Chaque matin — Ésaïe 50:4.

Georges ANDRÉ


Supplément de la Bonne Nouvelle, « Pour les plus grands », février 1933.


Avons-nous considéré cet homme solitaire qui s’en allait le matin « longtemps avant le jour », dans un lieu désert, pour prier ? L’avons-nous entendu répéter la parole du prophète : « Le Seigneur l’Éternel me réveille chaque matin, il réveille mon oreille pour que j’écoute » ? Et si nous l’avons fait, notre étonnement n’aura-t-il pas été grand de voir Celui qui possède tout, le « Créateur des bouts de la terre », prosterné au matin de ses journées dans la prière à son Dieu et Père ? Celui qui connaissait toutes choses avait-Il donc besoin d’« écouter » chaque matin, de prêter l’oreille « comme ceux qu’on enseigne » ? — Il était ici-bas l’homme dépendant, l’homme abaissé, l’homme obéissant, qui nous a laissé un « modèle afin que nous suivions ses traces ».

Si le Seigneur Jésus lui-même « dans les jours de sa chair » éprouvait le besoin de cette heure matinale en communion intime avec son Père, ne devrions-nous pas, nous si faibles et ignorants, en voir la nécessité et la valeur. Ses journées étaient si remplies que parfois, avec ses disciples, « ils n’avaient pas même le loisir de manger leur pain ». Mais malgré tout, les premiers moments du jour étaient consacrés à la prière et à la méditation solitaires, — base d’une activité qui montait tout entière à Dieu « en parfum de bonne odeur ».

Connaissons-nous la douceur de ces moments passés à l’aube du jour, dans la solitude à Ses pieds ? Quand tout est encore calme autour de nous, avons-nous l’habitude de venir puiser l’eau vive au « puits du Vivant qui se révèle » (Gen. 24:62) ? De venir goûter Ses compassions qui sont « nouvelles chaque matin » ? (Lam. 3:23). C’est là, seuls avec Lui, que nous entendons sa voix dans les pages du Livre que Dieu nous a donné. Là, nous apprenons à Le connaître, à Le considérer ; nous « apprenons de Lui », pour refléter dans les heures qui vont suivre quelque chose des perfections que le Saint Esprit nous aura fait découvrir dans cette Personne merveilleuse. Après L’avoir « laissé parler », nous pourrons alors à notre tour Lui dire tout ce que nous avons sur le cœur, placer toutes choses devant Lui : « Le matin, je disposerai ma prière devant Toi, et j’attendrai » (Ps. 5:3).

L’ennemi est habile pour nous ravir ces moments, au moins pour les raccourcir à tel point qu’ils perdent beaucoup de leur saveur. L’heure du travail qui s’approche, la fatigue de la veille, conséquence parfois d’une soirée prolongée outre mesure, et tant d’autres détails, deviennent prétexte pour abréger cette méditation matinale.

Chaque matin, l’Israélite au désert allait ramasser la « manne » pour la journée ; pas de « provisions » possibles. Le « pain du ciel » était journellement à sa disposition, mais avant que le soleil se lève (Exode 16 :21), il devait aller le prendre pour lui-même chaque jour.

Quand le Seigneur nous aura ainsi parlé, seuls à seul avec Lui, gardons précieusement dans notre cœur la « parole » spéciale qu’il nous aura donnée ; notons-la ; repassons-la dans notre esprit au cours de la journée ; mettons-la en pratique ; ainsi « vécue », elle deviendra notre part personnelle, un trésor qui petit à petit transformera notre être intime.

Et si notre Dieu devait permettre un temps sombre dans notre vie, si l’épreuve devait revenir « chaque matin », n’oublions pas alors que Son cœur « s’occupe » de nous (Job 7:17-18), ayant tellement connu la souffrance. Il peut sympathiser à toutes nos infirmités. À l’aube du jour, venons encore à ses pieds écouter la voix qui seule sait « soutenir par une parole celui qui est las », « augmenter l’énergie à celui qui n’a pas de vigueur ».

C’est ainsi que nous avons besoin de « boire du torrent dans le chemin », de nous « asseoir à son ombre », de goûter « son fruit ». Répétons avec Moïse la prière d’autrefois : « Rassasie-nous au matin de Ta bonté, et nous chanterons de joie, et nous nous réjouirons tous nos jours » (Ps. 90:14) — en attendant le « matin sans nuages » (2 Sam. 23:4) où la joie sera parfaite et éternelle, parce que nous Le verrons.