporte pas seulement la bénédiction au peuple, mais fait resplendir la gloire de Dieu. Jamais pareille chose ne s’était encore produite. Ni David, ni Salomon, hommes faillibles, n’auraient pu être, sans réserve, des hommes selon le coeur de Dieu. Lui ne pouvait être satisfait que du Dominateur qui en sortirait pour Lui, le même qui aurait dominé sur Israël, si ce dernier avait voulu le recevoir. Mais qu’a fait son peuple ? Il l’a rejeté, accablé de mépris, frappé de verges, il a craché contre lui et lui a donné des soufflets. Et cependant « ses origines étaient d’ancienneté, dès les jours d’éternité ! » (v. 2; És. 9: 6). N’est-ce pas la condamnation absolue de l’homme ? La dernière attaque de l’Assyrien est la vengeance exercée contre Jérusalem pour un tel mépris de Dieu !

 « C’est pourquoi il les livrera jusqu’au temps où celle qui enfante aura enfanté » (v. 3).

Ici le prophète reprend la parole, interrompue par l’Éternel au v. 2. Le « C’est pourquoi » du v. 3 se relie aux mots : « Ils frappent le juge d’Israël avec une verge sur la joué ». En présence de toute la grâce divine qui donnait le Christ pour Roi à Israël, le peuple et particulièrement Jérusalem, sujet principal de la prophétie de Michée, avait commis cet épouvantable attentat. C’est pourquoi la rétribution d’un tel forfait doit avoir lieu. Israël sera livré par l’Éternel jusqu’au temps de l’enfantement. Au lieu d’avoir été rassemblé, comme il aurait dû l’être, par la venue du Messie, il sera livré jusqu’à ce que tout le travail de son angoisse et de sa tribulation ait pris fin. Il s’agit moins ici du fruit de l’enfantement (voyez 4: 9, 10) que des douleurs et de la détresse d’Israël, quand elles auront été consommées (*). « Il les livrera » ; c’est Dieu qui les livre jusqu’à ce que la tribulation soit terminée.

(*) Je pense que tel doit être le sens. Si l’on voulait considérer le produit de l’enfantement, on pourrait invoquer non pas Apoc. 12: 4, 5, où l’Israël des conseils de Dieu enfante le « fils mâle », Christ et l’Église, dont l’enlèvement au ciel met fin à la période actuelle ; mais plutôt le « Résidu de la semence de la femme » (Apoc. 12:17).

« Et le reste de ses frères retournera vers les fils d’Israël » (v. 3). Ce reste avait été délivré de la captivité de Babylone sous Cyrus (4: 10), mais, au lieu de recevoir le Messie, en vue duquel il était ramené dans son pays, il l’a frappé sur la joue, comme nous l’avons vu, et en vertu de ce péché, il est retourné dans la dispersion vers « les fils d’Israël ». Pareil aux dix tribus, il est rentré dans la captivité au sein des nations.

Il n’en a pas été de même au début de la parenthèse par laquelle s’ouvre l’histoire de l’Église et qui se ferme ici-bas à la venue du Seigneur. Le Résidu d’Israël, le reste des frères de Christ, est venu à l’Église pour en faire partie ; « ceux qui devaient être sauvés », terme employé pour le Résidu, ont été ajoutés à l’Assemblée (Actes 2: 47), au lieu d’être dispersés de nouveau comme le furent les transportés de Babylone à la suite du meurtre du Fils de Dieu.

« Et il se tiendra et paîtra son troupeau avec la force de l’Éternel, dans la majesté du nom de l’Éternel, son Dieu. Et ils habiteront en sûreté, car maintenant il sera grand jusqu’aux bouts de la terre. Et lui sera la paix » (v. 4).

Ce n’est plus seulement, comme au chap. 4: 8, le royaume revenant à la fille de Jérusalem ; car le prophète nous décrit ici la personne du Roi, du Berger d’Israël. Après que le jugement aura été exécuté sur Jérusalem, le Juge souffleté jadis, Celui dont les origines sont éternelles, se tiendra là et paîtra son troupeau. « De Dieu », dit Jacob, « est le Berger, la pierre d’Israël » (Gen. 49: 25). Ce Christ, autrefois bafoué, se tiendra là dans la force (*) et dans la majesté de l’Éternel, comme le « Dieu fort, le Père du siècle, le Prince de paix » (Ésaïe 9: 6). Qu’y a-t-il, en effet, de plus paisible qu’un Berger paissant son troupeau ? Mais cette calme fonction sera remplie par Celui qui, maintenant, sera grand jusqu’aux bouts de la terre. « Lui sera la paix. » Tableau, à la fois reposant et grandiose, de cette période millénaire où, sur la nation délivrée et jusqu’aux bouts de la terre, resplendira la face paisible et souveraine de l’homme autrefois anéanti pour accomplir l’oeuvre de la Rédemption, maintenant souverainement élevé, tout en restant le fidèle Berger de ses brebis et le serviteur de ses bien-aimés. Ce service éternel d’amour nous le goûterons, nous aussi, dans la gloire, mais eux, « l’Agneau qui est au milieu du trône les paîtra », est-il dit en Apoc. 7: 17.

(*) Ce mot caractérise la force divine elle-même, force qui appartient de la même manière à Christ (Ps. 110: 2) et dans laquelle tous les saints de son peuple trouvent leur force.

Le v. 4, ayant fait la description magnifique de la personne glorieuse à laquelle sera confiée la garde du troupeau, les v. 5 à 9 nous renseignent sur les caractères du troupeau lui-même, du « Résidu de Jacob », qui prend la parole au v. 5:

« Quand l’Assyrien entrera dans notre pays, et quand il mettra le pied dans nos palais, nous établirons contre lui sept pasteurs et huit princes des hommes. Et ils ravageront le pays d’Assyrie avec l’épée, et le pays de Nimrod dans ses portes. »

Christ lui-même est le Libérateur quand l’Assyrien entre dans « notre pays » (c’est-à-dire celui du Résidu, du vrai Israël). Mais il emploie des instruments de sa puissance, une plénitude de pasteurs (sept) et de princes (huit), en rapport avec son gouvernement terrestre (quatre + quatre). Ce sont les « sauveurs » d’Abdias 21. Ils ravagent le pays d’Assyrie. J’ai suggéré autre part (*) que cette invasion de l’Assyrie pourrait être la cause du retour de l’Assyrien, lors de sa campagne d’Égypte, quand « des nouvelles de l’Orient et du Nord l’effraieront » (Dan. 11: 44).

(*) L’histoire prophétique des derniers jours, par H. R.

« Et il (le Messie) nous délivrera de l’Assyrien, quand il entrera dans notre pays, et qu’il mettra le pied dans nos confins » (v. 6).

Nous assistons maintenant à cette destruction finale de l’Assyrien par le Seigneur lui-même, mentionnée en Dan. 11: 45 et prédite par Ésaïe, Ézéchiel, Joël et d’autres prophètes.

« Et le Résidu de Jacob sera, au milieu de beaucoup de peuples, comme une rosée de par l’Éternel, comme des ondées sur l’herbe, — qui n’attend pas l’homme, et ne dépend pas des fils des hommes » (v. 7).

Tel est le premier caractère du Résidu sous le sceptre de Christ. Il portera les traits de Celui qui s’est mis à sa tête (2 Sam. 23: 4 ; Prov. 16: 15 ; 19: 12; Osée 14: 5) ; il sera comme une rosée qui n’exige aucun effort ; un pur fruit de la grâce qui n’attend pas l’homme, ni ne dépend des fils des hommes. Ainsi sera l’aube du millénium, et ce Résidu dont il est dit. « Du sein de l’aurore te viendra la rosée de ta jeunesse » (Ps. 110: 3). Toute bénédiction découlera du Roi céleste qui viendra manifester sa présence au milieu de son peuple ; elle sera la part d’Israël, en communion avec son Chef.

« Et le Résidu de Jacob sera, parmi les nations, au milieu de beaucoup de peuples, comme un lion parmi les bêtes de la forêt, comme un jeune lion parmi les troupeaux de menu bétail, qui, s’il passe, foule et déchire, et il n’y a personne qui délivre » (v. 8).

Tel est le second caractère du Résidu de Jacob. Juda, la tribu royale est à sa tête, ce qu’implique le nom de Jacob, comme nous l’avons souvent remarqué. C’est de Juda qu’il est dit : « Juda est un jeune lion ; tu es monté d’auprès de la proie, mon fils. Il se courbe, il se couche comme un lion, et comme une lionne ; qui le fera lever ? » (Gen. 49: 9, 10). Mais Juda porte avant tout le caractère de son Chef qui est le Christ. C’est lui qui est appelé « le lion qui est de la tribu de Juda, la racine de David » (Apoc. 5: 5). Comme il communique sa grâce à ceux qui sont de sa race, il leur communique aussi sa force, et c’est par Lui que le Résidu asservira les nations et dominera « parmi les bêtes de la forêt ».

Au v. 9, le Résidu s’adresse au Seigneur lui-même : « Ta main se lèvera sur tes adversaires, et tous tes ennemis seront retranchés ». Il donne la gloire à Christ seul, ne s’attribuant aucune vertu pour vaincre ce qui s’élève contre son Roi, mais la grâce et la force lui sont communiquées par le Chef adorable auquel il appartient pour toujours. C’est ainsi que le Résidu a appris, dans le chemin de l’humiliation, à n’avoir aucune confiance en lui-même et à attribuer à l’Éternel tout le bien qui est produit. Comparez ce que Dieu dit du Résidu aux v. 7 et 8, avec ce que le Résidu pense de lui-même en Esdras 9: 5-15. Dans ces conditions Dieu fait savoir, par la bouche du prophète, au « reste des réchappés », qu’Il veut faire de lui le vase de sa grâce et de sa puissance. Le Résidu répond (v. 9) en attribuant toute la gloire à son Seigneur et à son Dieu.

Aux v. 10 à 15 l’Éternel parle. Il retranchera du milieu du peuple apostat l’appareil guerrier, les villes et les forteresses, retraites de l’Antichrist (Dan. 11: 39). Toute cette puissance sera réduite à néant, avec ses enchantements et ses idoles (v. 10-14). Du même coup (v. 15), la colère et la fureur de l’Éternel tomberont sur les nations auxquelles le peuple incrédule s’était assimilé et dont il avait partagé l’apostasie. Ainsi le règne de paix sera établi par les jugements. L’Éternel commence par exercer le jugement sur sa propre maison, puis il l’étend au monde et à la nation apostate, mais tout cela en vue de la bénédiction finale de son peuple et de l’établissement du royaume glorieux de Christ.

5 - CHAPITRES 6 et 7 : Le plaidoyer

Nous abordons ici la quatrième et dernière division du livre de Michée. Ces chap. 6 et 7 contiennent le plaidoyer de Dieu avec son peuple dans le but d’amener ce dernier à une entière délivrance morale ; ce sont comme les questions du juge instructeur qui voudrait trouver l’accusé non coupable, et les réponses de ce dernier. Ses propres aveux le convainquent de péché, et cependant le débat se termine par l’acquittement du coupable et son entière justification ! Ce n’est certes pas ainsi que finissent les débats devant les tribunaux humains.

Avec le chap. 5, les événements prophétiques proprement dits sont arrivés à leur terme. Ici le débat a pour but le travail de conscience, l’horreur du péché, la repentance, la restauration et la pleine connaissance de la grâce. Sous la puissante influence de l’Esprit de Dieu ce travail s’accomplit dans le coeur du Résidu, en sorte qu’il accepte le jugement de l’Éternel sur lui-même, sur son peuple, et s’en remet entièrement à la grâce (7: 18) qu’il avait si outrageusement méconnue au commencement de sa carrière (6: 1-5).

Il est à remarquer combien ces chapitres ont d’analogie avec le premier chapitre d’Ésaïe. Même plaidoyer, mêmes conclusions, avec cette différence toutefois que Michée continue, comme d’habitude, à donner la parole aux divers interlocuteurs qui sont en scène, et que le plaidoyer qui termine sa prophétie conclut par l’acquittement du coupable et non, comme en Ésaïe, par sa condamnation. Toute la suite de ce débat est pour nous d’un profond intérêt pratique : la grâce présentée avant les reproches, l’effet qu’elle produit dans un coeur amené à s’accuser, à se condamner lui-même, et à trouver la tribulation juste et méritée, tout cela conduit enfin à la pleine appréciation de l’amour de Dieu qui bannit à tout jamais le péché de sa présence !

5.1 - Chapitre 6

« Écoutez, je vous prie, ce que dit l’Éternel » (v. 1). Le prophète est ici la bouche de Dieu ; on sent dès le début que celui-ci a un but de grâce. Il s’adresse à son peuple et le prie d’écouter. Bien différent était l’appel à écouter du premier chapitre (v. 2). Là les royaumes d’Israël et de Juda, ainsi que les nations et les peuples (en Ésaïe 1 les cieux et la terre), étaient invités à entendre l’irrévocable sentence, prononcée sur eux par un Dieu juste et saint. Ici l’Éternel a les siens, le vrai Israël, le peuple de son choix, en vue, pour le purifier et l’introduire dans l’héritage qui lui avait été promis de tout temps. Il s’agit pour le Résidu (la chose importe, et qui ne le sentirait ?) d’écouter ce que l’Éternel a à lui dire, car c’est pour lui le seul moyen de trouver la délivrance.

« Lève-toi, plaide devant les montagnes, et que les collines entendent ta voix ! Écoutez, montagnes, le plaidoyer de l’Éternel, et vous, fondements immuables de la terre, car l’Éternel a un débat avec son peuple, et il conteste avec Israël » (v. 1, 2).

D’abord le coupable doit écouter devant les montagnes, devant les puissances fermement établies sur la terre, capables d’être des témoins sûrs et invariables, et devant les fondements immuables de la terre. Ces témoins sont appelés eux-mêmes à écouter la parole de l’Éternel et à juger ensuite de ce que le coupable peut dire pour sa défense. Ils sont comme le jury de cette cour d’assises appelés à apprécier les choses, non pas comme le ciel pourrait le faire, mais en les considérant selon la mesure de l’équité bien établie d’un jugement terrestre. Dieu appelle encore ici Israël son peuple, car Il ne l’a pas encore définitivement rejeté. Mais cela pourra-t-il durer à toujours ?

« Mon peuple, que t’ai-je fait, et en quoi t’ai-je lassé ? Réponds-moi ! Car je t’ai fait monter du pays d’Égypte, et je t’ai racheté de la maison de servitude ; et j’ai envoyé devant toi Moïse, Aaron et Marie. Mon peuple, souviens-toi, je te prie, du dessein que forma Balak, roi de Moab, et de ce que Balaam, fils de Béor, lui répondit, de Sittim jusqu’à Guilgal, afin que vous connaissiez la justice de l’Éternel » (v. 3-5).

Quelle douceur dans la répréhension ! Ne sent-on pas que Dieu ne veut à Israël que du bien ? Que t’ai-je fait ? Et en quoi t’ai-je lassé ? Réponds-moi. Ah ! comme le Juge est prêt à trouver des circonstances atténuantes à leur conduite ! Mais comment en trouver, quand, de Sa part, tout avait été grâce et miséricorde, avant que la loi fût intervenue pour leur montrer ce qu’il y avait dans leur coeur. C’est que la rédemption était à la base de toutes ses voies envers eux ! « Je t’ai fait monter du pays d’Égypte, et je t’ai racheté de la maison de servitude ». Les secours spirituels leur avaient-ils manqué, dès le commencement, dans le désert ? Le conducteur et roi en Jeshurun, médiateur entre le peuple et l’Éternel, Moïse, — la sacrificature, Aaron, — la prophétie, Marie, — répondaient à tous leurs besoins, même matériels. Et au bout du désert, quand l’Ennemi voulait le maudire, ce peuple qui avait tant lassé la patience de Dieu, qu’avait-il trouvé ? Un Dieu qui les bénissait par la bouche même de celui qui voulait les maudire, un Dieu qui déclarait n’avoir pas vu d’iniquité en Jacob, et qui trouvait sur la terre ses délices dans ce peuple qu’il avait choisi : « Que tes tentes sont belles, ô Jacob ! » Et de quel côté avaient été les justes voies de l’Éternel, après qu’il leur avait révélé sa grâce ? Pas plus à Sittim qu’à Guilgal il n’avait renié sa justice. Aurait-il été l’Éternel sans cela ? À Sittim, il les avait châtiés pour leur fornication et leur oubli de sa sainteté. À Guilgal il leur avait enseigné que seul le retranchement de la chair pouvait les introduire dans la jouissance du pays de la promesse.

Aux v. 6, 7 nous trouvons la réponse des croyants d’entre le peuple, devant lesquels Dieu vient de faire passer toute sa bonté, mais une bonté qui ne peut faire abstraction de sa sainteté. « Avec quoi m’approcherai-je de l’Éternel, m’inclinerai-je devant le Dieu d’en haut ? M’approcherai-je de lui avec des holocaustes, avec des veaux âgés d’un an ? L’Éternel prendra-t-il plaisir à des milliers de béliers, à des myriades de torrents d’huile ? Donnerai-je mon premier-né pour ma transgression, le fruit de mon ventre pour le péché de mon âme ? »

Ainsi pris à partie, ils sentent que leur péché les sépare de Dieu. C’est le premier pas vers la conversion. Mais comment s’approcher de Lui ? Tous les sacrifices de la loi ne peuvent en aucune manière le satisfaire, et le coeur convaincu de péché le sent fort bien. C’est ce que Dieu lui-même appelle de « vaines offrandes » dans le passage correspondant d’Ésaïe (1: 11-15). Il en est de même de l’offrande des premiers-nés, instituée après la sortie d’Égypte. Cette offrande (Ex. 13: 1-2, 10-13) était une consécration à Dieu, dans le sens du dévouement complet de l’homme tout entier à l’Éternel. Cela pouvait-il avoir lieu, de la part de l’homme pécheur ? Pas plus que les sacrifices, l’offrande des premiers-nés ne pouvait les purifier. Par ce premier aveu, Dieu va pénétrer plus avant dans la conscience de son peuple, ou, pour mieux dire, dans la conscience du Résidu.

Au v. 8 le prophète répond au peuple selon les saintes exigences de Dieu et sur le pied de leur propre responsabilité individuelle « Il t’a déclaré, ô homme, ce qui est bon. Et qu’est-ce que l’Éternel recherche de ta part, sinon que tu fasses ce qui est droit, que tu aimes la bonté, et que tu marches humblement avec ton Dieu ? » Dieu veut le coeur de l’homme et non des formes ou des cérémonies vaines. Nous trouvons la même pensée en Ésaïe 1: 16, 17 : « Lavez-vous, purifiez-vous ; ôtez de devant mes yeux le mal de vos actions, cessez de mal faire ; apprenez à bien faire ; recherchez le juste jugement, rendez heureux l’opprimé ; faites droit à l’orphelin, plaidez la cause de la veuve ». Cela sépare l’âme de toutes ces formes vaines qui ne peuvent ôter les péchés, afin de l’amener à la conscience de son état devant Dieu. Pour être agréé par Lui, sur le pied de la responsabilité de l’homme, il ne faut que trois choses qui excluent toute apparence extérieure, et exigent un état réel du coeur, en accord avec le coeur de Dieu. Ces trois choses sont : 1° Faire ce qui est droit — l’activité dans les « oeuvres de justice » ; 2° Aimer la bonté — l’état d’un coeur qui prend plaisir au bien ; 3° Une marche avec Dieu dans l’humilité, exempte de tout orgueil, car marcher avec Dieu, c’est être son compagnon, comme Énoch, dans une humble dépendance de Lui.

Tels sont les « préceptes », les règles et enseignements que Dieu nous recommande. Mais comment les suivre si ce n’est par la foi. Par elle nous faisons les oeuvres ; par elle nous aimons à reproduire le caractère du Dieu d’amour qui s’est révélé à nous en Christ ; par elle nous marchons avec Dieu. La loi exige ces choses, mais ne peut les produire dans le coeur de l’homme ; ce dernier ne se trouve, par là, que plus absolument condamné, car il est impuissant pour répondre aux exigences de la sainteté de Dieu. C’est ce que l’on voit en Ésaïe 1: 16, 17, où il n’est pas question, comme dans les deux derniers chapitres de Michée, de la restauration du Résidu (quoiqu’il soit nommé au v. 9), mais du jugement absolu du peuple qui ne cesse pas de mal faire, qui « ne fait pas droit à l’orphelin et auprès duquel la cause de la veuve n’a pas d’accès » (v. 23; cf. v. 17). Il en est de même pour la purification de leurs péchés que Dieu leur offre au v. 18. Elle leur est présentée, mais ils refusent. — Toute autre est la prophétie de Michée, où, comme nous le voyons, Dieu poursuit son oeuvre de grâce dans la conscience du Résidu, pour l’amener à une complète restauration.

Aux v. 9 à 11, l’Éternel reprend la parole par la bouche de son prophète. C’est pour se faire entendre que Dieu emploie la verge : « Écoutez la verge et Celui qui l’a décrétée », crie-t-il à la ville. Cette ville est Samarie où l’on observe « les statuts d’Omri et toutes les oeuvres de la maison d’Achab » (v. 16). Le prophète revient à ce qu’il a annoncé au commencement « au sujet de Samarie et de Jérusalem » (1: 1). Il s’adresse à la seconde de ces villes au chapitre suivant (7: 11-17). Les avertissements de Dieu par ses prophètes ont-ils réussi à bannir des maisons de Samarie les faux poids et les fausses mesures, la violence et le mensonge ? (voyez Amos 3: 9, 10). À cause de cela le jugement l’atteindra. Tous ses efforts pour subsister, pour conserver, pour récolter du fruit, seront vains, car, au lieu d’observer les statuts de l’Éternel, il marche selon les conseils idolâtres d’Omri et d’Achab sous le règne duquel un autre Michée avait prophétisé (1 Rois 22). Ainsi Dieu répond au peuple sur le pied de sa responsabilité, quand il a été démontré à ce dernier qu’il lui est impossible d’y satisfaire.

Ce chapitre est très beau comme appel à la conscience. Dieu commence par parler de sa grâce. Le coeur est convaincu qu’il n’a aucun moyen d’y répondre, étant séparé de Dieu. Alors Dieu fait connaître l’état moral qu’il exige, et auquel, quelque désirable qu’il soit, l’homme ne peut répondre à cause de l’état de son coeur. La foi seule pourrait réaliser ces choses. Dès lors Dieu fait assister l’âme travaillée, à son juste jugement sur la ville et le peuple infidèle qui l’habite. Si Dieu en restait là, il n’y aurait plus aucune ressource pour le Résidu, mais nous allons voir au chap. 7 que tout ce travail a pour résultat d’amener l’âme des croyants à un entier jugement d’elle-même, de produire la repentance et enfin d’établir le coeur dans la pleine jouissance de la grâce.

5.2 - Chapitre 7

Loin d’être clos par le prononcé de la sentence sur Samarie, les débats continuent au sujet de Jérusalem et de Juda ; mais, ce qui importe au suprême degré, ils ont pour but la pleine bénédiction du Résidu qui va former le nouvel Israël. On voit dans ce chapitre à quoi le plaidoyer aboutit quand la foi est dans le coeur et que, réalisant le juste jugement de Dieu, et « écoutant la verge » (6, 9), l’âme comprend qu’elle est sans ressource.

« Malheur à moi ! car je suis comme quand on a fait la cueillette des fruits d’été, comme les grappillages lors de la vendange : pas une grappe de raisin à manger ! aucun fruit précoce que mon âme désirait ! » (v. 1).

On trouve, comme nous l’avons dit plus haut, deux « Malheur » dans Michée (2: 1 ; 7: 1) : le premier comprenant les six « Malheur » d’Ésaïe 5, le second (chap. 7: 1) correspondant à celui qu’Ésaïe prononce sur lui-même, quand ses yeux ont vu le Roi, l’Éternel des armées (Ésaïe 6: 5). Ainsi aussi en Michée, le prophète, représentant le Résidu, convaincu de péché, et reconnaissant le juste jugement de Dieu, prononce le jugement sur lui-même. Au chap. 5 d’Ésaïe, le Seigneur cherche du fruit dans sa vigne ; il s’attendait à ce qu’Israël produisît de bons raisins, mais il n’y trouve que des grappes sauvages. Ici c’est le Résidu qui reconnaît être sans fruit sous le jugement de Dieu ; et s’il a désiré qu’il soit trouvé chez lui quelque chose pour Dieu, même cet espoir lui est enlevé. L’Éternel semble ne tenir aucun compte de sa foi et de son intégrité, puisque, accablé sous la colère de Dieu, il est comme confondu avec le peuple coupable, et laissé là, dépouillé, sans nourriture, ni joie, ni rafraîchissement pour son âme. Alors il fait un retour complet sur lui-même. Il désirait porter des fruits précoces pour Dieu et n’en a produit aucun ! Pour le moment, l’Éternel ne montre pas sa faveur au Résidu qui doit passer par les terribles expériences de la grande tribulation, mais, quand le jugement aura porté tous ses fruits, il l’établira dans cette faveur selon la grandeur de sa miséricorde.

Au v. 1 l’âme a commencé par se juger elle-même ; aux v. 2 à 6 elle comprend l’éloignement de Dieu dans lequel se trouve le monde dont elle est entourée. Ce chapitre quitte Samarie pour faire la description affreuse du mal qui se trouve à Jérusalem :

« L’homme pieux a disparu du pays, et il n’y a pas de gens droits parmi les hommes ; tous ils se placent aux embûches pour verser le sang ; ils font la chasse chacun à son frère avec un filet ; les deux mains sont prêtes au mal, afin de le bien faire » (v. 2, 3).

Rien sur quoi l’on puisse compter, aucune piété que Dieu reconnaisse ! Tout cela a disparu. Les méchants emploient leurs deux mains, toute leur activité, pour le mal, afin de le bien faire et de réussir complètement dans leurs mauvais desseins. Cela ne se voit-il pas aussi de nos jours ? Toute la prévoyance de l’homme est mise en jeu, aucune source d’activité n’est négligée, afin d’accomplir le mal d’une manière aussi parfaite que possible. « Il est difficile », disait un chrétien, « de faire le bien et encore plus difficile de le bien faire » ; mais Satan trouve toujours des mains prêtes à bien faire le mal. Les hommes s’allient, ne font qu’un pour cette mauvaise oeuvre ; le prince se sert de son autorité pour commettre des exactions ; le juge ne fait pas droit aux réclamations des opprimés, parce qu’il est payé pour faire le mal ; le grand exprime l’avidité de son âme. Ces trois puissances concourent ensemble et d’un commun accord pour atteindre leur but unique (v. 3). « Le meilleur d’entre eux est comme une ronce, le plus droit, pire qu’une haie d’épines » (v. 4). Seul le feu du jugement leur est réservé, comme il est dit : « La lumière d’Israël sera un feu, et son Saint, une flamme ; et il brûlera et dévorera ses épines et ses ronces en un seul jour » (Ésaïe 10: 17).

Au chap. 5, 10, l’Éternel annonçait que le jour du jugement viendrait, maintenant, il est arrivé : « Le jour de tes sentinelles et de ta visitation est arrivé ; maintenant sera leur confusion » (v. 4). C’est le prophète qui déclare cela. L’état moral est devenu si mauvais en Israël que l’on ne peut plus se fier à personne : « N’ayez pas de confiance en un compagnon ; ne vous fiez pas à un ami ; garde les portes de ta bouche devant celle qui couche dans ton sein » (v. 5). Le croyant est isolé, ne peut plus marcher d’accord avec un compagnon, n’a plus d’ami auquel il puisse tout dire, plus de sein dans lequel il puisse s’épancher avec confiance. La présence de la lumière ne fait que soulever l’opposition des hommes et les exciter à la lutte pour éteindre cette clarté. « Car le fils flétrit le père, la fille s’élève contre sa mère, la belle-fille contre sa belle-mère ; les ennemis d’un homme sont les gens de sa maison » (v. 6). Le Seigneur se sert de ce passage (Matt. 10: 34-36) pour montrer les résultats de sa présence en grâce au milieu d’Israël. Du moment que le témoignage de Dieu est rejeté, tous les liens naturels qui unissaient encore les hommes entre eux sont brisés, pour donner carrière à la haine, haine qui s’exerce d’abord envers les témoins de Christ : « Les ennemis d’un homme seront les gens de sa maison ». Quand ces liens sont brisés, c’est comme un torrent qui a rompu ses digues et dévaste tout sur son passage. Les hommes ne se bornent pas alors à haïr Dieu, ils haïssent leur prochain. L’amour a disparu du coeur, dès que l’amour de Dieu en est chassé ; Satan vient immédiatement le remplir par son propre caractère qui est la haine.

« Mais moi, je regarderai vers l’Éternel, je m’attendrai au Dieu de mon salut ; mon Dieu m’écoutera » (v. 7). Remarquez maintenant cette parole dans la bouche du croyant. Il a dit : Malheur à moi ! puis il a jugé ce qu’est le monde ; puis il a appris qu’il ne pouvait pas plus se fier au monde qu’à soi-même ; puis il a réalisé qu’il ne pouvait trouver ici-bas qu’inimitié contre ce que est de Dieu. Que lui reste-t-il donc ? Dieu seul. Il regarde vers Dieu, s’attend à lui, crie et trouve un Dieu qui l’écoute. Va-t-il être malheureux désormais ? Certes pas ! Le malheur, il l’a prononcé sur lui-même quand il a dû s’occuper de son propre état ; mais il n’y a plus pour lui que bonheur et confiance quand il regarde à Dieu. Cette transition du malheur à la joie, de la connaissance de soi-même à la connaissance de Dieu, est fort belle. Quand même le meilleur des hommes est une ronce et le plus droit pire qu’une haie d’épines, vérité qui s’applique tout aussi bien au croyant, son coeur désespère de l’homme, mais sa foi ne désespère aucunement de Dieu : « Il est le Dieu de mon salut ; mon Dieu m’écoutera ! »

« Ne te réjouis pas sur moi, mon ennemie : si je tombe, je me relèverai ; si je suis assise dans les ténèbres, l’Éternel sera ma lumière. Je supporterai l’indignation de l’Éternel, car j’ai péché contre lui, — jusqu’à ce qu’il prenne en main ma cause et me fasse droit : il me fera sortir à la lumière ; je verrai sa justice. Et mon ennemie le verra et la honte la couvrira, elle qui me disait Où est l’Éternel, ton Dieu ? Mes yeux la verront maintenant elle sera foulée comme la boue des rues » (v. 8-10).

L’âme qui a appris à se confier en Dieu ne doute pas du salut final. Elle est assurée que sa chute n’a été entre les mains de Dieu que l’occasion de son relèvement. Elle sait que si les ténèbres de la tribulation l’environnent maintenant, l’Éternel sera sa lumière lorsqu’il apparaîtra (Ésaïe 9: 2; 50 : 10). Elle comprend que l’affreux péché dont elle est solidaire, puisque son peuple a frappé le Juge d’Israël avec une verge sur la joue, a mérité le jugement ; il est donc juste qu’elle supporte l’indignation divine, mais elle sait aussi qu’un temps viendra où l’Éternel prendra sa cause en main. Alors il fera sortir à la lumière le Résidu qui était dans les ténèbres de la tribulation et de la détresse, mais qui avait, dans ces ténèbres, l’Éternel pour clarté. Pendant la nuit profonde la lumière sera dans le coeur des fidèles, comme aujourd’hui, dans le nôtre, l’étoile du matin, seulement les ténèbres dans lesquelles le Résidu sera plongé seront le jugement de Dieu, tandis que les chrétiens, n’étant pas de la nuit, mais fils du jour, n’appartiennent en aucune manière aux ténèbres, tout en les traversant. On ne pourra dire cela du Résidu tant qu’il n’aura pas atteint une pleine délivrance. Alors son ennemie qui est certainement ici la nation apostate plutôt que les nations idolâtres, et qui disait au Résidu dans sa détresse : « Où est l’Éternel, ton Dieu ? » (injure qui caractérise la grande tribulation dans les écrits prophétiques), son ennemie, dis-je, sera couverte de honte quand elle assistera à l’intervention ouverte de l’Éternel en faveur de son peuple. Elle sera « foulée comme la boue des rues ». Nous apprenons, en effet, par Ésaïe 10: 6, que ce jugement sur la « nation profane » sera exécuté par l’Assyrien, verge de la colère de l’Éternel et qu’il « la foulera aux pieds comme la boue des rues ».

Aux v. 11-13, l’Éternel reprend la parole et s’adresse à Jérusalem, la cité de son choix. Il lui parle d’un jour futur où ses murailles seront rebâties et où les limites de son enceinte seront reculées. Alors l’Égypte et l’Assyrie viendront à elle et ses frontières s’étendront depuis l’Égypte jusqu’à l’Euphrate et d’une mer à l’autre. Alors aussi se réalisera la parole d’Ésaïe : « En ce jour il y aura un chemin battu de l’Égypte à l’Assyrie ; et l’Assyrie viendra en Égypte, et l’Égypte en Assyrie ; et l’Égypte servira avec l’Assyrie. En ce jour-là Israël sera le troisième, avec l’Égypte et avec l’Assyrie, une bénédiction au milieu de la terre ; car l’Éternel des armées le bénira, disant : Béni soit l’Égypte, mon peuple, et l’Assyrie, l’ouvrage de mes mains, et Israël, mon héritage » (19, 23-25).

Mais il est important de noter qu’avant cette restauration finale « ce pays sera une désolation, à cause de ses habitants, pour le fruit de leurs actions » (v. 13). Il s’agit, comme nous l’enseigne tout le cours de cette prophétie, de l’Assyrien prophétique qui, avant de se jeter sur le roi du Midi, traversera la terre d’Israël, la réduisant en désolation, comme un torrent qui déborde.

Alors les fidèles s’écrient : « Pais ton peuple avec ton bâton, le troupeau de ton héritage qui demeure seul dans la forêt, au milieu du Carmel ; qu’ils paissent en Basan et en Galaad comme aux jours d’autrefois » (v. 14). Au delà du jugement qu’il traverse, le Résidu aspire à la bénédiction future, mais, pendant la tribulation, il jouit déjà des soins du Berger d’Israël ; il sent sa présence avec lui en traversant la sombre vallée, où le contact avec le bâton du Berger le rassure : « Ta houlette et ton bâton, ce sont eux qui me consolent » (Ps. 23: 4). Le troupeau de son héritage, ce Résidu souffrant et méprisé, est appelé son peuple et, en attendant de le posséder quand il entrera dans son royaume glorieux, il le paîtra dans la solitude du Carmel, dans le lieu de la retraite cachée des prophètes, lieu où le peuple fut ramené au culte de l’Éternel, où les ennemis d’Élie, détruits par le feu du ciel, ne purent mettre la main sur lui, et d’où partit Élisée pour ressusciter l’enfant de la Sunamite. Comme ce lieu symbolique sera propre à encourager le « troupeau de l’héritage » en ces jours, désormais raccourcis, qui précéderont la délivrance finale, où les brebis paîtront en Basan et en Galaad, dans les gras pâturages comme aux jours d’autrefois ! Déjà cette délivrance est à la porte ; après la destruction de la Bête et du faux prophète, il ne reste plus qu’un dernier ennemi, l’Assyrien. En attendant qu’il « vienne à sa fin, sans personne pour le secourir » (Dan. 11: 45), le Seigneur dit : « Mon peuple habitera une demeure de paix et des habitations sûres, et des lieux de repos tranquilles » (Ésaïe 32: 18).

Aux v. 15-17, l’Éternel reprend la parole : « Comme aux jours où tu sortis du pays d’Égypte, je lui ferai voir des choses merveilleuses. Les nations verront et seront confondues à cause de toute leur puissance ; elles mettront la main sur la bouche, leurs oreilles seront sourdes. Elles lécheront la poussière comme le serpent ; comme les bêtes rampantes de la terre, elles sortiront en tremblant de leurs lieux cachés ; elles viendront avec frayeur vers l’Éternel, notre Dieu, et elles te craindront » (v. 15-17).

Dieu rappelle ici le jour où il fit sortir son peuple d’Égypte. Alors c’était tout le peuple ; maintenant il n’est plus représenté à ses yeux que par le Résidu. La délivrance sera aussi merveilleuse pour lui que jadis pour Israël à la sortie d’Égypte. L’Assyrien sera vaincu comme le fut jadis le Pharaon, et sera anéanti entre deux mers, comme celui-là le fut dans la mer Rouge. En entendant ces nouvelles, les nations, comme autrefois les peuples de Canaan, perdront tout courage et leur coeur se fondra (Josué 2: 11).

« Elles lécheront la poussière comme le serpent », dit le Résidu. Ce verset correspond au Ps. 18: 44, 45, où le Messie s’exprime ainsi : « Les fils de l’étranger se sont soumis à moi en dissimulant. Les fils de l’étranger ont dépéri, et ils sont sortis en tremblant de leurs lieux cachés ». Sous une feinte obéissance, leur coeur ne sera point changé ; ils ne se soumettront qu’extérieurement à une puissance à laquelle il leur sera impossible de résister, et qui, au moindre signe de rébellion, « les brisera avec un sceptre de fer, comme un vase de potier » (Ps. 2: 9). Leur révolte finale à la suite du règne glorieux de mille ans (Apoc. 20: 7-10) prouvera qu’elles ne s’étaient soumises qu’à la force. Leur coeur, mis à l’épreuve par la gloire, comme il le fut jadis par la grâce, n’aura pas été changé. Il exprime ici la crainte plutôt que la dissimulation, mentionnée au Ps. 18, mais l’une accompagne toujours l’autre quand le coeur n’a pas de droiture. Il va sans dire que « la grande foule que personne ne peut dénombrer » et qui constituera pendant le millénium les sauvés d’entre les nations (Apoc. 7: 9) n’est point comprise parmi ceux dont ce passage nous parle.

Versets 18-20. Nous avons vu le Résidu conduit, depuis le premier travail de conscience (6: 6), à travers la repentance et le jugement de lui-même (7: 1) à une pleine confiance en Dieu (7: 7) et à l’acceptation de l’épreuve comme étant la conséquence de son péché contre Christ (7: 9), mais il a la certitude, au milieu de l’isolement où Dieu le garde et des jugements qui sévissent, que les soins du Berger d’Israël ne lui manqueront pas (7: 14). Recevant en même temps de la bouche du Messie la certitude de sa restauration et d’une période de paix qui va suivre la désolation du pays (7: 9, 15), il se réjouit d’avance de voir les nations soumises au sceptre de son Roi (7: 17).

Le jour de la délivrance est près de paraître : Nous assistons au chant de triomphe alternativement entonné par le Résidu et par le prophète qui, dans l’affliction de cette longue épreuve, l’avait exhorté, consolé et encouragé dans l’espérance.

« Qui est un Dieu comme toi, pardonnant l’iniquité et passant par-dessus la transgression du reste de son héritage ? » (v. 18). Le Résidu se qualifie ici : « Reste de son héritage ». La nation apostate vient de recevoir la récompense de son iniquité. Quelle joie pour les fidèles de se savoir pardonnés ! Ce bonheur ne peut être pleinement apprécié et savouré que par des coeurs qui ont senti tout le poids de leur culpabilité devant Dieu. Le pardon ! l’oubli complet de leur transgression ! Comme ils sont mis au large en Sa présence !

« Il ne gardera pas à perpétuité sa colère, parce qu’il prend son plaisir en la bonté » (v. 18). Ici je crois entendre la voix du prophète faisant sa partie dans cet hymne d’actions de grâces. Avant le plein établissement d’Israël dans son pays, la délivrance est déjà proclamée. La colère de l’Éternel ne peut durer à perpétuité, parce qu’il prend plaisir en la bonté, et cette vérité est affirmée par l’âme qui vient d’en être l’objet d’une manière si merveilleuse. Je le répète, dans notre prophète, le but n’est pas encore atteint, ni la perfection venue, mais la foi, comptant sur ce que Dieu a déjà accompli, saisit d’avance la pleine réalisation de toutes les promesses de Dieu.

Aussi le Résidu reprend : « Il aura encore une fois compassion de nous, il mettra sous ses pieds nos iniquités » (v. 19). Oh ! quel bonheur pour lui, de parler de Dieu ! Avec quelle certitude il annonce ce que Dieu fera ! Ce sera une purification complète : Dieu qui « pardonne l’iniquité » ne se bornera pas au simple pardon, mais la mettra « sous ses pieds », et non plus devant ses yeux ! « Il aura encore une fois compassion de nous », car Il prend plaisir, non pas au jugement du mal — quelque nécessaire qu’il soit à sa sainteté — mais à ses compassions. Et quelle portée infinie a pour des coeurs, convertis à Dieu, ce seul mot qui embrasse l’oeuvre immense de la Rédemption : « les compassions de Dieu ! » (Rom. 12: 1).

Ici le prophète, s’adressant à Dieu lui-même, reprend la parole : « Et tu jetteras tous leurs péchés dans les profondeurs de la mer » (v. 19). Les fidèles apprennent, par la parole prophétique, qu’il ne sera plus jamais question de leurs péchés, puisque Dieu lui-même les aura bannis de sa présence et jetés de ses propres mains dans le grand abîme. Tel sera le caractère de la nouvelle alliance de l’Éternel avec son peuple (Héb. 8: 10-13).

Enfin le Seigneur laisse au Résidu la joie de prononcer le dernier mot : « Tu accompliras envers Jacob ta vérité, envers Abraham ta bonté, que tu as jurées à nos pères dès les jours d’autrefois ! » (v. 20). Les fidèles proclament que les promesses de l’Éternel sont sans repentance. Ils remontent, pour affirmer cela, au serment inconditionnel que Dieu fit à Abraham et à Jacob. Toute l’histoire de leur responsabilité comme pécheurs est à jamais terminée. Le désert et la loi menaçante du Sinaï ont pris fin ; il ne reste pour Israël qu’un Dieu fidèle à ses promesses, un Dieu dont la justice est fermement établie sur sa grâce, un Dieu qui justifie pour toujours le pécheur en condamnant à jamais le péché !

C’est ainsi que se clôt cette magnifique prophétie. Peu de prophètes font ressortir plus constamment que Michée la grâce qui s’élève par-dessus le jugement et le travail de conscience par lequel le croyant est amené à en jouir sans réserve. Michée nous conduit pour ainsi dire au seuil de l’Évangile et nous en ouvre la porte.

Cependant sa prophétie est limitée au Résidu de Juda qu’elle introduit dans les bénédictions de la nouvelle alliance, dont il jouira comme peuple de Dieu sur la terre. Elle nous conduit d’étape en étape jusqu’au chant de l’aube millénaire : « Sa bonté demeure à toujours ! » Le chap. 2: 12, nous parle du rassemblement futur du Résidu. Au chap. 4: 1-8 nous voyons la Restauration de Jérusalem avec le Résidu (v. 7) au milieu d’elle. Le chap. 5: 7-9 nous montre le Résidu portant dans l’avenir les caractères mêmes de son Seigneur et de son Roi, la grâce qui attire et la force qui domine. Au chap. 7, le Royaume va s’établir ; la nouvelle alliance est conclue, les promesses réalisées ; la restauration morale du Résidu est complète ; il peut entonner le cantique de la délivrance. Dans tous ces passages il nous est dépeint comme le troupeau du Berger d’Israël dont les loups sont exclus ; un troupeau conduit, gardé, nourri, soutenu, consolé par son glorieux Pasteur et pouvant dire : « Je ne craindrai aucun mal, car tu es avec moi ! »