André Gibert
Table des matières :
1 - Témoignage de Jean Baptiste
3 - Témoignage laissé aux disciples
Les sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest ; ME 1966 p. 85
Nous nous proposons simplement de suivre cette expression : « rendre témoignage », dans l’Évangile de Jean. Elle y revient à maintes reprises, au point d’en être caractéristique. Comment en serait-il autrement dans un Évangile qui « présente la nature divine manifestée dans une Personne, en présence de laquelle l’homme et le Juif se sont trouvés, et qu’ils ont rejetée » (J.N.D.) ?
Nous trouvons en premier lieu
le témoignage de Jean le Baptiseur. Il « vint pour rendre témoignage
» (Jean
1:7). Il attirait l’attention sur le grand fait qui allait se produire et
auquel les hommes devaient se préparer. Il était là « pour rendre témoignage de la lumière
, afin que tous crussent par lui. Lui n’était pas la lumière,
mais pour rendre témoignage de la lumière
» (v. 7, 8). Il allume sa lampe dans
la nuit, pour que des âmes, réveillées, attendent le jour qui va luire. Sa
parole devait être crue pour que des yeux s’ouvrent à « la vraie lumière » (v.
9).
La lumière paraît. « La Parole
devint chair ». « Jean rend témoignage de
Lui,
et a crié, disant : C’était celui-ci duquel je disais :
Celui qui vient après moi prend place avant moi ; car il était avant moi »
(v. 15). Jean disparaît derrière lui. Quand il nous est dit : « C’est ici le témoignage de Jean »,
nous l’avons
d’abord sous ce côté négatif : « Moi, je ne suis pas le Christ », ni Élie,
ni le prophète, et peu importe ce que je suis, sinon « la voix de celui qui crie
dans le désert : Faites droit le chemin du Seigneur ». Mais voici le côté
positif : « Au milieu de vous il y en a un que vous ne connaissez pas,
celui qui vient après moi, duquel moi je ne suis pas digne de délier la
courroie de la sandale » (v. 19-28). Le Seigneur est là, parmi vous, encore
inconnu, mais seul digne d’hommage.
Il le voit enfin, « venant à
lui » et il dit : « Voilà l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde… Je
ne le connaissais pas », mais je suis venu baptiser d’eau à cause de sa
manifestation à Israël… Et de nouveau « Jean rendit témoignage
» (v.
32), répétant qu’il ne le connaissait pas mais que, selon qu’il en avait été
averti, il avait « vu l’Esprit descendant du ciel comme une colombe » et demeurer
sur Lui : « c’est celui-là, atteste-t-il, qui baptise de l’Esprit Saint ».
Et, couronnant suprêmement le tout : « Moi, j’ai vu et j’ai rendu
témoignage que celui-ci est le Fils de Dieu
» (v. 33, 34).
Le témoignage du précurseur
est dès lors pleinement rendu. Comment a-t-il été écouté ? Deux disciples
de Jean l’entendent le lendemain redire, en « regardant Jésus qui
marchait : Voilà l’Agneau de Dieu », et, leur coeur ouvert à la foi, ils
suivent Jésus : ils quittent celui qui n’était pas la lumière mais son
héraut au milieu des ténèbres ; la lumière les éclaire ; ils
reçoivent le droit d’être enfants de Dieu. Mais que sont-ils, face à la
multitude aveugle, sinon l’expression la plus réduite d’un imperceptible
témoignage ? Les autres, le grand nombre, restent dans leur état. « Le monde
ne l’a pas connu, … les siens ne l’ont pas reçu ». Que pouvaient rapporter du
désert ceux qui, ayant entendu Jean, méconnaissaient son témoignage ? Ils
peuvent bien, avant qu’il ne soit jeté en prison, « rendre témoignage
» de
ce qu’il avait dit (3:28), en réalité ils ne l’ont pas cru. Jean avait rendu
témoignage
non à lui-même mais à la vérité
(5:33), en rendant
témoignage de Jésus. Eux s’en sont tenus à « la lampe ardente et brillante » du
messager, ils ont « voulu se réjouir pour un temps à sa lumière » (5:35), et quand
la lampe s’est éteinte après que sa clarté se fut évanouie dans la « vraie
lumière », ils sont restés dans les ténèbres. Ils les ont mieux aimées que la
lumière.
Mais la lumière était là.
Jésus lui-même va rendre témoignage. Cette lumière manifeste tout. L’état du
monde, le coeur de l’homme, sont mis à découvert comme jamais ils ne l’avaient
été. « Moi, je rends témoignage du monde
que ses oeuvres sont mauvaises »,
dit Jésus (7:7). Il « n’avait pas besoin que quelqu’un rendît témoignage au
sujet de l’homme ; car lui-même connaissait ce qui était dans l’homme »
(2:25).
Les hommes aimaient mieux les
ténèbres que la lumière parce que leurs oeuvres étaient reprises par elle. Les
ténèbres n’ont pas compris la lumière luisant au milieu d’elles (1:5), et
d’emblée il en a été ainsi : le témoignage de Jésus, dans l’Évangile de
Jean, est le témoignage de quelqu’un qui est rejeté avant même d’avoir parlé.
Il est le divin étranger (1:10, 11). Il parle de lui non comme du Fils de Dieu,
ni du Messie, mais comme du Fils de l’homme descendu du ciel, et qui est dans
le ciel. Merveilleuse et solennelle réalité, mais terrible condition des hommes ! Il parlait le langage du ciel,
il apportait la connaissance des choses célestes, et on ne l’entendait pas. Il
parlait les paroles de Dieu, par l’Esprit donné sans mesure (3:34), et on n’en
voulait pas. « En vérité, en vérité, dit-il à Nicodème, nous disons ce que nous
connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu
, et vous
ne recevez pas notre témoignage » (3:11). Jésus devra rendre témoignage
lui-même qu’un prophète n’est pas
honoré dans son pays (4:44), mais Jean déjà avait dit : « Celui qui vient
du ciel est au-dessus de tous ; et de ce qu’il a vu et entendu, de cela il
rend témoignage
; et personne ne reçoit son témoignage » (3:31, 32). La
colère de Dieu demeure sur ce peuple sourd, sur ce monde incrédule, et sur
chaque individu qui « désobéit au Fils » (v. 36).
Mais, bénie soit la grâce de
Dieu, heureux « celui qui a reçu
le
témoignage
du Fils : il a scellé que Dieu est vrai », et il « a la vie
éternelle » (v. 33, 36). Ainsi en est-il de la pécheresse de Sichar au chapitre
4, et des Samaritains qui « crurent en lui, à cause de la parole de la femme qui
avait rendu témoignage
: Il m’a dit tout ce que j’ai
fait » (4:39). En fait, elle les a amenés à Jésus : et « beaucoup plus de
gens crurent à cause de sa parole », non plus seulement à cause du dire de la
femme (40-42). La vérité est que Jésus « ne reçoit
pas témoignage de l’homme
» (5:34),
pas plus que de gloire des hommes (v. 41). Même le témoignage de Jean le
Baptiseur n’est invoqué par lui qu’en vue de sauver ses contradicteurs, et non
pour se glorifier (v. 34). Il sera bien dit plus tard, de la foule des Juifs, qu’« elle rendait témoignage
parce qu’il avait appelé Lazare hors du
sépulcre » (12:17), mais elle le fait dans l’ignorance et l’incrédulité, malgré
« tant de miracles » (v. 37), et malgré les témoignages que Dieu fait rendre que
Jésus était Fils de Dieu, Fils de David, Fils de l’homme (ch. 12).
Pas davantage Jésus ne rend
témoignage de lui-même à la manière des hommes : « Si moi je rends témoignage de moi-même
, mon témoignage n’est pas vrai » (5:31). Il est de toute beauté de
voir comment, au chapitre 5, quand
il se trouve contesté et persécuté à propos de ses oeuvres, il en appelle aux
témoins qui mettaient en évidence qui il était. C’est un autre qui rend témoignage de moi ;
et je sais que le
témoignage qu’il rend de moi est vrai » (v. 32). Cela avait été déjà le cas de
Jean « mais moi, j’ai un témoignage plus
grand
que celui de Jean » (v. 36). Les oeuvres que le Père lui avait données
à accomplir, « ces oeuvres mêmes que je
fais rendent témoignage de moi
,
que le Père m’a envoyé » (cf. 10:25). Et ainsi le Père lui-même, « le
Père
qui m’a envoyé, lui, a rendu
témoignage de moi
» (v. 37). Enfin,
le témoignage des Écritures, la Parole de Dieu, est rejoint par ceux-là :
« vous estimez avoir en elles la vie éternelle, et ce sont elles qui rendent témoignage de moi
» (v. 39). Quel ensemble admirable est offert à notre méditation :
Jean, les oeuvres, le Père, les Écritures, concourent à rendre un même
témoignage ! À l’avance Dieu avait parlé de Lui, fait parler de Lui, et
maintenant Il jalonnait d’oeuvres le chemin de son Bien-aimé.
Mais comment la Parole
devenue chair n’aurait-elle pas été à elle-même son propre témoignage ?
Non seulement Jésus parle les paroles de Dieu et fait les oeuvres de Dieu,
accomplissant les Écritures, mais Il est absolument aussi ce qu’Il dit (8:25).
Le chapitre 8, où il n’est pas question d’oeuvres mais de la Parole seule, est
saisissant à cet égard. « Moi, je suis la lumière du monde… » Ah, disent les
pharisiens, comme un écho perfide de 5:31, « tu
rends témoignage de toi-même
;
ton témoignage n’est pas vrai » (v. 13). Aveugles et insensés ! La
lumière brille : la niera-t-on parce qu’elle proclame ainsi ce qu’elle
est, en grâce miséricordieuse comme en
vérité et non en condamnation (v. 2-11) ? Elle est si vive que les
accusateurs doivent sortir. Mais il y a bien plus. Le Père est là dans Celui
même dont Il rend témoignage. À son tour Jésus reprend ses termes de 5:31, mais pour y joindre 5:37 : « Moi, je rends témoignage de moi-même
; et le Père qui m’a envoyé rend aussi témoignage de moi
» (v. 18). S’agirait-il de deux
hommes que leur témoignage concordant devrait être tenu pour vrai, mais ici il
y a le Père et le Fils, qui sont un. « Si vous m’aviez connu, vous auriez aussi
connu mon Père » (v. 19). « Mais maintenant ils ont, et vu, et haï et moi et mon
Père » (15:24).
Aussi le moment arrive où
Jésus rend témoignage au sein de l’iniquité et de la haine portées à leur
comble. Il est troublé dans son esprit et rend témoignage
que l’un de
ses disciples le livrera (13:21). Il somme l’huissier qui le frappe dans le
sanhédrin de rendre témoignage du mal
, s’il pouvait y en avoir en Lui
(18:23) ! Mais devant Pilate il dira « Je suis venu dans le monde, afin
de rendre témoignage à la vérité
» (18:37). Il avait pu dire cela de son
précurseur Jean (5:33), lequel avait rendu témoignage à la vérité en proclamant
que lui n’était rien et Jésus tout ; mais la vérité pour Jésus était au
contraire de prononcer maintenant la parole : « Je suis roi », qui allait le
faire condamner. Il la dit alors que le monde aussi bien qu’Israël, reniant
tout ce que Dieu avait présenté en Jésus, repoussait soit avec violence soit
avec dérision les droits du Christ de Dieu. La lumière allait être retirée à un
tel monde (12:35).
Effectivement, Jésus est
« passé de ce monde au Père ». Le monde ne le voit plus. Mais Il a laissé ses
disciples porteurs du témoignage à Lui rendre. Il les a enseignés à l’avance
quant à cet ordre de choses nouveau, que domine pour eux le don du Consolateur,
l’Esprit Saint. L’Esprit Saint remplissait Jean dès le ventre de sa mère (Luc
1:15), en tant que prophète, le plus grand des prophètes ; il était
descendu sur le Fils de l’homme et ainsi « le Père, Dieu », l’avait
« scellé » ; maintenant, cet Esprit Saint allait être envoyé aux disciples
« d’auprès du Père, l’Esprit de vérité qui procède du Père » (15:26), par Christ
glorifié : et « celui-là rendra témoignage
» que le Père a glorifié
son Fils auprès de lui-même, de la gloire qu’il avait avant que le monde fût.
Et eux aussi allaient rendre témoignage
à ce Fils de l’homme glorifié,
comme ayant été avec lui sur la terre dès le commencement (16:27).
C’est ce que Jean, le
disciple bien-aimé, a le privilège de faire dans cet Évangile même : en
19:35, il rend témoignage du sang et de l’eau
sortis du côté percé du
Sauveur en croix, et en 21:24 il rend témoignage des choses de la
résurrection
. Il écrit pour que
l’on croie (20:30, 31). Il sait, par l’Esprit, qu’« il dit vrai » (19:35),
et par le même Esprit d’autres fidèles se joignent à lui et disent : « nous
savons que son témoignage est vrai
» (21:24). Et ainsi ce témoignage se
poursuivra : les disciples immédiats ont vu Jésus après sa résurrection,
en ont témoigné ; par ces témoins oculaires l’Esprit Saint en amène
d’autres à croire, le Seigneur lui-même « rendant témoignage
à la parole
de sa grâce » (Actes 14:3), et ceux-ci seront appelés à leur tour à rendre
témoignage, et cela jusqu’à son retour en gloire, où il n’en sera plus besoin.
« N’aie donc pas honte du témoignage de notre Seigneur », disait Paul à Timothée — et à chacun de nous.